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Georgetown et Croydon
(Queensland, Australie)
Heure locale

 

Lundi 29 janvier 2018

 

Près de trois cents kilomètres me séparent de Croydon, ma destination du jour. Couché tôt, je me lèverai de bonne heure afin de prendre la route sans tarder. Celle-ci, d'abord convenable, se transformera en une seule voie sur certains tronçons (ci-dessous) me contraignant à empiéter sur le bas-côté non bitumé pour laisser passer le véhicule en sens inverse. Je me réjouis que le temps soit sec et que le bas-côté ne soit pas humide car cette manœuvre serait d'autant plus délicate. Au passage, un petit salut de la main de la part des conducteurs semble ici être la coutume. Même si je roule habituellement à bonne vitesse (cet axe routier autorise les 100 km/heure), je reste malgré tout prudent car la faune locale peut créer la surprise à tout moment. Ainsi un petit kangourou se mit-il à traverser la route alors que j'arrivais à vive allure. S'engageant prudemment sur la chaussée, il ne s'arrêta pour autant alors qu'il me voyait arriver et poursuivit très posément sa traversée, m'obligeant à marquer l'arrêt pour ne pas l'écraser. Une façon de me dire que je n'étais pas chez moi...Un peu plus tard, je croisais un autre kangourou, écrasé, et commençant par être dévoré par un gros lézard d'un joli vert électrique. D'autres lézards traverseront devant moi sans pour autant se presser non plus et je ne parle pas des oiseaux virevoltant autour du véhicule.


 

Ma première halte sera Georgetown,une petite ville située le long de la rivière Etheridge (qui prêta longtemps son nom à la ville), actuellement à sec. Cette ville a un passé lié à l'exploitation de la mine et possède un centre d'exposition de pierres (ci-dessous en photo) dont de superbes agates. Ouvert en 2003, Terrestrial (c'est le nom du centre) permet ainsi de voyager dans les entrailles de la Terre, à travers l'exposition de plus de 4500 pierres rassemblées par Ted Elliott, un passionné de ce genre d'objets. Derrière le bâtiment se trouve un petit parc qui abrite un monument dédié à la paix et à celles et ceux qui se sont battus pour elle dans différents pays. On y remarque entre autres les noms de Martin Luther King, Nelson Mandela ou Mahatma Gandhi... Je suis surpris par le quadrillage et la propreté de la petite ville, qui dispose de rues très larges. Je me gare sans difficulté sous un arbre près de l'office du tourisme et fais un tour à pied, histoire de me rendre compte du patrimoine architectural. Celui-ci est maigre. Je remarquerai la loge maçonnique locale, bâtie en tôle (deuxième photo ci-dessous) et aurai moins de chance avec The Ant Bed House, actuellement en cours de rénovation. Cette demeure fut bâtie en 1889 par T.R.Geragthy, arpenteur minier de son état et fait partie pourtant de la promenade proposée habituellement aux visiteurs. Même déconvenue avec l'ancien bureau de poste construit en 1871. Ici, l'élevage est roi et le bœuf a sa route, entendez la Beef Road (route du bœuf), le moyen de transport désormais favori des éleveurs de la région, à savoir de très longs camions comportant plusieurs remorques (road trains). Je noterai au passage le panneau d'adieu de la commune tracé en forme de bœuf en bord de route et qui vous remercie de vous être arrêté. Pour rappel, la route du Boeuf sera construite sur l'initiative du gouvernement de l'Etat du Queensland après des études préalables engagées en 1961. Un long ruban de bitume sera ainsi tracé pour un cout total de 62000 AUS$ par kilomètre réalisé. Un investissement durable pour la région, qui contribuera aussi à l'essor touristique.


 

Il me reste encore 150 kilomètres à parcourir avant d'atteindre Croydon, une petite ville de quelques 9000 âmes, mais qui compta jadis pas moins de 38 pubs (contre un seul actuellement) et huit cimetières différents d'après l'agent de l'office de tourisme. On ne risquait pas de mourir de soif ici... l'endroit est une ancienne cité minière où la ruée vers l'or a fait des ravages : cette ruée débuta en novembre 1885, avec l'arrivée de 7000 personnes sur le site deux ans plus tard. La ville comptera jusqu'à 36 hôtels au plus fort de sa fréquentation et l'on estime à 15000 le nombre d'habitants entre 1885 et 1927. On trouvera aussi quatre journaux différents et onze courtiers. Les gisements aurifères de Croydon se trouvaient sous terre avec toutes les difficultés d'extraction que cela impliquait. Les Frères Alldridge seront les premiers à mettre le doigt sur un gisement, en 1883, et seront suivi par d'autres prospecteurs qui tenteront à leur tour de faire fortune dans plusieurs gisements aurifères. Croydon vivra ainsi à l'heure du précieux métal de 1886 à 1926, permettant la construction de cette ville telle que nous la connaissons aujourd'hui, en laissant au passage une majorité de laissés-pour-compte et peu d'élus sur la roue de la fortune. Parmi les gisements ayant existé, il y a celui d'Iguana, tout proche de la ville dont il ne reste désormais qu'un musée à ciel ouvert (ci-dessous). En 1892, chaque tonne de pierres qui en était extraite contenait de 7 à 8 onces d'or (soit près de 175 à 200 grammes) mais au-delà de 170 mètres, la veine aurifère disparut derrière un large bloc de granit, au grand désespoir des prospecteurs. Il faudra attendre ensuite 1915 pour que Freddie Cuthbert, l'un des derniers chercheurs d'or chanceux, parvienne à creuser à 300 mètres de profondeur, mais en vain. Les énormes couts d'exploitation du gisement le fera renoncer à creuser au-delà d'une centaine de mètres de profondeur dès 1918, jusqu'à ce que le département minier de l'Etat de Queensland ne décide de fermer l'unité.

