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D'Elounda à Lato, en passant par l'île de Spinalonga et Kritsa
(Ile de la Crète, Grèce)
Heure locale


Dimanche 8 novembre 2015

 

Ma journée commence par la visite de la côte immédiate autour d'Agios Nikolaos : à quelques kilomètres de là, je découvre Elounda et son petit port de pêche (ci-dessous). Je peste contre mon GPS qui m'indique Elounda Village et me conduit aux portes d'un grand hôtel, genre de prison dorée pour touristes en mal d'imagination. Toute la côte environnante est ainsi bétonnée et occupée par des établissements de ce genre. Elounda ne présente d'ailleurs aucun intérêt, si ce n'est que son petit port est le point de ralliement de celles et ceux qui souhaitent se rendre sur l'île de Spinalonga, toute proche. Je poursuis ma route jusqu'à Plaka, autre petit port de pêche situé à deux kilomètres de là. De Plaka, on peut également se rendre l'été sur l'île de Spinalonga, en partant de l'embarcadère situé à côté de la Taverne Spinalonga.

Spinalonga prête ici son nom à la presqu'île désertique qui protège la côte. On l'appelle également Kolokitha. De loin, on dirait le dos d'un monstre marin émergeant de la mer. On la rejoint en passant par une chaussée qui part du port d'Elounda et traverse un isthme percé autrefois par les Français. Près du pont gardé par de vieux moulins à vent, on peut voir les restes de salines qui furent exploitées jusque dans les années 1970. Sur la droite, un chemin conduit à une petite chapelle où l'on peut admirer de jolies mosaïques byzantines. Sur place, on trouve aussi de très jolies criques. Sur l île, il faut visiter la citadelle (deuxième photo), imposante forteresse perchée sur son rocher. Déjà, dans l'Antiquité, cet îlot était utilisé comme poste avancé pour surveiller l'entrée nord de la baie. En 1579, les Vénitiens y édifièrent une forteresse qui était alors destinée à protéger l'armada qui se dissimulait dans le port d'Elounda. Dotée de 35 canons, elle résistera à de nombreux assauts jusqu'à ce que les Turcs la prennent en 1715. Entre 1903 et 1957, l'île fut occupée par une léproserie isolée de tout. Aujourd'hui, les impressionnantes murailles protègent encore le village-fantôme de la célèbre léproserie qui suscita le roman de Victoria Hislop vendu à plus de deux millions d'exemplaires, L'île des Oubliés. Ce livre a pour toile de fond la léproserie de l'île au début du XX è siècle, à une époque où l'on ignorait encore comment on attrapait la lèpre. Lorsqu'un citoyen grec était alors diagnostiqué, il était immédiatement envoyé en quarantaine sur l'île de Spinalonga. Un tunnel, surnommé La Porte de Dante, en référence à l'Enfer de Dante, isolait le malade dès son arrivée. Autant dire que la vie sur place était plus que sinistre et que seuls, la mairie, les magasins, le café, le marché et l’hôpital dont sera doté ce bout de terre, permettront aux malades d'égayer quelque peu leur séjour. La léproserie accueillera jusqu'à 400 malades, qui ne pourront quitter l'endroit qu'en 1957, date à laquelle le premier traitement contre cette redoutable maladie sera connu.


 

Après avoir avalé un bon café offert par Yanis à la Taverne Spinalonga, je reprends la route en direction de Kritsa, et passe de la mer à la montagne (ci-dessous). Je serpente sur une petite route durant une vingtaine de kilomètres, en espérant ne jamais me retrouver face à un camion car il est pratiquement impossible de se croiser à certains endroits. Le temps est splendide mais il souffle un vent fort qui me rappelle que novembre est bien là. Kritsa est un petit village de montagne dont les maisons blanches s'accrochent au contrefort du massif du Dikti (qui culmine tout de même à 2148 mètres). Pour les randonneurs, il existe une belle balade dans les gorges de Kritsa : il suffit de prendre la route de Lato, puis après un petit pont (situé dans un virage), prendre sur la gauche un petit chemin qui vous conduira vers le lit de la rivière. De là, prenez ensuite sur votre droite, et admirez les parois rocheuses tapissées de lauriers. Point de balade en montagne pour moi aujourd'hui, car ce qui m'attire ici est l'église byzantine de la Panagia Kera. Construite sous les Vénitiens, entre les XIII è et XIV è siècles, cette modeste église comprend trois petites nefs voûtées entièrement recouvertes de fresques (deuxième photo ci-dessous). Ces peintures très anciennes sont magnifiquement conservées et illustrent, en quatorze panneaux couvrant les murs et les voûtes, les Evangiles apocryphes (fait rare dans l'histoire de l'art). La vie de la Vierge occupe la nef centrale, tandis que Sainte Anne est au sud, et Saint Antoine au nord. Rappelons que ces évangiles apocryphes sont des récits chrétiens antiques sur Jésus, et différents des évangiles de Matthieu, Marc, Luc et Jean. On les surnomma apocryphes (qui signifie secret, caché) car l'Eglise s'en méfia, et ces évangiles eurent une diffusion bien moindre que les quatre autres. Plusieurs d'entre eux, qui n'ont pas été conservés, ne sont connus que par des citations très fragmentaires des Pères de l'Eglise. Rédigés dans le courant du II ème siècle, deux méritent cependant une mention spéciale:l'évangile de Pierre et celui de Thomas, décrivant respectivement la résurrection de Jésus en train de se produire, et 114 paroles de Jésus dont plusieurs se retrouvent sous une forme voisine dans les Evangiles canoniques.

