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Musée de la Brasserie de Saké Hakutsuru de Kobé
(Kansaï, Japon)
Heure locale

 

Dimanche 22 mai 2011


 

Il est une boisson que l'on ne peut pas ignorer lorsqu'on visite le Japon. Il s'agit du saké: boisson à base d'alcool de riz, titrant environ 15° ( mais celui que j'ai goûté ne me paraissait pas si fort!), le même mot peut être employé pour désigner toute boisson alcoolisée. Les Japonais emploient également le terme de Nihonshu (alcool japonais). Le saké est considéré comme un « vin de riz » chinois, ou baijiu. On la considère aussi comme une « bière de riz » (eau de source dans laquelle on a fait fermenter du riz en utilisant un processus biochimique). Kobé est fière de ses brasseries de saké. Certaines étaient sur le point de disparaître et ont été remises en état à grands frais. Leur saké est vendu dans tout le pays. Un musée, le Hakutsuru Sake Brewery Museum (musée de la brasserie de saké Hakutsuru) m'a ouvert ses portes , après avoir été lui-même menacé de disparition. Créé en 1743, ce musée a toujours su s'adapter aux changements au fur et à mesure tout en préservant la tradition. La production de saké n'a pas dérogé à la règle. Modernisée, elle a du adopter des techniques nouvelles. C'est alors que ce musée a rouvert une de ses anciennes brasseries qui employaient des méthodes traditionnelles de fabrication. Je marche ainsi dans les couloirs d'un lieu rempli d'histoire, qui a su recréer les méthodes de fabrication ancestrales de ce breuvage, qui datent du début du XVII ème siècle. Et ce dans un immense bâtiment de bois et entouré d'outils d'époque. L'outil qui accueille les visiteurs est un grand réservoir sur le point d'être hissé au deuxième étage sur son lieu de stockage. Une autre scène montre deux japonais échangeant le saké.

Je vais ici vous décrire ce que j'ai vu, c'est à dire le processus de fabrication du saké. Le riz qui entre dans la composition de ce breuvage est soigneusement choisi parmi une cinquantaine de riz à saké. La qualité du saké dépend en effet de trois facteurs: Le savoir-faire du brasseur, la qualité de l'eau et la qualité du riz. La première étape de fabrication est le polissage. On débarrasse le riz de ses graisses et de l'albumine pour ne garder que le cœur du grain, riche en amidon. Des hommes foulaient autrefois ainsi le riz à plusieurs reprises tout en chantant avec entrain pour se donner du courage. Plus le grain est poli, plus le taux résiduel sera bas et plus le saké sera fin. De nos jours, le riz passe donc dans une machine afin de subir cette opération de polissage. L'abrasion sera longue et délicate afin d'éviter de casser le grain ou de le surchauffer. Bien qu'on le considère au Japon comme un vin, le saké ne se conserve pas plus d'un an en bouteille. Inutile donc de le laisser vieillir longtemps. Chaque région a son cru ( comme chez nous pour le vin) mais certains sakés de pays peuvent réserver de bonnes surprises. Si vous vous rendez souvent au Japon ou si vous y vivez, collectionnez donc les bouteilles de saké, toutes différentes, originales et joliment décorées.

Le riz est ensuite lavé et trempé. Après le polissage, le riz ressemble à des petites perles et subit alors un trempage pendant lequel il doit absorber un volume d'eau bien précis en un laps de temps précis. Une fois gorgé d'eau, ce riz est ensuite cuit à la vapeur durant cinquante minutes et en continu. On prépare ainsi le koji (malt à riz)qui devra être composé d'un riz tendre à l'intérieur mais ferme à l'extérieur. D'octobre à avril, on cuit ainsi le riz tous les jours de la semaine. 20% environ de ce riz cuit va former le koji , malt destiné à transformer la fécule contenue dans le riz en sucres (saccharification). Ce travail va durer deux jours et sera observé avec attention car il est primordial pour la réussite du futur breuvage. Le riz est ensuite ensemencé de spores à koji ( un champignon) puis étalé sur des grandes tables appelées toko. Ces tables sont installées dans une salle de culture (Kojimuro) dont les cloisons sont en bois de cèdre du Japon. On enferme alors ce koji ( riz + spores à koji) dans de grands sacs en tissu et on laisse le tout fermenter à l'humidité et à une une chaleur de 30°.

