Revoir le globe
Top


Le Quartier Balvanera-Once
(Buenos Aires, Argentine)
Heure locale

 

Mercredi 2 septembre 2015

 

Je poursuis ma découverte du quartier de Balvanera par Once. Cette zone, appelée ainsi se concentre autour de la Plaza Miserere (ou Place Once) et de la gare Once de Septiembre (qui n'a rien à voir avec le 11 septembre aux Etats-Unis !

Ce secteur de Balvanera est particulièrement cosmopolite, avec des populations juives, arabes, coréennes et chinoises, mais aussi des Japonais, des Péruviens et des Boliviens. Tous contribuent à l'attractivité commerciale de ce quartier. Les Juifs furent les premiers à s'installer à Once afin d'y commercer. On peut avoir un aperçu de ce qu'était cette zone à cette époque en regardant le film « El Abrazo partido », du cinéaste argentin Daniel Burman. C'est à Once que les Portègnes avertis se rendent dans l'espoir d'y trouver les articles qu'ils recherchent à bon prix. Tout y est moins cher et on trouve beaucoup de choses. Ce quartier également bohème accueille également un grand nombre d'artistes qui s'y trouvent bien, tout simplement.

 

Je me rends à la Plaza Miserere en passant par l'Avenue Rivadavia (ci-dessus). Cette place est délimitée par trois autres rues : Pueyrredon, Ecuador et Bartolomé Mitre, et reste l'une des plus importantes places de la capitale argentine. Son nom provient d'un vieil habitant, Antonio Gonzalez Varela, aussi surnommé Miserere pour sa bonhomie et sa miséricorde. A cette endroit se dressait jadis une quinta (propriété argentine), la quinta de Miserere. L'endroit prit plus tard le nom de Maraderos de Miserere (vers 1814), puis Hueco de los Corrales (en 1817), avant de devenir le marché de l'Ouest (Mercado del Oeste) en 1850, puis Marché Once de Septiembre, jusqu'en 1882. Le marché sera bientôt rebaptisé Plaza Once de Septiembre, puis Plaza Miserere (en 1947). Cette place fut le témoin de plusieurs évènements historiques, comme par exemple des combats entre envahisseurs britanniques et l'armée locale du Commandante Liniers drant la période 1806-1807. Ce Français dénommé Jacques de Liniers était alors Général et Vice-Roi de la Plata, et pour différentes raisons, au service de la couronne espagnole. Il deviendra l'un des symboles de l'histoire argentine à la suite de cette glorieuse bataille qui opposera l'Angleterre à l'alliance franco-espagnole (conclue en 1804). L'évènement est connu sous le nom « d'invasions anglaises ». En juin 1806, Sir Home Popham, à la tête d'une escadre de 1600 hommes débarque à Quilmes puis attaque Buenos Aires. Surpris, le vice-roi Sobremonte part pour Cordoba en prétextant qu'il s'en va lever des troupes pour contrer l'ennemi. Les notables portègnes accueillent quant à eux l'envahisseur et entérinent le changement politique, mais une poignée de résistants, les vecinos, organisent la contre-attaque. Ils obtiennent le renfort de la garnison de Montevideo ainsi que le soutien d'une partie de la population de Buenos Aires, ce qui permettra à Jacques de Liniers, officier d'origine française, de livrer la bataille décisive du 12 juillet (avant la reconquête totale de Buenos Aires en août!). Le petit peuple reproche à Sobremonte de s'être enfui et Jacques de Liniers est nommé commandant le 14 août 1806. Tous les habitants âgés de 16 à 50 ans sont alors enrôlés dans les corps de milice et une armée de 8000 hommes est ainsi constituée. Dans le même temps, l'Angleterre envoie une seconde, puis une troisième expédition à Montevidéo (en 1807) avec 70 navires de marchandises. Lors de l'attaque de Buenos Aires qui a lieu le 5 juillet 1807, celle-ci se heurtera au plan de défense élaboré par Liniers. Vaincu, le chef de la garnison se rendra et un traité de paix sera signé dans les deux jours. Les villes de l'intérieur du pays seront largement mises à contribution afin de mener à bien l'enrôlement des milices et de trouver le financement de cette guerre. Certaines offrirent une contribution en numéraire, d'autres, en hommes, en armes, et en munitions.

