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Eglises et autres lieux florentins inattendus
(Florence, Région de Toscane, Italie)
Heure locale

Mercredi 19 février 2020

 

C'est à une promenade consacrée à quelques lieux de culte florentins et à leurs particularités que je vous convie religieusement. Rendez-vous d'abord à la basilique de Santa Croce avec sa façade inattendue et où il règne par ailleurs comme un petit air de liberté. Au même endroit nous attend le ciel jumeau de l'ancienne sacristie de San Lorenzo à l'intérieur de la chapelle des Pazzi. On découvrira aussi qu'à Florence, même les enfants avaient leur oratoire, puis nous ferons une halte à l'église Badia Fiorentina, avant de clore notre périple en passant par l'église de Santo Stefano al Ponte qui a pour voisin un superbe musée diocésain d'art sacré.

 

La basilique de Santa Croce qui donne sur la place Santa Croce est surprenante à plus d'un titre. A commencer par sa façade singulière qui dissimule la marque de Niccolo Matas, l'architecte d'Ancone, qui fut chargé, au milieu du 19è siècle, de parfaire l'image de ce lieu de culte. L'architecte ne trouva pas mieux que de dessiner une étoile de David dans le tympan, un symbole de la religion juive à laquelle il appartenait. Lui qui avait également conçu le cimetière monumental des Porte Sante, émettra le souhait d'être enterré face au portail d'entrée de la basilique, lieu de culte catholique.

L'édification du lieu débuta en 1294 sur des plans d'Arnolfo di Cambio, et le résultat donna la plus grande église franciscaine au monde. C'est le peuple et la république florentins qui assumèrent les frais de cette construction, laquelle s'éleva sur les restes d'une petite église bâtie en 1252 par les frères peu de temps après la mort de Saint-

François. Santa Croce sera constamment lié à l'histoire de la ville : durant 700 ans, elle jouera son rôle en acquérant le poste de municipe religieux pour les grandes familles et les corporations de la Florence médicéenne, mais aussi de laboratoire et d'atelier technique humaniste d'abord, puis renaissance plus tard, jusqu'à ouvrir un centre théologique. Le quartier fut de tous temps un lieu où se rencontrèrent les plus grands artistes, théologiens, religieux, hommes de lettres, humanistes et hommes politiques. Sans oublier ces grandes familles qui contribuèrent à faire de cette cité un lieu d'influence au Moyen-Age et à la Renaissance. Le couvent offrit un refuge à Saint Bonaventure, Saint Antoine de Padoue, St Bernardin de Sienne ou Saint Louis d'Anjou.


 

On peut y voir de nombreuses œuvres dont celles de Cenni di Pepo, alias Cimabue, peintre majeur de la pré-Renaissance, qui assurera le renouvellement de la peinture byzantine à travers l'introduction d'éléments d'art gothique, et un certain réalisme dans les représentations du corps de ses personnages. Je suis cependant surpris d'observer qu'une église aussi grande soit aussi vide. On me répondra que de nombreuses œuvres ont depuis quitté le lieu de culte pour rejoindre les musées de ville.

Autre legs de l'église de Santa Croce : le ciel hermétique de la chapelle des Pazzi (photo ci-dessous), superbe fresque qui orne la coupole de l'endroit et qui représente un ciel étoilé identique à celui qui se trouve dans l'ancienne sacristie de San Lorenzo. On assiste ici à un cas unique de deux mécènes qui passèrent commande simultanément au même artiste de deux fresques évoquant la même nuit. A noter que, comme les Médicis, les Pazzi entretenaient une relation personnelle avec le « roi de Jérusalem ».

 

Deuxième curiosité de la basilique Santa Croce : une (quasi) reproduction de la statue de la Liberté. Il est vrai que la basilique, autrefois dotée de près de 300 monuments funèbres, n'en était plus à un près. Et de se flatter d'ajouter à sa collection ce monument que Pio Fedi réalisa pour le tombeau de Giovanni Battista Niccolini, dramaturge et patriote du 19è siècle. On croirait voir la véritable statue de la Liberté, à quelques différences près : la chaine brisée dans la main de la Liberté de Pio Fedi (en remplacement de la torche brandie dans la version de Bartholdi) et un air plus gracieux que les traits presque masculins de sa sœur ainée américaine. Des dessins préparatoires avaient circulé dans le milieu artistique de l'époque avant que ne soit inaugurée l'oeuvre de Pio Fedi, en 1883 (c'est à dire trois mois avant sa copie new-yorkaise!). La maquette même de l'oeuvre, en plâtre, existait aussi lorsque le sculpteur français Bartholdi visita Florence. De là à penser que...

