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Kitakata
(Préfecture de Fukushima, Tohoku, Japon)
Heure locale


Samedi 4 octobre 2014

 

Toujours dans le Tohoku, je consacre aujourd'hui ma journée à visiter la petite ville de Kitakata, située à quinze minutes de train d'Aïzu-Wakamatsu. Le mot Kitakata signifie « endroit du nord » et la ville fut fondée le 31 mars 1954. Assurément, la spécialité de cette ville sont les ramen, ces pâtes japonaises incontournables. Et çà tombe bien car on m'apprend qu'il existe un musée des Ramen. Je m'y rends sans tarder et découvre une maison âgée d'une centaine d'années, ancienne boutique de kimonos et dont la façade ressemble étrangement à une entrée de sanctuaire shinto. « C'est un sanctuaire uniquement récréatif » me répond la dame qui me reçoit très gentiment sur place. Un petit sanctuaire (ci-dessous) est tout de même installé avec, en son centre, le fameux bol qui sert à servir les pâtes. Il existe, rien qu'à Kitakata, quelques 120 restaurants de ramen. Impressionnant ! Je n'y couperai pas et irai, moi aussi, déguster mes ramen à l'heure de midi. Les pâtes de Kitakata sont plutôt épaisses et sont généralement servies dans un bouillon salé, accompagnées de viande de porc et de niboshi (minuscules sardines). En ce qui me concerne, je ferai l'impasse sur ces pauvres bestioles !


 

Mets japonais par excellence, les ramen sont constituées de pâtes dans un bouillon à base de poisson ou de viande (c'est selon) et souvent assaisonné au miso (ce qui lui donne ce goût salé) ou à la sauce de soja (qui fut importée de Chine au début du XX è siècle). Ces pâtes, d'origine chinoise, tirent leur nom des la mian (nouille tirée), et sont des pâtes de blé étirées à la main par le cuisinier. On les doit à la minorité musulmane Hui de Lanzhou (Chine), dans la Province du Gansu. Elles furent importées au Japon durant l'ère Meiji et ont depuis été adoptées comme plat japonais. Il semble que la première boutique de ramen ait autrefois vu le jour à Yokohama (près de Tokyo), port important et lieu d'arrivée de nombreux immigrants chinois. Il s'agissait alors de shio ramen, à base de sel (shio) mais les Japonais y rajoutèrent leur sauce au soja. Ainsi furent créées les shoyu ramen qui se sont répandues dans l'archipel à partir des années vingt. En 1958, Nissin Foods lance les premières ramen instantanées, puis, en 1971, ses fameuses Cup Noodles, au moment même où MacDonald s'installe au Japon. Heureuse initiative, car le produit connut un succès immédiat auprès des Japonais, et leur permettra de s'alimenter plus sainement.

Il existe un très grand nombre de ramen et c'est le bouillon qui détermine les grandes familles de ces pâtes : celles-ci sont accompagnées de viande ou de poisson, et certaines régions sont même réputées pour leurs spécialités de ramen, comme à Hokkaido et à Kyushu (ou les pâtes sont plus fines). Les produits d’accompagnement du bouillon consiste en de la viande (souvent du chasu, porc rôti à la chinoise) mais aussi des œufs mollets cuits dans un bouillon de sauce soja, du menma (bambou fermenté), de la ciboule, des champignons noirs, du gingembre mariné, du beurre, du maïs, des nori (algues séchées), de l'ail ou un morceau de narutomaki (décoration culinaire japonaise à base de pâté de poisson, cuit à la vapeur, de couleur blanche présentant une spirale rose orangé à l'intérieur) comme sur la photo ci-dessous.


 

Ces nouilles ont la particularité de contenir une levure et sont produite droites ou ondulées, de diverses épaisseurs et longueurs. La plupart sont faites à partir de quatre ingrédients de base : farine de blé, sel, eau, et kansui (type d'eau minérale alcaline, contenant du carbonate de sodium et du carbonate de potassium). Le terme Kansui provient de l'eau du lac de la Mongolie intérieure Kan qui contenait une grande quantité de ces minéraux. L'utilisation de cet ingrédient donne aux nouilles une teinte jaunâtre ainsi qu'une texture ferme. On peut, à défaut, remplacer le kansui par des œufs. Le Japon offre ainsi des centaines de milliers de restaurants de ramen et les chiffres de 2008 annonçaient plus de 65 milliards de bols de ramen instantanées vendus cette année-là dans le monde. Le prix de ce plat (en boite ou pas) reste modeste puisque je paierai mon grand bol de ramen 650 yens (à peine 5 euros!) Les yatai (c'est ainsi qu'on appelle les restaurants servant ce type de mets) sont souvent ouverts tard le soir et un bon nomikai (une soirée organisée par les Japonais pour se détendre autour d'une bière ou d'un saké), doit, dit-on, se terminer par un grand bol de ramen avant de rentrer chez soi. Au Japon, on trouve même des magazines consacrés aux ramen et à leurs amateurs, avec des reportages sur de célèbres restaurants, des comparatifs...