En 1913, la Plaza Miserere subira une importante refonte avec la construction de la station « Plaza Miserere » de la première ligne du métro de Buenos Aires, la ligne A. La construction du métro débutera à ciel ouvert en septembre 1911, et c'est le 1er décembre 1913 que le premier tronçon fut inauguré entre Les stations Plaza de Mayo et Plaza Once (désormais Plaza Miserere).Cette station demeure une gare importante qui offre des correspondances vers d'autres destinations (avec, en 2007, l'ouverture de la station Once de la ligne H qui relie désormais la célèbre place avec le quartier de Parque Patricios). Elle fut désignée monument historique national en 1997.

La Plaza Miserere doit sa forme actuelle à des plans qui remontent à 1923. Neuf années plus tard, le mausolée de Bernardino Rivadavia y fut installé. Il est l'oeuvre du sculpteur Rogelio Yrurtia, l'un des plus célèbres sculpteurs argentins. Ce mausolée (en photo ci-contre) conserve les cendres de celui qui fut le premier président d'Argentine (malgré son désir de ne pas reposer dans ce pays), Bernardino Rivadavia.


 

En face de la Plaza Miserere, se trouve la estacion Once de Septiembre (gare du Onze septembre). Son appellation n'a rien à voir avec l'attentat du Onze septembre à New York, puisqu'elle fait, pour certains, référence à la date de mort du président argentin Domingo Faustino Sarmiento, le 11 septembre 1888, et pour d'autres, allusion au jour de rébellion de la province de Buenos Aires contre le gouvernement fédéral de la Confédération Argentine, le 11 septembre 1852, rébellion qui mènera cette province à la sécession jusqu'en 1862. Bref, cet importante gare portègne offre de nos jours des liaisons pour passagers sur des trains longue distance mais aussi des liaisons locales avec la banlieue. La société d'état Ferrobaires est l'opératrice de quatre lignes importantes desservant l'ouest de la province (Pehuajo, Bragado,...). La compagnie Trenes de Buenos Aires (TBA), elle, assure les liaisons vers la banlieue. Cette gare Once est enfin le terminus de la ligne Sarmiento. Celle-ci transporte les passagers de la capitale vers la plus grande partie de la banlieue ouest, et a pour gare principale la gare Estacion Once de Septiembre. Cette ligne ne compte pas moins de ...22 passages à niveau gênants pour la circulation de Buenos Aires, 38 stations, sur une longueur de 171 kilomètres.


 

Au 3070 de la rue Bartolomé Mitre, je m'arrête un instant devant l'ancienne discothèque Republica Cromanon qui fut, jusqu'en 2004, très fréquentée par les jeunes de Buenos Aires. Pourtant cette nuit du 30 décembre de cette même année, un incendie tragique se déclara alors que la boite de nuit était pleine à craquer, laissant derrière lui 194 morts et plus de 700 blessés. Et cet événement terrible de provoquer une crise sociale et politique à Buenos Aires faisant prendre conscience du laxisme en matière de sécurité dans ce genre d'établissement, et d'entrainer la destitution d' Anibal Ibarra, le chef du gouvernement d'alors. Je découvre sur place un émouvant mémorial avec les photos des nombreuses victimes de cet incendie. Le soir du drame, un public de 3000 personnes (alors que l'endroit ne pouvait en accueillir que mille) assistait à un concert du groupe Callejeros, et des feux de bengale auraient été tirés provoquant un embrasement général. Le propriétaire (et homme d'affaires) de la discothèque sera condamné à vingt ans de prison en 2009, peine réduite de moitié trois ans plus tard. L'homme décèdera de maladie fin 2014. Depuis, les discothèques argentines sont soumises à des normes de sécurité bien plus sévères, et les visiteurs peuvent se rendre à la Place de la mémoire aux victimes de Cromanon, située face au lieu de la tragédie et inaugurée en 2005. Outre un monument du souvenir, cet endroit offre aussi quelques peintures témoignant de la souffrance collective provoquée par cet accident.