Le jour suivant, le riz va subir trois opérations successives permettant de retravailler le koji ( malt de riz) en l'étalant sur des plateaux afin de favoriser l'évaporation de l'eau et éviter une trop rapide élévation de la température. Le matin du troisième jour, on sort le koji de la salle de culture puis on l'étale au frais sur de grands plateaux , puis on le peigne ( en traçant des sillons dans le riz) afin de stopper son évolution. C'est pour cette raison qu'autrefois, on produisait souvent le saké pendant l'hiver afin de profiter des basses températures. Aujourd'hui, des salles spéciales réfrigérées sont utilisées. La prochaine étape consiste alors à mélanger dans une cuve, du riz cuit avec le koji , additionné d'eau et d'acide lactique. Cette opération est appelée shubo. La culture du shubo va durer pendant 14 jours: Chaque jour, l'eau dans laquelle sont dissous les enzymes est à maintes reprises répartie à la louche sur la surface de la culture pour favoriser le travail des enzymes. L'amidon du riz va ainsi lentement se transformer en glucose, glucose qui va servir à nourrir les levures et accélérer leur concentration. Cette opération est gérée avec minutie et la température est sans cesse contrôlée pour éviter toute perturbation microbienne. A la fin du processus, on obtient un liquide ayant l'aspect du yaourt (soit 200 à 300 millions de cellules levuriennes par goutte d'eau). A ce stade, le glucose a presque entièrement été absorbé par le riz et le mélange commence « à avoir faim ». On prépare alors le moromi (moût de riz) pour la fermentation finale. Le shubo est alors transvasé dans une cuve de taille moyenne et nourri avec les mêmes ingrédients de base: eau, koji et riz cuit. Cette opération va augmenter le volume du shubo. Cette opération est effectuée en trois fois sur 4 jours, afin d'éviter un arrêt de la fermentation. Après un premier complément, on laisse le moromi reposer durant une journée. Puis on renouvelle l'opération pendant les quatre jours. Le koji continue à transformer l'amidon en sucres, sucres qui se transforment en alcool sous l'effet des levures , le tout dans la même citerne.

Après une fermentation de 21-25 jours, le moromi a atteint sa maturité et développe un arôme et un bouquet équilibrés. Son titre alcométrique est compris entre 18 et 20% du volume. Ce mélange doit maintenant être débarrassé du kasu (lies blanches) avant d'être commercialisé. C'est l'opération du pressurage. Plusieurs façons existent pour « clarifier » le saké. Le saké est ensuite élevé en cuves entre 6 mois à 2 ans ( la durée de cette maturation dépend de la variété de saké). Et comme pour le vin chez nous, des prélèvements sont régulièrement effectués dans chaque cuve pour apprécier le degré d'affinement et juger du meilleur moment pour la mise en vente.

Lorsqu'il est prêt, le saké est stocké dans différents contenants: tonneaux,bonbonnes, bouteilles plus ou moins grandes,boites en carton, et même verres portionnés. On emballe soigneusement les bonbonnes de saké ( photo ci-dessus) avant leur transport ou leur entreposage. Le baijiu ( vin de riz chinois) qui est à l'origine du saké, aurait vu le jour en Chine dès la Haute Antiquité (2000 ans avant J.C). La fabrication du saké aurait, elle, été introduite de la Chine vers le Japon, peu après l'apparition de la riziculture , au III ème siècle (Période Yayoi) en se propageant de l'Ouest (Kyushu) à l'Est du pays. Le riz était alors mâché primitivement, à la bouche, et les céréales étaient saccharifiées à la salive. Il faudra attendre le VIII ème siècle (Période Nara) pour que le saké reçoive ses lettres de noblesse par un édit de la Cour impériale. Et les deux religions nippones de codifier son caractère sacré en l'intégrant à des rites. Au IX ème siècle (Période Heian), le Enkishiki décrit un procédé de fabrication d'une dizaine de sortes de saké faits de riz additionné d'eau et de koji. On détaille aussi les procédés de chauffage. A la fin de a période Heian, la demande de saké croit beaucoup et son prix dépasse celui du riz. Les temples se lancent à leur tour dans la fabrication du breuvage afin de répondre à la demande. Puis, le double ensemencement est découvert et c'est la naissance du précurseur du saké actuel. Les premières grandes cuves qui faciliteront la production extensive du saké apparaissent à Nara au XV ème siècle. Sous la période Edo, un brasseur découvrira l'importance de la minéralité de l'eau sur la qualité du saké. La période Meiji verra l'apparition de l'Institut national des fermentations, de la chimie et de la plupart des matériaux modernes.

Le saké est traditionnellement servi chaud (réchauffé au bain marie entre 36 et 50°et servi dans un tokkuri – pichet à saké en porcelaine- ou dans un grand verre) ou froid (en apéritif par exemple et à une température de 8 à 12°).


 

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