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L'Alcazar de Cordoue
(Cordoue, Andalousie, Espagne)
Heure locale


Vendredi 21 novembre 2014

 

Et si nous nous rendions aujourd'hui à l'Alcazar des Rois catholiques ? Celui-ci est situé dans le centre historique de Cordoue, non loin de la Mosquée-Cathédrale. Ce palais-forteresse nous a été donné par le roi Alphonse XI de Castille, Ferdinand II d'Aragon et Isabelle 1ère de Castille. A l'époque, la guerre opposant les Maures aux Chrétiens débutera dans le nord de l'Espagne, puis gagnera l'Andalousie, qui sera le théâtre d'une victoire majeure des Chrétiens à Las Navas de Tolosa en 1212, suivie des chutes de Séville et de Cordoue. A la fin du XIII ème siècle, seul le royaume des Nasrides de Grenade restait encore maure. Des monarques comme Alphonse X puis Pierre 1er de Castille emploieront des artisans mudéjars pour bâtir églises et palais (mudéjar signifiant « ceux qui sont autorisés à rester »).

L'Alcazar de Cordoue possède des caractéristiques islamiques mais la presque totalité de la structure fut construite pendant l'époque chrétienne. A l'origine, les Wisigoths avaient érigé une forteresse sur ce site. Lorsque ces derniers tombèrent lors de la conquête musulmane, les Omeyyades (dynastie de califes ayant gouverné le monde musulman entre 661 et 750) de Damas reconstruiront la structure. En 750, Les Omeyyades de Damas (Syrie) sont renversés par les Abbassides. Le seul survivant de la dynastie omeyyade, Abd- Al-Rahman 1er, qui a une mère berbère, s'enfuit alors en direction du Maghreb, puis atteint l'Espagne (Al-Andalus) pour rejoindre des troupes qui lui étaient restées fidèles. Puis il établit l'émirat de Cordoue et utilise l'Alcazar comme palais.


 

La ville prospère alors en tant qu'important centre politique et culturel. Les Maures agrandissent l'Alcazar avec des bains (ci-dessous), des jardins, et la plus grande bibliothèque de l'Occident. Ces bains sont accessibles en passant par le corridor Est et offrent plusieurs salles dont certaines possèdent un plafond avec des bouches d'aération en forme d 'étoiles. L'eau qui alimentait ces bains provenait d'une citerne placée à proximité de la Tour de l'Hommage, puis était chauffée à l'aide d'un four. On pense que ces bains furent actifs jusqu'au XV ème siècle. En tous cas, ils seront utilisés sous l'Inquisition comme lieu de torture et salles d'interrogatoire. Quant aux jardins, ils étaient alimentés en eau grâce à des moulins placés sur le Guadalquivir, qui utilisaient un savant système de levage pour amener l'eau jusqu'au palais. Ces mécanismes fonctionnèrent jusqu'à ce que la reine Isabelle se plaigne du bruit occasionnés par ces moulins et les fasse interrompre.


 

En 1236, les forces chrétiennes s'emparent de Cordoue lors de la Reconquista. En 1328, Alphonse XI de Castille commença à bâtir la structure actuelle de l'Alcazar en ne gardant qu'une partie des ruines de l'ancienne forteresse maure. D'autres parties de ce palais seront offertes en tant que butin à l'évêque, les nobles et l'Ordre de Calatrava (premier ordre militaire espagnol, fondé au XII ème siècle). Le palais sera impliqué dans la guerre civile lors de laquelle Henri IV de Castille affrontera la rébellion de son demi-frère Alphonse. On améliore à ce moment-là les défenses de l'Alcazar (photo ci-dessous) afin de faire face à l'avènement de la poudre à canon. Et de construire dans le même temps la Tour de l'Inquisition. Les successeurs de Henri, Isabelle et son mari Ferdinand utilisèrent ensuite l'Alcazar comme l'un des premiers tribunaux permanents de l'Inquisition espagnole mais aussi comme siège pour leur campagne contre la dynastie des Nasrides de Grenade, ce dernier royaume maure de la péninsule ibérique. L'Inquisition maintiendra un tribunal dans ce palais pendant trois siècles. Boabbil, le XXII ème émir nasride de Grenade , surnommé l'infortuné, y sera prisonnier en 1483. Six ans plus tard, lorsqu'il refusera de renoncer à son royaume, les Chrétiens attaqueront Grenade en 1492, et vainqueront le royaume nasride. C'est dans ce même palais, et cette même année, que les rois catholiques rencontrèrent Christophe Colomb au moment où il se préparait à appareiller pour effectuer son premier voyage vers les Amériques.

L'Alcazar servira enfin de garnison pour les troupes de Napoléon 1er en 1810. Et l'Alcazar, de devenir une prison en 1821. Ce n'est que dans les années 1950 que le gouvernement espagnol fera de ce lieu un site touristique et un monument national.


 

L'Alcazar actuel est, en apparence seulement, de style mauresque, mais a bien été bâti par les rois chrétiens (principalement Alphonse XI de Castille). Il est, avec l'Alcazar de Séville (voir mon précédent article à ce sujet) l'un des principaux témoins de l'architecture mudéjare qui se développera en Espagne entre les XII è et XVI è siècles. Les murailles, ainsi que les tours sont clairement inspirées de l'architecture almohade, au style sobre et austère, comportant d'imposantes murailles surmontées de merlons d'origine almohade.

