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Ubeda et Baeza
(Andalousie, Espagne)
Heure locale


Lundi 24 novembre 2014

 

Je suis arrivé hier, dimanche, à Jaén (Province de Jaén), capitale mondiale de l'huile d'olive, c'est du moins ce qu'elle prétend. Dans les environs de cette cité, il existe deux petites villes classées sur la liste du patrimoine mondial de l'humanité : Ubeda et Baeza.

Ubeda est assez proche de Baeza, puisque séparée seulement par huit kilomètres d'oliveraies. Elle fut déclarée patrimoine mondial de l'humanité le 3 juillet 2003, grâce à la qualité et le bon état de conservation de ses nombreux monuments. Surnommée la ville des collines, Ubeda est située au cente de la Province de Jaén, sur un point dominant donnant sur la vallée du Guadalquivir, et face à la Sierra Magina, massif montagneux culminant à 2167 mètres. Le site d'Ubeda était autrefois occupé par les Ibères ainsi que le montrent des découvertes archéologiques. Lors de sa conquête par les Romains, la ville prendra le nom de Baetula. Elle sera détruite plus tard par les invasions des Vandales, et il lui faudra attendre l'arrivée des Arabes pour qu'elle renaisse sous le nom de Ubbadat. Ces derniers élèveront une muraille autour de cette cité en 852, muraille qui délimite toujours aujourd'hui le tracé de l'ancienne ville médiévale. Entre le XI è et le XII è siècle, Ubeda sera successivement prise par les rois de Castille puis par les Almohades, avant d'être reconquise par le roi Ferdinand III de Castille, à la suite d'un long siège qui mènera à une capitulation en 1233. Les trois cultures arabes, juive et chrétienne y coexisteront pacifiquement pendant deux siècles. Après la conquête de Grenade, en 1492, Ubeda se développera économiquement grâce à sa juridiction couvrant un vaste territoire et à la présence de grands axes de communication. De puissantes familles s'y installeront alors, rivalisant les unes avec les autres en magnificence et construisant palais et églises. Ce qui en fait aujourd'hui un véritable musée dédié à l'architecture de la Renaissance, avec une quarantaine de curiosités à découvrir. Ubeda aboutit à ce résultat grâce à l'aide du mécénat d'hommes parmi les plus influents d'Espagne au XVI è siècle (comme, par exemple, le secrétaire d'Etat de Charles Quint, Francisco de las Cobos et son petit-neveu Juan Vazquez de Molina), dont le joyau est certainement la Plaza de Vazquez de Molina, entourée de palais et d'églises d'une grande élégance.


 

Outre ces familles, la ville devra beaucoup à l'architecte Andrès de Vandelvira, à cause de ses constructions de style renaissance. Natif d'Alcaraz, notre homme sera aussi un talentueux tailleur de pierre et érigera de nombreux palais et édifices religieux, non seulement à Ubeda, mais aussi à Jaén. Du point de vue culturelle et artistique, la ville d'Ubeda a tout pour plaire aux amateurs de style renaissance. La célèbre place Vazquez de Molina est entourée par d'imposants édifices comme par exemple le Palacio de las Cadenas, appelé aussi Palais Vazquez de Molina, qui fut édifié par Andrès de Vandelvira, entre 1546 et 1565. Ce Palais des Chaines est ainsi nommé en raison des nombreuses chaines décoratives qui pendaient autrefois sur sa façade. De nos jours, il est utilisé comme Hôtel de ville.


 

Non loin de là se dresse le Palais du doyen Ortega, qui fut la résidence du chapelain de la Capilla del Salvador. Construit au milieu du XVI è siècle, toujours par Andrès de Vandelvira, avec l'aide de Luis de la Vega, il sera transformé en parador de tourisme à partir de 1929 (ci-dessous). La Chapelle sacrée du Salvador (deuxième photo ci-dessous) fut bâtie afin d'abriter le tombeau de Francisco de los Cobos y Molina. Sa sacristie est considérée comme l'une des réalisations majeures de la Renaissance espagnole, et comporte de nombreuses sculptures en haut-relief qui symbolisent vices et vertus. Celles-ci furent réalisées par Esteban Jamete, d'après des dessins d'Andrès de Vandelvira. On doit par contre son choeur, richement décoré, à Bartolomé de Jaen.


