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Exposition "A l'Est, la Guerre sans fin, 1918-1923"
(Musée de l'Armée, Paris, France)
Heure locale








 

Lundi 10 décembre 2018

 

Ce n'est pas parce qu'un armistice est signé le 11 novembre 1018 à Compiègne (France) que l'horrible guerre est terminée. Celle-ci se poursuivra en effet à l'Est et au Proche-Orient jusqu'en 1923. Et l'exposition « A l'Est, la Guerre sans fin (1918-1923) » présentée au Musée de l'Armée (Paris 7è) jusqu'au 20 janvier prochain, de retracer la chute des quatre grands empires russe, ottoman, austro-hongrois et allemand tout en abordant cette période peu connue de l'histoire qui fut faite de révolutions et de guerres civiles, accompagnées d'importantes modifications des frontières et de création de nouveaux Etats.

D'entrée, le visiteur débute le parcours par la dissolution des grands Empires européens, avant de découvrir un éclairage utile sur la fabrication des traités qui redéfiniront l'Europe, avec un coup d'oeil appuyé sur la réorganisation de l'Europe de l'Est. Et d'entamer la marche vers l'Est, en traversant successivement l'Allemagne, la Pologne, la Finlande, l'Estonie, la Lettonie, la Lituanie, l'Ukraine et la Russie. L'exposition est aussi l'occasion d’approfondir sa connaissance d'autres pays comme l'Autriche, la Hongrie, la Roumanie, la Tchécoslovaquie, la Bulgarie, le Royaume des Serbes, Croates et Slovènes et l'Albanie. La visite s'achève enfin avec les pays du Levant (Grèce, Turquie, Syrie et Liban). 

 

Au lendemain de l'armistice, il existe toujours une nébuleuse de troubles internes, voire de guerres civiles et d’affrontements inter étatiques mettant aux prises les différents pays issus de la décomposition des Empires russe, austro-hongrois et ottoman, avec maintien de violence et d'instabilité. Dans ces conditions, le règlement de ce premier conflit mondial reste très fragile et le remplacement des anciens empires par de nouveaux Etats-nations, difficile. A son niveau, la France, avec sa prépondérance militaire retrouvée, tente de son côté de mettre en place un nouvel ordre européen et levantin avec l'aide de ses diplomates, ses militaires et ses alliés.

Petit retour en arrière : en 1914, l'Europe centrale et orientale était dominée par quatre Empires : l'Allemagne, l'Autriche-Hongrie, la Russie et l'Empire ottoman (qui contrôle alors le Levant). Ceux-ci seront durement affectés par l'acharnement et la dureté de la Première guerre mondiale, à travers des revers militaires (1916-1917) qui attisent des tensions internes. Et chaque Empire d'entrer en crise, l'un après l'autre : la Russie est emportée par la révolution de 1917, l'Autriche-Hongrie et l'Empire ottoman subissent de grandes défaites en 1918 et l'Allemagne doit déposer les armes avec, pour conséquence, l'effondrement du régime impérial. Des peuples disparates doivent alors s'adapter à une situation inédite face aux rigueurs de l'existence et l'incertitude.


 

Ces années de guerre et la dissolution des Empires ont souvent exacerbé chez ces peuples les aspirations nationales et leurs lots de tensions, avec, à la clef, des attentes fortes et parfois irréalistes de leur part. Dans le camp des vainqueurs, les ambitions sont également grandes mais leurs objectifs parfois contradictoires. L'Américain Wilson soutient une politique idéaliste des nationalités tandis que le Britannique Lloyd George préconise un équilibre européen, que le Français Clemenceau reste hanté par la survivance d'une menace potentielle allemande et que l'Italie s'estime mal récompensée de son engagement. Les traités seront élaborés difficilement, d'autant plus que l'on s'interroge : par quoi et comment remplacer les anciens Empires multi ethniques détruits ? De leur côté, les grandes puissances tentent d'arbitrer entre leurs alliés, et les nations longtemps dominées essaient de retrouver leur indépendance parfois sans grand succès. Quant aux vaincus, ils sont tenus à l'écart des négociations et en éprouvent du ressentiment. La Russie, plongée dans la révolution, est exclue de fait tandis qu'on consulte ici et là les populations mais de manière inégale.


 

L'éclatement des Empires en 1917-1918 ont entrainé sur ces immenses territoires des entités politiques moins étendues mais plus nombreuses comme, par exemple en Finlande, en Estonie, en Lettonie, en Lituanie, en Pologne ou en Ukraine... Toute la zone est déstabilisée par les répercussions de la Révolution russe qui conduira à une effroyable guerre civile dans ce pays, puis à une série de soulèvements révolutionnaires en Finlande, dans les pays baltes ou en Allemagne. Bientôt, guerres entre Etats et guerres civiles se recoupent dans une extrême violence. Et les minorités des populations civiles d'être prises à partie et de se voir infliger de terribles traitements, notamment les Juifs qui sont régulièrement victimes de pogroms. Finlande, pays baltes, Pologne et Ukraine sont pour leur part confrontés à l'hostilité plus ou moins affichée de la Russie et de l'Allemagne et s'affrontent parfois entre eux sur des problématiques de frontières. Dans ce contexte, notre pays intervient de différentes façons (dont militairement) en se posant comme garante des traités et d'une certaine stabilité politique.


