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Paléochora et sa région
(Ile de la Crète, Grèce)
Heure locale


Mercredi 25 novembre 2015

 

Pour ma dernière journée de visite de mon séjour en Crète, je choisis d'aller faire un tour du côté de Paleochora, loin des stations balnéaires. Ici, se dégage un charme tout autre, empreint de simplicité et d'authenticité. Le pays de Kantanos que je traverserai offre des dizaines d'églises byzantines, mais aussi les gorges méconnues d'Agia Irini, aux essences rares, et la vallée d'Azogires recouvertes d'oliviers séculaires.

Comme fâché par mon départ prochain, le temps n'est pas à la fête et le soleil nous a faussé compagnie dans ce coin de l'île. Le vent souffle fort sur Paléochora lorsque j'y fais une halte. Petit village de pêcheurs crétois, le lieu est situé au sud-ouest de la Crète et ressemble en fait à une presqu’île. Même si le tourisme reste une activité non négligeable, on ne retrouve pas ici la même atmosphère qu'ailleurs. Et une Française que je rencontre au cours de ma promenade, de me confier que l'endroit bénéficie d'une énergie qu'on ne trouve pas ailleurs. En ce qui me concerne, je n'aurai pas le temps nécessaire pour juger du bien-fondé de cette affirmation, mais, à première vue, il n'y a pas tant de choses que cela à voir sur place. Paléochora a toutefois une particularité : ses rues. Celles-ci ne comportent pas de noms, comme partout ailleurs, mais des noms d'usage (par exemple, la rue Principale, la Promenade et la rue transversale).

Le village, qu'on surnomme aussi la fierté de la mer de Libye, aurait été bâti sur les ruines de l'ancien site de Kalamidis. En 1280, le duc vénitien de Crète, Marino Gradenigo, construira le « Castelo Selino «  (ci-dessous) dont on peur encore apercevoir les restes sur les hauteurs. La forteresse sera tour à tour mise à mal par la révolte crétoise, par le pirate Barberousse et par la conquête ottomane. Les principaux atouts de la commune résident dans ses plages, ses sites archéologiques environnants (comme les vieilles églises byzantines de Kantanos et de Plemeniana) et les randonnées possibles dans les alentours. A côté de l'église, dont le clocher à trois niveaux mérite le coup d'oeil, se trouve le musée des Akrites, lui aussi fermé hors saison. Le sujet aurait pourtant été intéressant à développer puisqu'on nous dit que ces gens (aussi appelés akritoi, ou akritai) étaient chargés de protéger les frontières anatoliennes de l'Empire byzantin. Et leur nom d'être d'ailleurs formé à partir du terme grec akra, signifiant frontière. Frontière, un nom qui laisse rêveur les citoyens européens que nous sommes... Ces akrites étaient des Grecs vivant dans les provinces proches des frontières orientales de cet empire. Leur statut était celui de soldat-paysan. Ces gens étaient entretenus grâce aux loyers qui leur étaient versés (dont l'origine semble encore prêter à confusion d'après certains historiens). On pourrait en quelque sorte les considérer comme assez proches de nos seigneurs féodaux d'antan. Fantassins légers, armés d'arcs et de javelots, les Akrites défendaient ainsi leur région, principalement contre les raids de la cavalerie légère turque. Considérés comme les ancêtres des klephtes et des armatoles, ils seront progressivement remplacés par des mercenaires. Le musée en question est précisément consacré à l'étude des rapports entre ces peuples frontaliers à travers des sujets aussi divers que la guerre, la culture, la musique.

 

Je quitte Paléochora pour me rendre dans la montagne, en direction de la vallée d'Azogire, à une dizaine de kilomètres de là. Neuf kilomètres avant d'atteindre le petit village de Temenia, se trouve, niché au fond de cette vallée, le monastère des Saints-Pères (ci-dessous). Il faut rouler au pas pour apercevoir sur sa droite, et dans un virage, juste avant le minuscule village d'Azogire, une pancarte de couleur marron qui indique l'accès au monastère. J'emprunte un minuscule chemin aussi large que ma voiture, et m'enfonce dans la vallée en passant sous les branches d'oliviers, sans savoir, ans un premier temps, si je pourrai faire demi-tour. Je finirai mon parcours en marchand sur quelques centaines de mètres avant d'atteindre ce lieu de culte qui s'ouvre sur la vallée. Le monastère en question fut érigé en partie dans une grotte : c'est ici que les 99 apôtres de Saint Jean l'Ermite, venus de Chypre et d'Egypte, se réfugièrent à la suite de leur naufrage sur l'île de Gavdos, toute proche. Ils s'installèrent ensuite dans une grotte située sur le versant opposée à la vallée. Des fresques relatent cet événement mais ne sont malheureusement pas visibles, le monastère étant désert lors de mon passage. J'apercevrai toutefois, à travers les vitres, la salle d'un petit musée consacré à la seconde guerre mondiale. Ses murs sont entièrement recouverts des photos des résistants locaux, morts au cours de leur lutte contre les nazis. Une section du musée raconte aussi en détails la guerre de 1921 contre les Turcs à travers uniformes, fusils et coupures de presse des journaux de l'époque.

