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Le Festival Kunchi de Karatsu
(Préfecture de Saga, Kyushu, Japon)
Heure locale


Dimanche 25 mars 2012

 

Karatsu a aussi son festival: Le Festival Kunchi (affiche ci-dessous). Ce festival d'automne du sanctuaire de Karatsu existe depuis le XVII ème siècle et s'illustre chaque année début novembre. C'est assurément l'évènement phare de l'année culturelle dans la cité qui attire de 150 000 à 500 000 visiteurs en trois jours de festivités. Les enfants n'ont pas école durant cette fête-là , les parents et amis trouvent une excellente occasion pour se retrouver et sabler le...saké!

Le moment important du festival de Kunchi est le défilé des quatorze chars dans les rues de la rue. Le reste du temps, ces chars sont rassemblés sous un hall d'exposition. C'est là que je les ai vu et j'en ai rapporté les photos que vous allez voir. Certains ont la forme d'un casque, d'autres de lions, ou de poissons. A chaque char est associée une communauté et parfois une légende. Les matériaux de construction sont principalement le bois laqué et le papier et entrent dans la confection des chars d'après la technique appelée Ikkanbari ( qui fut inventée au XVII ème siècle par Hirai Ikkan): On utilise des centaines de feuilles de papier japonais que l'on étire afin de donner la forme au char puis on utilise des laques pour peindre le tout tout en le solidifiant. Un char mesure entre cinq à six mètres, peut peser plusieurs tonnes et est monté sur quatre roues à essieux fixes. Dans ces conditions, il n'est pas toujours aisé de le manœuvrer, surtout dans les plus petites rues de la ville. On fait d'abord défiler les chars dans les rues de Karatsu avant de les rassembler sur une aire sablonneuse, ce qui n'aide pas les tireurs des chars, qui ont alors le plus grand mal à faire bouger les drôles de machines.


 

Les chars Hikiyama ( c'est ainsi que l'on traduit ces engins en japonais) sont tirés aux cris de En-ya,En-ya, ou encore Yoy-sa,Yoy-sa...par des familles de tireurs appartenant aux quatorze quartiers traditionnels de la ville (chaque quartier disposant d'un char). Afin de permettre au plus grand nombre de personnes de participer au défilé, on accroche de très longues cordes aux chars ( d'une centaine de mètres) et toutes les générations se trouvent alors réunies dans le même effort. Certains quartiers n'autorisent cependant que les hommes pour servir de tireurs. Ceux-ci sont alors vêtus d'un costume traditionnel qui consiste en une paire de sandales de paille, une épaisse culotte blanche, et une tunique arborant les couleurs du quartier représenté. On trouve aussi le happi et le Nikujuban (l 'uniforme des pompiers d'Edo) Le défilé s'effectuant en musique, on rencontre aussi des joueurs de taiko (tambour japonais appelé aussi wadaiko, et associé depuis fort longtemps à l'histoire du Japon), et des flutistes. On peut entendre trois styles de musique lors de ce défilé: Michibayashi, Tatebayashi et Seriyamabayashi. Chaque char dispose d'une musique qui lui est propre.

Le festival Kunchi est bien sur coordonné par le sanctuaire shintoïste de Karatsu depuis maintenant plusieurs siècles. 1980 fut l'année où ces chars furent déclarés biens importants culturels. Des chars dont la construction s'échelonna de 1819 à 1876.


 

Je vous invite maintenant à découvrir chacun des quatorze chars du festival Kunchi. Commençons avec le premier char (photo ci-dessus). Celui-ci est appelé Aka Jishi (Le lion rouge). Il est dédié au sanctuaire de Karatsu et ouvre le défilé. Il fut construit en 1819 par le quartier de Katanamachi, sur l'initiative de Ishizaki Kahei, un marchand de la ville. Celui-ci, très impressionné par les chars du festival Gion de Kyoto voulut en créer un semblable. Le 3 novembre, on place en son sommet des papiers ornementaux sacrés et purifiés.


 

Le deuxième char est appelé Ao Jishi ( Le lion bleu) (photo ci-dessus). Il fut créé en 1824 par le quartier de Nakamachi. Semblable au lion rouge, il est toutefois de taille plus modeste. Sa corne est fourchue, ses oreilles ne pendent pas et sa musique est très dynamique.


