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Kato Zakros et son site archéologique
(Côte Sud-Est, Ile de la Crète, Grèce)
Heure locale


Vendredi 13 novembre 2015

 

Je ne suis pas spécialement superstitieux en ce vendredi et prends tôt le volant ce matin, car 110 kilomètres m'attendent pour me rendre jusqu'au site archéologique de Kato Zakros, sur la côte sud-est de la Crète. C'est encore une superbe journée qui s'annonce, lorsque je quitte Agios Nikolaos, vers 7h00. Je connais déjà le parcours pour l'avoir effectué les jours précédents, à tel point que je m'arrêterai en cours de route pour prendre mon café habituel, à Istro, sur ma route, et toujours dans le même établissement.

Zakros et Kato Zakros appartiennent à la municipalité d'Itanos, une des municipalités les plus orientales de la préfecture du Lassithi. Dans cette région, presque tous les habitants travaillent dans l'agriculture et tout particulièrement dans la production de l'huile qui fait la réputation de la région. Ce sont en effet plus de 250 000 oliviers qui recouvrent les plaines environnantes et les amateurs de l'huile locale pourront, entre autres, l'acheter dans le petit village de Zakros. On est très fier, sur place, d'être la capitale mondiale de l'huile d'olive (je ne me risquerai pas à départager cette bourgade avec une autre ville d’Andalousie qui s'attribue le même titre!). Je dirai simplement que ce bourg paysans se trouve au milieu d'oliveraies qui descendent jusque la mer. La qualité de son huile d'olive dépend bien sûr des conditions climatiques, mais aussi de la qualité du terroir, et de la variété des fruits. L'île de Crète offre en effet des étés chauds, des hivers modérés, des pluies plutôt rares, des paysages accidentés, avec, en plus, une variété particulière d'oliviers qui ont toujours grandi sur ce territoire depuis des milliers d'années. Ce sont 500 raffineries crétoises qui travaillent jour et nuit pendant la période de la récolte des olives, afin de s'assurer que les fruits soient broyés immédiatement après leur cueillette. Ces oliveraies occupent près de 500 000 acres du territoire de l'île, représentent environ 30 millions d'arbres cultivés par 95 000 familles. L'île tourne autour de 100 000 à 200 000 tonnes d'huile produites annuellement. La production du précieux liquide au cours de ces quarante dernières années a d'ailleurs beaucoup augmenté, au point de pratiquement doubler, tout en gagnant en qualité puisque 90% de la production d'huile d'olive de la Crète est extra-vierge, avec un taux d'acidité inférieur à 1%. Quant aux Crétois, ils sont réputés consommer annuellement 31 litres par personne (contre 25 litres dans les autres pays méditerranéens).


 

La route de moyenne montagne tourne sans cesse et c'est avec soulagement que j'atteindrai Kato Zakros au bout de 2h30 de conduite. Ma première image de ce minuscule village (ci-dessus) se trouve au bout d'une route. Et reste, pour de nombreux touristes, un refuge du bout du monde dans un endroit isolé mais très beau. La grande plage de l'endroit est faite de galets et quelques baigneurs font trempette dans la mer de Crète. Pour ma part, je suis venu pour des raisons culturelles et m'étonne du manque d'information concernant le site archéologique (voir infos pratiques). Le palais minoen de Zakros est le quatrième en taille de la Crète minoenne. Il se trouve à un endroit stratégique, avec un port sûr en centre d'échanges commerciaux avec les régions d'Orient. C'est le seul palais à ne pas avoir été pillé et l'on retrouva d'ailleurs l'unique salle des trésors minoenne intacte à l'intérieur du palais : celle-ci comportait des ustensiles très fins et des archives sous la forme de plaques inscrites en linéaire A.

 

Le palais fut bâti en 1600 avant J.C et se composait de 180 appartements, sur une surface de 8000 m2. Au début du II ème millénaire, le site verra effectivement l'émergence d'une agglomération urbaine qui donnera par la suite naissance à ce palais minoen, dont les vestiges seront mis à jour en 1961 par Nikolaos Platon. Cet archéologue grec, né sur l'île de Céphalonie en 1909, était descendant d'une famille crétoise et commença sa carrière d'archéologue en 1930 comme assistant au Musée d'Héraklion. Il passera par Paris afin de poursuivre ses études quelques années plus tard, deviendra directeur du musée d'Héraklion, puis, plus tard, directeur des recherches pour la partie orientale de la Grèce. Il est à l'origine de l'élaboration d'une chronologie de la période minoenne, reposant sur les différentes étapes de développement des centres palatiaux comme Knossos, Malia, ou Zakros. Et divisa ainsi l'histoire minoenne en quatre parties : les périodes pré-palatiale, pro-palatiale, néo-palatiale et post-palatiale.

