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L'Histoire de Guangzhou
(Province de Guangdong, Chine)
Heure locale


Mardi 4 juin 2013

 

Guangzhou essuie à cette époque de l'année des orages à répétition. Quotidiennement, à partir de la mi-journée, il est fréquent de voir tomber des rideaux d'une pluie chaude qui vous fait l'effet d'une douche en quelques minutes. Mieux vaut avoir sur soi un parapluie. C'est ce que j'ai fait en sortant de mon hôtel pour me diriger cette fois vers le musée de Guangzhou, situé dans le parc Yue Xiu. Fondé en 1929, ce musée fut le premier musée d'histoire généraliste locale en Chine. On y trouve une exposition permanente sur l'histoire de la ville, en remontant 5000 à 6000 ans en arrière. Abritée à l'intérieur du Pavillon de Zhenhailou (en photo ci-dessous), cette exposition permet d'admirer mille objets sur cinq niveaux. Je n'explorerai cette fois que les trois premiers niveaux de ce bâtiment considéré comme le premier pavillon au sud des « cinq montagnes ». Une visite ultérieure nous permettra de découvrir les us et coutumes de Guangzhou. Le musée comprend non seulement le Pavillon de Zhenhailou mais aussi le Pavillon de Meishuguan, le mémorial de la guerre contre le Royaume-Uni menée par le peuple de Sanyuanli et le mémorial de l'ancien siège du poste de commandement d'insurrection « 3-29 ». Revenons pour l'instant sur le Pavillon de Zhenhailou: L'architecture antique du lieu évoque la vieille ville des dynasties Ming et Qing. Zhenhailou est aussi surnommé « Wanghailou (le pavillon pour regarder la mer), ou bien le « pavillon à cinq étages ». Construit la treizième année du règne Hongwu de la dynastie Ming, c'est à dire en 1380, ce pavillon fait partie d'un plan de construction mis au point par le Général Zhu Lianzu alors chargé de la défense de Guangzhou. Celui-ci avait décidé d'agrandir la ville en construisant des murailles au nord de celle-ci (murailles traversant la montagne Yue Xiu) et en bâtissant le pavillon de Zhenhailou en son sommet. Depuis ce pavillon, on peut en effet profiter d'une vue d'ensemble sur la ville. L'endroit attira également poètes et gens de lettres venus exprimer leur admiration sur ce lieu il y a plusieurs centaines d'années. L'endroit sera d'ailleurs classé au premier rang des attractions de Guangzhou sous la dynastie Qing. La partie est du pavillon est utilisée pour accueillir les expositions temporaires tandis que la partie ouest abrite une galerie de documents historiques sous la forme de stèles ainsi que les canons de défense de la dynastie Qing. On peut ainsi voir ci-dessous (deuxième photo) un canon avec carabine intégrée qui fut conçu par la firme allemande Krupp. Fixé autrefois sur un rail annulaire, l'engin était capable d'ajuster son angle de tir et possédait deux calibres: Celui de 22 cm, fondu en 1897, servait à défendre le Fort de Xieshan à Huanpu lors de la guerre sino-japonaise en 1894. L'autre, de 12,5 cm, fut fondu en 1887, dix ans auparavant.


 

Aujourd'hui capitale de la province du Guangdong, Guangzhou reste le berceau d'un mythe et d'une longue civilisation. Au rez-de-chaussée du pavillon de Zhenhailou, se trouve sur la droite la statue des cinq chèvres (ci-dessous), une pièce originale que l'on doit à Yin Jichang, Kong Fanwei et Chen Benzong, sculpteurs cantonnais, qui la réalisèrent en 1959 d'après un mythe local. On prétend en effet qu'il y a très longtemps, cinq fées, juchées sur cinq chèvres, survolèrent la ville et offrirent cinq brassées de maïs aux habitants, garantissant à jamais la fertilité des terres. Puis, ces mêmes fées s'évanouirent dans le firmament tandis que les chèvres, elles, se figèrent dans la pierre. D'où le surnom de Guangzhou: La ville des chèvres, ou « ville du maïs ».


 

La civilisation ancienne de l'endroit remonte au néolithique et de nombreux trésors culturels démontre que Guangzhou fut le lieu de naissance de la civilisation chinoise, des millénaires durant. La ville fut d'abord la capitale de trois dynasties locales: Les Nanyue (de 204 à 111 avant J.C), les Han du Sud (de 917 à 971 après J.C) et les Ming du Sud (de 1644 à 1664). Guanzhou fut aussi le point de départ de la Route de la soie grâce à l'importance de son port qui donnait accès à l'océan indien mais aussi à la Mer rouge et à l'océan Pacifique, permettant ainsi un mélange d'autres cultures avec la culture chinoise. Guangzhou mit enfin à profit sa situation géographique privilégiée pour développer très tôt ses échanges commerciaux. On considère que c'est ici que débuta l'histoire moderne du pays (avec la guerre de l'Opium dès 1840 et la Révolution démocratique de 1911) faisant de Guangzhou le précurseur de la démocratie moderne, du capitalisme national et de la science occidentale. Durant le régime du parti communiste chinois, tout particulièrement durant les années 80, la ville devint un lieu important pour le développement économique et le commerce international. La Foire de Guangzhou qui se tient deux fois par an (en avril et en octobre) est d'ailleurs l'une des plus grandes foires commerciales au monde où on y négocie aussi bien le textile que l'électronique.