 

Le troisième char (photo ci-dessus) fut bâti par le quartier Zaimokumachi, en 1841. On l'appelle Urashima Taro to Kame (Urashima Taro et la tortue). Au Japon, la tortue a toujours été au service des dieux. Elle est symbole de chance et de longévité. C'est un animal considéré comme de bon augure qui est supposé apporter 10 000 années de bonheur. C'est dire... Dans le folklore japonais, le kappa (monstre maléfique ou diablotin d'eau) prend la forme d'une tortue vivant dans les rivières, pour attirer les enfants dans le but de les noyer. Rien de cela ici puisque la tortue représentée est bénéfique. On trouvait autrefois sur son dos une flamme divine qui a depuis été remplacée par l'effigie d'Urashima Taro, le pêcheur de contes. Celui-ci sauva un jour une tortue malmenée par des enfants. Le lendemain, le pêcheur vit une grosse tortue venir à sa rencontre. Il découvrit que la tortue qu'il avait sauvé la veille était la fille du roi de l'océan qui voulait le récompenser. Il remporta ainsi un séjour à Ryugu-Jo, lepalais sous-marin de Ryujin. La tortue sauvée s'était transformée en une jolie princesse mais notre pêcheur commença bientôt à souffrir du mal du pays. Il fut alors autorisé à retourner chez lui et se vit offrir par la princesse un coffret incrusté de joyaux, coffret que le pêcheur ne devait pas ouvrir. A son retour, Urashima découvrit que 300 ans s'étaient écoulés depuis son départ et que personne ne se souvenait de lui. Déprimé, il se rendit le long de la plage avec le fameux coffret qu'il se mit à ouvrir. E malheureux vit alors une fumée noire s'en échapper: Notre pêcheur se mit soudainement à vieillir puis mourut. Le coffret contenait son âge réel. Ce char est l'un des chars les plus populaires.


 

Le quatrième char est surnommé Minamoto Yoshitsune no kabuto (le casque du guerrier de Minamoto Yoshitsune). Il fut construit en 1844 par le quartier de Gofukumachi. Le thème de l'armure fut probablement retenu à cause de la présence d'armureries dans cette partie de la ville. On y trouvait en effet de nombreux artisans talentueux. Le char offre deux casques de tailles différentes: Le plus petit casque est utilisée lors de la parade de rues alors que le plus grand prend place sur le char lorsque celui-ci est au repos. Quant à Minamoto Yoshitsune, il était un samouraï et un général durant les périodes Heian et Kamakura. Très vite devenu orphelin, il est élevé par les moines sous le nom d'Ushiwaka avant d'être placé sous la protection de Fujiwara no Hidehira, gouverneur de la province de Mutsu.


 

Le cinquième char (photo ci-dessus) s'appelle Tai (daurade) et fut bâti par le quartier d'Uoamachi (Uoya signifiant marché aux poissons en japonais) en 1845. Les nageoires du char sont mobiles et sont actionnées durant les défilés. Ce char participa au Carnaval de Nice (France) en 1979.


 

Voici maintenant Hoomaru (ci-dessus) ou « le bateau du phénix ». Il fut construit en 1846 par le quartier d'Oishimachi. Ce quartier était riche à l'époque de la construction de ce char et l'on y notait la présence de marchands riches et très influents. Il fallait donc créer le plus cher et le plus luxueux des chars, le plus grand aussi. Issu directement de la Chine, le « fenghuang »(phénix) est un oiseau mythique qui règne sur tous les autres oiseaux. C'est le plus doux et le plus sage d'entre eux, dit-on. Souvent associé au dragon, il était l'emblème personnel de l'impératrice (l'empereur avait le dragon pour emblème) et apparaissait pour annoncer la naissance d'un grand philosophe. Au Japon, on le retrouve dans de nombreux sanctuaires et dans les temples bouddhistes.


 

Hiryu (le dragon volant) est le septième char ( il est de sortie sur la photo ci-dessus). Construit en 1846 par le quartier Shinmachi, il fut imaginé à partir d'un dragon chinois peint sur une porte de bois d'un des grands temples zen-bouddhistes du Japon: Nanzen-Ji à Kyoto. Le dragon japonais porte le nom de Ryu et est généralement associé aux étendues d'eau, aux nuages et au ciel. Dans le mythe japonais, c'est le dieu de la mer et le dieu de l'eau.


 

Le huitième char est appelé KinJishi ( Le lion doré)(ci-dessus). Il fut créé par le quartier de Honmachi en 1847 et est recouvert de feuilles d'or. Sa corne est plus haute que celles des deux autres lions. On dit que c'est la tête de lion la plus grande du Japon. Le char participa en 1966 au Festival d'Honolulu et défila le long de la plage de Waikiki (Hawaii).Les tireurs participants portent dans le dos de leur happi le symbole du lord du domaine de Karatsu.


