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Fremantle
(Australie-Occidentale, Australie)
Heure locale


Mercredi 4 mai 2016

 

Dur de s'habituer cette fois au décalage horaire. J'ai pourtant connu pire mais cela fait deux jours que je me couche trop tôt et que je me réveille vers trois heures du matin. La journée qui suit n'en est que plus pénible. Je vous emmène aujourd'hui à Fremantle, ville de quelques 25000 âmes située à l'embouchure de la rivière Swan. Celle-ci fait partie de l'agglomération de Perth (au sud-ouest de cette ville) et fut fondée en 1829 par les colons britanniques alors conduits par le capitaine James Stirling. Les Australiens considèrent Fremantle comme l'un des centres culturels de Perth, avec, entre autres, ses anciennes geôles comme le Round House (en photo ci-dessous), ou Maison ronde, bâtie dans le quartier de West End lui-même formé par une succession de rues et de bâtiments de style colonial à la pointe sud du port. Je passe d'une rue à l'autre, admirant au passage certaines façades préservées. C'est qu'ici, on ne plaisante pas avec le patrimoine. Je ne visiterai pas la Maison ronde, qui, en réalité n'est pas ronde mais forme un plan polygonal. Ses huit cellules donnent sur une petite cour intérieure et l'ensemble, qui abritait aussi le logement des geôliers, forme le plus ancien édifice de la ville. Le bâtiment, érigé en 1830-31, sera également la première prison de Fremantle dès 1830 et la première pendaison y aura lieu quatorze années plus tard. En-dessous de la Round House a été creusé un tunnel, communément appelé tunnel des baleiniers (deuxième photo ci-dessous). Il fut en effet creusé entre 1837 et 1838 afin de relier la plage Bathers Beach au centre-ville et faciliter ainsi l'activité des baleiniers présents sur le port. Ce projet fut le premier du genre en Australie de l'Ouest et fut financé par le gouvernement. L'ouvrage, creusé dans la falaise, mesure 64 mètres de long pour 3,60 mètres de large, et donnait autrefois accès à un autre tunnel « secret » qui aboutissait au cottage de Gunner. Ce tunnel plus petit servira d'abri aux soldats lors de la Seconde guerre mondiale, mais sera fermé dans les années 1970. Les pierres récupérés suite au creusement du tunnel principal seront, elles, utilisées pour ériger la jetée où se trouvait l'unité baleinière.

 

Dans le quartier de West End, qui s'est sensiblement embourgeoisé depuis les années 1990, je passe devant l'Université Notre-Dame qui occupe plusieurs bâtiments sur place. Non loin de là, face à la tour de contrôle du port de Fremantle, je me rends au nouveau musée maritime de la ville qui abrite notamment un voilier de la coupe America, le voilier Australia II. Qui ne connait pas cette compétition nautique de voile internationale, connue par ses initiateurs comme un défi amical et perpétuel entre des clubs de voile de nations différentes ? L'établissement offre aux visiteurs d'admirer des embarcations de croisière et des embarcations d'agrément et autres types de navires. Par ailleurs, des visites sont régulièrement organisées à bord d'un sous-marin jouxtant le musée.

