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Calama
(Province d'El Loa, Région d'Antofagasta, Chili)
Heure locale

 

Lundi 18 février 2019

 

C'est samedi que je suis arrivé à Calama, petite vile minière de quelques 145 000 âmes, située dans la province d'El Loa (Chili), avec un jour d'avance sur mon programme. Que le Chili est loin ! Treize heures de vol furent nécessaires avant d'atteindre la capitale chilienne recouverte par de la brume matinale. Les formalités et la récupération de mon bagage de soute me demandèrent une heure environ, avant de pouvoir enfin sortir des douanes, une fois après avoir été « reniflé » à plusieurs reprises par de charmants toutous. Le Chili ne plaisante pas avec l'introduction illicite de produits alimentaires.

Le premier contact est positif et l'on répond très gentiment à mes questions. Il est vrai que je ne pratique désormais que l'espagnol car je mets un point d'honneur à me mettre à la portée des habitants du pays que je visite, et cette attitude facilite grandement les contacts. Grâce à l'extrême gentillesse de Caroline (agent Air France de l'aéroport de Santiago) et à sa précieuse aide, je pourrai même avancer de 24 heures mon départ pour Calama sur la LATAM, la compagnie nationale chilienne. Et hop, un saut de puce (de deux heures!) plus loin, j'atterrirai sur ce petit aéroport tout neuf, nom de code IATA, CJC, pour les connaisseurs, et sous un beau soleil. A ma grande surprise, Uber fonctionne sur place mais mon chauffeur se fera tout de même attendre un bon quart d'heure et ne descendra pas de son véhicule pour m'aider à charger (et décharger) mes bagages. Une autre course avec le même prestataire le lendemain me vaudra d'être déposé à cent mètres de l'aéroport par la conductrice de taxi afin d'éviter à cette dernière des contrôles de police.

Mon installation à l'hôtel Ibis Budget se fera dans de bonnes conditions : le personnel se montrera très accueillant et l'accès internet, de qualité, malgré une première coupure durable en soirée due à une panne générale dans le secteur. Heureusement, je rechargerai ma carte téléphone ENTEL en crédit et cela me sera fort utile bien qu'il me faudra faire beaucoup d'efforts pour comprendre le fonctionnement de cet opérateur.


 

Calama me donne l'impression d'une ville perdue dans le désert d'Atacama, à 2260 mètres d'altitude. Elle est pourtant la capitale minière du Chili, même si elle manque singulièrement d'attraits pour le visiteur que je suis. On est ici au milieu d'étendues impressionnantes et la province d'El Loa ne fait pas exception à la règle : c'est l'une des trois provinces de la région d'Antofagasta (nord du pays), située sur un plateau central relayant la frontière avec l'Argentine sur la Cordillère des Andes. Le climat y est désertique et les pluies quasi inexistantes. Je me méfie toutefois de la pluviométrie locale car j'apprenais avant-hier, à ma descente de l'avion, que des inondations étaient survenues il y a une semaine de cela à Calama. Comme quoi... Il existe plusieurs hypothèses quant à l'origine du nom de la ville. Certains attribuent le nom de Calama au mot kunza « Ckara-ama » signifiant « la ville au milieu de l'eau », en souvenir de la création, au milieu du 20è siècle, non seulement de Calama, mais également d'oasis verdoyants sur le rives de la rivière El Loa, un îlot de verdure au milieu du désert en quelque sorte.

Il y a 9000 ans, la région était déjà occupée par les premiers peuplements humains, et Calama de figurer géographiquement comme le point milieu (entre mer et montagne) du désert d'Atacama. Les Espagnols débarquèrent sur place à l'époque coloniale malgré les conditions climatiques hostiles, avant que la création du port de Cobija en tant que principal port de la Bolivie voisine, ne fasse de Calama un passage idéal obligé sur le chemin, c'est à dire un tambo, une sorte d'auberge pour les caravanes qui circulaient entre ce port de Cobija, Potosi et Oruro. A l'époque, les premiers conquistadores, comme Diego de Almagro et Pedro de Valdivia ne furent pas très marqués par cet endroit dépeuplé. Et Calama de tomber d'abord sous la juridiction du vice-royaume de La Plata (une création du roi d'Espagne en 1778), avant de devenir une possession bolivienne, d'être propulsée comme capitale provinciale dès 1840, et de figurer comme le principal îlot de population dans cette région au moment des conflits territoriaux entre le Chili, la Bolivie et le Pérou. La Guerre du Pacifique (ou Guerre du salpêtre) éclatera en 1879 entre le Chili et ses deux voisins, pour prendre fin quatre années plus tard. Calama sera ainsi occupée par l'armée chilienne le 23 mars 1879 pour des raisons purement stratégiques, et le conflit du nitrate (salpêtre) fera perdre à la Bolivie sa province de Litoral (ou Litoral de Atacama), au profit du Chili qui gagnera des territoires plus au nord, aidés par les Anglais qui favoriseront son expansionnisme dans le Pacifique, au détriment de la Bolivie.