 

Ce premier palais de Zakros, à l’instar des trois autres palais crétois, est assez mal connu. On sait qu'il fut bâti vers 1700-1650 avant J.C, puis sera détruit comme les autres palais par un probable tremblement de terre. Le Palais sera aussitôt reconstruit (vers 1600 avant J.C) avant d'être à nouveau détruit vers 1450 avant J.C, toujours par un important séisme. Les restes de ce deuxième palais s'étendent sur 7000 m2 (10 000 m2 avec les annexes) et ont permis d'observer que sa construction et ses décors étaient relativement pauvres, ce qui laisse penser à certains spécialistes qu'il n'aurait jamais abrité un roi, mais plutôt un haut-dignitaire, sans doute responsable de la flotte des bateaux et du commerce extérieur. Pour d'autres, l'endroit aurait été non seulement une résidence de la famille royale mais aussi le centre administratif, commercial et religieux de la région. Les débats sont ouverts.

Le palais de Zakros appartient au type même de palais minoen, et est composé d'une cour centrale (ci-dessous) entourée des différentes ailes de bâtiments, avec la présence de corridors labyrinthiques et un nombre important de pièces. Les ailes les plus importantes restent les ailes Est et Ouest. Autour de la cour centrale, s'organisaient les quartiers fonctionnels qui comportaient des magasins de stockage et des pièces à fonction religieuse. Le palais disposait de quatre entrées (une par aile) et la plus imposante était l'entrée Est. A noter que cette cour n'est pas orientée Nord-Sud comme dans les autres palais. On y trouve également un autel et des ateliers, dont certains auraient servi à la fabrication de parfums. L'aile Ouest, elle, abritait le sanctuaire, où l'on y découvrit des lingots de cuivre et trois défenses d'éléphants. Deux autres grandes salles permirent enfin de retrouver entre autres le rhyton en forme de tête de taureau et des outils en bronze. Au total, les fouilles entreprises auront permis de mettre à jour plus de 10 000 objets, lesquels sont désormais conservés aux musées d'Héraklion et de Sitia. Beaucoup sont considérés comme uniques.

 

L'aile nord abritait pour sa part des habitations modestes. Je m'y perds un peu au milieu de ce site qui n'offre aucun information détaillée, contrairement aux autres sites que j'ai visités récemment. Et je me prends à rêver d'une application informatique qui reconstituerait le site à l'aide de la réalité augmentée. Je porterai une paire de lunettes virtuelles qui me permettrait d'évoluer sur le site avec les lieux reconstitués tels qu'ils étaient à l'époque du minoen, tandis que de petits films retraceraient des scènes de vie d'alors. Ce n'est malheureusement qu'un rêve... La rue du port du petit village constituait l'accès principal au palais et consistait en une large allée pavée. Quelques marches descendent dans la cour nord-est que jouxte la principale réserve d'eau du palais, large puits circulaire. Sur le site, se trouve également un court escalier descendant vers la Tykti Kreni, surnommée la fontaine bien construite, qui consiste en un bassin lustral de forme carrée où furent découverts des restes d'offrandes. Plus loin, on observe les ruines des appartements royaux débouchant sur la cour centrale de 30 mètres sur 12. Le long de l'aile nord-ouest, se côtoient le mégaron (salle d'apparat) et la salle des banquets qui accueillait les réceptions.

 

A côté du site archéologique s'élève la vallée des morts (ci-dessous en photo). La promenade se fait facilement et n'est que de quelques centaines de mètres, à travers les champs d'oliviers. Quelques panneaux sommaires donnent des indications sur le temps nécessaire pour effectuer les excursions disponibles. Je m'arrête à l'entrée du chemin empierré conduisant à la vallée et à ses paysages : ce parcours est parfois humide et s'insinue entre d'impressionnantes falaises creusées et de grottes, tandis que lauriers et oliviers s'épanouissent dans le fond caillouteux de la gorge. Cette vallée (aussi dénommée gorge) a reçu le nom de vallée des morts à cause des nombreux tombeaux qui y ont été trouvés, à l'intérieur de cavernes ou sur les versants abrupts. Compte tenu de la beauté du site, les Minoens imaginaient que leurs disparus survivaient ainsi, dans la beauté de l'au-delà.

 

INFOS PRATIQUES :

  • Site archéologique de Kato-Zakros, à Kato Zakros. Ouvert de 8h00 à 15h00 en hiver (et de 10h30 à 17h30 en été). Entrée 3€. Lorsque vous arrivez au bout de la route à Kato Zakros, prendre la direction « Gorge Palace » (Car parking) et vous découvrirez un panneau vous indiquant le site archéologique. Ce dernier se trouve à quelques centaines de mètres de ce panneau (longer le grillage). Parking disponible en face de l'entrée. Sur place, les quelques panneaux d'information ne parlent succinctement que des différentes ailes de l'ancien Palais. Un plan global avec légende est à disposition sur le site mais difficilement transportable (aucun plan papier disponible) si bien que l'on ne sait pas ce que l'on voit. Pas de parcours fléché digne de ce nom non plus. De plus, le personnel n'est pas très aimable. Le déplacement vaut-il le détour ?
  • A quelques centaines de mètres du site (prenez sur votre droite en quittant le site archéologique, puis suivre les panneaux) se trouve le point de départ de la Vallée des Morts. Cette excursion nécessite deux heures de marche, est facile à entreprendre mais nécessite de bonnes chaussures de marche, un chapeau, des lunettes de soleil et de l'eau en quantité suffisante pour s'hydrater régulièrement.

 

 

 



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