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Le Festival du Grand Prix international de l'Orchidée
(Tokyo, Japon)
Heure locale


Dimanche 17 février 2013

 

Une fois n'est pas coutume! J'arrive ce weekend à Tokyo, juste en même temps que le Festival 2013 du Grand Prix international de l'Orchidée. Je savais que les Japonais adoraient les fleurs mais cet événement, qui rassemble le plus grand nombre d'orchidées au monde, sous le Tokyo Dome city, et la foule qu'il attire, montre s'il en était besoin, que ce pays est un fervent adepte de cette fleur magique. Pour cette visite, je suis accompagné de Thibaud, Commandant de bord, et grand amateur des belles fleurs. L'orchidée a des millions de fans sur la planète et sera, pour l'occasion, photographiée sous tous les angles pendant les neuf jours que dure le festival. Amateurs et professionnels admirent à la fois les orchidées traditionnelles mais découvrent aussi de nouvelles fleurs. Il va sans dire que la plus belle sera récompensée par un prix à l'issue de cette manifestation. Ce dimanche matin, il y a déjà beaucoup de monde à l'entrée du Tokyo Dome City: Nous allons acheter notre billet à un kiosque situé à deux pas des filtres de sécurité puis prenons la file d'attente pour entrer dans l'immense bâtiment. Certaines personnes ont déjà acheté leur billet sur internet ( pré-réservation) avant de venir au festival. Le personnel est nombreux, la circulation fluide, et il ne nous faudra que quelques instants pour franchir l'entrée. Les hôtesses d'accueil ne disposent malheureusement que d'une brochure en japonais pour cet événement. L'affiche du festival ( ci-dessous) attire déjà mon regard et Thibaud et moi ajustons les objectifs de nos appareils-photos respectifs.


 

Les orchidées forment une grande famille, celle des plantes monocotylédones, c'est à dire des plantes ne possédant qu'un seul cotylédon (feuilles primordiales constituant la graine) et appartiennent aussi à celle des liliacées. Elles possèdent des racines d'égale importance, non ramifiées, tandis que les fleurs sont généralement constituées de trois pétales plus ou moins élaborés. La majorité des espèces se rencontrent dans les régions tropicales. Le mot orchidée vient du grec orchis, signifiant testicule, en référence à la forme des tubercules souterrains de certaines orchidées des régions tempérées. On aurait retrouvé du pollen de cette fleur dans de l'ambre, ce qui laisse à penser que l'espèce existait déjà il y a 75 à 86 millions d'années. Je parlais tout à l'heure de « fleur magique » car celle-ci se contente de peu: Très économe en ressources, l'orchidée a peu d'étamines, et ses graines sont souvent minuscules. Son poids et sa taille varient souvent selon l'espèce ( de un à cinq millimètre et un à deux grammes pour la plus petite jusqu'à... trois mètres de long et une tonne pour la plus grosse!). Et les spécialistes évaluent à près de 30000 le nombre de ses espèces, qui vivent dans tous les milieux excepté les déserts et les cours d'eau. C'est regrettable mais on déplore aujourd'hui la destruction du milieu naturel de l'orchidée et certaines d'entre elles disparaissent: Déforestation, fragmentation des forêts, destruction des zones humides, réduction ou disparition des pollinisateurs comme les insectes, les oiseaux ou les chauve-souris, sont responsables de cette situation. Heureusement, des programmes de conservation et de restauration sont mis en place afin de maintenir ou de réintroduire certaines fleurs.


