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La Vallée de la Lune
(San Pedro de Atacama, Région d'Antofagasta, Chili)
Heure locale

 

Mercredi 20 février 2019

 

En ce désert d'Atacama se trouve un lieu désertique dont l'apparence évoque les paysages lunaires car on n'y détecte aucun signe de vie : la Vallée de la Lune.

Celle-ci se trouve dans la région d'Antofagasta, non loin de San Pedro de Atacama. J'espère ainsi me réconcilier avec cette fichue lune en visitant cette vallée car cet astre actuellement plein me cause bien des insomnies depuis quelques jours. La fatigue accumulée ajoutée à l’altitude commencent à peser sur la santé physique. Heureusement, le temps est radieux et je pourrai faire de jolies photos une fois sur place tout en croisant au passage de nombreux compatriotes venus eux aussi du vieux continent pour contempler le désert d'Atacama. Comme d'habitude j'ai vu grand, en prévoyant de visiter le même jour la Vallée de la Lune, Pukara de Quitor et Aldear de Tulor. L'endroit est vaste et, même si les distances kilomètres entre ces différents lieux paraissent raisonnables sur la carte, le manque de panneaux routiers d'une part, et le non référencement par mon GPS TomTom de certains endroits ne me faciliteront pas la tâche. Je décide finalement de me rendre ce matin au commissariat de police de San Pedro de Atacama afin de m’enquérir de l'itinéraire à suivre pour visiter ces différents endroits. D'emblée, on m'informe que l'accès routier à Pukara de Quitor est fermé depuis les récentes inondations, mais qu'il est possible d'aller à Aldear de Tulor et à la Vallée de la Lune. Ces deux dernières destinations sont d'ailleurs proches l'une de l'autre.

Déclarée sanctuaire naturel et intégrée dorénavant à la réserve national Los Flamengos, la Vallée de la Lune est le résultat du travail d'érosion effectué par l'eau et le vent depuis des millénaires. Le sol est formé de canyons, de crêtes pointues, de ravins et de monticules qui offrent des paysages semblables à ceux qui composent la Lune. Je m'arrête d'abord à l'accueil du parc pour m'acquitter du droit d'entrée et me procurer un plan. L'hôtesse m'informe qu'à cause des pluies récentes (il y a tout de même deux semaines de cela), il ne me sera pas possible de visiter l'intégralité de la vallée.

C'est un comble d'être contraint à renoncer à certaines attractions à cause de la pluie dans une vallée habituellement réputée pour son manque d'humidité. Bah, tout se perd. Après tout, il fait beau, pas trop chaud et des paysages somptueux n'attendent plus que moi.

En cours de route, j'observe avec attention des tâches blanches qui recouvrent ici et là le relief : il s'agit de sel qui s'est déposé au fil du temps. Autrefois, la vallée de la lune était surnommée « les Salines » justement à cause de ces immenses quantités de sel résiduel dans cette cordillère du sel. Et les chamanes d'antan de déjà prévoir un avenir radieux pour cet endroit si particulier. Ils ne se sont pas trompés vu le nombre important de visiteurs se rendant chaque année sur le site. Ce sel gemme servira bien sûr de monnaie d'échange pour les populations locales. La première halte, située à cinq kilomètres de l'entrée du parc, porte justement le nom de « Caverne du sel » mais son accès est malheureusement fermé. On s'y promène en temps normal en empruntant un étroit goulet, sur une distance de 520 mètres. La moitié du trajet s'effectue à ciel ouvert, et l'autre moitié en zone souterraine. Ces cavernes sont le résultat de la dissolution des sels par les eaux souterraines, ce qui laissa place à d'énormes cavités. La cordillère de sel, quant à elle, est le fruit d'une histoire géologique complexe qui débuta il y a quelques trente millions d'années, à une époque où les volcans actuels (qui forment la haute cordillère) n'existaient pas encore. Et la chaine montagneuse de s'étendre progressivement sur environ cent kilomètres dans un axe Nord-Nord Est, sur une largeur maximale de dix kilomètres, le long de la région d'Antofagasta. Les reliefs s'élevèrent ainsi en direction de l'ouest et les sédiments se déposèrent en contrebas, dans les vallées, à savoir la plaine de la Patience et une partie du Salar d'Atacama. Ce travail géologique dura 15 millions d'années et permit de relâcher d'immenses quantités de sels (surtout des sulfates et du chlorure), résultat d'une importante évaporation locale, un peu comme dans des salines.

Même chose pour le Canyon (en photo ci-dessus) qu'il n'est pas possible de visiter et que je ne pourrai admirer que d'en haut. Les énormes quantités de sédiments résultant du travail géologique effectué sur des dizaines de millions d'années se sont depuis transformées en roche et les géologues ont relevé l'existence de deux épisodes de formation du relief : la formation San Pedro et celle de Vilama. Il y a dix millions d'années, la région connut une intense activité volcanique, avec rejets de lave et autres matériaux en quantités importantes. Ce sont ces matériaux qui constituèrent les paysages étranges de l'Altiplano que nous connaissons aujourd'hui. La présence d'algues à l'intérieur de certaines roches laisse penser qu'il y eut ici une zone lacustre aux eaux peu profondes. La formation des paysages actuels intervint assez récemment d'un point de vue géologique, avec l'aide du vent et de la pluie. Les sels furent ainsi dissous pour former différents cristaux entrant dans la formation de dunes. « La Duna Mayor » (ci-dessous) est un bel exemple de l'oeuvre de la nature. Je me gare au pied de ce gigantesque amas de sable pour effectuer une balade jusqu'au sommet et de profiter d'une vue imprenable sur les environs. Quinze minutes à peine me seront nécessaires pour parvenir en haut et découvrir des paysages improbables (deuxième et troisième photos ci-dessous). La « Duna Mayor » attire chaque année des centaines de touristes qui montent en son sommet pour admirer les couchers de soleil.