Je ne m'attarderai pas sur ce premier musée car je suis féru d'histoire et l'autre musée maritime de la ville, le plus ancien, abrite l'épave du Batavia, navire hollandais ayant fait naufrage au large des côtes en 1629. Le musée en question, bien plus petit que son grand frère, est réputé pour être le plus beau musée d'archéologie maritime de tout l'hémisphère sud. Celui-ci a trouvé refuge à l'intérieur de bâtiments construits dans les années 1850, et abrite des centaines d'objets repêchés sur les lieux de naufrages de plusieurs navires le long de la côte ouest de l'Australie. Plusieurs expositions permanentes y sont montrées dont une consacrée aux superstitions et aux monstres marins. Ce qui m'intéresse cette fois est bien sûr l'histoire du Batavia, ce navire hollandais affrété jadis par la Compagnie néerlandaise des Indes orientales, qui fit naufrage le 4 juin 1629. Les survivants de cette catastrophe débarquèrent sur l'archipel des Abrolhos de Houtman mais seront massacrés dans d'atroces conditions pour la plupart, par les locaux. Seul un tiers des survivants parviendra à sauver sa peau. Construit en 1628, le Batavia est un trois-mâts armé de trente canons, et est long de 56 mètres, avec une capacité de 1200 tonnes. Le 28 octobre de cette même année, le navire quitte l'île de Texel (Pays-Bas), pour partir en direction des Indes orientales avec une cargaison de pièces d'or et d'argent estimée à 250000 florins, et destinée au commerce des épices. Quelques 320 personnes ont embarqué à son bord, dont deux tiers de marins et de soldats. Jusqu'à l'escale du Cap, le Batavia sera accompagné de cinq autres bâtiments plus modestes et d'un escorteur. Depuis quelques années, les navires se rendant à Java empruntent alors une route certes indirecte mais plus rapide grâce à de puissants courants marins passant au sud de l'océan indien. Des risques existent aussi à cause de la présence de récifs de corail présents au large de l'Australie. De plus, les instruments de navigation étant encore à l'époque plus que rudimentaires, les bâtiments croisant dans cette zone n'ont pas le droit à l'erreur. A bord du Batavia, les relations entre le capitaine Jacobsz et le subrécargue Pelsaert se sont détériorées. Une mutinerie est envisagée et le Batavia est volontairement tenu à distance des autres navires par son capitaine, mais ce projet restera sans suite. Surtout, le Batavia s'échoue dans la nuit du 3 au 4 juin 1629 sur une barrière de récifs, par un fort vent arrière. A marée haute, il y a alors à cet endroit quatre mètres de profondeur en moyenne alors que le tirant d'eau du bateau est de 5,5 mètres. Le Batavia prend de la gite et tout dégagement devient impossible. Et le capitaine de faire bientôt débarquer quelques 180 personnes sur les îlots les plus proches. Entre temps, les réserves d'eau potable du navire sont rompues et certains survivants mourront de soif. On connait la suite. Le Batavia finit au fond de l'eau avec une autre cargaison, celle que les recherches effectuées en 1972-76 mettront à jour : 137 blocs de pierre, soit un poids total de 37 tonnes, seront remontés à la surface et permettront de reconstituer la façade d'un portique de pierre dont l'original se trouve actuellement au musée de Geraldton. On découvrira aussi dans des archives, que le Batavia transportait également plusieurs gravures sur bois, dont une représentait Batavia (nom signifiant Jakarta). L'exposition du musée permet d'admirer la reconstitution d'une partie de la coque du navire (ci-dessous), mais aussi de découvrir le squelette de l'un des disparus de cette catastrophe (deuxième photo)


 

Je me dirige ensuite vers le centre-ville en empruntant la Marine Terrace qui longe un joli parc situé le long de la côte. Cette avenue dessert plusieurs rues dont la Norfolk Street que je remonterai jusqu'à atteindre le Marché de Fremantle. Sur mon chemin, je m'arrête quelques instant devant l'Esplanade Hotel (ci-dessous), un bel exemple d'architecture coloniale. Cinq minutes plus tard, j'atteins la South Terrace (aussi surnommée Cappuccino Strip, à cause du nombre important de cafés et de restaurants présents sur cet axe), l'avenue sur laquelle se trouve le marché de Fremantle : c'est un concours organisé par la ville en 1897 qui décida de l'aspect de la halle de la ville achevée cinq ans plus tôt. Depuis, l'endroit fut rénové en 1975, et abrite chaque fin de semaine un grand marché (deuxième photo) constitué de plus de 170 étals proposant un vaste choix d'articles, depuis les produits frais jusqu'à la vente d'opales.


 

Un peu plus haut, en remontant Parry Street, je laisse sur ma droite le Fremantle Oval, un stade de 17500 places à l'origine utilisé pour la pratique du cricket, jusqu'à ce qu'en 1895 ne s'y déroule le premier match de football. Je me trouve alors à moins de dix minutes de l'ancienne prison de la ville (dont on peut observer la porte fortifiée sur la photo ci-dessous), qui resta en service jusqu'en 1991. Cette prison fut à une époque l'une des plus célèbres geôles de l'empire britannique. Elle abrita des bagnards, des prisonniers locaux, des prisonniers militaires, mais également des civils ennemis et des prisonniers de guerre. Elle est à ce jour devenue l'un des hauts lieux du patrimoine culturel de la cité. J'y croiserai d'ailleurs un petit groupe de touristes japonais tout droit venu d'Hiroshima. Nous passerons quelques minutes à échanger en langue japonaise et chacun retournera à ses occupations. A l'intérieur, des visites guidées sont régulièrement proposées, mais un petit musée accessible gratuitement est visible, en tournant à droite après le comptoir de vente des billets d'entrée. On y explique en détails l'origine de la prison, les conditions de vie des détenus et l'évolution de l'institution au fil des ans. Quant aux détenus, ils se livraient parfois à des tâches artistiques comme, par exemple, à l’exécution de graffitis dans leurs cellules (deuxième photo) similaires à de véritables œuvres d'art. La boutique de souvenirs de la prison vend un ouvrage consacré à cet art carcéral.


