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Treinta y Tres
(Département de Treinta y Tres, Uruguay)
Heure locale

Jeudi 4 mai 2017

 

Je quitte Minas tôt ce matin, en direction de Treinta y Tres, qui se trouve dans le département du même nom. Dès le lever du soleil, c'est à dire vers 6h30, je charge mes bagages dans mon « tapecul » et rejoins la Ruta 8. 150 kilomètres me séparent de ma destination où je compte m'arrêter deux heures pour visiter l'endroit, car j'ai prévu de me poser ce soir plus au nord, à Melo.

Je ne fais que survoler l'Uruguay lors de ce premier séjour en me concentrant sur les principales villes de chacun des 19 départements. Ainsi Treinta y Tres est-elle la capitale du département Treinta y Tres, deuxième département le moins peuplé du pays d'après mes informations, avec seulement 5 habitants par km2. Il est vrai que je ne rencontrerai pas beaucoup de monde sur la route mis à part des camions. Par contre, plus je me rapprocherai de Treinta y Tres et plus j'observerai des hommes à cheval, l'animal semblant ici servir de moyen de locomotion. La chaussée est très convenable jusqu'à Treinta y Tres et c'est tant mieux car, après le temps clair de Minas, un épais brouillard va bientôt envelopper la campagne, un brouillard à couper au couteau. Cela n'empêchera pas certains automobilistes de me doubler sur une ligne continue, alors que je respecte scrupuleusement la vitesse fixée à 90 km/heure sur les routes nationales. Enfin, route nationale, c'est vite dit, car à 50 km de Treinta y Tres, un péage m'attendra et je devrai m'acquitter comme l'autre jour de 85 pesos uruguayens. Une fois de plus, j'étais apparemment sur une autoroute mais je ne le savais pas puisque rien n'était annoncé sur le parcours. L'employée du péage me laisse alors entendre que ce droit de passage dépend du département. Soit.


 

L'homme était déjà présent ici il y a 2000 ans, comme en attestent les traces de tribus indiennes dans le département. Fondé en 1853, ce dernier est le fruit de la fusion de territoires ayant appartenu aux anciens départements de Cerro Largo et de Minas. Et si ce département est appelé ainsi, c'est en hommage aux 33 Orientaux qui luttèrent en faveur de l'indépendance de l'ancienne province orientale (dont l'actuel Uruguay faisait déjà partie). 33 est le nom de la ville où je me rends aujourd'hui mais symbolise aussi le nombre d'hommes ayant jadis combattu pour leur liberté, sous la coupe de Juan Antonio Lavalleja et Manuel Oribe en 1825, n'hésitant pas à fomenter une insurrection en Argentine afin de récupérer l'indépendance de la fameuse province orientale (alors formé de l'actuel Uruguay et d'une partie de l'Etat brésilien Rio Grande del Sur) sous domination brésilienne.

Nom de code de l'expédition, Croisade libératrice, pour ces 33 hommes dont certaines controverses prétendent qu'ils auraient été 34, ou même 59. 16 listes furent en effet avancées à une certaine époque, comprenant souvent différents noms. Tous ne furent pas orientaux puisque l'on compta dans le groupe quatre Argentins, quatre Paraguayens, eu même un ressortissant du Mozambique.

Quoiqu'il en soit, cette polémique ne retire rien aux charmes du département Treinta y Tres, constitué d'une part de plaines et d'autre part de lagunes où l'on cultive le riz. Sa rivière principale est l'Olimar Grande, fruit de l'union du petit Olimar et de la rivière Yerbal Grande (ci-dessous). Autre point d'intérêt du département : le ravin des corbeaux ou Quebrada de los Cuervos, un site touristique hors du commun avec ses chutes d'eau, ses étranges formations rocheuses et sa végétation unique, qui rassemble dans le même lieu 70% des espèces végétales uruguayennes, mais aussi plus de cent espèces d'oiseaux, vingt de mammifères, dix-huit d'amphibies et vingt de poissons, toutes différentes. La route d'accès se trouve sur la Ruta 8 entre Treinta y Tres et Melo, mais il faut conduire encore une vingtaine de kilomètres pour atteindre le site. Il est bien sûr possible de loger sur place et simultanément jusqu'à 36 personnes à l'intérieur d'un gite comprenant tout le confort de base. Quant aux randonneurs, ils seront comblés en effectuant le circuit prévu sur place, qui comporte neuf étapes (marcheurs mal chaussés s'abstenir!).

Du point de vue économique, le département de Treinta y Tres vit avant tout de l'élevage, de l'agriculture avec en particulier les cultures de maïs, de riz et d'autres céréales. La ville de Treinta y Tres est sans conteste la principale entité urbaine du département.

 

Comme je peux m'en apercevoir jour après jour, si mon GPS TomTom couvre les routes, il ne couvre pas (ou si peu, excepté Montvideo) les agglomérations. Il me faut donc demander mon chemin de façon régulière aux passants heureusement fort sympathiques. Se garer à Treinta y Tres ne me posera aucun problème et en plus, c'est gratuit. Le centre-ville concentre la majeure partie des quelques attractions et peut facilement être parcouru à pied. Je conseille d'emprunter l'avenue Manuel Melendez jusqu'à croiser la rue Manuel Oribe puis de se garer dans le quartier. A un pâté de maison se trouve la Place du 19 avril, centre névralgique de la ville et plus ancienne place, qui débouche sur les principales rues Juan Antonio Lavalleja, Manuel Lavalleja, Manuel Oribe et Pablo Zufriategui. Un monument en l'honneur des 33 Orientaux se dresse ici (ci-dessous). Le monument a connu bien des modifications depuis son inauguration en 1887 comme par exemple le transfert depuis d'une statue de Juan Antonio Lavalleja dans un jardin du lycée départemental.


