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Virée au Cap Fréhel
(Côtes d'Armor, France)
Heure locale

 

Lundi 30 juillet 2018

 

Durant ma jeunesse, une sortie au Cap Fréhel faisait partie de mes promenades favorites. Cette pointe de grès rose au relief tourmenté sépare à l'est la baie de Saint-Brieuc et de l'autre côté, celle de Saint-Malo. L'endroit se trouve sur la commune de Plévenon, commune de moins de mille âmes qui tire son nom de Ploe et de Menoen (saint breton) ou du vieux breton meinin (qui signifie paroisse de la pierre). On peut y voir une allée couverte du Tertre de l'église, autrefois érigée à 500 mètres de la mer, et désormais en ruines. Celle-ci était formée de 32 dalles sur une longueur d'environ 17 mètres (par deux mètres de large). Son tumulus fut détruit en 1859 et les tables de couverture (dont certaines mesuraient entre 2,50 m et 2,80 m de long) entassées à proximité. Des fouilles seront entreprises en 1861, qui permettront de dresser le seul plan de l'édifice connu à ce jour, et de recueillir six squelettes humains, des silex, huit perles de collier, des haches polies, deux poignards en bronze et des poteries en plus ou moins bon état.


 

De nos jours, le cap Fréhel constitue une réserve ornithologique le long de la côte d'Emeraude. Et comporte une falaise qui domine la mer d'environ 70 mètres de haut. On peut ainsi se promener entre ajoncs et bruyères le long du sentier littoral appelé GR 34, qui fait le tour du cap : ce sentier part de Vitré (Ille et Vilaine) et se termine au Tour du Parc (Morbihan). Il longe sur toute sa longueur la côte bretonne depuis le Mont Saint-Michel jusqu'au Morbihan, reprenant la plupart du temps les anciens chemins douaniers, lesquels permettaient jadis aux douaniers de patrouiller le long du littoral depuis leurs corps de garde situés sur des points d'observation clés.

Le premier sentier de grande randonnée vit le jour en 1968 entre Beg Leguer et Pors Mabo (Morbihan) près de Lannion (Côtes d'Armor). Il fut initié par un certain Emile Orain et certains de ses amis, qui se mobilisèrent un an plus tôt afin de défricher ce tronçon de la côte de granit rose. Quarante ans plus tard, le GR breton sera entièrement balisé sur toute sa longueur.

 

Du haut des falaises, et par beau temps, on peut aisément distinguer les îles Anglo-Normandes ainsi que Jersey. Pour la petite histoire, le cap Fréhel donnera son nom au cap de Freels situé de l'autre côté de l'océan Atlantique, sur la côte orientale de Terre-Neuve, lorsque les marins locaux commencèrent à pêcher la morue sur place. Ces spectaculaires falaises rouges laissent apparaître du grès rouge entrecoupé de temps à autre de filons de diorite (roche magmatique). Peu à peu, l'érosion marine a découpé ces grès en marches d'escalier et en blocs, avant de voir certaines parois s'effondrer au fil des années tandis que d'autres laissent la place à des piliers ou des pinacles plus résistant comme le rocher de la Fauconnière. Quant à la couleur rouge du grès des falaises, elle est due à la présence d'oxyde de fer.

 

