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Balade historique dans la Grand'Rue
(Paarl, Province du Cap-Occidental, Afrique du Sud)
Heure locale

 

Lundi 11 novembre 2019

 

Mon périple sud-africain se poursuit avec Paarl, une petite ville tout en longueur (son artère principale fait douze kilomètres) nichée entre la montagne et le fleuve Berg. Le Paarl Rock domine l'ensemble comme bloc de granit le plus grand du monde juste derrière Ayers Rock (Australie) tandis que la ville évolue au milieu des vignobles. Ici, on parle majoritairement Afrikaans et l'endroit abrite un joli musée dédié à cette langue, à son histoire et à sa diversité, ainsi qu'un monument à la gloire de cette langue qui reste l'un des parlers africains les plus récents. Seulement voilà, la vie est faite de choix et j'opterai cette fois pour une promenade historique sur la rue principale, avec ses édifices anciens bâtis dans ...dix styles architecturaux. Du jamais-vu ! Pour cette jolie balade, Hybré sera ma guide.

 

Si Paarl est la troisième plus ancienne implantation de colons en Afrique du Sud, c'est sans doute grâce à ces fermiers qui s'installèrent ici dès 1687 sur les terres qui leur avaient alors été attribuées en bord de rivière. La vallée, elle, héritera du nom d'un commissaire hollandais, Hendrik Adriaan van Reede tot Drakenstein, Lord de Midrecht, qui visitera Le Cap en 1685. D'où l'appellation de Vallée Drakenstein.

Pionnier par excellence, Abraham Gabbema, colon néerlandais, baptisera Peerlebergh le célèbre mont en granit. Notre homme était alors à la recherche d'un endroit où établir sa ferme, trente ans avant l'installation d'une vingtaine de fermiers dans la place. Cité agricole, Paarl est au centre d'une vaste région de vergers et de vignobles. Et le fait que le siège de l'industrie viticole sud-africaine s'y trouve n'est pas du au hasard. Historiquement, Paarl est aussi le berceau de l'Association des vrais Afrikaners. Ce mouvement sera fondé dès 1875 par Stephanus Jacobus du Toit avec un groupe formé d'enseignants et de pasteurs de l'église réformée hollandaise. L'idée de ce mouvement était alors d'imposer l'usage de la langue Afrikaan au côté de l'anglais, en tant que langue officielle de la colonie du Cap.


 

Comme à l'accoutumée, je décide du thème de mon article à la dernière minute. Et de me renseigner auprès de l'office du tourisme s'il existe des visites guidées de la ville. Il existe même une « héritage walk » riche d'une quarantaine d'édifices. J'aurai la chance qu'Hébry soit disponible immédiatement et accepte de me faire découvrir sa ville, tout en participant à la vidéo tournée pour l'occasion. Deux heures trente seront nécessaires pour faire un tour d'horizon d'une partie du patrimoine historique de Paarl, tant il y a de choses à voir et d'anecdotes à conter. La cité aura la chance de voir défiler chez elle les plus grands architectes, comme Wynand Louw, le premier architecte d'Afrique du Sud à pratiquer l'Afrikaans, et à qui l'on doit les plus beaux immeubles du Cap érigés durant la première moitié du 20è siècle. Antonie de Wit, lui, débarquera dans le pays à l'invitation du Président Burgess, alors à la tête de la République du Transvaal dans la seconde partie du 19è. Parmi ses spécialités figurent les pignons néerlandais et les décorations en plâtre. Le troisième, Herbert Baker, architecte britannique, imposera le style architectural hollandais du Cap : le style Cap Dutch (caractérisé par ses maisons à toit de chaume plus ou moins imposant, des façades blanchies à la chaud et des boiseries de couleur verte) puis à partir de 1850, le style Cape Dutch Renaissance, avec ses caractéristiques classique italien englobant aussi le style Renaissance du 19è siècle. A Church Square, deux jolies maisons (ci-dessus en photo) de style Cape Dutch se dressent harmonieusement depuis le début du 19è, face à une vaste place où les paroissiens avaient l'habitude garer leurs chariots. De style Cape Dutch Renaissance, on trouve l'ancien « Press Building » (photo ci-dessous), qui fut conçu pat Antonie de Wit au N° 187-189 de la rue principale. La brique que l'on croit voir n'est finalement qu'une belle imitation en plâtre, et la façade d'offrir aussi balcons,tourelles,sphères et piliers d'ornement pour embellir l'ensemble.