 

Le temps ne se prêtant pas à la visite (il pleut désormais et l'obscurité s'abattra même par instants lors de ma traversée montagneuse), je ne m'attarderai pas sur ce pays de Kantanos, dont le chef-lieu, Kantanos, trône au centre d'une vallée en forme d'amphithéâtre et couverte d'oliviers. Ce village sera le théâtre d'une tragédie durant la seconde guerre mondiale, lorsque les nazis rasèrent l'endroit en représailles à la résistance acharnée des Crétois, et plantèrent une pancarte, toujours visible « Ici git Kantanos ». Autour du village se dressent plusieurs petites églises, comme, par exemple, l'église Agia Kiriaki (à deux kilomètres seulement), dont l'intérieur est orné de fresques. Non loin de Temenia existe aussi l'église Christos, que je n'ai jamais trouvée. Celle-ci se dresse pourtant au milieu d'un petit plateau, derrière des chênes et des cyprès. Si vous la trouvez, amusez-vous à distinguer ses deux parties:la plus ancienne est surmontée d'une coupole datant du XIII ème, tandis que la plus récente est décorée de fresques datant des XVI-XVII èmes siècles.

 

En Crète, les plaines sont presque inexistantes, et je traverse ainsi plateaux et montagnes, les plateaux (en fait, des cuvettes) étant situés entre 600 et 900 mètres d'altitude. Le reste du temps, la montagne est omniprésente à l'intérieur, avec ses routes sinueuses au détour desquelles se dressent parfois des petites chapelles (comme ci-dessous). La végétation naturelle d'origine y a été fortement dégradée et ce sont désormais des zones de garrigue basse qui couvrent d'immenses étendues, alors que les vallées, elles, sont le plus souvent couvertes d'oliviers et d'orangers. Moutons (deuxième photo) et chèvres évoluent dans ce panorama, parcourant librement collines et montagnes, certains de ces animaux pouvant même occuper la chaussée (soyez prudents!).


 

Au cours de ce mois, j'ai croisé en bord de route de nombreuses chapelles miniatures (ci-dessous). Il s'agit tout simplement de petites églises où brûlent constamment des lampes à huile, en souvenir d'une personne qui a trouvé la mort à cet endroit, lors d'un accident de voiture par exemple. C'est notamment le cas pour les chapelles comportant la photo de la personne défunte. Lorsque la chapelle abrite une icône, il s'agit alors de remercier la sainte ou le saint qui a miraculeusement sauvé la personne accidentée. Je verrai un grand nombre de chapelles de ce type durant mon séjour, ce qui me laisse penser qu'il doit souvent y avoir des accidents sur cette île. Ainsi s'achève ma première visite crétoise, voyage fort instructif et premier regard positif sur une île authentique et identitaire. J'ai eu la chance de profiter d'un temps extrêmement clément en ce mois de novembre, avec soleil quotidien et une température moyenne de 22° en journée (un peu moins en altitude). L'hiver se prépare car les feuilles des arbres tombent abondamment depuis dix jours, et je regretterai certainement cet automne méditerranéen.


 

INFOS PRATIQUES :

  • Site de la ville de Paléochora : http://www.paleochora.com/
  • Musée des Akrites (à côté de l'église), rue principale, à Paléochora. Tél : 23230 42265. Téphoner avant de vous y rendre pour connaître les horaires d'ouverture.

  • Monastère des Saints-Pères, juste avant Azogire (en venant de Paléochora), sur la droite, dans un virage. Repérer le panneau marron puis suivre le petit chemin jusqu'au bout (on peut manoeuvrer à la fin pour revenir sur ses pas). Se garer près de la petite cascade, franchir un petit pont, puis marcher jusqu'au petit portail d'entrée. Il paraît qu'il faut sonner la cloche de l'église pour visiter le monastère (5€ l'entrée, à vérifier)


 



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