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Tokaïdo, la Route de la Mer de l'Est - Goyu et Akasaka
(Préfecture d'Aichi, Japon)
Heure locale


Jeudi 25 février 2016

 

C'est par un temps ensoleillé mais accompagné d'un vent glacial que je prends le train pour me rendre à Goyu, la 35 ème station de la route du Tokaido. Goyu est un petit village qui est désormais rattaché à la ville de Toyokawa. Cette dernière fut fondée le 1er juin 1943 et est symbolisée par deux symboles : le pin noir et l'azalée. Près du bureau de poste de Goyu se trouve un minuscule musée historique où une charmante dame m'accueille. Au milieu de l'unique salle (ci-dessous en photo) trône une maquette de la région qui décrit Goyu ainsi que la station suivante, Akasaka. D'un côté la campagne et de l'autre la montagne et entre les deux, la célèbre route shogunale chemine encore aujourd'hui.

Goyu-shuku fut établie en 1601 sur ordre de Ieyasu Tokugawa. Du temps de sa plus grande prospérité, la bourgade détenait quatre honjin (la moyenne étant de deux établissements de ce genre pour la plupart des étapes). L'estampe de la station (deuxième photo) décrit la rue principale de la shukuba au crépuscule, alors que deux rabatteuses très entreprenantes (la station était d'ailleurs connue pour cette singularité) tentent de conduire des voyageurs passer la nuit dans leur auberge ou leur maison de thé. A l'époque Meiji, Goyu devint un temps le bureau officiel de l'office central du district de Hoi, mais lorsque la ligne ferroviaire principale Tokaido contourna la bourgade, cette dernière ne connaitra pas le même essor que ses voisines, Mito et Gamagori. Il faudra attendre la création de la Nagoya road, qui allait devenir la ligne ferroviaire principale de la compagnie Meitetsu pour q'une gare y soit ouverte. L'essor restera limité et Goyu fusionnera avec Toyokawa en 1959. C'est par la Meitetsu line que j'atteindrai Goyu. Entreprise privée, cette compagnie gère des lignes ferroviaires dans les préfectures d'Aichi et de Gifu, et détient son siège à Nagoya. La ligne de trains appartient au groupe industriel Meitetsu qui possède des actifs dans le transport, la distribution et l'immobilier. C'est le 21 juin 1921 que fut officiellement fondée la compagnie Nagoya railroad (autre nom de la ligne Meitetsu) mais la compagnie ferroviaire est le fruit d'une fusion d'autres sociétés de chemin de fer encore plus anciennes, dont la compagnie de tramway à cheval d'Aichi, Aichi Basha Tetsudo, qui fut à l'origine fondée en 1894 et qui est la plus ancienne de toutes. Les trains de la ligne Meitetsu sont reconnaissables grâce à leur livrée rouge, bien que les derniers modèles aient des couleurs à dominante blanche ou acier. Le Meitetsu série 7000 Panorama, lui, roula jusqu'en 2009 et reste toutefois le train le plus célèbre de la compagnie. Entré en service en 1961 (l'année de ma naissance), il offrait pour l'époque un design novateur, inspiré d'un concept italien, avec la cabine du conducteur au-dessus des passagers qui pouvaient ainsi profiter d'une vue panoramique.


 

En traversant Goyu, je prendrai sur ma gauche (un panneau routier en anglais indique la direction) pour me rendre au temple Toringi (ci-dessous) puis rebrousserai chemin pour regagner la route du Tokaido en direction d'Akasaka, la prochaine station. A la sortie de Goyu se dresse une colonnade de pins (deuxième photo), un des rares témoignages qui reste de l'ancienne shukuba (station) et une scène bien connue des touristes. C'est en 1604 que furent plantés les trois premiers pins qui seront ensuite classée comme monuments naturels en 1944 puis, répertoriés parmi les cent plus beaux pins du Japon. De Goyu, on pouvait rallier plusieurs routes, parmi lesquelles les routes Kamigoi, Nakauemachi, Naka-machi, Yoko-machi et Chaya-machi.

 

Je marche prudemment au bord de la route du Tokaido, très étroite à cet endroit et pourtant ouverte à la circulation à double-sens. Peu après être entré dans Akasaka-juku, 36 ème étape du parcours, je ferai une halte quelques instants au sanctuaire Sekigawa (ci-dessous) car c'est là que Matsuo Basho écrivit ce haiku faisant allusion à la proximité (moins de deux kilomètres) des deux stations : Natsu no suki/ Goyu yori idete/ Akasaka ya (A lu lune d'été / quitte Goyu/ et atteint Akasaka). Plus connu sous son nom de plume Basho (le Bananier), ce poète japonais du XVII ème siècle, c'est à dire du début de l'époque Edo, sera considéré comme l'un des quatre maitres classiques du haïku japonais (avec Buson, Issa et Shiki). Auteur d'environ 2000 haïkus (petit poème très bref visant à dire et à célébrer l'évanescence des choses), et influencé par Akira Kisaï, Basho rompra avec les formes de comique vulgaire du haïkaï-renga du XVI ème siècle de Sokan, en proposant un style de poésie plus subtile qui crée l'émotion en suggèrant le contraste ambigu ou spectaculaire d'éléments naturels simples opposés ou juxtaposés.

 

Akasaka-juku était comme les deux stations précédentes bien connue pour ses meshimori-onna (servantes d'auberges). Ces femmes embauchées par les hatago (simples gites) et les honjin (auberges) seront d'abord de simples servantes avant de se livrer plus tard à la prostitution, dans le but de « fidéliser » la clientèle de passage. L'estampe d'Hiroshige (ci-dessous) décrit une auberge typique en divisant la scène en deux parties à l'aide d'un grand cycas : à droite, on aperçoit les voyageurs en train de prendre leur diner, et à gauche, les prostituées qui se maquillent et se préparent pour leur activité nocturne. C'est ainsi qu'Akasaka était devenue au fil du temps une ville-étape très populaire auprès de nombreux voyageurs.

Sur mon chemin, j'aurai la chance de trouver une ancienne auberge, Ohashi-ya (deuxième photo), qui ouvrit ses portes pour la première fois en 1649, moins d'un demi-siècle après la création du Tokaido. Le bâtiment date semble t-il de 1716 mais a fermé depuis ses portes. A travers les vitres, je peux toutefois apercevoir ce à quoi ressemblait l'intérieur de l'auberge (troisième photo). Un recensement de 1733 comptait jusqu'à 83 auberges à Akasaka, et Ohashi-ya est à l'heure actuelle la seule survivante de cette époque. Pour combien de temps ?

 

INFOS PRATIQUES :


  • Depuis la gare de Toyohashi, pour vous rendre à Goyu, prendre le train de la ligne Meitetsu sur le quai 3, descendre à la gare de Kou puis prendre un omnibus quai 1 pour Goyu. Coût : 300 yens.

  • Musée historique de Goyu, derrière le bureau de poste (près de la rivière). Ouvert tous les jours (sauf le lundi) de 10h00 à 16h00. Entrée libre. Prise de photos autorisée sans flash.

  • Site officiel de la compagnie ferroviaire Meitetsu : http://www.meitetsu.co.jp/eng/?_ga=1.146641970.723331048.1456376258












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