 

Notre promenade débute au N°112, en face de l'église Het Gesticht, de style Néo-gothique. Erigé en 1813 pour servir d'école et de lieu de rassemblement pour l'accueil des esclaves alors assistés par les Missionnaires, cet édifice passera sous la tutelle de la Société missionnaire de Paarl dès 1817, et jusqu'à ce qu'une plus grande église soit construite en 1841. Ce gothique Renaissance offre les habituels traits du gothique original, agrémenté d'autres motifs décoratifs. A quelques pas de là, sur le trottoir d'en face, s'élève la Klein Vredenberg, de style géorgien (ci-dessous). Cette architecture, née après la seconde vague d'occupation britannique, est le résultat de l'évolution des lois de l'époque, des matériaux de construction utilisés et des modes. Les maisons étaient souvent à deux niveaux et agrémentées d'un toit plat, et de fenêtres à guillotine. Construite au milieu du 19è siècle la maison ci-dessous offre une double porte d'entrée encadrée par deux pilastres cannelés. L'ensemble, probablement un ancien cottage en toit de chaume transformé en ravissante demeure géorgienne, fut acquis en 1823 par un certain I.P de Villiers.


 

C'est le style vernaculaire qui caractérise l'église Strooidakkerk (ci-dessous) avec ses pignons gracieux et sa simple croix. L'édifice a été construit par un ingénieur militaire allemand, la Major Georg ConradKuchler. L'intérieur austère, lui, reflète bien le calvinisme de l'église réformée hollandaise. Quant au clocher, il est de style néo-classique et date de 1811. Et le style vernaculaire dans tout cela ? C'est une architecture traditionnelle qui se transmet de génération en génération, de bouche à oreille et à tout niveau de la société. La Mairie de Paarl a été bâtie dans ce même style par l'architecte Wynand Louw, agrémentée toutefois d'une frise, œuvre d'un célèbre artiste sud-africain, Hugo Naude.

 

La reine Victoria laissera, elle aussi un style, le style victorien, né sous son règne et reconnaissable à ses toits en tôle ondulée, ses vérandas ornées de piliers en dentelle brookie, ses tourelles et des motifs en plâtre apposés sur les murs. Rappelons qu'à cette époque, l'Angleterre connait la Révolution industrielle et l'apparition de machines nouvelles qui produisent de nouveaux matériaux de construction. A Paarl, le « Patriot Building » (ci-dessous) offre ce style bien qu'il ait perdu beaucoup de son charme au fil des ans. Il correspond à l'époque où la langue Afrikaans fut reconnue en tant que nouvelle langue africaine, en 1875. Et les supporters d'imprimer alors de nombreux ouvrages de littérature afrikaans, en utilisant une presse installée dans ce bâtiment. C'est de là également que sortiront enfin les journaux Die Patriot, puis le Paarl Post Newspaper.


 

Construite en 1841, pour pallier au manque de place offert par l'église Het Gesticht, l'église de Zion (ci-dessous) offre un style néo-classique, une architecture apportée jusqu'au Cap par l'architecte français Louis Michel Thibault, adepte des écoles romaine et grecque. Ce style est caractérisé par des lignes symétriques, des frontons triangulaires, urnes et pilastres cannelés. Majoritairement fréquentée par des paroissiens de couleur, ce lieu de culte perdra de sa superbe au début des années 1960, à la suite du vote d'un ensemble de textes reléguant les Noirs dans des quartiers périphériques. L'église restera ainsi orpheline de nombreuses années par manque de congrégation.


 

Point de bâtiment de style romanesque cette fois sur notre parcours : ce style médiéval européen avec ses arcs semi-circulaires est pourtant joli. Apparu au 12è siècle, il combine styles byzantin et roman, avec ses gros murs épais, ses arcs arrondis, ses piliers robustes et ses arcades décoratives. Point de style Art-déco non plus, avec ses formes géométriques, ses lignes claires et précises et sa décoration qui se fond dans la structure. Un style découlant des courants picturaux du début du 20è siècle, entre cubisme et futurisme italien. A Paarl, l'ancienne Western Province Bank (au N° 175-177), l'église de la Sainte Trinité, la façade du bâtiment situé au N°244, celle du N°258 ou le Protea Bioscope offrent ce style architectural.

Reste le style Edouardien, une architecture populaire durant le règne d'Edouard VII mais plus sobre que le style victorien. Au N° 218-220 de la rue principale se dresse toujours un édifice à deux niveaux dans ce style architectural, datant des années 1920. Un autre bâtiment, celui d'une maison de ville (N°260-266) offre le même style, puis encore une autre maison au N°270. La salle paroissiale, bâtie en 1927, est du même acabit.

Décidément, il me faudra revenir pour poursuivre cette passionnante visite patrimoniale en compagnie d'Hybré. Notre parcours s'achève à l'office de tourisme de la ville, qui a trouvé refuge au N°210 de Main Road (ci-dessous). Il s'agit là d'une superbe demeure de style Cape Dutch, datant du 18è siècle, avec sa double-porte au milieu d'une façade dénudée ce qui lui donne encore plus de charme. Autrefois propriété de S.P.Jordan, petit-fils du huguenot Jean Jourdan, cette maison fut restaurée en 1982 par la municipalité et sert désormais de lieu d'archivage pour les documents historiques de la ville.


 

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