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Les Diligences Cobb & Co
(Musée Cobb & Co, Toowoomba, Queensland, Australie)
Heure locale


Mardi 13 février 2018

 

C'est au terme d'un parcours de près de 400 kilomètres que je suis arrivé dans la matinée à Toowoomba, où se trouve le musée Cobb & Co. Nous l'avons vu lors de précédents articles, Cobb & Co fut une importante compagnie de diligences australienne qui fut fondée en 1853 à Melbourne, en pleine ruée vers l'or. Ses fondateurs étaient quatre Nord-américains, Freeman Cobb (en photo ci-dessous), John Murray Peck, James Swanton et John B.Lamber. A l'origine, la compagnie oeuvrait sous le nom de American Telegraph Line of Coaches, qui évoquait alors à la fois le progrès et la rapidité. Dans un second temps, l'américain George Train vint se joindre au groupe et apporta son soutien financier à l'entreprise. Et d'importer pour commencer plusieurs voitures fabriquées au Etats-Unis dont le modèle Concord, afin d'ouvrir dès le début de l'année 1854 une ligne quotidienne vers Forest Creek et Bendigo, pour ensuite pousser en direction de Geelong et de Ballarat, là où plusieurs champs aurifères étaient exploités.

 

En ce temps-là, les attelages étaient changés tous les 10 à 20 kilomètres selon la ligne et surtout la difficulté du terrain. On s'arrêtait alors dans des auberges ou des hôtels afin de satisfaire également les besoins des passagers et des conducteurs. A aucun moment ces diligences ne tenteront d'ailleurs de rivaliser avec le chemin de fer naissant. Bien au contraire, au fur et à mesure de l'extension du réseau ferré, les diligences Cobb & Co desserviront d'autres routes encore inexploitées et se caleront sur l'heure d'arrivée des trains. C'est ce qui s'appelle agir avec intelligence. Et Cobb & Co de se tailler une excellente réputation pour sa fiabilité, son efficacité et sa rapidité, alors que l'entreprise n'avait encore décroché aucun contrat d'envergure dans le transport du courrier. Avec ses voitures américaines plus modernes, Cobb & Co offrait un confort maximal aux voyageurs en comparaison des voitures australiennes habituelles équipées de simples ressorts en acier. Et cela faisait toute la différence compte tenu des mauvaises routes qui conduisaient très souvent vers les gisements d'or.

En 1856, les quatre premiers fondateurs vendirent leurs parts : Freeman Cobb et Lambert s'en retournèrent aux Etats-Unis tandis que Swanson travailla encore dans les diligence durant quelques années, et John Peck s'établit à Melbourne et monta sa propre affaire. L'entreprise Cobb & Co connut alors plusieurs propriétaire jusqu'à ce qu'en 1862, un groupe d'investisseurs s'intéresse au projet, avec en tête James Rutherford. Notre homme réorganisera la maison en étendant le réseau et en décrochant des contrats pour la livraison du courrier postal. Vers 1870, une grande partie de l'Etat de Victoria était desservi par Cobb & Co. Loin de s'arrêter en si bon chemin, James Rutherford envisagea d'étendre son activité en Nouvelle-Galle-du-Sud, toujours en direction des gisements aurifères. Dix voitures furent ainsi affectées , à grand renfort de publicité, de Bendigo à Bathurst. Et Rutherford de finalement s'établir durablement à Bathurst compte tenu du succès de l 'opération. 1865 ouvrit une nouvelle phase d'expansion, cette fois dans le Queensland, en développant un service régulier entre Ipswich et Brisbane. Et Cobb & Co d'agrandir rapidement son emprise sur cet Etat en contribuant à relier de nombreuses communautés jusqu'ici isolées dans un territoire démuni d'infrastructures routières. En 1881, Cobb & Co devint une vraie compagnie, au capital de £50 000 de l'époque. L'entreprise exploitait alors 3000 chevaux et était devenue la plus grande société de transport du Queensland en parcourant chaque semaine quelques 10000 miles (soit plus de 16000 kilomètres). Et d'ouvrir sa propre usine de fabrication de matériels à Charleville en 1886 en offrant notamment un choix de 120 modèles de voitures différents.