 

Autour de cette place Vazquez de Molina se trouve également le Palais du Marquis de Mancera, qui servira de résidence au Vice-roi et Capitaine du Pérou, Pedro de Toledo. La Real Colegiata de Santa Maria la Mayor de los Reales alcazares est, quant à elle, l'église principale d'Ubeda (ci-dessous). Elle fut érigée sur les restes de la mosquée mauresque de la cité et incorpore les styles gothique, renaissance et baroque. Elle sera sérieusement endommagée lors de la guerre civile espagnole. Dans le même quartier, on notera enfin la présence de la prison de l'évêché, construite sur l'ancien Palais du Maure. Sous son site, ont été découverts les vestiges d'un cimetière ibère datant de 1200 à 1400 ans avant J.C.


 

Le temps me manque malheureusement pour visiter davantage la ville intra-muros. La ville hors les murs offre aussi son lot de curiosités. L'Hôpital de Santiago (ci-dessous), œuvre d'Andrès de Vandelvira, fut bâti entre 1562 et 1575 d'après une commande de Don Diego de los Cobos, le cousin de Francisco de los Cobos y Molina, et évêque à Jaén. Son aspect imposant le fait confondre avec l'Escorial de l'Andalousie. Son escalier monumental offre un plafond et des murs aux décors magnifiques avec des fresques de Pedro de Raxis et Gabriel Rosales (deuxième photo). Le bâtiment comporte quatre tours, et est désormais centre de congrès, de festivals et d'expositions. Ubeda compte enfin plusieurs musées, dont le Musée archéologique qui se consacre aux vestiges issus des périodes allant du Néolithique à l'ère islamique. On peut y admirer des pierres tombales du 1er siècle après J.C et de superbes œuvres maures ou mudéjares en bois et en stuc. Ce musée est logé dans la Casa Mudéjar du XV è siècle, au milieu des palais, couvents et églises de la vieille ville d'Ubeda. Un dernier musée, celui de l'ordre des Carmes déchaux , surnommé l'Oratoire de San Juan de la Cruz : cet ordre, ainsi que les Moniales déchaussées de la bienheureuse Vierge Marie du Mont-Carmel, est un ordre religieux catholique contemplatif et apostolique appartenant à la catégorie des ordres mendiants. Les frères Carmes déchaux partagent avec les sœurs Carmélites déchaussées, des moniales cloitrées, le même rythme de prière, depuis le XVI è siècle. Quant à Saint Jean de la Croix, il mourra au couvent d'Ubeda, en 1591. Saint mystique espagnol, souvent appelé « Saint du Carmel », il naquit dans une famille aristocratique, deviendra carme, puis fondera l'ordre des Carmes déchaussés, ce qui déplaira à ses supérieurs. Il vivra le reste de sa courte vie (il décédera à 49 ans) cloitré et développera la très célèbre expérience mystique de la nuit obscure, cherchant à témoigner du chemin des âmes vers Dieu.


 

Une autre petite ville, d'ailleurs voisine d'Ubeda, est aussi classée au patrimoine mondial de l'humanité depuis 2003 et mérite bien qu'on s'y arrête : Baeza. J'y passera deux heures à me promener dans le centre historique qui regroupe les principaux monuments (parmi la cinquantaine de curiosités disponibles) qu'il ne faut pas manquer. Située au milieu des oliveraies, Baeza se distingue, elle aussi, par la richesse de ses monuments de style renaissance. La cité semble avoir été occupée il y a fort longtemps, dès l'époque du Paléolithique moyen. On a en effet retrouvé les restes d'un camp de chasseurs datant de cette époque. La colonisation agricole, elle, eut lieu lors du Néolithique, entrainant un développement remarqué dans la région. Sous les Wisigoths, Baeza prend de l'importance puisqu'elle rassemble le siège épiscopal du diocèse et la fabrique de monnaie. Je visiterai sur place la cathédrale (ci-dessous), construite à partir de 1529, sur les vestiges d'une ancienne mosquée après la conversion au catholicisme de la population lors de la conquête d'Alphone VII de Leon et de Castille et de Ferdinand III. A l'intérieur, on peut admirer le cloitre, et un joli petit musée, rassemblant entre autres habits sacerdotaux, livres anciens et peintures. On peut enfin monter au sommet de sa tour.