En 1918, la désagrégation de l'Autriche-Hongrie et la quasi disparition de la Turquie d'Europe mettent la région sans dessus dessous. Les trois vaincus, l'Autriche, la Hongrie et la Bulgarie y laisseront d'importantes portions de territoires et de populations, ce qui attisera les mouvements révolutionnaires puis contre-révolutionnaires, avec, à la clef, de nombreuses violences meurtrières. A côté de cela apparaissent de nouveaux Etats: la Tchécoslovaquie et le Royaume des Serbes, des Croates et des Slovènes (future Yougoslavie). D'autres nations sortent renforcées de cette situation, tant sur le plan territorial que démographique, comme par exemple la Roumanie. Et les traités d'avaliser ces grands remaniements, ce qui n'empêchera pas les contestations de frontières et les problèmes de minorités. Ainsi, la Hongrie se heurte t-elle à presque tous ses voisins pendant que l'Italie et le Royaume des Serbes,Croates et Slovènes connaissent des relations conflictuelles à propos du contrôle de Fiume et de sa région. Quant à la France, présente militairement dans la région, elle pèse activement sur la résolution des conflits tout en contribuant à former les armées des Etats en Tchécoslovaquie, au Royaume des Serbes, Croates et Slovènes et en Roumanie.

Le Levant est lui aussi à bout de souffle : alors que les provinces arabes et la Cicilie sont partagées entre la France et la Grande-Bretagne, on voit les Italiens s'installer en Anatolie méridionale pendant que les provinces orientales sont promises à l'Arménie, que la Grèce occupe Izmir (Smyrne) et que Constantinople est investie par les Français, les Britanniques et les Italiens le 8 février 1919. Un an et demi plus tard, le traité de Sèvres du 10 août réduira l'Empire ottoman à une peau de chagrin et donnera naissance à un vaste mouvement de résistance armée en Anatolie, avec à sa tête le général Mustapha Kemal Pacha, le futur Atatürk. Suivront des victoires militaires remportées par les troupes nationalistes turques sur les Arméniens en 1920, les Français en 1921 et les Grecs en 1922. De même, les succès diplomatiques ottomans auprès de la Russie soviétique permettront l’élaboration d'un nouvel accord, le traité de Lausanne, à l'issue duquel Mustapha Kemal pourra bâtir sur de solides bases nationales le seul Etat-nation du Levant, la République turque. Les autres entités nationales, arabes, arméniennes et kurdes qui avaient tant espéré de l’écroulement de l'Empire ottoman et des promesses du principe des nationalités prônés par les Alliés, en seront pour leurs frais et ne survivront pas au traité de Lausanne signé le 24 juillet 1923, ni à la volonté de la France et de la Grande-Bretagne d'imposer leur autorité sur la Syrie, le Liban, la Palestine et l'Irak.



 

Quid de l'inégalité des années 1918 et 1923 ? Certes, il n'y eut pas de conflagration générale en Europe centrale et orientale ou au Levant comparable à la Grande Guerre, mais les souffrances endurées lors des différents mouvements révolutionnaires et contre-révolutionnaires, et des guerres civiles furent tout autant cruelles notamment à l'égard des populations civiles soumises à de nombreuses exactions et déplacements forcés. Reste que l'année 1923 paraît assez oubliée même si elle annonce un certain calme après cinq années tourmentées. Pour preuve, le sentiment de ces soldats français, envoyés à l'Est et au Levant pour faire face à des missions complexes, d’avoir été oubliés de l'opinion publique. A leur intention, soulignons que leur mémoire est conservée aux Invalides à travers notamment de plusieurs plaques commémoratives entourant la cour d'honneur. Cette année-là, sur le terrain, les mandats français syriens et libanais sont momentanément stabilisés et un relatif apaisement prévaut en Europe médiane après l'agitation des années 1920. Un nouvel équilibre se met en place autour de la Tchécoslovaquie, du Royaume des Serbes, Croates et Slovènes et de la Roumanie appuyée par la France. L'Allemagne et la Russie soviétique sont contenues, tandis que la Pologne, alliée de notre pays, s'affirme en tant que puissance régionale. Et la jeune SDN (Société des Nations) de se préoccuper du sort des minorités et des réfugiés.

 

INFOS PRATIQUES :

  • Exposition « A l'est, la Guerre sans Fin (1918-1923) », jusqu'au 20 janvier 2019, au Musée de l'Armée, Hôtel national des Invalides, 129 rue de Grenelle à Paris (7è). Tél : 01 44 42 38 77. Ouvert tous les jours de 10h00 à 17h00. Accès par métro (stations La Tour-Maubourg et Varenne) et RER C (Invalides). Entrée : 12€. Site internet : http://www.musee-armee.fr/programmation/expositions/detail/a-lest-la-guerre-sans-fin-1918-1923.html
  • Le catalogue de l'exposition est en vente sur place au prix de 29€ (336 pages, dont plus de 300 illustrations)

  • Merci à l'agence Alambret Communication pour son aide.

 

 



 



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