 

Les liens formels jusque là entretenus entre les actionnaires de Cobb & Co dans le Victoria et James Rutherford (qui avait développé l'entreprise dans la Nouvelle-Galle-du-Sud et le Queensland) disparurent mais les bonnes relations demeurèrent. Dans le Victoria, les diligences Cobb & Co opéraient leurs lignes à travers quatre entreprises locales qui se partageaient les dessertes. Une autre compagnie Cobb & Co verra également le jour en 1866, en Australie du Sud, enlevant une fois pour toutes le marché après plusieurs années de concurrence avec William Rounsevell, un autre transporteur. Le renom de Cobb & Co sera tel que l'entreprise fera des émules en Nouvelle-Zélande dès 1863, et même au Japon en 1868. De retour plus tard des Etats-Unis, Freeman Cobb reviendra quelques temps en Australie avant de partir avec sa famille en Afrique du Sud en 1871 dans le but d'ouvrir une ligne Cobb & Co entre Port Elizabeth et le gisement de diamants de Kimberley. Notre homme s'éteindra là-bas sept années plus tard.

Cobb & Co laissera des traces durables dans le folklore australien et en littérature : Henry Lawson évoquera l'entreprise dans son ouvrage « The Lights of Cobb & Co » qu'il écrira en 1897. Le peintre Tom Roberts illustrera aussi Cobb & Co dans son œuvre « Bailed Up » réalisée près d'Inverell, en 1895. Peu à peu, le développement des diligences et des gisements d'or entrainera aussi l'apparition de bandits de grand chemin qui se mettront à attaquer les convois. Cobb & Co subira au moins neuf attaques de diligences du côté de Bathurst dans les sept mois suivant son installation sur place.

Je l'évoquais plus haut, l'arrivée du chemin de fer en Australie viendra ici et là contrarier sérieusement le développement des lignes de diligences Cobb & Co, sans compter l'arrivée de l'automobile à des prix de plus en plus abordables et l'avènement du transport du courrier par avion. Ainsi Cobb & Co devra t-elle fermer son usine de Charleville en 1920, et faire une croix sur une bonne partie de ses contrats de transport de courrier au départ de cette même ville un an plus tard. L'inauguration d'une ligne aérienne Charleville-Cloncurry y sera certainement pour quelque chose. Cobb & Co, qui s'était aussi diversifiée dans d'autres secteurs économiques, avait accumulé par péché d'optimisme une montagne de dettes notamment dans l'industrie lainière. En 1911, l'année où Rutherford décédera, l'entreprise se lancera notamment dans l'achat de véhicules à moteur, considérant sans doute qu'on ne pouvait pas aller contre le progrès. Deux ans plus tard, Cobb & Co allait assurer son dernier service de diligence entre Hebel-Goodooga-Brewarrina (Nouvelle-Galle-du-Sud) et entre Casterton et Mount Gambier (Victoria) en 1916. Dans le Queensland, le dernier attelage parcourra la ligne Yuleba-Surat pour son ultime voyage le 14 août 1924. Quant à l'entreprise Cobb & Co, elle sera mise en liquidation suite à la chute du cours de la laine lors de la crise de 1929. Et avec elle, se tournera une page de l'histoire du pays.

 