 

A l'intérieur du festival, je dispose de peu d'informations sur les orchidées présentées. Celles-ci habillent parfois des parois entières pour le plus grand plaisir des curieux. Et l'on à parfois le plus grand mal à se frayer un chemin pour photographier telle ou telle composition florale mais jamais on se bouscule, car on est au Japon! Des jardins sont même reconstitués de temps à autre avec plusieurs orchidées différentes et une petite mare, comme sur cette photo ci-dessous. On habille aussi des kimonos avec des fleurs (deuxième photo). Comme à mon habitude, je parle aux uns et aux autres, en langue japonaise. Complimentant même une dame que je qualifie de « plus belle fleur de l'endroit ». « Arigato gozaimasu. Nihongo ga jiozu desu »(merci beaucoup, vous parlez bien japonais) me répond t-elle. On ne pourra pas m'accuser de ne pas entretenir activement les relations franco-japonaises... Thibaud est ravi de sa visite et ne sait plus ou où donner de l'objectif! Nous essayons de ne pas nous perdre mais m'étant pour l'occasion habillé de rouge, je serai vite reconnaissable. Nous apercevons au loin une longue file d'attente: Il s'agit d'amateurs d'orchidées qui attendent leur tour pour assister à une consultation de spécialistes. Il s y apprendront comment s'occuper des fleurs.


 

Si l'orchidée a peu de besoin, il lui faut tout de même un endroit adapté: L'intérieur d'une maison ou d'un appartement est un bon endroit pour la cultiver, mais il lui faut beaucoup de lumière (surtout l'hiver!) et des températures variant de 18-20° à ...5°C (afin de permettre une nouvelle floraison!) mais prenez garde à ne pas non plus offrir une lumière trop importante et directe l'été. La véranda est parfaite car les variations en température entre le jour et la nuit y sont plus importantes. L'humidité ambiante est aussi un gage de réussite dans la croissance de l'orchidée qui développe alors tiges, feuilles et racines. Si votre fleur manque de lumière, elle produira des feuilles plus longues et plus larges. Ses bourgeons sècheront et tomberont également. L'arrosage idéal consiste à laisser l'orchidée les pieds dans de l'eau de pluie à température ambiante ( la fleur n'aime pas l'eau calcaire) durant une vingtaine de minutes. N'arrosez jamais le cœur de la fleur car celui-ci pourrirait. Ajoutez à la rigueur du fertilisant mais mettez-en très peu car il pourrait détruire les racines de la plante (divisez par deux les doses prescrites sur l'emballage!). Vous pouvez aussi ajouter à l'eau quelques gouttes de jus de citron: La Phalaenopsis adore l'acidité. En règle générale, plus il fait chaud, plus vous devez arroser votre orchidée ( pour une température ambiante de 19-20°, un arrosage tous les 8 à 10 jours suffit en période de floraison!). Et davantage si elle est défleurie. Plus les racines sont importantes, moins les copeaux de bois dans le pot seront nombreux et plus il faudra arroser ( des racines vertes témoignent d'un bon arrosage). Dans son milieu naturel, l'orchidée vit avec 85% d'humidité. Il faut donc entretenir celle-ci: Essayez de maintenir un taux d'humisité de 45° dans votre pièce pour une température de 20° (65% d'humidité s'il fait 25°). Poser la fleur dans un récipient garni de billes d'argile et d'eau fera l'affaire car l'évaporation de l'eau contenue dans les billes favorisera l'humidité. On peut aussi utiliser un brumisateur. Vaporiser l'eau directement sur les feuilles n'est pas conseillée car elle provoque la dilatation des pores des feuilles pendant quelques heures et l'humidité de cette vaporisation ne durera finalement qu'une quinzaine de minutes. Le reste du temps, l'orchidée se desséchera. Lorsque votre fleur arrive en fin de floraison, coupez une partie de la hampe , juste en-dessous de la première fleur et juste au-dessus du nœud d'où partira probablement une nouvelle hampe. Placez alors la hampe florale dans un vase rempli d'eau de pluie contenant quelques gouttes de fertilisant et de jus de citron. Placez le tout dans un endroit frais (15°C est la température idéale!) durant quelques jours, afin de stimuler la formation d'autres hampes florales. Mais attention! Ne vous faites pas d'illusions: La culture de l'orchidée est l'école de la patience!