Il n'y a pas de cap sans son phare : le premier d'entre eux , le vieux phare (ou tour Vauban) sera érigé sous le règne de Louis XIV, en 1701, par Jean-Siméon Garangeau, disciple de Vauban et ingénieur en chef puis directeur des fortifications de Saint-Malo. A l'époque ce phare, haut de quinze mètres, fonctionnait à l'aide de charbon à l'air libre. En mai 1694, Vauban inspecte les côtes nord de Bretagne et propose l'édification d'une tour pour avertir des attaques de la flotte anglaise. L'ingénieur Garangeau avait déjà bâti plusieurs phares dont ceux du Stiff à Ouessant, le phare des Baleines sur l'île de Ré, et celui de Chassiron sur l'île d'Oléron. Et de reprendre les plan du phare du Stiff pour construire celui du cap Fréhel qui sera allumé dès 1702, mais uniquement durant les mois d'hiver. Le phare ne sera allumé toute l'année que quinze ans plus tard, à l’initiative de la marine. Les dépenses supplémentaires liées à cet allumage prolongé seront payées grâce à une taxe versée par les navires entrant dans les ports compris entre le cap Fréhel et Regnéville sur Mer (Manche). Ce n'est qu'en 1774 que ce premier phare accueillera un réverbère de 60 réflecteurs sphériques pour remplacer le brasier. Placé à l'intérieur d'une lanterne, ce système deviendra tournant en 1821, et la portée du feu (composé d'un éclat long toutes les 135 secondes) passera alors de 15 à 21 miles.


 

Un second phare sera bâti vers 1840 par Léonce Reynaud qui consistera en une tour octogonale de 22 mètres de haut pouvant supporter une optique de Fresnel. Né à Lyon en 1803, Léonce Reynaud est architecte et ingénieur. Egalement directeur de l'Ecole des ponts et chaussées, il supervisera la construction de nombreux phares français alors qu'il était directeur du Service des phares et balises de 1846 à 1878.

Ce second phare est mis en service le 1er mai 1847 avec un feu de premier ordre à éclat long blanc toutes les trente secondes, grâce à l'optique de François Soleil à seize demi-lentilles. Et la portée de ce phare de passer à 25 miles alors que l'ouvrage s'élève à 79 mètres au-dessus du niveau de la mer. En 1875, l'ouvrage adopte un éclairage à l'huile minérale, puis, en 1903, est installé un feu à deux éclats blancs toutes les dix secondes avec un éclairage aux vapeurs de pétrole. Un temps voué à l'électrification, l'ouvrage ne sera finalement pas équipé suite à une décision ministérielle du 23 juillet 1886. Durant la seconde guerre mondiale, le phare servira de poste d'observation pour l'armée allemande qui dynamitera l'édifice le 11 août 1944. Seule l'ancienne tour Vauban subsistera et supportera un feu provisoire jusqu'en 1950.


 

Le phare actuel (troisième phare) débute en 1946 et s'achève le 1er juillet 1950. L'ouvrage est aussitôt électrifié. Haute de 32,85 mètres, la tour carrée est faite en maçonnerie de pierre de taille centrée à un bâtiment en forme de U. Le tout sera bâti sous l'autorité de l'architecte Yves Hémar, architecte malouin qui s'illustrera dans le style néo-breton, école architecturale dont le principal souci était de reconstruire le pays après la Première guerre mondiale tout en respectant son identité, en s'inspirant notamment des peintres de l'école de Pont-Aven, mais aussi de l'esprit nordique et hongrois. Ce style marquera l'architecture des années 1920-1950. Parmi les œuvres d'Yves Hémar, on note l'aquarium de Dinard, la grande Poste de Saint-Malo ou l'église Notre-Dame des grèves (Saint-Malo).


 

Appelé jadis le Roche Guyon, le château de Fort la Latte (en photo ci-dessous) se dresse face au cap Fréhel. Célèbre château breton, celui-ci fut bâti sur un cap rocheux, face à la mer, et servit à plusieurs reprises de décor de films. Construite au 14è siècle par le seigneur de Matignon, Etienne III Gouyon, la forteresse sera assiégée par Bertrand Du Guesclin en 1379 après le retour d'exil de Jean IV, duc de Bretagne. Le château sera attaqué une nouvelle fois lors des guerres de religion au 16è siècle et sera d'ailleurs laissé à l'abandon suite à la défaite. Et l'ouvrage de retrouver son intérêt stratégique au 18è siècle sous le règne de Louis XIV. Le château servira ainsi jusqu'à la fin du Premier Empire, après quoi les progrès en matière de techniques militaires rendront la bâtisse obsolète. Il sera vendu à partir de 1892 à plusieurs propriétaires privés avant de devenir depuis un monument historique privé.


 

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