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Légendes en pays de Rocha
(Département de Rocha, Uruguay)
Heure locale


Lundi 29 mai 2017

 

Ce lundi est en quelque sorte pour moi un jour de relâche. Je n'effectuerai qu'une promenade en bord de mer, sous le ciel encore tourmenté de la veille. Cette côte du département de Rocha, qui longe l'Atlantique Sud, est un rivage de légendes et de naufrages, et un petit tour du côté d'Aguas Dulces, à quelques kilomètres d'ici, permet de confirmer cette réputation, là même où apparurent des légendes comme par exemple celle de La Mujer Gaviota. Les navires, eux, abandonneront souvent sur place de fabuleux butins.

Cela n'avait pas dans un premier temps attiré mon attention mais personne ne sait pourquoi la petite ville de La Paloma a réellement donné à ses rues des noms de constellations (Pégaso, Centauro, Orion...) ou pourquoi une mystérieuse cloche découverte à La Pedrera refusait de sonner. Cette terre de Rocha qui fut déjà un lieu de pérégrination il y a des siècles, abrita jadis de nombreuses tribus indiennes qui avaient trouvé ici une abondance de nourriture grâce à la diversité des écosystèmes et des zones humides (lagunes), à la douceur estivale et à la vue dégagée jusqu'à la côte, sans collines ni forêts pour l'obstruer.

 

Cette région de Rocha est une zone de rencontres pour différentes cultures et il n'existe aucun explorateur, conquistador ou navigateur qui ne la choisisse sans se l'être préalablement approprié. Bien avant le déferlement des touristes sur cette côte sauvage, l'embouchure du Rio de La Plata, qui donne sur cet océan Atlantique Sud turbulent, était déjà synonyme d'enfer pour bien des marins croisant dans ces eaux. Au point que les fonds marins des alentours ressemblent désormais à un grand cimetière maritime.

Le Cap Polonio sema par exemple longtemps le trouble, car considéré comme maléfique, les boussoles perdant le nord à cet endroit. D'autres légendes relatent aussi la présence d'un trésor caché dans les palmeraies d'Aguas Dulces, l'histoire des colombes enchanteresses de La Pointe du Diable, et le mystère des rues de La Paloma.

Tout près d'ici s'échoueront des navires anglais, argentins, brésiliens, espagnols, français, norvégiens et chinois, tous victimes des dangereux récifs qui bordent cette côte inhospitalière. De telles tragédies ne pouvaient que nourrir les récits les plus fous comme ceux de Jack London, Joseph Conrad ou Emilio Salgari.

 

Ne m'étant contenté d'une courte promenade au pied du phare Sainte-Marie, justement construit à cet endroit pour aider les bateaux à s'orienter, je ne pourrai en apprendre davantage sur le fameux butin de cette plage d'Aguas Dulces qui fut emmené ici suite au naufrage du navire L'Arinos, en 1875, et par 200 mètres de fond, alors qu'il s'apprêtait à rejoindre le Brésil. Des sommes d'argent auraient ainsi échoué entre les palmiers tout proche, bien que les habitants locaux affirment n'avoir jamais rien trouvé à cet endroit.

Ces trésors enfouis seraient légions sur cette côte, et de mystérieuses lueurs d'apparaitre ici et là, la nuit tombée, pour indiquer aux plus malins leur emplacement. Mais quand on demande à ces derniers pourquoi ils ne les ont pas déterrés, ils répondent que « bien mal acquis ne profite jamais ».

 

Toujours à Aguas Dulces, on se plait à raconter le naufrage d'un bateau cargo, le « Francisco Rocco » qui survint au large de la côte en 1961 et qui reste l'un des naufrages les plus terrifiants d'après les dires des habitants. Les seize marins rescapés avaient réussi à embarquer dans une chaloupe et se dirigeaient vers le rivage, d'où ils pouvaient distinguer la silhouette de policiers à cheval venus pour les secourir., mais les vagues leur interdisaient l'accès à la côte. Seul un valeureux pêcheur, Agosto Alvarez, osera défier les éléments en se jetant à l'eau pour rejoindre la chaloupe. Il parviendra à secourir les seize marins, l'un après l'autre, en les ramenant sur le rivage à la nage. Tous survivront grâce au courage d'Agosto, qui, depuis, est devenu un héros à Aguas Dulces.

Autre légende, celle de l'île Enchantée et de ses colombes blanches, du côté du Cap Polonio. Ces oiseaux pullulaient alors à cet endroit et étaient réputés intouchables, au point que si une embarcation croisait un de ces volatiles, elle faisait demi-tour par crainte du malheur, car ces oiseaux représentaient le danger et la malédiction. Aujourd'hui encore, on déconseille à quiconque de regarder une colombe droit dans les yeux. Encore faudrait-il le pouvoir ?

Sur cette même côte qui s'étend du Cap Polonio à la Pointe du Diable, et bien avant l'apparition de touristes dans la région, il existait une femme qui vivait sur la plage, vêtue d’oripeaux, et qui avait le don de parler aux mouettes. Celles-ci venaient d'ailleurs se poser sur ses épaules. On la surnommait La Mujer Gaviota (la mère des mouettes) et cette femme fascina longtemps les habitants. La tradition orale rapporte aussi l'histoire de mères ayant abandonné un jour leur bébé sur la plage en attendant que la marée ne l'emporte, et que les mouettes sauveront d'une mort certaine en les nourrissant.

Se promener dans les rues de La Paloma ressemble à une balade dans la galaxie, compte tenu du nom qu'elles portent : étoiles, astéroïdes planètes constellations et personnages de la mythologie grecque , auraient été choisi par les premiers villageois vers 1870, afin de remplacer les noms précédents qui étaient, d'après certains témoignages, considérés comme inavouables. Et un habitant, né à La Paloma en 1945, d'avouer que sa rue s'appelait jadis Calle del Boliche (rue du souteneur) et fut rebaptisée ensuite Calle Antarès. Les autorités locales mettront, quant à elles, des années à accepter ces dénominations nouvelles qui leur étaient tombées du ciel.

 

 

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