 

Après 711, Baeza passe sous domination musulmane, période pour laquelle on ne dispose que de peu d'information si ce n'est que Baeza restant alors majoritairement peuplée de Chrétiens, l'émir omeyyade Abd al-Rahman III décide de faire d'Ubeda une ville entièrement peuplée de Musulmans. Le X ème siècle sera malgré tout synonyme de prospérité pour la ville qui s'agrandit et développe de vastes zones de cultures dans les alentours. Le XI è siècle verra la chute du Califat de Cordoue et connaitra une époque bien moins favorable, la cité passant, successivement, aux mains de différents taifas (royaumes musulmans) de la région comme Murcie, Grenade ou Séville. A la suite de la Reconquête, Baeza ne sera reprise par les chrétiens qu'en décembre 1226. Au XVI è siècle, la population ne va pas cesser de croitre mais connait de nouvelles luttes nobiliaires pour le pouvoir local et est pressurée par les charges fiscales. Le commerce , lui non plus, ne marche pas bien fort. Mais la petite ville parviendra malgré tout à maintenir son prestige, lié à son diocèse, mais aussi à son université (ci-dessous) et au collège de San Felipe Neri, fondé en 1660. Notons que l'université fut, de 1542 à 1825, le siège de l'une des premières universités d'Espagne.


 

En 1810, Baeza est occupée par les troupes napoléoniennes, mais les Français en seront chassés deux ans plus tard. On notera l'arrivée du chemin de fer dans la cité au XIX ème siècle mais cela ne bouleversera manifestement pas la vie de ses habitants. Après m'être garé sans grande difficulté à proximité du centre historique, je me rends Place de Populo pour admirer la jolie fontaine aux Lions (ci-dessous), avec son pilier carré. Cette place, tout comme la fontaine, appartiendraient à l'ancienne cité romaine, Castulo. A deux pas, se trouvent la porte de Jaén et l'arc de Villala (deuxième photo), qui seront reconstruits après 1476, après que la reine Isabelle la Catholique en eut ordonné la destruction. L'endroit est hautement symbolique puisque c'est de cet endroit que partirent les troupes chrétiennes pour abattre le dernier bastion musulman de la péninsule ibérique. Ceci marque le point de départ d'un circuit qui va successivement me mener à la cathédrale, puis, juste en face, à l'université de Baeza, ouverte au public et où je m'arrêterai pour boire un café. Cette même université occupe désormais le Palais de Jabalquinto (troisième photo), édifice gothique qui possède une magnifique façade de style isabélin, flanquée de beaux contreforts arrondis. Ce gothique isabélin était le style architectural dominant de la Couronne de Castille, sous le règne de la reine Isabelle 1ère. Et se caractérise par des influences décoratives d'art hispano-mauresque, hispano-flamand et un peu aussi d'architecture italienne.

 

Il ne faut toutefois pas confondre cette récente université avec la vieille université de Baeza (ci-dessous) qui accueille, encore aujourd'hui, une école. On peut y trouver l'ancienne salle de classe du poète Antonio Machado, né en 1875 à Séville et décédé à Collioure (France) en 1939, à l'âge de 63 ans. Poète espagnol, il reste l'une des figures du mouvement littéraire espagnol, mélangeant la rêverie mélancolique et raffinée à l'inspiration terrienne, et enseignera quelques temps dans cette classe de l'ancienne université de Baeza.

