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Salies de Béarn
(Pyrénées Atlantiques, France)
Heure locale

 

Dimanche 24 mai 2015

 

L'endroit où je vais vous emmener aujourd'hui ne manque pas de sel. Nous sommes à Salies de Béarn, au cœur du Béarn des gaves, petite cité située entre les gave de Pau et d'Oloron, qui doit sa renommée au sel, denrée qui a fortement influencé son histoire. On attribue l'existence de la ville à un sanglier, découvert auprès d'une source, les soies recouvertes de cristaux de sel. Depuis, Salies de Béarn veille sur cette source d'eau salée intarissable qui procure forme et bien être, eau qui appartient encore aujourd'hui à près de 500 Salisiens (habitants de Salies), appelés Part-Prenants. Ce privilège se perpétue tout de même depuis...1587. La ville est formée de deux quartiers. Le premier (et le plus ancien) s'est développé autour de la source, en s'y enroulant comme un escargot. Je découvre sur place de magnifiques maisons typiques des XVII et XVIII ème siècle, arborant pour la plupart des drapeaux bretons. J'interroge les habitants sur cette curieuse pratique, et j'apprends que les Salisiens attendent les habitants de Batz sur mer (avec laquelle Salies de Béarn est jumelée) pour un voyage d’agrément, d'où ces attentions particulières.

Sur la Place de Bayaa, j'aperçois la fontaine du sanglier (ci-dessous en photo), monument érigé en souvenir de la bestiole qui permit aux gens de découvrir cette fameuse eau salée. La légende raconte qu'un sanglier fut blessé au cours d'une chasse, puis découvert mort quelques jours plus tard, dans un marécage, les soies constellées de sel. Cette fontaine porte gravées les paroles soi-disant prononcées par l'animal : Si je n'y étais pas mort, personne n'y vivrait. Il faut se rendre à l'intérieur de l'Hôtel de ville, qui fut reconstruit en 1810, pour découvrir la Salle du musée de la Crypte et de l'histoire salisienne. On y découvre un film sur la cité et sur l'exploitation de la source d'eau salée, sur celle du sel à travers les âges. On y voit également de jolis meubles de l'école salisienne, ainsi que des vitrines renfermant des objets préhistoriques qui furent découverts lors de fouilles près de Mosquéros. Au coeur de la cité du sel, cette place du Bayaa (deuxième photo) recouvre la source salée depuis 1865. La crypte, elle, a été construite à l'origine par souci d'hygiène et pour protéger la source salée à laquelle Salies doit sa naissance. Une voûte de pierre soutenue par des piliers d'un mètre de côté sont posés sur des pieux de huit mètres, en bois de châtaignier, peut être admirée depuis la place grâce à un puits de lumière.


 

Bien entendu, salies possède sa rue de la Fontaine salée, dans laquelle se trouve la maison du cordonnier, qui porte sur sa façade un superbe bas-relief (ci-dessous) relatant la visite de Jeanne d'Albret à Salies en 1568. Cette dernière possède d'ailleurs sa place à Salies. Nièce du roi François 1er, elle épousera Antoine de Bourbon, premier prince du sang et elle sera enfin la mère du roi Henri IV. Je poursuis ma visite en m'engageant dans la rue Pont Mayou, au N°8 de laquelle une vieille maison offre de voir près de la porte un coulédé, une auge en pierre qui servait jadis à recevoir l'eau salée apportée par les porteurs d'eau. L'eau salée était en effet puisée dans la source, Place Bayaa, puis déversée dans des sameaux (récipients en bois d'une contenance de 92 litres et en photo ci-dessous) pour être ensuite apportée par les tiradous, porteurs d'eau, jusqu'aux ateliers où l'eau était ensuite chauffée dans de grandes poêles en plomb pour en retirer le sel par évaporation de l'eau. J'apprendrai plus tard, au Musée du sel, que ce sel avait été déposé dans le sous-sol il y a plus de 200 millions d'années. Il y a plus de 4000 ans, des hommes s'en servaient déjà pour conserver produits à base de lait et viandes. Dès l'âge de bronze, ils fabriquèrent des pains de sel dans des fours circulaires, et à l'aide de poteries. La même technique sera reprise à l'époque gallo-romaine, au 1er siècle après J.C. Cette production se faisait alors sur 18 sites dans un rayon de deux kilomètres autour de Salies. Peu à peu, Salies cultiva céréales, arbres fruitiers et vignes, tandis que les Salisiens se mirent à élever porcs, moutons et petits bœufs. Quant au sel, il fut peu à peu exporté dans tout le bassin de l'Adour. Salies prospéra entre industrie et commerces à partir du XIV ème siècle , grâce, entre autre à la fontaine, qui offre une eau dix fois plus salée que celle de l'océan. Depuis 1857, ce sont les Salisiens et les voisins de la fontaine qui sont part-prenants, c'est à dire propriétaires de génération en génération de l'eau salée et de divers biens immobiliers. Ainsi, la Corporation des Parts-Prenants de la fontaine salée, encore régie de nos jours par le décret de Mac Mahon de 1876 a t-elle concédé en 1995 un bail-concession de 99 ans à la SEM Catherine de Bourbon pour l'exploitation exclusive de la source salée du même nom. L'exploitation familiale et artisanale d'antan a depuis laissé place à une production semi-artisanale de sel alimentaire et de bains au sein des salines, gérées de nos jours par la compagnie Fermière.


