Revoir le globe
Top


Ussel
(Corrèze, France)
Heure locale


Jeudi 20 octobre 2016

 

Située sur les derniers contreforts du plateau de Millevaches, Ussel est traversée par la Méridienne verte, projet artistique consistant à matérialiser le tracé du méridien de Paris par des arbres, qui fut conçu pour les cérémonies de l'an 2000. L'origine de la ville remonterait à l'époque gauloise et son nom proviendrait du gaulois uxsello (élevé), adjectif qualifiant l'endroit de hauteur située entre Diège et Sarsonne et plus tard défendu par l'oppidum du Camp de César. L'époque romaine nous aura laissé une aigle romaine (première photo ci-dessous), en granite, découvert près du moulin du Peuch, au sud-est d'Ussel. Cette sculpture imposante surmontait probablement un monument funéraire disparu. Sans tête lors de sa découverte, l'oiseau en reçut une en 1804 par le sculpteur Pic lors de son érection en l'honneur du couronnement de Napoléon Bonaparte. Cette sculpture est visible Place Voltaire. Ussel deviendra également le centre administratif du duché de Ventadour au XVI ème siècle. Du XVII ème au XVIII ème siècle, la cité sera dédiée à la boucherie et à ses activités dérivées, dont la tannerie, qui donnera à ses habitants le surnom de « Pelauds ». Dès le Moyen Âge, les boucheries étaient installées autour de l'église. Cette tradition perdura jusqu'au siècle dernier et la boucherie d'Eugène Monsourier (en photo ci-dessous) en est le dernier témoin. Trois piliers en pierre soutiennent le logement en encorbellement sur la rue. Et l'on peut encore apercevoir les crochets qui servaient à accrocher les quartiers de viande.


 

Je visiterai le centre historique d'Ussel en une heure de temps car l'ensemble des curiosités tient dans un mouchoir de poche : l'Eglise Saint Martin (ci-dessous, une clef de voute) porte le vocable de ce saint qui fut attribué aux première paroisses implantées en Limousin. La première mention dans les textes de l'église d'Ussel date de 1096. Et l'édifice fut construit à la fin du XII ème siècle, en forme de croix. L'intérieur comporte un choeur, un transept et une nef à trois travées. Des bas-côtés furent rajoutés au début du XVI ème. Quant au clocher, il s'effondra partiellement à la fin du XVIII ème siècle et sera reconstruit en 1860. La tradition locale usseloise prétend que cette reconstruction fut effectuée par le grand architecte parisien Eugène Viollet-le-Duc. Certes, la municipalité avait à l'époque sollicité cet architecte pour bâtir une nouvelle église mais l'opération s'avérait trop couteuse et fut abandonnée. Viollet-le-Duc proposera tout de même un projet de clocher en 1852 mais les travaux ne débutèrent qu'en 1860, et notre architecte, occupé sur d'autres chantiers plus prestigieux, avait passé la main. En définitif, ce fut un architecte départemental, Jéréthie, qui se chargea de reconstruire le clocher, tout en s'inspirant toutefois du projet de Violet-le-Duc. Le chevet de l'église, lui, est d'inspiration cistercienne, et les colonnes qui soutiennent les travées sont surmontées de chapiteaux à motifs floraux. Il faut lever la tête pour admirer les clefs de voute représentant d’illustres familles d'antan, mais ces clefs sont peu visibles à cause de l'obscurité de l'église car le lieu est mal éclairé et peu mis en valeur. Dans la pénombre, j'apercevrai aussi un orgue, installé en 1864 et classé aux Monuments historiques en 1970. On doit cet orgue à Cavaillé-Coll, célèbre facteur d'orgues dans toute l'Europe.


 

La cité possède plusieurs maisons historiques : à côté de l'église Saint Martin, se dressent deux d'entre elles, chacune comportant une tourelle. La maison Monloys (tourelle de gauche sur la photo ci-dessous) fut la demeure de la famille du même nom qui siégea au consulat de la ville à partir du XVI ème siècle. Et cette famille de s'illustrer notamment dans les charges notariales usseloises. La tourelle d'angle permettait à ses occupants d'afficher leur statut social. Juste en face, on trouve la maison des Prêtres communalistes, bâtie au XVII ème siècle. Equipée elle aussi d'une tourelle d'angle, elle abrite également un superbe escalier monumental à balustre de pierre desservant les différents étages de la demeure. Ainsi les prêtres filleuls d'Ussel formaient-ils autrefois une communauté. Ils étaient nés et baptisés dans la région usseloise, et pouvaient desservir l’église Saint Martin au côté du curé de la paroisse pour les messes de fondation et les offices. Je passerai quelques instants plus tard devant la maison des Cosnac et sa porte (deuxième photo ci-dessous). Dès le Moyen Âge, cette famille comptait parmi les familles de la noblesse limousine. Une branche s'établit alors à Ussel, dans cette maison érigée aux XIII-XIV ème siècles. Le linteau de la porte en arc brisé est décoré d'un écu en biais sur lequel les armes de la famille étaient peintes. Une tour polygonale abrite quant à elle un escalier à vis qui dessert les deux corps de logis qui l'encadrent. Le vantail en bois de la porte est muni d'un judas en fer forgé, qui permettait de contrôler les visiteurs, et d'un heurtoir.


