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Musée archéologique d'Héraklion
(Héraklion, Ile de la Crète, Grèce)
Heure locale







Dimanche 1er novembre 2015

 

C'est hier, samedi, que j'ai embarqué pour la Crète. Je n'avais jamais encore mis les pieds en Grèce et ai trouvé que l'époque était propice à la découverte de ce pays car il y a bien moins de touristes à cette époque de l'année et la chaleur y est plus supportable. Je ferai une halte à Athènes afin de changer d'appareil et embarquer sur la compagnie grecque Aegean Airlines. Sur place, je compte une majorité de passagers allemands. L'Allemagne d'Angela Merkel a t-elle racheté cette Grèce aux abois ? On le penserait presque. De toute façon, je ne pratique ni l’allemand, ni le grec, et mes premiers pas à Héraklion nécessiteront quelques minutes d'adaptation. J'embarque bientôt à bord de l’Airbus A320 qui est presque complet. La durée du vol entre Athènes et la Crète n'est que de cinquante minutes et seul un service de boissons est prévu avec des éléments salés, mais, je ne sais pourquoi, la deuxième partie de la cabine, où je me trouve, ne sera jamais servie, car à l'approche de turbulences légères, le personnel de cabine disparaît avec ses chariots. Bizarre ! A Héraklion, nous descendons sur le tarmac où un bus nous attend afin de nous conduire au terminal de l'aéroport. C'est là que je prendrai livraison de ma voiture de location qui va me permettre de me déplacer ici et là un mois durant. Il est 17h00 et il fait déjà presque nuit (il y a une heure de plus qu'à Paris en Grèce) et de gros nuages noirs s'amoncellent au-dessus de nos têtes. Il ne pleuvra finalement pas, et c'est au sec que je pourrai atteindre mon hôtel situé à quelques kilomètres de là.

Je consacre ce dimanche à ma visite au musée archéologique d'Héraklion qui est l'un des principaux musées de la Grèce. Il est même parfois considéré comme le deuxième musée du pays. Situé aux portes de la petite ville, celui-ci dépend du directorat général des antiquités au ministère de la culture grec. Il rassemble une importante collection d'objets découverts sur les sites minoens de la Crète. Mais quels sont donc ces sites et que signifie cette culture minoenne ? Il faut savoir que la Crète fut le berceau de la civilisation minoenne, une société brillante et raffinée, comme en témoignent les vestiges que je découvrirai lors de ma visite. C'est une catastrophe naturelle qui mettra un terme à cette civilisation et l'île d'être plus tard colonisée par les Grecs, les Doriens, les Romains, les Byzantins, les Arabes, les Vénitiens, les Turcs et...les Allemands. L'identité de l'île résulte donc d'un brassage de cultures diverses mêlées à des origines minoennes.

 

Le musée archéologique fut fondé en 1883 puis installé dans un bâtiment antisismique bâti en 1937 : c'est un certain Joseph Chatzidakis, qui dirigeait alors l'association des amis de l'Education, qui mettra sur pied, en 1883, la première exposition d'antiquités à Héraklion, avec la bénédiction des autorités ottomanes de l'époque. Cette exposition sera installée dans deux salles d'un bâtiment situé dans la cour de la cathédrale Aghios Minas. L'évènement entraina par la suite un afflux de dons privés, d'achats et de résultats de fouilles entreprises dans l'île. Lorsque la Crète devint autonome, les nouvelles autorités décidèrent de créer un musée plus grand. Et la première collection d'être transférée dans une caserne de la ville et confiée à deux conservateurs : Joseph Chatzidakis et Stephanos Xanthoudidis. Au début du XX è siècle, un édifice spécifique fut érigé sur l'emplacement d'un monastère franciscain détruit par un tremblement de terre en 1856. On construisit une première salle entre 1904 et 1907, puis une seconde ouvrit ses porte en 1908, puis une autre en 1912 . A partir de 1937, fut construit un autre bâtiment, plus récent. Mais la seconde guerre mondiale survint et le conservateur de l'époque, Nikolaos Platon dut organiser la protection des œuvres. Il supervisera également la réouverture du nouveau musée en 1952 ainsi que la présentation chronologique des collections. Ces dernières prirent encore plus d'importance en 1962, grâce à un don du collectionneur privé crétois Stylianos Giamalakis. C'est au premier étage que sera exposée cette nouvelle collection. 1964 vit l'ajout d'une aile supplémentaire au bâtiment principal tandis que de nouvelles acquisitions venaient enrichir les collections déjà existantes, comme par exemple, celles du collectionneur Nikos Metaxas, en 2000.