 

Le premier étage de l'exposition aborde la naissance de la civilisation des Yue du Sud. Cette dynastie, qui régna de 203 à 111 avant J.C, possédait le Royaume de Nanyue qui s'étendait des provinces actuelles du Guangdong et du Guangxi jusqu'au nord du Vietnam actuel. Son fondateur, Zhao Tuo, déclarera plus tard la guerre aux Han. La position privilégiée de ce qu'on appelait alors Panyu (un nom emprunté à la dénomination de deux montagnes, Pan et Yu, qui entourent la ville actuelle) faisait alors l'objet de nombreux échanges commerciaux. Point de jonction des affluents est, ouest et nord de la Rivière des Perles, la ville était nichée entre les montagnes et faisait face à la mer. Bénéficiant d'un climat subtropical, elle offrait déjà un temps chaud et humide toute l'année. Durant la Préhistoire, l'endroit était recouvert de jungle, de pièces d'eau, de rivières et d'îles, ce qui permit à la civilisation néolithique de vivre de l'agriculture, l'élevage du bétail et la pêche. Des découvertes archéologiques prouvent l'existence de cette civilisation, 6000 à 7000 ans avant notre ère.

En 214 avant J.C, le premier empereur des Qin, Qin Shi Huang, envoya son armée conquérir Lingnam afin d'y établir trois préfectures: Nanhai (centre de Panyu, l'actuelle ville de Guangzhou), Guilin et Xiang. Succédant à la dynastie Zhou, la dynastie des Qin mit fin à des siècles de féodalité en jetant les bases administratives d'un Etat centralisé, en favorisant l'unité culturelle du territoire et en ouvrant l'histoire impériale chinoise. Qin Shi Huang connaitra un règne court durant lequel il conquerra l'ensemble des Royaumes combattants, standardisera l'écriture, la langue, les monnaies, les poids et mesures, et fondera la Grande muraille de Chine. Son caractère cruel et autoritaire fera pourtant de lui un homme détesté par son peuple.

A la fin de la dynastie des Qin, le souverain local Zhao Tuo unifiera les préfectures de Guilin et de Xiang pour établir le Royaume des Nanyue qui aura pour capitale la vieille ville de Panyu. Puis se couronnera lui-même du titre de Prince Wu. Panyu sera ainsi tour à tour capitale du royaume Nanyue, puis capitale de la province de Guangdong sous la dynastie des Han et enfin siège de la Préfecture de Guang en 226. Et les Han (ethnie majoritaire) et les Yue (ethnie minoritaire) de cohabiter en paix tout en développant fortement le commerce et les techniques d'architecture. Sous le règne de l'empereur Wu (de 140 à 87 avant J.C), durant la dynastie des Han de l'ouest, d'importantes flottes de navires chinois prenaient la mer au départ du port de l'actuelle Guangzhou pour se diriger vers le sud-est et le sud de toute l'Asie. Ces flottes atteindront même plus tard le Golfe Persique (sous le règne des Han de l'est, de 25 à 220 après J.C). Sous le règne des Han de l'est, il existait aussi des bateaux de transport de marchandises qui naviguaient sur les rivières intérieures (comme sur cette photo ci-dessous, ce bateau fait de poterie, qui fut exhumé de Honghuagang en 1954). Cette période durant laquelle le commerce international va bon train, est attestée grâce aux nombreuse marchandises retrouvées dans les sépultures des périodes Han: Cornes de rhinocéros, brûleurs d'encens, vaisselles, ornements faits de perles et d'ivoire...Cette cité qui allait devenir Guangzhou était déjà à l'époque un grand port du sud de la Chine ancienne et le point de départ de la Route de la soie.