 

La maison de 1647 (ci-dessous) reprend le modèle des maisons urbaines polyvalentes médiévales. Au rez-de-chaussée, les boutiques ouvraient sur la rue par un large arc brisé, tandis que la porte de la tour à tympan blasonné permettait d'accéder à un escalier à vis. Ce dernier desservait les étages et conduisaient aux logements. Et la lumière de pénétrer au premier étage par des fenêtres à croisée ou à traverse. Je me perds ici et là dans les ruelles, et j'arrive bientôt dans la rue Esparvier qui me laisse entrevoir une maison de 1615 à tour ronde, au N°9 (deuxième photo). Les encadrements de la porte et des fenêtres sont finement sculptés d'une succession de cavets (moulures concaves). Juste à côté, au N°7, se dressait la maison de la famille Esparvier, construite aux XIII-XIV ème siècles mais malheureusement remaniée au XV ème, et pourvue d'une porte en arc brisée dont l'écu est martelé. A l'étage, figure une fenêtre de style Renaissance, encadrée par une succession de tores (grosses moulures rondes). Incluse dans la ville murée du XV ème, se dresse encore la maison Pénières, bâtisse à tour d'escalier ornée d'un écu incliné, qui fut réaménagée au XIX ème siècle par Raymond Pénières, alors premier sous-préfet d'Ussel. Son portail en fer forgé est surmonté d'un monogramme composé de ses initiales R.P.


 

 

Place de la République, il ne reste rien du Château d'Ussel, autour duquel se développa pourtant la cité dès le XI ème siècle. Bâti sur un tertre naturel, celui-ci dominait et contrôlait la route Lyon-Bordeaux. Il évoluera tout au long du Moyen Âge, jusqu'à occuper toute la surface de l'actuelle place. La ville ayant fait allégeance au roi d'Angleterre, Du Guesclin, connétable de France assiégera Ussel en 1371. Durant les XIV et XV ème siècles, le château servira de place forte pour les Anglais, mais aussi de garnison pour les seigneurs limousins qui protégeaient le pays contre les routiers. Rarement utilisé par les co-seigneurs d'Ussel et de Ventadour, qui lui préféraient d'autres forteresses ou la cour royale, le château sera démantelé au XVI ème siècle. A la place, une autre demeure fut érigée, la maison de Ventadour (http://www.petit-patrimoine.com/fiche-petit-patrimoine.php?id_pp=19275_8) que je ne vous montrerai pas en photo directement pour des problèmes de droits à l'image. Bâtie au début du XVII ème siècle, cette demeure constitua, en l'absence des ducs et de leurs sénéchaux, la résidence des lieutenants-généraux de Ventadour. Elle comporte une tourelle d'escalier octogonale sur sa façade et une tourelle d'angle. Sa porte est de style Renaissance et est formée de pilastres cannelés supportant un fronton triangulaire, surmonté de deux fenêtres. La famille des seigneurs de Ventadour fondera un séminaire en 1585, à Egletons. Sur l'initiative des consuls de la ville, celui-ci sera transféré à Ussel. Devenu collège, il s'installe dans ce bâtiment à partir de 1730. La porte d'entrée (ci-dessous) à fronton est encadrée de pilastres qui se prolongent jusqu'à la fenêtre de l'étage.

Il est enfin une maison qui appartenait à l'emprise du château d'Ussel : la Tour Soubise (deuxième photo ci-dessous), qui fut construite aux XIII-XIV ème siècles, est ouverte sur la rue par une porte à blason, qui dessert les deux ailes latérales. On pense que cette tour abrita autrefois le siège de la sénéchaussée jusqu'au XVIII ème siècle.