 

Le musée actuel fut érigé d'après les plans innovants de l'architecte grec Patroklos Karantinos. En effet, la région étant sujette aux séismes, il fut décidé, dès l'origine, de bâtir une construction antisismique tout en prévoyant dès le départ les futures extensions du musée. Cette réalisation reste un bel exemple d'architecture moderne qui fut d'ailleurs récompensée par le Bauhaus (courant artistique s'intéressant entre autres à l'architecture) et qui répond aux besoins d'un musée, à savoir un éclairage particulier, et un plan de circulation facilitée pour un grand nombre de personnes. Enfin, les matériaux employés lors de la construction rappellent les palais minoens. Une première rénovation du site eut lieu en 1987, permettant d'améliorer les circuits électriques et d'installer la climatisation et le système de protection incendie. A cette occasion, on revit aussi l'éclairage en remplaçant les verrières d'origine par un éclairage artificiel . Une seconde restauration débuta en 2002, d'après les plans de l'architecte grec Alexandros Tombazis, et s'attaqua aux mêmes chantiers qu'en 1987, mais une nouvelle aile (destinée à accueillir les réserves) fut construite et l'on mit aussi en valeur les ruines de l'ancien monastère franciscain. Aujourd'hui le musée archéologique a heureusement rouvert après avoir fermé ses portes jusqu'en 2009, suite à des infiltrations d'eau. Il abrite plusieurs salles et offre de voir des œuvres diverses, depuis la Préhistoire et touchant bien sûr à l'histoire de la Crète sur une période de 5500 ans, allant du Néolithique à l'époque romaine, même si la plus riche collection concerne les objets minoens venus des palais de Knossos, Phaistos, Malia, Zakros, ou Aghia Triada. L'exposition se tient sur deux niveaux mais je ne pourrai malheureusement pas en voir l'intégralité puisqu'à compter du 1er novembre (pour la saison hivernale), les salles situées au premier étage ne sont plus accessibles, à l'exception des fresques minoennes.


 

Je pénètre dans la première salle qui est consacrée aux premières communautés et à la Crète préhistorique : Faute de témoignages écrits, la chronologie des périodes anciennes de l'île est essentiellement fondée sur le style des poteries égéennes et proche-orientales. On sait que la Crète a été habitée dès le Paléolithique. La Méditerranée se trouvait alors cent mètre en-dessous de son niveau actuel et il aurait été assez aisé d'atteindre l'île depuis le Péloponnèse. La seconde salle aborde la construction des premières villes et des premiers palais. Des vitrines exposent des objets retrouvés dans des cimetières de jadis mais aussi des symboles de l'autorité d'alors comme par exemple ces sabres (photo ci-dessus) datant de 1800-1700 avant J.C , et retrouvés à Malia, ancienne ville qui était autrefois située sur la côte nord de l'île.

La troisième salle aborde l'histoire des palais de Knossos et de Phaistos. On peut y admirer des poteries de Kamarès, comme des tasses colorées. La période protopalatiale de la civilisation minoenne correspond à l'apogée de ce style. Le nom de Kamarès provient de la grotte située sur le Mont Ida, où l'on découvrit pour la première fois des vases de ce style. On imagine que ces vases contenaient autrefois des liquides et de la nourriture, autant d'offrandes pour la divinité de cette grotte. Le style de Kamarès apparaît comme étant l'un des styles les plus décoratifs de l'histoire mondiale de la peinture sur céramique. L'apogée de la civilisation minoenne est décrit dans la salle 4. C'est là que j'apercevrai la maquette d'une maison d'époque (ci-dessous). Cette civilisation est décrite comme autonome et remonte à une période allant de 2700 à 1200 ans avant J.C. Elle tient son nom du légendaire roi Minos et est caractérisée par une activité culturelle et artistique exceptionnelle. A cette époque, on était déjà capable de pratiquer l'écriture. De plus, cette civilisation était extrêmement organisée grâce à un système politico-religieux élaboré, et l'instauration d'échanges commerciaux avec les pays voisins. Il existe en fait trois périodes distinctes : le minoen ancien (âge du bronze ancien), le minoen moyen (âge du bronze moyen) et le minoen récent (néopalatial). L'âge d'or minoen correspond aux années 1600-1100 avant J.C, date à laquelle apparaît l'écriture dite linéaire A, toujours pas déchiffrée à l'heure qu'il est. A cette époque correspondent les magnifiques fresques (deuxième photo) du Palais de Knossos, visible au premier étage du musée, mais également des statuettes à vocation religieuse, des bijoux raffinés, des sarcophages et des céramiques. On pense que cette civilisation fut probablement organisée autour d'un culte des déesses. Je pourrai d'ailleurs en voir certaines sur place comme la déesse aux serpents (troisième photo). La prospérité économique favorisera l'accroissement de la population minoenne, permettant ainsi à Knossos de compter, vers 1450 avant J.C, près de 80 000 âmes selon Sir Arthur Evans, riche aristocrate britannique passionné de fouilles (mais plus probablement 15 000 selon les estimations actuelles). Que s'est-il passé à partir de cette date ? On observa un brusque effondrement de la civilisation minoenne, avec la destruction par le feu de tous les palais de l'île (à l'exception du Palais de Knossos). Plusieurs hypothèses existent mais on pense qu'un cataclysme lié à une brutale éruption volcanique ravageant à l’époque l'île de Santorin aurait pu causé la perte des Minoens, avec effondrement soudain de l'économie dû à la disparition de la flotte commerciale. Privés de ressources, les Crétois n'auraient plus été en mesure d'importer les céréales nécessaires à leur alimentation, devenant ainsi une proie facile pour les envahisseurs venus de Grèce. C'est en effet à cette époque qu'arriveront les Mycéniens (et leur écriture linéaire B, qui, elle, fut déchiffrée au cours des années 1950)