 

Après ma visite du musée des ramen, je me promène dans cette petite ville tranquille et admire certaines maisons traditionnelles (ci-dessus). J'ai bien tenté de trouver des croissants avec un bon café mais rien à faire ! Ici, on ne mange que des pâtes. Et peu de sucreries. Kitakata ressemble à une petite cité tranquille. On me sourit et on me salue lorsqu'on me croise. Un passant me demandera même l'autorisation de me prendre en photo avec l'affiche d'une prochaine fête devant avoir lieu fin octobre. Il est vrai que les étrangers ne courent pas les rues (je n'en ai rencontré aucun aujourd'hui) compte tenu, je suppose, des informations alarmistes distillées par nos médias occidentaux sur le taux de radioactivité dans cette région. Je rencontre plusieurs kura, ces entrepôts traditionnels japonais. Faits en bois, en pierre ou en argile, ces constructions permettaient de stocker autrefois en toute sécurité les différentes marchandises. Jadis, le kura servait à entreposer des objets précieux et on estime que le premier kura fut construit durant la période Yayoi. A proximité de la rue Fureai, se trouve le Musée du saké Yamatogawa. Je me dis que cette terre est bénie des dieux et offre des mets délicieux. Après le plat, le breuvage...Cette brasserie (ci-dessous) fut fondée en même temps que la Révolution française, en 1790, comme se plait à le souligner Mr Sato Yuemon. Et cela fait 220 ans que celle-ci produit du saké et il y en a pour tous les goûts puisque, désormais, la palette de saké est infinie. Cela va du saké de table jusqu'au saké de luxe (comme le Tadatona, qui repose en cave pendant trente ans avant d'être vendu 210€ la bouteille). Tout dépend du degré du saké, du polissage des grains de riz, du temps de fermentation et de l'ajout (ou pas) d'alcool. On trouve même désormais des sakés à base de fruits (comme ce saké à la pêche de Fukushima). Qui dit région de Fukushima, dit crainte de contamination depuis l'explosion du réacteur nucléaire situé à cent kilomètres d'ici, mais à cet argument, la brasserie Yamatogawa répond que tout est contrôlé : l'eau (qui provient des Monts Ide), le riz complet, puis le riz devenu blanc (après lavage) et le saké lui même. Les résultats révèlent des taux de 0 à 25 becquerels par kilo (le seuil de tolérance étant fixé à 100 becquerels). Ce saké est écoulé dans tout le Japon (dont 40% auprès d'une clientèle de particuliers) et à l'étranger. La brasserie n'utilise que son riz pour fabriquer le précieux breuvage et possède, pour ce faire, 25 hectares de rizières. Du riz garanti 100% bio, arrosé avec un eau pure venue des montagnes environnantes. La région de Kitakata produit d'ailleurs beaucoup de riz puisqu'on compte environ 4600 kura (entrepôts à riz) sur place.


 

En 1990, une nouvelle unité de production a été créée dans la banlieue de Kitakata, où a été installé le Pavillon culturel Yamatogawa Hoppo. En pénétrant dans ce qui est désormais un musée, je découvre des centaines de bouteilles de saké alignées (ci-dessous). Je traverse préalablement une salle présentant d'anciens outils qui servirent autrefois à la confection de la boisson (deuxième photo). Avant d'arriver à la boutique où l'on me proposera de déguster du saké. Cette boisson, dit Sato Yuemon, donne du courage mais c'est aussi un désinfectant, qui agrémente les repas, et favorise les rencontres amoureuses. Cela ne s'invente pas !

 

Avant de reprendre mon train pour Aïzu-Wakamatsu, je m'arrête quelques instants au temple Anshoji (ci-dessous) qui fut fondé en 1422. Le bâtiment original brûla en 1880 et l'actuel temple noir et blanc, construit dans le style architectural kurazukuri le remplace depuis. Ce style architectural était habituellement utilisé pour construire les kura (entrepôts) de Kitakata, et il est surprenant d'observer que le temple utilisa ce même style de construction.


 

 

INFOS PRATIQUES :


  • Musée des Ramen, rue Fureai, à Kitakata. Tel:0241 24 3131. Ouvert tous les jours de 10h00 à 16h00. Entrée gratuite. Explications uniquement en japonais.

  • Musée du Saké Yamatogawa, à Kitakata. Tel:0241 22 2223. Ouvert tous les jours de 9h00 à 16h30. Entrée gratuite. Boutique sur place. Site internet : http://www.yauemon.co.jp/

  • Temple Anshoji, 4706 Teramachi, à Kitakata. Entrée libre.

  • Site de la ville : http://www.city.kitakata.fukushima.jp/

  • Restaurant de ramen Asian, Kitakata-shi Asa, 2-Chome, Kitakata. Tel :0241 23 6161. Ouvert tous les jours de 7h00 à 15h00. Accueil très sympathique.












 



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