 

Toujours dans le quartier Santa Croce, au commencement de la Via Pandolfini, se dresse au N°2 un modeste portail marquant l'entrée de l'oratoire de la Compagnie de San Niccolo al Ceppo, une des plus anciennes confréries de Florence. Celle-ci vit effectivement le jour au 15è siècle et connut plusieurs sièges avant de se fixer ici en 1561. Accueillant les jeunes en journée pour le catéchisme, puis les Florentins (surtout les artisans) pour des prières en fin d'après-midi, l'oratoire offre encore de nos jours des messes régulières. De taille modeste, l'endroit est chaleureux et orné de simples boiseries et d'un plafond sur lequel a été peinte une œuvre de Giandomenico Ferretti, une fresque illustrant les « histoires de Saint Nicolas ». On remarque enfin un maitre-autel et une « Crucifixion » de Francesco Curradi, en remplacement d'une précédente œuvre du même goût désormais transférée au Musée de San Marco. L'endroit, ouvert à tous, accepte les nouveaux membres pour une somme modique.

En français, « Badia Fiorentina » signifie abbaye florentine ». Cette église Sainte-Marie de l'Assomption fut érigée en 978 sur un terrain offert aux moines bénédictins de l'époque par la marquise Willa de Toscane. Un précédent article explique ce qui arriva à nos moines résistants qui ne voulurent pas payer l'impôt municipal et virent leur campanile mis à bas par la ville. Parcourir quelques pas en ce lieu repose à la fois le corps et l'esprit. On y croise deux monuments funéraires, une magnifique nef, et le cloitre des orangers, œuvre de Bernardo Rossellino. La galerie supérieure de ce cloitre est en effet ornée de onze fresques relatant la légende de Saint Benoit. Celles-ci furent peintes entre 1436 et 1439 par le peintre portugais Giovanni Consalvo, à un moment où l'abbé qui se trouvait à la tête de l'abbaye était lui-même originaire de Lisbonne. L'accès est libre et je trouve l'église sur ma gauche en franchissant le portail. A la fois abbaye et église, Badia Fiorentina est la maison des Fraternités monastiques de Jérusalem, dont les membres ont pour mission de vivre dans la ville et au cœur de Dieu. Une institution qui fut fondée en 1975 et à Paris par l'église de Saint Gervais Saint Protais. J'y rencontrerai sur place une jeune sœur qui officie à la boutique (source de revenus pour la communauté) et j'apprendrai au cours de notre échange que l'église du peuple (Chiesa del Popolo) comme on la surnomme ici, possède un superbe plafond à caissons (en photo ci-dessous). La providence faisant son œuvre, une charmante dame italienne entre alors dans la boutique avec ses deux jeunes enfants et m'invite à l'accompagner à la chapelle familiale, juste à côté. Et de réaliser que j'ai en face de moi l'épouse d'un (très) lointain descendant du Niccolo Pandolfini, cardinal italien du 16è siècle né à Florence en 1440. Chanoine dans cette même ville, le pape Sixte IV lui confiera l'instruction de son neveu Giuliano della Rovere, futur pape Jules II.

 

L'église Santo Stefano al Ponte, se dresse, comme son nom l'indique, à deux pas du pont Ponte Vecchio. Datant du 12è siècle, sa construction est de style romanesque et l'édifice a déjà subi plusieurs restaurations au fil des siècles. Rien qu'au 20è siècle, l'église sera endommagée durant la Seconde guerre mondiale, lors des inondations de Florence en 1966 et lors de l'explosion d'un véhicule piégé dans la Via dei Georgofili en 1993. A partir de 1986, l'archidiocèse dut se résoudre à réduire le nombre de paroisses à l'intérieur de la vieille ville face à une importante baisse de population et l'église Santo Stefano al Ponte se reconvertit alors en salle de concerts et lieu d'expositions. Actuellement, l'église est en cours de réfection et est interdite d'accès. Il persiste pourtant à l'intérieur de l'édifice un superbe escalier à rampe, chef d'oeuvre de Bernardo Buontalenti. L'escalier, à l'origine destiné à la basilique Santa Trinita, fut installé ici lorsque sa consoeur changea radicalement de style architectural. Cet escalier est pourvu de marches semblables à des valves de coquilles ou à des ailes de chauve-souris qui interrompent le schéma de lignes de la rampe. Etonnant.

