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Le Musée Faure
(Aix-les-Bains, Savoie, France)
Heure locale

 

Mercredi 25 septembre 2019

 

Il est un musée qu'il ne faut pas manquer lors de votre passage à Aix-les-Bains : le Musée Faure. Celui-ci doit tout à la générosité du Docteur Jean Faure, amateur d'art, qui légua pas moins de 220 œuvres impressionnistes à la ville. Par ailleurs, le musée abrite la deuxième collection française d'oeuvres de Rodin, sans oublier la reconstitution de la chambre du poète Alphonse Lamartine qui vécut ici et s'inspira de la beauté des paysages pour nous offrir ses plus beaux poèmes. Quant au généreux donateur, il avait posé une seule condition : faire en sorte que ses œuvres soient accessibles au plus large public. C'est chose faite !

 

Disparu en 1942, le vœu de Jean Faure ne sera exaucé que sept ans plus tard, après la seconde guerre mondiale. Installé dans une villa de type italien, surnommée « la Villa des Chimères » et bâtie en 1902, le musée Faure ouvrira ses portes en 1949, agrémenté d'un jardin en libre accès où figurent quelques œuvres dont une statue d'Alfred Boucher et une autre de Mars Vallett. Dès mon arrivée, je rencontre l'équipe du musée, dont Isabelle Couette et Amélie Pilon (guide-conférencière à la ville d'Aix-les-Bains) qui mettront tout en œuvre pour me faire découvrir l'endroit.

J'avoue être surpris par une telle accumulation d'oeuvres par un seul homme. Certes, le Docteur Jean Faure, d'origine gasconne recevra une éducation bourgeoise, et effectuera de brillantes études qui le conduiront à devenir docteur en pharmacie. Vite attiré par le monde des arts, notre homme deviendra membre du Comité Français des Expositions dès 1885, avant de fréquenter le milieu des Beaux-Arts et de s'installer à Aix-les-Bains. Entrepreneur, il s'associe en 1904 avec le Docteur Paul Dussuel pour fabriquer le célèbre élixir Bonjean recommandé pour contrer bien des malaises. C'est la vente de ce produit qui va faire la fortune des deux médecins. Dès lors, Jean Faure passera le plus clair de son temps entre Paris et Aix-les-Bains, en continuant de cumuler les succès dans le domaine paramédical. Parallèlement, il fréquente les salons parisiens, rencontre diverses personnalités, dont André Schoeller, marchand d'art parisien, qui lui apportera sa précieuse expertise pour l'acquisition de sa collection. Et le médecin de bâtir peu à peu sa fortune personnelle avec des placements judicieux et l'accumulation d'oeuvres d'art.

 

Eclectique, Jean Faure collectionnera ainsi boites à médecine, Netsuke (objet vestimentaire traditionnel japonais), ouvrages aux illustrations licencieuses, peintures et sculptures impressionnistes et pré-impressionnistes (qui forment l'essentiel de la collection du musée). Des œuvres choisies avec le plus grand soin, qui témoignent de la sensibilité artistique de l'amateur d'art. Homogène, cette collection laisse à penser que notre docteur avait bien en tête un projet muséal. Musée devenu finalement réalité pour la plus grande joie des visiteurs qui déambuleront sur les trois niveaux offerts par la villa : le rez-de-chaussée accueille ainsi quatre à cinq exposition temporaires par an, consacrées la plupart du temps aux œuvres d'artistes contemporains ou régionaux. On y voit aussi des peintures et sculptures de styles divers datant des 17è au 20è siècle, dont des œuvres de Foujita, Fantin-Latour, Hayez, Carpeaux, Alfred Boucher ou Barye...Le premier étage, lui, est consacré à la présentation d'oeuvres impressionnistes ou proches de l'Impressionnisme. Au dernier étage, se trouve la collection de sculptures de Rodin, la reconstitution de la chambre de la pension Perrier (depuis disparue) où vivait Alphonse Lamartine en 1816, lors de sa rencontre avec Julie Charles. Enfin, le lieu abrite également une collection de faïences et de céramiques issue du premier musée aixois, fondé en 1872 par le Vicomte Ludovic Napoléon Lepic, qui fut peintre, graveur, et ami de Degas.

 

Certes, le premier étage nous invite à passer du romantisme à l’impressionnisme et du néo-impressionnisme au symbolisme, mais au fait, qu'est-ce que l'Impressionnisme ? Il s'agit d'une recherche commune à certains artistes (de 1874, qui correspond à la première exposition de ce groupe, à 1886 leur dernière présentation d'oeuvres) face à la problématique de leur art. Et de proposer de nouvelles lois de la couleur et de la lumière. Cela se traduira concrètement par la suppression des contours, une nouvelle variété de tons (tons clairs et couleurs pures apparaissent, qu'elles soient accordées ou contrastées, en supprimant les gris et les tons intermédiaires), de nouveaux éclats de lumière et des touches larges sur les œuvres. On rompt ainsi avec les formes admises jusque là. Et Claude Schaeffner de rajouter : « l’Impressionnisme suggère les formes, les distances, par les vibrations et les contrastes de couleurs ».

Le visiteur pourra ainsi admirer les œuvres de plusieurs peintres aux styles différents : Thomas Couture et Ernest Meissonier, peintres « pompiers », c'est à dire des peintres officiels de scènes historiques, auteurs de grandes fresques. François- Frédéric Grobon et François-Joseph sont quant à eux des paysagistes romantiques régionaux, qui voisinent avec d'autres artistes comme Stanislas Lépine (un des premiers peintres impressionnistes et premier artiste à peindre la Seine et des paysages parisiens), Camille Corot (qui démocratise le paysage par l'observation directe de la nature), Paul Cézanne (et sa « Vue de Bonnières »), Camille Pissaro (peintre impressionniste se revendiquant peintre de la nature agreste et de la vie paysanne), Edgar Degas (maitre incontesté du pastel), ou Charles Cottet (peintre d'origine savoyarde et important peintre post-Impressionniste)....