 

Buenos Aires est un haut-lieu de l'architecture et le quartier de Balvanera-Once n'est pas en reste. La Casa de los Pavos Reales (la maison des Paons) située au 3216 de l'Avenue de Rivadavia est l'oeuvre de l'architecte italien Virginio Colombo. Cet artiste avant-gardiste de l'Art nouveau s'illustra à cinquante reprises dans la capitale argentine. Nombreuses sont les rues de Buenos Aires qui ont accueilli ou accueillent toujours certaines de ses œuvres : Casa Grimaldi dans l'Avenue Corrientes, ou la Casa Anda dans l'Avenue Entre Rios, la Casa Garbesi dans l'Avenue Rivadavia et la Villa Caru (dans la même avenue) démolies depuis. Le style de Virginio Colombo balançait entre modernisme et éclectisme, avec éléments architecturaux médiévaux, et Art nouveau (qui permit à l'architecte de personnaliser ses œuvres). La maison des Paons, elle, fut inaugurée en 1912. Elle était à l'époque la construction la plus haute du quartier, et doit son nom aux paons discrètement sculptés qui soutiennent ses balcons. Certains des éléments architecturaux de la façade furent identifiés comme des symboles de la maçonnerie à laquelle l'auteur aurait à priori appartenu. Les paons restent toutefois l'élément décoratif dominant de cet ensemble qui offre aussi de voir des peintures murales reproduisant des scènes de vie de la campagne italienne, et des mosaïques colorées. Notons que cette construction fut réalisée par notre homme alors que celui-ci n'avait que ...27 ans !

Autre exemple d'Art nouveau dans la rue Peron, au numéro 2630, avec la Torre Saint. Ce très bel immeuble, bâti en 1928, est habillé par deux tours, l'une de couleur verte et l'autre de couleur blanche, toutes deux ornées de subtils motifs inspirés de l'architecture de l'Egypte ancienne.

Au Passage Colombo (au 2451 de l'Avenue Rivadavia), le temps semble s'être arrêté. Cet endroit, long d'une trentaine de mètres tourne en angle droit et donne sur l'Avenue Azcuénaga. Il a la particularité d'offrir une petite tour avec un toit à deux versants, couronnée d'une lance métallique.


 

Terminons ce tour d'horizon de ce quartier Balvanera-Once avec la légende du Géant. On raconte en effet qu'un personnage de trois mètres environ errait jadis dans les rues de Once, afin de veiller sur ses habitants. Ce brave géant aurait ainsi sauvé certains d'entre eux à plusieurs reprises, les mettant à l'abri d'accidents de voitures ou de malfaiteurs. Et notre personnage d'être depuis devenu le protecteur bienfaisant de cette zone, personnage qui ne serait autre, selon certains habitants, que le Golem en personne, c'est à dire un être artificiel créé au XVI è siècle par un rabbin de Prague surnommé Judah Loew Ben Bezabel. Ce Bezabel aurait en effet créé treize humanoïdes avec de l'argile et l'un d'entre eux se serait rendu à Buenos Aires, amené par un rabbin, lors du flux d'immigration juive. L'histoire diffère ensuite : certains avancent qu'avant de mourir, le rabbin en question aurait enfermé le Géant dans une chambre clôturée située dans un immeuble contigu à l'hôpital du quartier de Caballito, tandis que d'autres soutiennent que le Géant se serait caché dans le Passage Colombo.

 

INFOS PRATIQUES :










Retour aux reportages







Qui Suis Je - Reportages - Médiathèque - Calendrier - Pays - La lettre - Contact
Site réalisé par Kevin LABECOT
Disclaimer - Version mobile