 

Le reste de ma visite m'offre de voir plusieurs phases de la vie des Crétois d'origine : leur vie privée et publique est abordée dans la salle 6. On nous parle de leur régime alimentaire, de l'artisanat locale et même de viticulture. On sait que les libations donnaient lieu à des banquets et que la table jouait un rôle important lors de ces réunions. La religion minoenne est aussi décrite à travers une foule d'objets ayant garni les anciens sanctuaires. Il existait déjà des processions et même le cycle de l'Epiphanie (salle 8). Lors de la période protopalatiale (2000-1600 avant J.C), on sait que l'organisation sociale de la civilisation minoenne était articulée autour des palais, sortes de cités dépourvues de murs défensifs où se concentraient les activités politique, commerciale, artisanale et religieuse. Les constructions, très avancées pour l'époque, comportaient un système de tout-à-l'égout, des habitations à étage, des bains et un système hydraulique complexe. De plus, il existait déjà une forme d'écriture primitive constituée d'idéogrammes proches des hiéroglyphes, écriture qui facilitera l'administration de la société. Une route entre Phaestos et Knossos avait aussi été créée, et c'est à cette époque que les Crétois développèrent une flotte marchande pour commercer avec leurs voisins. Et puis, vers 1700 avant J.C, un cataclysme frappa la Crète et détruisit ses principaux centre civilisationnels. Les palais primitifs disparurent pour laisser place, plus tard, à des palais encore plus beaux comme sur le site de Zakros. Des ensembles urbains moins importants furent rebâtis, puis reliés aux ports de l'île. Et les Crétois de commercer avec l'Egypte et le Moyen-Orient, exportant l'étain indispensable à la fabrication des armes et des outils en bronze. En échange, ils importaient de l'or, des céréales et de l'encens. C'est à cette époque qu'ils coloniseront aussi plusieurs îles de la Méditerranée comme Rhodes, Kea, Cythère, Milos ou Santorin.


 

Les fresques murales (exposées au premier étage du musée, en photo ci-dessus) ont une longue histoire en Crète. Les murs des habitations étaient recouverts de fresques peintes en rouge ou en brun, à l'époque du Minoen moyen. Dans les palais de Knossos et de Phaistos, il apparaît que les murs étaient décorés de motifs ornementaux sur plâtre, mais il faudra attendre la construction des seconds palais (après le cataclysme) pour que ces fresques murales se banalisent. La base de ces compositions était un enduit à la chaux. On utilisait alors surtout le noir, le blanc, le rouge, le jaune, le bleu et le vert. IL arrivait que ces fresques soient légèrement en relief dans le but de créer un effet tridimensionnel (deuxième photo ci-dessus). A noter que les fresques retrouvées proviennent surtout de Knossos et de Théra. On en trouve aussi certaines d'Haghia, de Triada,de Tylissos ou d'Amnissos.


 

Les deux dernières salles (26 et 27), situées au rez-de-chaussée du musée exposent des sculptures des périodes archaïque (7è et 6è siècles avant J.C) et classique (5è et 4è siècles avant J.C). A l'époque archaïque, la sculpture servait principalement à orner les sanctuaires ou à commémorer les défunts. La sculpture de cette époque se développera surtout dans deux cités alors sous le contrôle de tyrans : le sanctuaire d'Héra à Samos, où régnait le tyran Polycrate, et à Athènes où l'Acropole prendra une place importante durant le VI è siècle avant J.C. Nous l'avons vu, après l'anéantissement de la civilisation minoenne (vers 1450 avant J.C) , la Crète devra faire face à l'envahisseur grec et devra désormais vivre selon l'organisation sociale dorienne intégrée à la culture grecque classique. Au début du V è siècle avant J.C,les Grecs parviendront à repousser les troupes de la grande Perse lors des guerres médiques. La bataille de Salamine (en 480 avant J .C) assurera l'hégémonie de la Grèce en mer Egée et permettra au pays de connaître son âge d'or. C'est l'époque des penseurs (Parménide, Empédocle, Leuccipe) et de la démocratie (qui est peu à peu mise en place à Athènes). Toutes ces sculptures exposées dans ces salles sont les témoins de cette époque.

 

INFOS PRATIQUES :

 


  • Musée archéologique d'Héraklion, Xanthoudidou 2, à Héraklion. Tél : 2810 279086/279145 et 279000. Ouvert de 8h00 à 20h00 (d'avril à octobre) et de 8h00 à 15h00 (de novembre à mars). Entrée : 6€. Gratuit le premier dimanche du mois. Prise de photos autorisée sans flash. Boutique de souvenirs et cafétéria sur place. Site internet : odysseus.culture.gr





 



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