Le Festival de l'orchidée présente également des compositions artisanales sur le thème de cette fleur:Tableaux, sculptures et décorations (ci-dessous). Des boutiques vous permettent aussi de rapporter à vos amis l'incontournable mouchoir à décor d'orchidée, les petits biscuits créés pour l'occasion, ou bien le bloc de papier à l'effigie de la fleur. Nous tombons soudain sur un stand qui vend des savons en forme de fleurs d'orchidée. Un bon moyen pour personnaliser sa salle de bains! A ce même stand, une dame sculpte des orchidées dans un melon (deuxième photo) et attire ainsi la curiosité des badauds. On vend aussi sur place des kimonos à motifs d'orchidée. Ce n'est pas forcément la tenue adéquate pour descendre chercher son pain mais vous pouvez vous habiller ainsi pour recevoir vos amis et les surprendre tout à la fois. Le moment venu (c'est à dire à midi!), vous achèterez votre bento (coffret repas) que vous dégusterez comme ces dames (troisième photo) dans les tribunes!

 

Et maintenant, un peu d'histoire. Voici l'épopée d'une orchidée noble et riche, celle de Bushido japonais (samouraï) pendant des siècles: L'orchidée Fuukiran. Seuls les samouraïs pouvaient détenir cette plante qu'ils cultivaient avec amour et passion. La première découverte de la fleur eut lieu à Nagasaki ( sur l'île de Kyushu), sur les collines au-dessus du port. L'orchidée Neofinetia falcata dont il s'agit y pousse à l'état naturel, évitant les eaux stagnantes. Elle apparaît pour la première fois dans la littérature botanique, aux alentours de 1600, dans les ouvrages de « Senkaku Ruisho », puis « Kashi Sahen » (vers 1617). La fleur est alors appelée « Keiran Ichimei Fuuran » (Fuuran signifiant l'orchidée du vent). On trouve les conseils d'entretien de la fleur dans le « Kadan Komoku » qui fut écrit dès 1665, confirmant ainsi l'existence de la culture de cette orchidée durant la période Kanbun (1661 à 1673). Pour les Japonais, la beauté et l'intérêt de la plante réside non seulement dans sa fleur mais aussi dans la tige (jiku), le pédoncule floral (kyo), les feuilles (tennba), le point de jonction entre les feuilles et les tiges (tsuke) et même les racines! Et un système de classification a été mis au point par nos amis nippons depuis...342 ans pour répertorier toutes les différentes caractéristiques (répartition géographique de la plante, ses variantes). La classification d'une nouvelle espèce de « Fuuran » (orchidée du vent) en « Fuukiran » (orchidée noble et riche) ne se fait pas aussi facilement et nécessitera plusieurs générations de culture de la fleur avec apparition de spécimens distincts et uniques. C'est seulement à ce stade que la Société Japonaise des Fuukiran déterminera si ledit spécimen mérite (ou pas) d'être classé. Pour ce faire, des caractéristiques culturelles doivent être respectées (façon de cultiver la fleur au sommet d'un monticule de sphagnum, dans un pot artistiquement sculpté et décoré). Caractéristiques qui rappellent la culture des bonsaïs. Décidément, seul le Japonais a ce talent nécessaire pour pousser à l'extrême le souci du détail au point d'exiger de la plante le meilleur d'elle-même. Les origines des « Fuukiran » remontent à l'époque Edo (1660) et à l'époque Bunka Bunsei (1804 à 1830). En ce temps-là, cultiver l'orchidée noble et riche était à la mode. Ce qui fit monter le prix de cette orchidée au point de la mettre ( encore aujourd'hui) hors d'atteinte de certains budgets! Le Shogun Tokugawa Ienari en était par exemple un grand collectionneur. Les visiteurs de sa collection personnelle d'orchidées devaient porter un masque pour ne pas risquer d'expirer de l'air impur pouvant nuire aux plantes. Les chefs de guerre parcouraient le pays à la recherche de nouveaux plants de Fuukiran. Et les samouraïs tentaient constamment de surprendre le shogun en leur rapportant de nouvelles espèces de cette orchidée. Il faudra attendre la fin de la période Edo pour voir disparaître la popularité de la Fuukiran (jusqu'à la fin de la restauration Meiji, en 1868). Le nouveau gouvernement fut bien sûr très influencé par l'Occident et s'inspira beaucoup de la culture occidentale de l'orchidée, délaissant malheureusement les orchidées du vent et les Fuukiran. C'est au début de la période Showa (dans les années 1920), que les fameuses orchidées nippones connaitront une seconde vague de popularité: On nota l'apparition de livres consacrés à ces plantes, ainsi que l'apparition d'associations se consacrant à la classification, à la culture et à la récolte des orchidées. Mais les Fuukiran ne restaient abordables que pour les classes supérieures. Et ne permirent pas à cette orchidée de devenir populaire. Il faudra attendre les années 1975 pour voir renaitre un intérêt véritable pour l'orchidée japonaise. Alors, si vous croisez un jour, sur l'île de Kyushu ou ailleurs une orchidée noble et riche, ou bien une orchidée du vent, ayez une petite pensée pour elle!