Lors de cette visite, je déplorerai l'absence d'information concernant les différents sites visités. C'est dommage, car quand on dispose d'un tel patrimoine, on le met en valeur.

Ma prochaine étape est le Mirador Achaches (ci-dessous). Là encore, je resterai sur ma faim en ce qui concerne les explications. Un chemin aménagé part du parking en direction du mirador qui se trouve à 600 mètres de là. Durée de l'ascension : 20 minutes. Le point culminant de la zone se trouve à 2580 mètres et me permet d'admirer un paysage aussi somptueux qu'inattendu (deuxième photo ci-dessous). Au loin, j’aperçois le majestueux volcan Licancabur et son voisin Juriques.


A quelques minutes de là, je m'arrête à la « Mina de sal Victoria ». Là encore, aucune information n'est offerte aux touristes individuels. J'ai comme l'impression que seuls les guides donnent les informations utiles à la bonne découverte de l'endroit. J'observe un vieux tracteur (ci-dessous) qui a connu ses heures de gloire depuis très longtemps. Un peu plus loin, j'aperçois du sel cristallisé (deuxième photo) sur une paroi rocheuse. Le sel gemme était ici exploité à grands frais (ses coûts de production étaient supérieurs à ceux du sel de mer) jusqu'en 1994. L'essentiel de sa production aura lieu du début du 20è siècle aux années 1970. Les mineurs étaient en grande majorité des Atacamènes, particulièrement productifs pour ce genre de travail. Ce sel gemme était ensuite utilisé par l'industrie minière du cuivre (comme à Chuquicamata) pour servir de saumure dans les unités de traitement du métal. Le reste de la production était vendu comme sel de table. Il me faudra malheureusement rebrousser chemin à l'issue de cette étape car le reste de l'itinéraire est interdit d'accès au public à cause des inondations récentes.


On me l'a promis, Aldear de Tulor ne se trouve qu'à quelques kilomètres de la Vallée de la Lune. Soit, mais, l'itinéraire que l'on m'indique à partir de la Vallée de la Lune ne comporte aucune indication claire et il me faudra demander ma route aux habitants. Grâce à eux, je parviendrai en quelques instants au site archéologique de Tulor, le plus ancien lieu patrimonial en terre du Chili qui prit forme il y a 2800 ans. Ce site, qui fut découvert par le Père Gustavo Le Paige en 1957, est remarquable par son état de conservation du au sable qui s'est accumulé au fil des ans autour des maisons. Et l'endroit d'abriter le lieu du plus ancien peuplement de la vallée, datant de 800 ans avant JC. Une maison typique (ci-dessous) a été depuis reconstituée, qui montre avec force détails comment étaient bâties ces (très) anciennes demeures. Juste quelques mètres pus loin, j'apercevrai les maisons authentiques, à demi-enterrées dans le sol (deuxième photo). Ce site archéologique est l'un des sites les plus anciens du nord chilien et l'ensemble des habitations circulaires qu'elle rassemble (ci-dessous, vue aérienne de l'endroit) ne laisse pas indifférent : ces maison étaient non seulement circulaires mais reliées les unes aux autres. Ce lieu de peuplement témoigne d'un mode de vie plus tourné vers la production que vers la déprédation des ressources naturelles. Après le pastoralisme, place est donnée à l'agriculture grâce à la proximité de la rivière San Pedro et à la création d'un habitat communautaire stable. Les échanges commerciaux intenses qui étaient générés par la population d'Aldear de Tulor se retrouvent dans les fouilles archéologiques qui furent entreprises depuis. On y retrouva ainsi des restes de céramiques, des objets en bois, en cuir et en os.

Lorsque les Espagnols débarqueront ici en 1535, les population atacamènes qui avaient toujours entretenu de forts liens avec les villages andins voisins instaureront une véritable confédération défensive qui mènera la vie dure aux conquistadores de 1537 à 1556. Pukara del Quitor sera alors le théâtre d'intenses batailles comme en 1540, lorsque Francisco de Aguirre tuera plus de 300 Atacamènes. Quinze ans plus tard, le chef politique local, Don Juan Coto Cotar, qui s'était entre temps converti au christianisme, posera les bases d'un accord de paix en terre atacamène, un traité qui verra le jour en 1556.

 

INFOS PRATIQUES :

  • La Vallée de la Lune, à environ 13 kilomètres de San Pedro de Atacama (Prendre la direction de Calama). Contact : Calle Caracoles N°349, Oficina 1, San Pedro de Atacama (+56 55 851 574). Ouvert tous les jours jusqu'à 18H00. Entrée : 2500 pesos par adulte. Un plan du site vous est remis, qui indique les différents sites remarquables. La route qui traverse cette vallée ressemble plus à une piste caillouteuse qu'à une route et il est recommandé de rouler au pas (20 Km/heure). A côté de l'accueil, se trouve une salle d'exposition qui permet de comprendre comment s'est formé le site (panneaux d'information en espagnol).
  • Site archéologique de Tulor (Poblado de Tulor), à Aldear de Tulor. Tél : +56 940 46 31 98. Ouvert tous les jours. Entrée : 3000 pesos par personne étrangère. Quatre guides se relaient pour accompagner les visiteurs dans la découverte de l'endroit. Derrière la réception, plusieurs panneaux d'information (en espagnol) offrent une information exhaustive sur les maisons de terre exposées plus loin. Ne jamais quitter le sentier balisé.

 










 



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