Je débute ma visite par le couloir nord, qui court de la Tour des Lions jusqu'au salon des mosaïques (ci-dessous). Là se trouvaient les cellules des femmes du temps où le palais était une prison. Le notaire Ucelay transforma plus tard cette galerie en construisant des arcs en panier en brique. On y trouve entre autre un sarcophage romain datant du III ème siècle et le buste du philosophe cordouan Séneca, qui fut réalisé par le sculpteur cordouan Mateo Inurria. Le sarcophage romain fut découvert dans la nécropole nord de la ville en 1958. On imagine, compte tenu de ses dimensions et de son exceptionnel état de conservation, que celui-ci nous parvint de Rome, avant que des sculptures n'y fussent rajoutées à Cordoue. Ces sculptures représentent l'entrée des défunts dans l'autre monde. Non loin de là, au niveau inférieur, je peux observer la galerie Est (deuxième photo) correspondant à l'axe oriental de l'enceinte. Celles-ci accueillit jadis les cellules des hommes du temps de la prison. Sa construction est de style islamique, mais Alphonse XI chargea, en 1338, les artisans mudéjars de transformer peu à peu l'endroit en galerie.


 

Je m’arrête quelques instants devant la Salle de l'Océan (en photo ci-dessous) : celle-ci arbore ce qui pourrait être un morceau d'une mosaïque plus grande, qui représente l'image d'un dieu mythologique. La pierre de taille de l'ancien chapitre date du XVII ème siècle. Sur le bureau, on peut voir la tête du Grand capitaine, œuvre de Mateo Inurria.

Autrefois chapelle de San Anacio, et situé au-dessus des bains royaux, le salon des Mosaïques offre plusieurs mosaïques (d'où son nom). Les toits d'origine furent transformés en voûtes durant le XVIII ème. Sur place, on peut admirer des mosaïques qui furent découvertes sur la place de la Corredera, en 1959. Ces mosaïques datent des II è et IIIè siècles après J.C et formèrent le sol de maisons romaines construites à l'extérieur des murs. Ci-dessous, la mosaïque « La Méduse », polychromie allant de la couleur bleue à l'ocre , présentant motifs géométriques et marins.


 

Je traverse le patio mudéjar (ci-dessous), de forme rectangulaire, qui offre des similarités avec celui qui sera construit plus tard pour le Palais des Lions de l'Alhambra (à Grenade). En son centre coule une fontaine. Le jardin est formé de quatre grands parterres irrigués par des ruisseaux en surface. Il reste encore quelques vestiges médiévaux, et des dépendances du roi Alphonse XI, avant que l'Inquisition ne transforme cette enceinte en prison, puis, plus tard, en prison de la ville.


 

Je pénètre ensuite dans les jardins par une grande porte fermée par une grille. Ceux-ci occupent l'espace d'autres jardins de l'Alcazar, plus anciens, irrigués à l'époque par la noria (roue) de la Albolafia. Plusieurs bassins en espalier (ci-dessous), des promenades et des fontaines agrémentent ce lieu dans une riche harmonie de couleurs (certes, un peu moins importante en cette saison). De nombreux objets archéologiques remontant à l'époque romaine, disséminés ici et là, font de cette visite une promenade encore plus enrichissante. Près de la Tour des Lions, se trouve un petit palais néo-mudéjar, qui fut occupé par le maire de Cordoue, Tomas Conde, de 1875 à 1877. Un épigramme De Platano cordubensi du poète latin Marcial évoque la présence de l'empereur Jules César à Cordoue. Et de reproduire une mosaïque de Thiasos Marino (deuxième photo) dans une fontaine dressée en hommage au dictateur romain dans les années soixante. Plus loin, la promenade des Rois (troisième photo) me rappelle que celle-ci était consacrée aux monarques liés à l’histoire de la forteresse.


 

Différents bassins s'offrent au regard des visiteurs : on distingue d'abord, au pied de la Tour des Lions, les bassins supérieurs, qui sont alimentés par une fontaine (ci-dessous). Les bassins inférieurs (deuxième photo) sont à leur tour, alimentés en cascade par les bassins supérieurs, via une autre fontaine. Ces bassins sont entourés d'arbres fruitiers, de palmiers, et de cyprès créant un labyrinthe exceptionnel.


 

Je termine ma visite en grimpant dans la Tour des Lions, de forme carrée (ci-dessous), qui m'autorise à prendre quelques vues panoramiques des environs (n'oubliez pas de visionner les autres photos de cette promenade, en cliquant en haut de l’article à droite). Cette tour doit son nom aux gargouilles qui la décorèrent. Dans son prolongement, se trouve la Tour de l'Hommage (qui s'appela autrefois la Tour de l'eau, à cause de la présence d'une citerne voisine d'une part, et de l'existence d'un campanile qui sonnait jadis l'heure réglementée de l'utilisation de cette eau). De forme octogonale, cette tour (deuxième photo) présente une pièce principale constituée par des voûtes soutenues par des colonnes d'origine française. Les portes présentent des éléments architecturaux wisigothes et islamiques, ce qui prouve la réutilisation des mêmes matériaux d'une époque à l'autre. Autre tour, celle de l'Inquisition, et encore une autre, la Tour des Colombes (troisième photo), qui fut détruite en 1856 mais reconstruite depuis avec une structure de béton mais ne peut pas être visitée.

 

INFOS PRATIQUES :


  • Alcazar des Rois Catholiques, Plaza Campo Santo de los Martires, à Cordoue. Tél:(+34) 957 42 01 51. Ouvert du mardi au vendredi de 8h30 à 19h30, le samedi de 9h30 à 16h30 et le dimanche de 9h30 à 14h30. Entrée : 4,50€. Livret-guide en espagnol, français ou anglais à 3€ (distributeur automatique). Prise de photos autorisée. Site internet : http://www.alcazardelosreyescristianos.cordoba.es/?id=3

 




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