Non loin de là, se trouve le Musée diocésain d'art sacré, qui a trouvé refuge à l'intérieur d'un presbytère et d'autres locaux contigus à l'église Santo Stefano al Ponte. On y admire habituellement plusieurs œuvres retirées d'églises florentines durant la deuxième moitié du 20è siècle. Ce musée, qui a ouvert ses portes en 1983 subit d'importants dommages lors de l'attentat à la voiture piégée de 1993. Une partie du plafond s'effondra et certaines œuvres exposées furent perdues à jamais. Là encore, il me sera impossible de visiter ledit musée, celui-ci étant à nouveau en travaux. Mince alors !

L'histoire florentine est si riche et les lieux d'intérêt si nombreux qu'il m'est impossible de tout visiter mais voici quelques autres endroits dignes d'intérêt et découverts lors de mes lectures : le Palais Pandolfini (Via San Gallo, 74) à la forme d'un bâtiment à deux étages. Une fois à l'intérieur, on découvrira un grand escalier monumental, l'ancien oratoire de San Silvestro (intégré à la résidence) et un jardin derrière la façade. Autre curiosité : une reproduction du Saint-Sépulcre de Jérusalem en la Chapelle Rucellai (Piazza San Pancrazio). La famille du même nom ayant toujours entretenu des constantes relations avec le Proche-Orient, eut à cœur de reproduire ici le cœur du plus important sanctuaire chrétien. Enfin, l'église de Santa Maria Maggiore (Via de Cerretani) offre, à l'une de ses fenêtres, la tête pétrifiée d'un prêtre. En levant la tête et en cherchant bien sur la façade, on apercevra une tête de femme en pierre, qui fut sculptée vers 1327 lorsque l'astrologue Francesco Stabili fut condamné au bûcher. Et l'astrologue de pétrifier la tête du prêtre lui faisant face (et qui lui « tenait tête »!) pour la fixer au mur de l'église. D'autres histoires existent concernant ce visage d'un autre temps. Encore un mystère florentin ?

 

INFOS PRATIQUES :

  • Basilique Santa Croce, du lundi au samedi de 9h30 à 17h00 et les dimanche et jours fériés de 14h00 à 17h00. Ticket d'entrée : 8€.
  • Chapelle des Pazzi (dans l'enceinte de la basilique de Santa Croce, Piazza Santa Croce à Florence. Ouvert en semaine de 9h30 à 17h30 et le dimanche de 13h00 à 17h00.

  • Oratoire de la Compagnie de San Niccolo al Ceppo, Via de Pandolfini 2, à Florence. Du lundi au vendredi de 17h00 à 19h00.

  • Badia Fiorentina, à Florence : l'entrée se trouve face au Musée Bargello.

  • Eglise Santo Stefano al Ponte, Piazza di Santo Stefano 1, à Florence. Ouverte tous les jours de 10h00 à 20h00. Les fresques du cloitre ne sont visibles que le lundi de 15h00 à 18h00.

  • Musée diocésain d'art sacré, à côte de l'église Santo Stefano. En travaux actuellement, le musée est fermé aux visiteurs.

  • Palais Pandolfini, Via San Gallo, 74, à Florence. Accessible chaque dernier lundi et dernier samedi du mois sur rendez-vous, de 10h00 à 13h00. Fermé en août. Tèl : +39 338 722 9862.

  • Chapelle Rucellai (accès par une salle du Musée Martini), Piazza San Pancrazio, à Florence. Ouvert de 10h00 à 17h00 (excepté les mardis, dimanches et jours fériés).

  • Eglise Santa Maria Maggiore, Via de Cerretani, à Florence.

 

 

 










 



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