 

Je traverse plusieurs petites rues : rue des Griffons (ci-dessous), rue du Saleys, rue fleurie et rue Loumé. La rue des Griffons eut aussi son puits : à la fin du XIX ème siècle, les puits de la place de Bayaa (terme signifiant eau, étang ou mare) n'étant plus suffisants, on mit en service deux autres puits, celui de Dondats et celui de Griffon (qui fut foré à une dizaine de mètres). L'eau ainsi puisée contenait moins de sel que celle du Bayaa, mais était dirigée vers les Thermes, à travers une conduite franchissant le Saleys. Pour ne pas tarir le puits, il n'était possible de puiser l'eau dans ce puits que durant cinq heures chaque jour. Malgré cela, l'exploitation cessera juste avant le seconde guerre mondiale. Je passe devant une maison darremoundine qui fut construite dans la première moitié du XVII ème, avec un premier étage à pans de bois en encorbellement. Elle fut restaurée en 1992 par l'association des Amis du vieux Salies, avec reconstitution de façade à l'aide de croisée de pierre et d'un coulédé. Il s'agit du Musée du Sel et des Traditions béarnaises. En face de cette maison, une autre demeure, la Maison Bourg (deuxième photo ci-dessous) a également été restaurée par la même association. A savoir que la Maison Bourg fut bâtie avant 1385, c'est à dire sous le règne de Gaston Fébus. Le musée du sel me permettra d'en apprendre davantage sur le rôle du sel dans le développement de Salies de Béarn, grâce à une visite guidée fort intéressante. Ce musée occupe les trois niveaux de la maison décrite plus haut. Les salles montrent la reconstitution d'un atelier de façonneur de sel (troisième photo), mais aussi des vitrines avec vestiges archéologiques et des documents anciens sur l'histoire locale. Une partie de l'exposition est consacrée aux traditions béarnaises et offre de voir des objets datant essentiellement des XIX et XX ème siècles, qui retracent la vie de nos ancêtres.


 

Depuis la Place de la Trompe, j'admire Salies comme sur une carte postale (ci-dessous) avec la Maison Lacoste, laquelle porte un linteau sur sa porte d'entrée, mentionnant la date de construction, 1683. Cette demeure (deuxième photo) est surélevée et est à l'abri des éventuelles crues. C'est une parfaite maison salisienne, avec son toit à forte pente, sa galerie couverte et sa balustrade en encorbellement sur trois côtés. Symbolique de Salies et de l'habitat béarnais traditionnel, cette maison figura à deux reprises sur des affiches de la Compagnie de chemin de fer du Midi et au Musée pyrénéen de Lourdes. Pendant la seconde guerre mondiale, la bâtisse menaçant ruine, fut détruite par son propriétaire qui en récupéra les matériaux. Son fils, Guy Lacoste s'en servira pour reconstruire la célèbre maison.