A l'église de la Panagia Kera, on remarquera que le traitement des personnages n'st pas uniforme, car plusieurs artistes du village de Kritsa se relayèrent pour peindre le décor. Parmi les plus anciennes peintures, on notera les huit grands panneaux de la voûte ouest qui se trouvent dans la nef centrale. On y reconnaitra le massacre des Innocents, Rachel pleurant ses enfants, le sauvetage de Saint Jean-Baptiste par Elisabeth ou encore la Nativité ou le Paradis, qui dévoile une Vierge au visage empreint d'une grande noblesse. Sur le pilier à gauche de l'entrée, est peint Saint François, rare saint catholique à être admis dans une église orthodoxe.


 

Insatiable, je pars maintenant en direction de Lato, ancienne cité dorienne située sur un site superbe. Lato fait partie de ces nombreux sites archéologiques de la région d'Agios Nikolaos, et est considéré comme la ville la mieux préservée de l'époque classique-hellénisque en Crète, et l'une des villes anciennes les plus complètement conservées de Grèce. Ses vestiges de construction appartiennent au IV è siècle et au III ème siècle avant J.C. Lato était une ville fortifiée, dont les maisons étaient bâties sur des terrasses. Elle possédait une agora, un prytanée (l'équivalent de notre Hôtel de ville actuel), des temples et un théâtre creusé dans la roche. J'avoue me perdre un peu au milieu de tous ces blocs de pierre. Certes, je reconnais bien les énormes blocs savamment disposés de l'une des trois entrées successives qui constituaient l'accès à l'ancienne cité. Un passage dallé serpente bien entre les restes des hauts murs mais je reconnaitrai plus facilement les marches qui mènent à l'agora. Sur la droite (c'est à dire côté sud) s'alignaient les magasins, tandis qu'une puissante muraille, renforcée par des tours, courait sur le côté gauche. L'agora, elle, est fermée au nord par les gradins du prytanée. L'espace central est quant à lui occupé par une vaste citerne et un petit temple. La beauté de l'endroit est saisissante et je comprends mieux l'intérêt stratégique de cette place forte qui dominait les environs (troisième photo). Je distingue au loin la baie de Mirabello. Cette cité fut détruite aux alentours de 200 avant J.C mais son port, Lato Etera, situé près d'Agios Nikolaos, fut utilisé durant le règne romain. On pense que cette ville fut nommée d'après la déesse Léto (Lato est la forme dorienne du nom) et fut mentionnée dans les tablettes en linéaire B, sous le nom de RA-TO. Lato produisit sa propre monnaie, à l'effigie de la déesse Ilithyie, déesse de l'enfantement dans la mythologie grecque, et plus particulièrement décrite comme la déesse des douleurs de l'enfantement. Quant à la déesse Léto, elle était, dans la mythologie grecque, une maitresse de Zeus. Et mère d'Artémis et d'Apollon. Et à ce titre, elle encourra la colère d'Héra, laquelle la fera poursuivre par le serpent Python et n'aura de cesse de la tourmenter. On retiendra aussi que Néarque, l'amiral d'Alexandre le Grand, naitra à Lato.


 

INFOS PRATIQUES :


  • A Elounda, contrairement à ce qui est marqué sur le parking du port, on peut stationner gratuitement, y compris en période estivale.

  • On peut embarquer au départ du port d'Elounda en direction de l'île de Spinalonga

  • Taverne Spinalonga, à la sortie du village (à côté de l'église) à Plaka. Tél:28410 41804. Yanis, en est le propriétaire et c'est son fils qui conduit les touristes en bateau sur l'île, d'avril à octobre : achat du billet à la Maria Old Taverna (située presque en face de la Taverne Spinalonga), au prix de 8€ A/R. Les départs (tous les 30 minutes) ont lieu à partir de 9h00. Tél : 6977 446229. Durée de la traversée:environ 10 minutes.

  • Ile de Spinalonga : accessible par bateau, d'avril à octobre. Visite de la Citadelle, de 8h00 à 20h00. Entrée : 2€.

  • Eglise de la Panaghia Kera, en bord de route, sur la droite, à l'entrée de Kritsa, lorsque vous arrivez d'Agios Nikolaos. Garez-vous sur le parking et achetez votre ticket (3€) pour vous rendre ensuite à l'église située un peu en retrait de la route, à cinquante mètres de là. Prise de photos autorisée, sans flash. Tél : 2841 051806. Ouvert tous les jours (sauf le lundi), de 8h00 à 15h00.

  • Site archéologique de Lato, ouvert en saison, de 8h00 à 15h00. Entrée : 2€. Téléphonez tout de même avant de vous y rendre hors saison (2841 025115), par précaution.






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