 

En 226, lors de la période des trois royaumes, l'état de Jiaozhou (qui incluait la région de Lingnan, alors constituée du Guangdong, du Guangxi, du Hunan, des provinces de Jiangxi et du nord Vietnam) fut séparé en deux: Le Jiaozhou d'un côté et le Guangzhou de l'autre. La région connaitra une longue période de paix et de prospérité durant la règne des dynasties du nord et du sud. Elle recevra un apport important d'immigrants venus tout droit du nord de la Chine qui apporteront leur culture et leur savoir-faire. Sous la dynastie des Tang, la région constituera un grenier à trésors pour les empereurs: Les techniques de construction navale s'améliorent alors considérablement et le commerce connait un essor spectaculaire. Guangzhou devient le port du commerce de la soie (de 618 à 906) mais aussi le point de départ de la plus longue route maritime au monde. A cette époque, de nombreux navires étrangers accostent à Guangzhou, chargés de trésors et le port devient bientôt le premier port de commerce international et l'une des principales ressources financières de la cour des Tang (cela sera encore vrai sous les dynasties Ming et Qing). En 716, le représentant des Tang, Zhang Jiuling, reconstruit la route de Dayuling, améliorant ainsi la liaison nord-sud. Guangzhou compte une population étrangère grandissante, au IX ème siècle, estimée à 100 000 personnes. En 758, la ville est toutefois mise à sac par des pirates arabes et perses. La cité abritait trois villes en une depuis la dynastie Tang: Yasheng, Zicheng et Luocheng. En 917, lors de la chute des Tang, le souverain local, Liu Yan s'intronisa empereur du Royaume des Han du sud. Celui-ci sera défait par l'armée des Song en 971. Cette dynastie des Song régnera en Chine de 960 à 1279. Elle instaurera le premier gouvernement au monde à émettre des billets de banque. Cette dynastie connaître le premier usage de la poudre à canon mais aussi l'utilisation de la boussole indiquant le vrai nord. Les Song du nord débutèrent en 1068 le construction de la ville est (à l'est de Zicheng). Cinq ans plus tard, ils bâtissaient la partie ouest afin de protéger à la fois le commerce en cours de développement et les marchands étrangers qui résidaient sur place. 1380 vit le début de la dynastie Ming et le Marquis Zhu Liangzu rebâtit Guangzhou en unifiant les trois villes déjà existantes, constituant ainsi un ensemble qui allait plus tard s'étendre plus au nord. Sous la dynastie Qing, deux autres villes furent construites sur les flancs est et ouest de Guangzhou, jusqu'à atteindre les rives de la Rivières des Perles et donner les limites à la ville actuelle.


 

Sous la dynastie des Song, la céramique tient aussi une place non négligeable. Alors que les fours chinois du nord produisaient des pièces destinées à la cour impériale, les fours du sud du pays produisaient de la vaisselle ordinaire destinée à l'usage local mais aussi à l'exportation, ressemblant aux articles produits dans le nord du pays. Le four de Xicun était localisé au nord de Guangzhou et produisait des porcelaines destinées à l'exportation et qui auraient pu être réalisées par n'importe quel autre four chinois. Cette vaisselle était recouverte d'une glaçure le plus souvent bleu pâle, parfois noire, marron, assortie de tons verts (obtenus à des températures de cuisson plus basses). On relève 29 types d'articles (parmi lesquels des bouilloires à tête de phénix comme sur la photo ci-dessous, des jarres, des vases, des boites... ) dont de grandes assiettes aux tons bleu pâle, avec des chrysanthèmes et des pivoines marrons en guise de décorations au centre et des motifs floraux sur les bords. L'influence arabe est parfois de mise et les peintures sont colorées ou à dominante marron. De nombreux restes de cette vaisselle furent retrouvés au fond de la mer au large des îles de Xisha et dans le sud-est asiatique.


 

Je termine pour aujourd'hui cette visite au 2ème étage en m'attardant sur les conduites d'eau en bambou (ci-dessus). Autrefois, il ne pleuvait presque pas à Guangzhou durant l'automne et l'hiver. De plus, les marées faisaient remonter l'eau de mer loin dans la Rivière des Perles et la salinisation de l'eau douce rendait sa consommation impossible pour les habitants et pour l'agriculture. Sous les Song, un certain monsieur « Su » eut l'idée de concevoir des canalisations en creusant des bambous. Ces tuyaux transportaient ainsi l'eau douce des criques vers les terres plus sèches et les villages dépourvus d'eau consommable. Il existait aussi des conduites de pierre pour transporter le précieux liquide. Une idée géniale n'est-ce pas ?

 

 

INFOS PRATIQUES:

 


  • Musée de Guanzhou, Zhenhailou, Jardin Yue Xiu à Guangzhou. Tel: 020 835 50 627 et 020 835 45 253. Site internet: http://www.guangzhoumuseum.cn/

    le Pavillon de Zhenhailou est ouvert toute l'année de 9h00 à 17h30. Le Pavillon de Meishuguan est ouvert tous les jours de 9h00 à 17h30 ( sauf le lundi). Droit d'entrée: 10 yuans. Brochure en français disponible au sas de sécurité.

  • D'autres photos de cette visite sont disponibles sur le site: Médiathèque-->Album photos Asie













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