 

Je traverse ensuite la Place d'Armes, un espace aménagé au Moyen Âge sur l’emplacement de l'ancien cimetière. Autrefois lieu de foires et de marchés depuis le milieu du XVI ème siècle, elle servait aussi de lieu de proclamation des actes officiels et de place d'armes où se réunissaient les contingents militaires. Et le nom de cette place d'être gravé par deux fois au chevet de l'église Saint Martin. Pour terminer ce tour d'horizon, j'admire l'hôtel Bonnot de Bay (ci-dessous), demeure noble de Jean Bonnot de Bay, qui abrite aujourd'hui la section des arts et traditions du Musée du Pays d'Ussel. Le musée de la ville est actuellement fermé et c'est bien dommage, car celui-ci permet d'admirer notamment la tapisserie de Jean Lurçat, visible dans la salle d'accueil. L'oiseau qui est représenté, une sorte de dindon poilu et cornu, est juché sur un bouc brun au regard diabolique. Cette tapisserie de basse lisse en laine a été tissée vers 1955 à Aubusson par l'atelier de Suzanne Goubely. Ce musée a ainsi fait le choix de présenter des tapisseries marchoises dès son ouverture, en 1976. A découvrir aussi dans ce musée, le buste de Joseph Salagnac. Cette statue de plâtre dépeint ce personnage originaire de Saint-Setiers, sur le plateau de Millevaches, qui tenait un café à Paris, boulevard Montparnasse, avant la Première guerre mondiale. Ce buste devait trôner sur le zinc de l'établissement.


 

Il est un personnage, notable usselois, qui fonda la Côte d'Ivoire, au temps de l'Afrique Occidentale Française (AOF). Né le 4 juin 1860 à Ussel, Marcel Treich-Laplène effectue son service militaire en Algérie en 1878, puis devient répétiteur au lycée de La Rochelle où il rencontre un important commerçant, propriétaire d'une factorerie à Assinie et des plantations dans le golfe de Guinée. Ce commerçant engage Marcel pour diriger l'une de ses plantations. Et Treich-Laplène d'être nommé en 1885 résident-délégué en Côte d'Ivoire. Un an plus tard, face aux prétentions anglaises, il est envoyé auprès des rois de l'Abron et du Bondoukou pour passer des alliances, puis dans l'Indénié, décuplant ainsi la superficie des possessions françaises en Côte d'Ivoire. En 1888, il entre en contact avec les chefs des pays situés le long de la rivière Comoé et arrive le 20 mars 1889 à Grand Bassam où il est nommé résident général de France. C'est épuisé qu'il embarque le 9 mars 1890 pour Dakar sur un paquebot, le Ville de Maceio, où il mourra le jour même. D'abord inhumé dans le cimetière des Européens de Grand Bassam, son corps est ramené à Ussel où des obsèques solennelles lui seront faites le 3 décembre 1891. Je m'incline quelques instants devant sa tombe (ci-dessous) avant de poursuivre ma promenade dans le cimetière, à la recherche des plaques funéraires. En effet, la porcelaine est l'une des productions emblématiques du Limousin depuis la fin du XVIII ème siècle, et les ateliers limougeaux, de confectionner des plaques funéraires en forme de grande assiette (deuxième photo) dès les années 1830. Les plus modestes de ces plaques, en simple porcelaine blanche, comportaient uniquement le nom du défunt ou de la famille propriétaire du tombeau. La seconde moitié du XIX ème siècle verra ensuite se répandre des plaques dont la partie supérieure était enrichie d'une peinture funèbre, souvent d'esprit romantique. Certaines plaques funéraires représentent une veuve éplorée sur le tombeau de son époux, les mains jointes d'un couple, un ange auprès d'une tombe ou de simples fleurs, comme des pensées par exemple. Il suffit ainsi de parcourir les allées du cimetière d'Ussel pour découvrir cette forme d'art populaire, certes modeste, mais attachant et fragile.


 

INFOS PRATIQUES :

  • Office du tourisme, Place Voltaire, à Ussel. Tél : 05 55 72 11 50. Site internet : http://www.ot-ussel.fr/
  • Musée du Pays d'Ussel, 12 rue Michelet à Ussel. Tél : 05 55 72 54 69 et 05 55 72 40 73. Ouvert de mi-mai à fin septembre, tous les jours, de 14h00 à 18h00 (sauf le mardi). Sur rendez-vous hors saison. Site internet : http://www.ussel19.fr/activites/musee-du-pays-dussel/

  • Cimetière, rue de l'Enclos, à Ussel.

  • Galerie associative, L'Art et la matière, 6, rue de l'Eglise à Ussel. Tél : 06 80 64 52 96. Site internet : https://aiguaderocha.com/

  • Photographe Jean-Baptiste Robert : http://jbrphoto.fr/

 

 

 

 




Retour aux reportages







Qui Suis Je - Reportages - Médiathèque - Calendrier - Pays - La lettre - Contact
Site réalisé par Kevin LABECOT
Disclaimer - Version mobile