 

Ma promenade se poursuit en direction de l'impasse Argenton, où s'élève encore la maison de Michel de Bergeras, qui fut autrefois maître charpentier. Cet homme était un ébéniste issu de l'école de Salies qui fonctionna trois générations durant, du XVIII au XIX ème siècles. On prétend qu'il serait descendant des cagots, ces parias des Pyrénées dont on entendit parler dès le XI ème siècle. Depuis la rue Laroumette, j'aperçois, noyé dans la végétation, et semblant à l'abandon, le Château de Saint Pé (ci-dessous) qui fut reconstruit au XVI ème siècle. Au XVII ème, un tribunal pour sorcières y siégea. Inutile de vous dire que je n'y ai pas mis les pieds ! De nos jours, ce château est une propriété privée. Je rebrousse chemin puis me dirige vers l'église Saint Vincent, dominée par son clocher (deuxième photo), ancienne tour de guet. Avec ses fortifications, cette église faisait partie du système défensif de Salies. Je quitte à présent l'ancien quartier de la cité pour me diriger vers le second, plus récent, qui abrite le quartier thermal.

 

Grands hôtels et palaces fleuriront en effet dans cette partie de la cité à partir du XIX ème siècle, lorsque Salies découvrira les vertus du thermalisme. Le Grand hôtel du parc témoigne encore aujourd'hui de la magnificence du cadre offert à la riche clientèle de cette époque (ci-dessous). L'établissement fut construit en 1893 par Pierre Saint Guily, au profit de Gabriel Graner dont on peut encore voir les initiales sur la façade. L'hôtel remplira ses fonctions jusqu'en 1978 , puis sera repris par la ville de Salies de Béarn. Il est depuis devenu le nouveau casino de la station thermale, depuis 1999. Et reste particulièrement remarquable grâce à son hall aux trois galeries couvertes et à sa magnifique verrière. Je traverse le jardin public et aperçois un joli kiosque à musique puis m'arrête en face de l'établissement des Thermes (deuxième photo) dont le premier bâtiment vit le jour en 1857, et qui obtint son classement aux monuments historiques en 1997. Détruit par un incendie, il sera reconstruit en 1888, dans un style mauresque. L'aile droite du bâtiment est consacrée à l'espace cure, les bienfaits de l'eau très salée permettant de soigner de nombreuses affections. La partie gauche, elle, abrite les Bains de la Mude, un centre de remise en forme doté des installations modernes alliant plaisirs de la détente et du bien être. Dès 1891, l'Académie nationale de médecine vantait les bienfaits de l'eau de Salies pour bon nombre d'affections (rhumatologie, gynécologie, troubles du développement de l'enfant). Les qualités curatives de l'eau salée furent mises en évidence alors que des personnes blessées qui se baignaient dans la fontaine au XIX ème siècle en ressortaient guéries. Les Part-Prenants, avec le docteur Charles Nogaret, décidèrent donc, grâce aux revenus tirés de l'exploitation de la fontaine salée, de bâtir un établissement thermal. Au départ, cet établissement ne posséda que quinze cabines. Vingt-trois ans plus tard, il augmenta de capacité devant le succès grandissant de cette thérapie. Nous sommes alors en 1880.

Les soins thermaux sont prodigués à partir de deux eaux thermales chlorurées sodiques fortes riches en 26 oligoéléments dont le magnésium, le calcium, le potassium et le fer : l'eau minérale naturelle, contenant 300 grammes de sel/litre, et les eaux mères, un concentré d'eau thermale comprenant 350 grammes de sel par litre d'eau. D'où les propriétés antalgiques, anti-inflammatoires et décontractantes. Ah c'qu'on est bien quand on est dans son bain !


 

INFOS PRATIQUES :


  • Office du tourisme de Salies, 18 Place de la Trompe, Salies de Béarn. Tél : 05 59 38 02 95. Site internet : http://www.tourisme-bearn-gaves.com

  • Restaurant A la Fraich', 16 Place du Bayaa, Salies de Béarn. Tél : 05 59 65 04 17. Site internet : http://www.alafraich.fr

  • Pâtissier-chocolatier Lavignasse, 8 Cours du Jardin Public, Salies de Béarn. Tél : 05 59 38 17 57. De délicieux chocolats et d'irrésistibles gâteaux basques artisanaux.

  • Thermes de Salies de Béarn : http://www.thermes-de-salies.com/

  • Musée du Sel et des Traditions béarnaises, rue des Puits salants, Salies de Béarn. Tél : 05 59 09 31 99 et 07 83 95 68 92. Entrée : 4 €. Site internet : http://www.museedusel64.fr

 

 










 



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