Je m'arrête également au Temple chinois, lui aussi musée à ciel ouvert. Cet ancien site archéologique se trouve sur la route du Lac Belmore et rappelle qu'il n'y aurait jamais eu d'exploitation minière ici sans les Chinois. Ceux-ci coopérèrent à leur façon en vendant fruits et légumes aux nouveaux arrivants et en faisant la cuisine pour nourrir tout ce petit monde. Croydon dénombra jusqu'à 300 Chinois, lesquels avaient à l'époque érigé leur propre temple dont il ne reste de nos jours que les fondations.


 

Croydon propose aux visiteurs un dépliant (en photo tout en bas de cet article) rassemblant les lieux incontournables de la ville. Après ma visite du musée de la mine, je me rends au camping pour y garer ma maison roulante et surtout brancher l'air conditionné car la chaleur est étouffante en ce début d'après-midi. Puis je repars à pied pour faire un tour du propriétaire : je commencerai par l'épicerie la plus ancienne de l'Etat du Queensland (en photo ci-dessous) puisque celle-ci fonctionne de manière continue depuis...1894 ! Originalité de l'endroit, une aile de cette épicerie offre un musée gratuit avec de vieux outils et d'anciennes publicités. Je suis fort bien accueilli par la patronne (qui, elle, n'est pas d'origine!) avec laquelle j'échangerai quelques mots. Puis je m'arrête quelques mètres plus loin devant l'annexe de l'ancien hôpital de la ville (deuxième photo) qui fut érigée en 1894 par un certain John Angus qui fit don de £40000 à l'hôpital mais ne laissera...qu'un shilling à son épouse ! Cette annexe était réservée aux hommes et était jadis bâtie sur un autre site. On démonta le tout lors de la construction du nouvel hôpital puis on remonta l'ensemble ici.


 

Samwell Street aligne quatre édifices classés, à commencer par l'ancienne mairie (ci-dessous), construite vers 1892. L'endroit est encore utilisé pour des cérémonies du souvenir et aussi comme bureau administratif. Le caractère de la construction reflète l'opulence de l'époque et montre l'importance de la ville à la fin des années 1800. L'endroit accueillit même le Jubilé de la Reine Victoria en 1897. L'ancien tribunal (deuxième photo) fut quant à lui bâti vers 1887 et vit défiler bien des procès, d'autant plus que les écarts de conduite (états d'ébriété) étaient nombreux à cette époque compte tenu du nombre de pubs, sans parler des conflits à régler entre détenteurs de concessions minières. La dernière décision de justice fut ici rendue en 1926 mais l'on peut toujours visiter l'intérieur. Juste à côté, se dresse encore l'ancien commissariat de police érigé en 1896, pour seulement £196 de l'époque. Une bouchée de pain ! Celui-ci est depuis devenu un musée. Quant à l'officier de police, il n'avait pas besoin de beaucoup de temps pour se rendre sur son lieu de travail puisqu'il occupait la maison résidentielle voisine (troisième photo), qui comportait trois chambres, un salon et une salle à manger, un cuisine, une penderie, plusieurs salles de bain et une véranda.


 

Lors de ma visite à l'office du tourisme, je tomberai sur le portrait de plusieurs femmes, originaires de Croydon, et ayant été les premières à occuper leur poste chacune dans leur catégorie : Jean White (ci-dessous) sera ainsi la première femme australienne à devenir médecin volant (Flying Doctor) en 1937, avec, pour camp de base les hôpitaux de Croydon et de Normanton. N'ayant jamais pris l'avion avant d'occuper cet emploi, Jean parcourra pourtant des milliers de kilomètres à bord d'un bi-moteur Fox Moth pour ausculter des patients. Alors qu'elle n'était âgée que de 20 ans, Leonora Gregory, elle, créa son propre journal, le Croydon Mining News, en 1930. Le premier numéro, qui sortira de presse le 12 mai, provoquera un certain enthousiasme notamment grâce à un article qui s'intéressait à la relation entre la longueur des jupes des filles et le retour du port de la barbe pour les messieurs. Née à Croydon en 1889, Dorothy Coleman deviendra quant à elle une photographe renommée à Brisbane après avoir d'abord étudié l'art pictural. Après avoir fait ses armes dans un studio photographique, elle deviendra retoucheuse photos de talent, ouvrira son propre studio en 1935 et deviendra célèbre pour ses portraits. Terminons ce tour d'horizon flatteur pour la gente féminine locale avec Madame Thompson (deuxième photo), femme d'entreprise, puisqu'elle dirigeait un hôtel et une boutique en ville, et fut la première femme à devenir conseiller de l'Etat du Queensland !

 

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