 

Accompagné d'Amélie Pilon, guide-conférencière, je me rends maintenant au deuxième étage du musée Faure où nous attend la salle Auguste Rodin, et ses 34 sculptures : les bustes de Danielli, Carrier-Belleuse et Manon Lescaut marqueront les débuts du sculpteur, grâce à une technique proche de l'Impressionnisme. L'artiste réalisera trois portraits de femme en bronze (« Pallas au casque », « Mme Fenaille » et « Hanako ») entre 1896 et 1907, puis concevra « La Porte de l'Enfer » (de 1880 à 1917) qui inspirera plusieurs autres sculptures. En 1895, Rodin réutilisera cette figure pour une nouvelle composition, « les Illusions reçues par la Terre ». Aimant par dessus tout les personnages mythologiques, le Docteur Faure fera l'acquisition de « Sirène Toilette de Vénus » et de « Sirène Méditation ». De la même manière, les symboles de douleur, de désespoir et d'accablement font aussi partie de l'univers du sculpteur. On lit alors le désespoir à travers la posture des sujets et non sur leurs visages. Rodin réalisera également des couples représentant l'amour, comme « Roméo et Juliette », ou « Frère et Soeur ».

Avec « L'Homme qui marche » (en photo ci-dessous), Auguste Rodin s'oriente vers la simplification, en cherchant à fixer un moment tout en allant à l’essentiel.


 

A côté de la salle Rodin, se trouve la reconstitution de la chambre du poète Lamartine, où l'homme séjournera, lors de ses huit séjours à Aix-les-Bains, entre 1816 et 1830. C'est au cours de son premier séjour (en octobre 1816) qu'il rencontrera la passion, en la personne de Julie Charles, épouse de l'illustre physicien Jacques Charles. Le 10 octobre, Lamartine sauve Julie d'un naufrage lors d'une tempête sur le lac du Bourget. De cette rencontre, naitra une idylle qui marquera fortement notre homme. Le couple se donnera rendez-vous au même endroit, un an plus tard, mais Julie, qui souffre de la tuberculose, ne pourra se déplacer en août 1817 et Lamartine, anéanti, compose alors son poème « Le Lac » à l'intention de sa bien-aimée, qu'il prénomme Elvire dans son œuvre. Lorsque Julie quittera ce bas-monde en décembre de la même année, la douleur de Lamartine sera terrible. Et de se consoler en retournant à Aix-les-Bains deux années plus tard, toujours à la pension Perrier (dont le mobilier reconstitue aujourd'hui la chambre du poète) et lieu de rencontre de sa future épouse d'origine britannique, Mary-Ann. Nous sommes en 1820 et les « Méditations Poétiques » connaissent un triomphe. Alphonse de Lamartine séjourne à nouveau à Aix-les-Bains d'avril à juin 1820, mais cette fois à la pension Perret. Et d'épouser Mary-Ann à Chambéry avant de partir pour l'Italie. Retour à nouveau à Aix-les-Bains en 1821, avec son épouse et son fils. Un an plus tard, nait sa fille qu'il appellera Julia en hommage à sa première conquête, Julie Charles. Son dernier séjour dans la ville d'eaux aura lieu à l'été 1830. Deux ans plus tard, sa petite « Julia » décède et le poète, écrasé par la douleur, se tourne vers la politique, jusqu'en 1848. Il faudra attendre 1925 pour qu'un premier hommage soit rendu à l'homme, d'abord par Mars Vallet, puis par le sculpteur Carle (à Tresserve, en 1927). En 1985, la même ville lui érigera une statue.


 

La reconstitution de la chambre que Lamartine occupa durant ses séjours aixois entre 1816 et 1830 n'est qu'une simple suggestion. Certes, les meubles proviennent bien de la Pension Perrier qui se trouvait jadis face à la Mairie et qui fut détruite vers 1930 lors de la construction des Thermes. Le lit du poète (ci-dessous) et une bonne partie des meubles sont de style Empire savoyard. Tous les objets et documents sous vitrine évoquent bien sûr le souvenir d'Alphonse de Lamartine et furent rassemblés à force d'achats, de dons et autres apports divers. Dans un coin de la pièce, sont suspendus deux petites gravures représentant Lamartine et Julie Charles. Le poète, très présent dans cette salle, trouve sa plus fidèle représentation à travers le buste façonné par David d'Angers (ci-dessus). Un peu plus loin, est exposée une statuette en terre cuite représentant le poète, une œuvre du sculpteur Emile Boisseau, qui servit de modèle au grand bronze inauguré en décembre 1990 dans le parc des thermes, à l'occasion du bicentenaire de la naissance du poète.


 

Ultime (et discrète) collection de ce musée, celle des céramiques rassemblant porcelaines, faïences et verres, parmi lesquelles des pièces rares. On trouve ainsi des faïences régionales, dauphinoises et savoyardes, toutes simples, comme celles figurant sur la photo ci-dessous, qui furent produites à Haute Combe au 19è siècle. Beaucoup d'entre elles proviennent de la faïencerie de la Forest qui fonctionna à Saint-Ours (près d'Aix-les-Bains) dans la seconde moitié du 18è siècle. Face à cette production locale, sont exposées d'autres faïences de Marseille et Delft, à côté d'autres beaux ensembles de porcelaines fabriqués à Vienne (Autriche) et à la Manufacture de Berlin (Allemagne). La production française trouve aussi sa place avec des pièces provenant des Manufactures de Sèvres et de Paris (Fabrique de Monsieur).

 

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