 

Pourquoi avoir appelé la ville du nom de Fremantle ? La cité doit son nom à celui du capitaine Charles Fremantle, un officier de marine anglais qui établit ici même un camp le 2 mai 1829. La terre sur laquelle fut bâtie la ville de Fremantle appartient traditionnellement au peuple aborigène Whadjuk Noongar. L'endroit avait été repéré par les Britanniques dès 1827, comme pouvant faire l'objet d'une création de camp, lorsque le capitaine James Stirling explora la côte à bord du navire HMS Success. Sans doute à cause de la présence ici et là de Français, le gouvernement britannique ne tarda pas à donner l'ordre d'établir sur place un premier campement deux ans plus tard. Charles Fremantle sera ainsi le premier à hisser le drapeau britannique au sommet de la falaise Arthur Head. Depuis, on célèbre cet acte chaque année, le premier lundi du mois de juin, histoire de rappeler à ceux qui l'ignoreraient encore que les Anglais prirent pied durablement sur cette terre. Quelques mois plus tard, après avoir remonté la rivière Swan, un autre camp britannique naissait à Perth, le 12 août 1829.

Avant d'achever ma promenade, je fais une halte à l'église évangéliste anglicane St John, histoire d'admirer un vitrail unique (ci-dessous), le Pioneer Window (fenêtre du pionnier), retraçant l'épopée de fermiers anglais, depuis leur départ d'Angleterre et jusqu'à leur installation sur la côte ouest australienne. Achevée en 1882, cette jolie église offre aussi des autels taillés dans du bois de jarrah et un curieux petit clocher. Le vitrail en question retrace l'histoire d'une famille d'agriculteurs sur sept générations, et est visible sur la gauche en entrant dans l'église. A ne pas manquer !

 

INFOS PRATIQUES :


  • Round House (Maison ronde), 10 Arthur Head Road, au sommet de la falaise Arthur Head. On y accède par des escaliers situés à l'entrée du tunnel des baleiniers. Tél : 08 9336 6897. Ouvert tous les jours de 10h30 à 13h30.

  • Nouveau musée maritime, Victoria Quay, à Fremantle. Tél : 1300 134 081. Ouvert tous les jours de 9h30 à 17h00. Entrée : 15 AUD. Site internet (en anglais) : http://museum.wa.gov.au

    , puis Western Australian Maritime Museum.

  • Ancien Musée maritime, Shipwreck Galleries, Cliff Street, à Fremantle. Tél : 1300 134 081. Ouvert tous les jours de 9h30 à 17h00. Entrée gratuite, mais les dons sont les bienvenus. Site internet : http://museum.wa.gov.au, puis Western Australian Museum, Shipwreck Galleries.

  • Fremantle Market, à l'angle de la rue Parry Street et de la South Terrace. La halle est ouverte au public les vendredi (de 9h00 à 20h00), samedi et dimanche (de 9h00 à 18h00). Site internet : http://fremantlemarkets.com.au

  • Eglise anglicane évangéliste St John, à l'angle d'Adelaïde Street et de Queen Street. Tél : 08 9335 2213.

  • On peut aisément se déplacer en bus à Fremantle : j'emprunterai ainsi le bus pour me rendre de Cockburn Road/Magazine Court (près du camping Woodman Point) jusqu'à Fremantle Station. Prix du billet aller : 4,50AUD à l'aller (billet utilisable deux heures sur tout le réseau). Durée du trajet, une vingtaine de minutes, et pas de problème de stationnement pour mon camping-car. Au retour, billet à 2,10AUD. Informé, le chauffeur m'a arrêté au bon arrêt.

  • Prison de Fremantle, The Terrace, à Fremantle. Tél : 08 9336 9200. Ouvert tous les jours de 9h00 à 17h00. Entrée pour la visite guidée de la prison : 20AUD. Boutique, café et musée librement accessibles sur place. Site internet : http://www.fremantleprison.com.au

  • Achetez votre vin chez Fremantle Bottle Shop, 1/152 High Street. Tél : 08 9335 8090. Le caviste vous conseillera utilement sur le choix de vins.

  • N'oubliez pas de visualiser les autres photos de cette visite, en cliquant sur l’icône photos disponibles en haut à droit de cet article.









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