 

J'emprunte ensuite la rue Pablo Zufriategui pour découvrir le Musée Agustin Araujo, du moins le pensais-je. Or, ce musée n'ouvre qu'à midi trente et j'aurai quitté la ville à cette heure-là. C'est dommage car ce musée des Beaux-Arts, à la fois municipal et départemental, présente pas moins de 1200 œuvres d'art nationales et internationales. On peut ainsi admirer 52 œuvres de Diogenes Hequet, 82 de Goffredo Herneni Sommavilla, 700 peintures du peintre allemand Carla Witte ainsi que huit sculptures. D'autres œuvres, anonymes celles-là, sont exposées sur place. Aramis Mancebo Rojas (ci-dessous en photo) fut le premier à donner tout son temps pour promouvoir le musée municipal depuis sa création en 1943. A l'origine des ateliers de Treinta y Tres, notre homme se verra confier la direction du musée, puis créera le cercle des amis du musée quelques temps plus tard. En 1961, l'actuel musée Agustin Araujo s'installe dans le bâtiment actuel de la maison de la culture. Et Eduardo Araujo (deuxième photo), fils de Agustin Araujo, de faire don au musée d'une importante collection d'oeuvres picturales et de sculptures. A noter que depuis 1990, ce musée organise des exposition itinérantes d'Arts plastiques.


 

La porte à côté de celle du musée, c'est à dire l'édifice voisin, conduit au théâtre de la ville. On me présente à Fernando qui tient la place et me fait très gentiment visiter son domaine. J'apprends ainsi que ce théâtre fut construit en 1929, dans le style Art-Déco (ci-dessous), et accueille encore aujourd'hui jusqu'à mille personnes simultanément (dont 600 dans la salle de théâtre) pour assister aux spectacles offerts (jusqu'à quatre par semaine). Des projections de films sont également organisées avec les appareils de projection de l'époque qui datent de 1948 mais fonctionnent encore parfaitement. Fernando m'emmène dans les coulisses, là où sont dissimulées certains personnages du carnaval de la ville qui se tient ici chaque mois de février. J'y aperçois notamment un Pierrot qui ne dit mot, perché qu'il est sur un échafaudage. Est-ce le vertige ? Toujours d'actualité, ce théâtre, qui, tout comme le musée précédent fait partie intégrante du centre culturel de la ville, offre enfin un cybercafé où il est possible de consulter sur place la plus grande collection de photos historiques de Treinta y Tres.


 

Le temps me manque pour pousser plus loin ma découverte de Treinta y Tres mais il faut savoir que le département est source de mille histoires, mythes, contes et légendes qui laissèrent leurs empreintes dans la tradition locale. Parmi elles, on trouve Dionisos Diaz, l'enfant héro (ci-dessous en photo) qui naquit ici le 8 mai 1920, au lieu-dit Arroyo del Oro. Il vivait entouré de sa mère, de son oncle, son grand-père et sa petite sœur qu'il aimait tout particulièrement. Un soir, après le diner, et suite à une discussion plus violente qu'à l'accoutumée entre le grand-père et la mère du petit garçon, le grand-père, pris de démence, poignarda à mort la mère de Dioniso. Le petit garçon, blessé après avoir lutté contre le grand-père, alla chercher son oncle pour lui raconter le drame, puis eut juste le temps de mettre à l'abri sa petite sœur avant de mourir de ses blessures quelques heures plus tard, sur le chemin de l'hôpital. Cette tragédie marqua fortement les habitants au point de devenir un exemple de stoïcisme et de lutte contre l'adversité. Depuis, un monument commémoratif à la mémoire du petit Dioniso et de sa mère, œuvre du sculpteur José Belloni, se dresse à l'entrée de la ville. Cette histoire sera même portée sur grand écran, en 1929, à travers un film intitulé Le petit héro d'Arroyo del Oro.


 

INFOS PRATIQUES :

  • Quebrada de los Cuervos, à 45 km de Treinta y Tres, au KM 306,7 de la Ruta 8, puis parcourir 23 km de chemin vicinal pour arriver sur place. Informations sur http://www.treintaytrs.gub.uy
  • Un bureau de tourisme se trouve à l'entrée de la ville de Treinta y Tres (à côté de la station-service ANCAP, sur la Ruta 8, à droite), au bord d'un rond-point. Vous y trouverez toutes les informations souhaitées concernant non seulement la localité mais aussi le reste du pays. Tél : (0598) 4452 2911

  • Confiserie Espacio Dulces, sur la place du 19 avril, à Treinta y Tres. Tél : 4452 8598. Ouvert du lundi au vendredi de 7h30 à 20h00 et le samedi de 7h30 à 14h00. Accès WiFi gratuit : Espacio Dulces (code d'accès : espaciodulce). Bon accueil.

  • Administration de Treinta y Tres : http://treintaytres.gub.uy/idtt/

  • Musée Agustin Araujo, Pablo Zufriategui 1272, à Treinta y Tres. Tél : (045) 22486. Ouvert du lundi au vendredi de 12h30 à 19h00. Entrée gratuite. Prise de photos autorisée sans flash.

  • Juste à côté du musée, se trouve le théâtre de la ville, qui vaut le coup d'oeil avec son architecture Art Déco bien préservée.

  • Le monument du petit Dioniso et de sa mère se trouve près du rond-point voisin du bureau de tourisme, à l'entrée de la ville de Treinta y Tres.


 











 



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