 

Le char N°9 (en photo ci-dessus) s'appelle Takeda Shingen no kabuto ( le casque de guerrier de Takeda Shingen). Il fut créé par le quartier de Kiwatamachi en 1864. Takeda Shingen compte parmi les chefs militaires glorieux du Japon au XVI ème siècle. On dit que Shingen Takeda manquait de sel dans la montagne où était rassemblaée son armée avant la grande bataille qu'il allait livrer à son adversaire Uesugi Kenshin. Ce dernier lui en offrit cependant afin de rendre la bataille plus équitable. Ceci explique sans doute pourquoi on ne jette pas de sel de ce char. Ce qui ne l'empêche pas d'honorer le sel et de le représenter. Les cheveux blancs du casque du char sont faits de poils de yak d'Himalaya, un animal rare.


 

Presque naturellement, le dixième char ( ci-dessus) s'appelle Uesugi Kenshin no kabuto (Le casque de guerrier Uesugi Kenshin) et fut construit par le quartier de Hiranomachi en 1869. Uesugi Kenshin fut l'éternel rival de Shingen Takeda. Le casque porte un lion mythique garni d'une longue corne en son sommet. Cette corne ressemble d'ailleurs à une racine de lotus, d'où le surnom de ce char: Char de la racine de lotus.


 

Voici le onzième char: Shutendouji to Minamoto kaikono kabuto (Shutendouji et le casque du guerrier de Minamoto) (photo ci-dessus). Celui-ci fut construit en 1869 par le quartier de Komeyamachi. Le char est basé sur une légende de Minamoto Raiko, un guerrier historique du X ème siècle, durant l'ère Heian. Ses loyaux services envers le clan Fujiwara lui permirent de devenir le gouverneur de la province d'Izu puis de la province de Kozuke. Il commandera aussi la garde impériale. Minamoto Raiko raconta que Shutendouji et ses amis terrorisèrent Kyoto. Minamoto s'opposa à lui et en vint à bout alors que Shutendouji était ivre. Sa tête vola dans les airs mais heurta le casque de Minamoto Raiko. On retrouve aujourd'hui le regard terrifiant de Shutendouji faits à l'aide de verre d'Hizen Biidoro ( Préfecture de Saga).


 

Le douzième char (ci-dessus) s'appelle Tamatorijishi (le lion qui joue sur le globe). Il fut créé en 1875 par le quartier de Kyomachi , d'après un modèle tiré d'une poterie de Karatsu. Le corps vert foncé du lion danse sur un globe avec se quatre grosses pattes. On note immédiatement le contraste entre les couleurs des cheveux dorés et du globe peint en rouge par rapport au corps vert foncé du lion.


 

Le treizième char est surnommé Shachi (baleine tueuse) (ci-dessus) et fut conçu en 1876 par le quartier de Kakomachi. En japonais, kako signifie pêcheur ou marin. Shachi veut dire le monstre des mers, qui est sensé protéger du feu. Ce char est connu pour sa générosité dans la distribution de sel , source de purification. Le char original était plus grand mais fut endommagé en 1928. Deux années furent nécessaires aux habitants de Karatsu pour sa rénovation. On fit pour l' occasion appel aux meilleurs artisans laqueurs de Wajima.


 

Notre tour d'horizon ne serait pas complet sans le quatorzième (et dernier) char (ci-dessus): Shichihoumaru (Le bateaux aux sept trésors). Il fut construit en 1876 par le quartier de Egawamachi , d'après la légende du bateau aux sept trésors: Une balle, un éventail de chef militaire, une valise de chance, un manteau magique, un sac à trésor, une perle en forme de virgule et un manuscrit. Ce char est à la fois long et lourd. Ce char fut construit la même année que le précédent et se dispute donc avec lui l'honneur de fermer alternativement le défilé, une année sur deux.

 

Ainsi se termine le défilé du festival Kunchi, sous l'égide du sanctuaire de Karatsu depuis maintenant plus de 400 ans. Une manifestation à ne pas manquer , début novembre, si vous passez par là.

 

 

INFOS PRATIQUES:

 


  • Exposition des chars du Festival Kunchi, ouvert tous les jours de 9h00 à 17h00. Droit d'entrée: 300 yens (adulte). Photos autorisées. Infos en japonais et en anglais.

  • Festival Kunchi, les 2, 3 et 4 novembre de chaque année à Karatsu.










 



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