Je poursuis ma visite par la Torre de los Aliatares (deuxième photo), tour arabe du XII ème siècle, l'une des tours fortifiées les plus importantes de la ville. Elle tient son nom de la tribu arabe des Aliatares qui, dit-on, la détenaient déjà avant la conquête réelle de Baeza. Sur ordre d'Isabelle la Catholique, elle fut rasée en 1476. Puis reconstruite plus tard : celle-ci est de forme carrée et mesure 25 mètres de haut.


 

Cette tour débouche sur le Paseo de la Constitucion (ci-dessous), qui fut créé afin d'accueillir le marché à partir du XVI ème siècle. Désormais transformé en lieu de promenade, les habitants et les touristes de passage peuvent toutefois admirer l'architecture des bâtiments qui l'entourent, avec ses portiques en forme d'arcades : La Alhondiga (deuxième photo), jadis halle au blé, offre précisément trois étages d'arcades, dont le dernier étage comporte des colonnes de style renaissance. Sur cette promenade, se trouve aussi la fontaine de l'étoile qui fut érigée dans la seconde moitié du XIX è siècle, à l'occasion de la révolution de 1868, surnommée « La Glorieuse ». Cette fontaine se dresse sous la forme d'un pilier circulaire tel un obélisque. Autrefois, au bout de cette promenade, se tenait un café prestigieux, El Cafe Mercantil, aujourd'hui disparu. C'est là qu'Antonio Machado descendait pour boire chaque jour son café.


 

Je ne pouvais pas quitter Baeza sans me rendre à son Hôtel de ville (ci-dessous en photo) abrité dans un splendide édifice de style plateresque qui servit jadis de Palais de Justice et de prison. Sa jolie façade porte les armoiries de Philippe II d'Espagne, de Juan de Borja et de la ville de Baeza. L'architecture du début de la Renaissance est appelée plateresque car son ornementation riche et fine rappelle l'art de l'orfèvre. Cet Hôtel de ville en est un exemple.


 

 

INFOS PRATIQUES :


  • Site internet de la ville d'Ubeda : http://www.ubeda.es/ubeda/

  • Office de tourisme d'Ubeda, Palacio Marquès de Contadero, Baja del Marqués, 4,à Ubeda. Tél:(+34) 953 75 08 97. Une quarantaine de sites à visiter.

  • Office de tourisme de Baeza, Plaza del Populo, à Baeza. Tél:(+34) 953 779 982. ouvert de 9h00 à 19h30 du lundi au vendredi. Et de 9h30 à 15h00 les samedi et dimanche. Une cinquantaine de sites à visiter. Site internet : http://www.andalucia.org et courriel : otbaeza@andalucia.org

  • Site de la mairie de Baeza : http://www.baeza.es/baeza/

  • Cathédrale de Baeza, Plaza Santa Maria, à Baeza. Ouverte l lundi de 9h30 à 11h00, et visite des cloitre, tour et salle capitulaire de 11h00 à 14h00 et de 16h00 à 18h00. Du mardi au vendredi, de 10h30 à 14h00 et de 16h00 à 18h00. Le samedi, de 10h30 à 18h00, et le dimanche de 10h30 à 17h00. Entrée : 4 € (audioguide en espagnol, anglais, français ou allemand inclus).

  • Agence Populo (services touristiques), Plaza de los Leones, 1, à Baeza. Tél:(+34) 953 744 370. Demander Santiago Calvo Sanchez au 678 50 79 13. Equipe très sympathique, proposant des visites guidées à Baeza et à Ubeda, ainsi que des services touristiques et culturels. Petit train touristique. Site internet : http://www.populo.es

  • Musée de la Culture de l'Olive, Complexe de la Hacienda La Laguna. Pour découvrir la culture traditionnelle de l'olive.Tél:(+34) 953 765 142. Ouvert toute l'année, de 10h30 à 13h30 et de 16h00 à 18h30 en hiver, de 16h30 à 19h00 au printemps et en automne, et de 17h30 à 20h00 en été. Entrée : 3,60€ . Site internet : http://www.museodelaculturadelolivo.com








 



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