 

Après ma visite au festival des orchidées, j'emmène Thibaud au sanctuaire Yushima Tenmangu, non loin de là. Depuis l'ère Edo, le sanctuaire Yushima Tenmangu est adoré par des milliers de personnes comme un lieu célèbre pour ses fleurs de pruniers. On peut ainsi admirer dans son enceinte 300 pruniers. Une démonstration de tambour japonais (taiko) est même offerte aux visiteurs tous les samedis, dimanches et jours fériés durant la période de floraison des pruniers à partir de 15 heures. Le sanctuaire Yushima est un superbe bâtiment abritant un sanctuaire shinto appelé couramment « Yushima Tenjin ». Il fut construit en 458 afin de vénérer Ameno Tajikarao no Mikoto , l'une des déités appartenant à la mythologie japonaise. Ameno Tajikarao signifie le Dieu du pouvoir de la main du ciel. Ce dieu est consacré dans de nombreux sanctuaires ainsi qu'au Jinja Togakushi de Nagano. Le prunier japonais est une espèce de petit arbre caduc originaire de la Chine, qui pousse aussi en Corée et au pays du soleil levant. On le cultive pour ses fruits consommés frais. Il peut mesurer jusqu'à douze mètres de haut et ses rameaux sont brun-marron. Il porte des feuilles à bord doublement crénelés et ses fleurs de 2 centimètres de diamètre font apparaître cinq pétales blancs au début du printemps. Son fruit est la prune japonaise a une chair rosée et est récolté en été. La floraison du prunier japonais est précoce et devance celle des cerisiers de plus de six semaines. Elle est aussi très abondante et dégage un parfum délicieux qui embaume l'air. Les fleurs, sensibles aux gelées printanières, en font un arbre adapté aux hivers doux. Ce prunier tout droit venu de Chine fut importé au Japon il y a 200 à 400 ans. Les Chinois apprécient tellement son fruit qu'ils en font des bonbons réputés pour faciliter la digestion. On en fait aussi des fruits confits. Mais aujourd'hui, pas question de fruits confits! Malheureusement, la floraison de ces arbres ne fait que commencer et je me contenterai, cette fois encore, que de quelques photos (ci-dessous). A peine arrivé au sanctuaire, nous rencontrons un comité japonais anti-nucléaire. Nous échangeons quelques instants sur la situation des deux pays en matière d'énergie et immortalisons notre rencontre par la photo ci-dessous). Une belle journée s'achève encore au pays du soleil levant …


 

 

INFOS PRATIQUES:

 


  • Festival 2013 du Grand Prix international de l'Orchidée, au Tokyo Dome City de Tokyo (Japon, du 16 au 24 février 2013. Ouvert de 10h00 à 17h30. Prix du billet: 2000 yens. A cinq minutes de la station de métro JR: Suidobashi (Sobu Line).

  • Fédération Française d'amateurs d'orchidées: http://ffao.free.fr/

  • Sanctuaire Yushima Tenmangu: http://www.yushimatenjin.or.jp/pc/eng-page/english.htm

     

    Station Métro Yushima (ligne JR Yoshida).

 










 



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