Après la conquête de Calama, dix années passèrent durant lesquelles la ville sera livrée plus ou moins à l'abandon de la part des autorités chiliennes. Don Toro commencera l'exploitation de la mine de cuivre de Zaragoza en 1882, une école verra le jour dans la petite ville en 1885, avant que Calama et ses mille habitants ne soient dotés d'une chemin de fer dans le but de relier Antofagasta à la Bolivie. 1888 verra la création de la Municipalité de Calama (en photo ci-dessous), puis ce sera le début de l'exploitation minière de Chuquicamata, après ses premiers forages en 1911, suivis d'un vrai développement au 20è siècle, avec l'important impact que l'on connait aujourd'hui au profit de l'économie nationale. La petite ville devra d'abord son salut à de petites exploitations minières et à ses liens commerciaux avec la Pampa Union qui fournira les bureaux de l'entreprise de salpêtre. Isolée du monde, Calama accueillera en 1951 l'ouverture de la première ligne aérienne à destination de la capitale chilienne au profit des grands patrons de la mine. Cette même année verra également le détournement des eaux du rio Salado afin de « laver » le minerai de cuivre et de rendre du même coup les terres alentours plus fertiles. Autre fierté de la ville : le club sportif national Cobreloa, dont le siège se trouve à Calama, et qui promeut, entre autres, des sports comme le football, le rugby et le basketball. Le stade municipal « Zorros del Desierto », d'une capacité de 12000 personnes, est l'une des installations les plus emblématiques de Calama.


 

Calama joue ainsi le rôle de ville-dortoir pour les employés de la mine de cuivre de Chuquicamata qui se trouve à une quinzaine de kilomètres de là, une mine qui pourvoit largement aux besoins économiques de la population de cette ville isolée. Je parcourrai cette province dans les prochains jours, en me rendant successivement à San Pedro de Atacama, à la Valle de la Luna, et au Salar de Atacama. Je n'oublie pas que l'endroit est sujet à des tremblements de terre plus ou moins fréquents, comme ce 11 juillet 2010 lorsqu'un séisme s'est produit avec son épicentre situé à environ 80 km de Calama. Il n'y aura heureusement pas de dégâts importants ni de victimes.

Non, décidément, Calama, qui s'enorgueillit de posséder plus de bars et de bordels que nulle part ailleurs au Chili n'est pas fait pour le touriste que je suis. On la surnomme la cité des 3P (Polvo, perros y putas), c'est à dire « poussière, chiens et putes ». Il est vrai que je croise ici des dizaines de chiens en plein effort de sieste et à toute heure de la journée. Pas du tout agressifs, ils prennent le soleil sous le regard compatissants des promeneurs.

En face de l'ancienne mairie, se trouve le Paseo Manuel Rodriguez, du nom de Manuel Javier Rodriguez y Erdoiza qui fut officier, avocat et homme politique chilien. Notre homme sera considéré comme l'un des fondateurs du Chili moderne, tant il fit en faveur de l'indépendance de la nation. Un panneau d'information attire mon attention au-dessus d'une buvette située à l'entrée d'un petit parc municipal : le texte raconte que cet homme illustre se déguisa un jour en mendiant et se vit remettre une piécette par le premier gouverneur Marco del Pont, lequel avait mis la tête de ce héro à prix. Incarnation même du peuple chilien, l'homme, qui défendait un Chili créole et démocratique ne plaisait pas à tout le monde, loin s'en faut, mais aimait profiter de la vie et séduire les plus belles femmes par son langage enchanteur. Il devint ainsi un héro romantique du Chili indépendant, avant de mourir assassiné à Til Til, à l'âge de 33 ans. Son icône inspirera poètes et compositeurs chiliens, mais également de nombreuses casernes de pompiers qui feront de lui leur patron et porteront son nom (comme par exemple la première brigade sapeurs-pompiers de Til-Til). Notre homme figurera même sur les billets de 2000 pesos.


 

INFOS PRATIQUES :

 

  • Aéroport El Loa de Calama, à 5 kilomètres environ du centre ville. Site internet : http://www.cacsa.cl/es/
  • Attention aux vols en série à proximité et à l'intérieur des terminaux de bus de Calama

  • Site officiel de la Cobreloa : https://cobreloa.cl/

  • Fêtes : Mois de Calama (en commémoration de la conquête chilienne de 1879) , fête de Saint Jean-Baptiste (24 juin), de N.D du Carmen à Conchi Viejo (16 juillet), N.D de Guadeloupe à Ayquina (8 et 12 septembre)...










 



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