Je tente aujourd'hui de revivre pour quelques instants cette fabuleuse histoire de Cobb & Co à travers l'exposition de quelques modèles de voitures que l'entreprise utilisera sur ses lignes. Le musée Cobb & Co abrite la plus grande exposition de ce type de véhicules en Australie, même si d'autres véhicules Cobb & Co peuvent être admirés entre autresà Ballarat, à Sydney ou à Timberton. Si Cobb & Co ouvre le bal, je pourrai aussi admirer d'autres types de véhicules tractés par la force animale tout au long de cette visite. Pour l'heure, je me concentre sur la lecture des panneaux d'information qui figurent souvent en face des modèles de voitures. J'apprends ainsi que ces diligences étaient souvent tirés par 5 ou 7 chevaux et étaient destinées à emporter 8, 11 ou 14 passagers. Lors du changement d'attelage, il n'y avait pas de temps à perdre car le courrier royal (Royal mail) devait être livré en temps et en heure. Les passagers mettaient à profit cette escale de courte durée pour satisfaire leurs besoins physiologiques ou pour se rafraichir et manger un encas. A part l'usine de Charleville (qui restera la principale unité de fabrication à partir de 1890), Cobb & Co possédera d'autres ateliers similaires à Castlemaine (Victoria) à Bathurst, Hay and Bourke (Nouvelle-Galle-du-Sud) et à Petrie et Brisbane (Queensland). Jusqu'à sa disparition, l'entreprise aura parcouru des milliers de kilomètres dans le bush australien durant plus de 70 ans.

Quelques modèles de voitures sont exposés comme, par exemple la voiture Cobb & Co N°100 (en photo-ci-dessous) qui fut construite dans l'usine de Charleville jusque dans les années 1920. Cette voiture desservira le sud-ouest du Queensland sous la marque Cobb & Co avant d'être remplacée plus tard par le conducteur E.A.Palmer. Cette voiture sera modifiée en 1947 par Geoff Ernst puis repeinte par Col Ferguson (Diligences Ferguson) pour être ensuite exposée au musée.


 

La Cobb & Co N°112 (ci-dessous), elle, transportera des années durant de nombreux passagers sur la ligne Yuleba-Surat-St George avant d'être remplacée par une automobile en 1924. Elle fut également construite à l'usine de Charleville. En janvier 1925, cette voiture sera vendue par Cobb & Co pour la somme de £100 au gouvernement fédéral. Elle sera transportée de Yuleba jusqu'à l'exposition de Brisbane avant de finir à Canberra en 1927. Le véhicule restera plus ou moins à l'abandon pendant plusieurs années avant de retrouver son aura grâce au Musée national australien qui la prête au musée Cobb & Co de Toowoomba depuis octobre 1990.


 

Terminons ce tour d'horizon avec le modèle Cobb & Co N°48 (ci-dessous) qui pouvait transporter quatorze passagers à la fois (neuf à l'intérieur de la voiture, trois sur le toit et deux à côté du conducteur). Le véhicule était tiré par un attelage de cinq à sept chevaux. C'est l'entreprise Ferguson, qui, là encore, restaurera l'ensemble dans les années 1950. A noter qu'une peinture sombre recouvrait à l'époque la voiture du temps de Cobb & Co.


 

Une visite complète du musée Cobb & Co vous permettra de découvrir 47 véhicules de types différents et d'usages divers, qui jouèrent un rôle prépondérant dans l'histoire du Queensland : les voitures Cobb & Co bien sûr, mais aussi les buggys à quatre roues, moyens de locomotion légers et stylés utilisés pour le transport de personnes, les chariots à quatre roues conçus pour le transport de lourdes charges à travers les Darling Downs, des charrettes plus légères pour transporter la laine, les produits laitiers et autres produits, les sulkies et autres cabriolets, voitures à deux roues, à la fois légères et rapides qui servaient au transport des personnes, les omnibus (en photo ci-dessous) qui étaient affectés au transport public des passagers dans les villes et les banlieues, et les fiacres, véhicules de fantaisie utilisés par les gens aisés. En voiture Messieurs Dames...

 

INFOS PRATIQUES :

  • Cobb & Co Museum, 27 Lindsay Street, à Toowoomba. Tél : 07 4659 4900. Ouvert tous les jours de 9h30 à 16h00. Entrée : 12,50AUD$. Accès wifi gratuit sur place. Parking gratuit derrière le bâtiment. Cafétéria (je vous recommande les pâtisseries).Site internet : http://www.cobbandco.qm.qld.gov.au
  • Si vous voulez en savoir davantage sur l'entreprise Cobb & Co, procurez-vous le livre en photo ci-dessous à la boutique

 







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