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Bunbury
(Australie-Occidentale, Australie)
Heure locale


Jeudi 5 mai 2016

 

Encore une nuit blanche, ou presque. Je commence à m'épuiser. Qu'à cela ne tienne, je quitte le terrain de camping dès l'aube pour prendre la direction de Bunbury, une ville de 75 000 habitants située dans le sud-ouest de l'ouest australien. C'est la troisième ville d'Australie-Occidentale, par l'importance de sa population, après Perth et Mandurah. Bunbury se trouve à l'embouchure de la rivière Collie qui se jette dans la Koombana Bay, principale attraction de l'endroit. Cette baie se trouve à l'intérieur de la grande baie Géographe qui s'étend au sud jusqu'au cap naturaliste. C'est Louis de Freycinet qui abordera pour la première fois cette côte, en tant que capitaine du navire Casaruina, en 1803. Il nommera la région Port Leschenault en l'honneur du botaniste de l'expédition Jean-Baptiste Leschenault de la Tour. Louis de Freycinet fera partie de ces grands voyageurs français, commençant sa carrière de marine en tant que simple aspirant, embarquant en 1800 à bord du navire du Commandant Baudin en direction des Terres australes à des fins scientifiques, puis devenant lui-même le capitaine du Casaruina trois ans plus tard.

Les Anglais toujours à l'affût, ne tarderont pas à débarquer eux aussi à Bunbury : en 1829, Alexander Collie (qui a prêté son nom à la rivière locale) et le lieutenant Preston arrivent sur place et sillonnent la région. Juste avant que le gouverneur de l'Etat, Sir James Stirling (encore un navigateur!) ne visite cet endroit et y fasse installer un poste militaire. Et si Bunbury s'appelle ainsi aujourd'hui, c'est au lieutenant Henry William St Pierre Bunbury qu'elle le doit, car celui-ci fut à l'origine de la route reliant Pinjarra à Bunbury. En 1895, le rail fera aussi son entrée entre Perth et le sud de l'Etat et desservira par la même occasion la ville.

De nos jours, Bunbury est devenue le chef-lieu du sud-ouest et est réputée pour ses terres agricoles, ses vignobles et ses forêts de karris et de jarrahs. Station balnéaire, la ville affiche fièrement le Rose Hotel, établissement datant de 1865 qui offre son majestueux balcon au premier étage, orné de ferronneries ouvragées. Non loin de là, un ancien couvent des sœurs de la Miséricorde a été transformé en galeries d'art. C'est l'époque qui veut cela.

 

 

Mon guide recommande de visiter le centre de découverte marine consacré aux dauphins. En temps normal, ils sont nombreux (environ 150 dauphins) à venir nager dans la baie de Koombana et à s'y reproduire. Malheureusement, la saison actuelle n'est pas la plus propice pour observer cet animal au demeurant fort sympathique. Je n'embarquerai pas pour l'une des croisières proposées par ce centre, par manque de temps, et parce qu'en cette saison, on ne me garantit pas la présence des dauphins. Je me contenterai de visiter le centre avec ses quelques petits aquariums contenant quelques créatures marines comme le homard, la langoustine, ou la pieuvre (j'assisterai au repas de l'une d'entre elles). Ce centre bénévole a pour mission de sensibiliser le public sur les dauphins et leur milieu naturel. Bien sûr, il accueille beaucoup d'Australiens mais les touristes étrangers sont également présents. Sur place, je suis accueilli par des spécialistes formés pour informer les visiteurs sur la mission de ce centre. Ces personnes sont épaulées par plusieurs bénévoles, des jeunes étudiants souvent originaires de l'étranger, comme Tom, qui vient d’Allemagne. Une aide précieuse pour faire face à l'affluence d'un public avide de connaissances.


 

On m'informe que le centre abrite actuellement une tortue verte de mer qui a récemment subi une intervention chirurgicale afin de lui retirer une tumeur cancéreuse à la gorge. L'opération s'est bien passée et notre tortue a repris des forces. Pour la photographie, Jan (en photo ci-dessus) sortira un instant la tortue de l'eau. Celle-ci battra des nageoires avec une vigueur inégalée. En voilà une qui devrait bientôt rejoindre son milieu naturel....Rappelons que la tortue verte de mer ne mesure que 5 centimètres de long à sa naissance mais ...jusqu'à 1,5 mètre à l'âge adulte (pour un poids supérieur à 300 kg). Elle est en effet la plus grande espèce de tortues marines existante. Sa carapace est large et douce à la fois, de couleur brun olive, tandis que sa face intérieure laisse apparaître une couleur jaune. Curieusement, sa tête ne peut pas se rétracter à l'intérieur de son corps, mais notre tortue a bien d'autres qualités comme, par exemple, sa vitesse de déplacement qui peut dépasser les 56 km/heure, grâce à ses larges nageoires. L'animal peut aussi s'abstenir de respirer pendant des heures, plus facilement, il est vrai, lorsqu'elle se trouve en eau froide. Manifestement, cette espèce de tortue est faite pour la vie marine, et elle se déplace très difficilement à terre. Il le faut pourtant, lorsqu'elle rejoint tous les deux à quatre ans sa plage native pour y déposer ses œufs (entre 100 et 200). Pour cela, notre tortue femelle est capable de parcourir des distances impressionnantes pour mener à bien sa mission.

Même si les dauphins ne sont pas présents à l'intérieur du centre, il ne faut pas oublier qu'ils sont à l'origine de la création de cette unité de recherche qui observe les dauphins sauvages de cette baie. On surveille ainsi de près les espèces de dauphins qui nagent à proximité des côtes, leur façon de vivre et de se nourrir. Et nos spécialistes de tenter d'identifier les uns et les autres grâce aux marques que les cétacés portent sur leur dos. Il existe en effet plus de 200 espèces de cet animal !

Plus de 150 bénévoles assistent les scientifiques de ce centre, pour une mission de six semaines minimum. Ils viennent généralement du monde entier et ne sont jamais trop nombreux. Si le cœur vous en dit... Ici, on recherche toujours des volontaires qui accompagneront les visiteurs lors de la nage avec les dauphins, contribueront à nourrir les animaux, ou aideront à l'entretien des différents aquariums.

 

Au cours des prochaines semaines, la baie de Koombana va vivre d'intenses changements : suite à une enquête réalisée il y a deux ans auprès de la population de Bunbury, un plan de développement vient en effet d'être arrêté. Il consiste à rénover et à réaménager la fameuse baie, afin d'y attirer un plus grand nombre de visiteurs locaux et étrangers. Au programme, constructions de zones résidentielles et de boutiques, aménagement d'une promenade et développement du centre de découverte des dauphins, le tout avec accès direct au centre-ville. Trois années de travaux devraient être nécessaires à la réalisation de ce projet et j'ai déjà promis de revenir à l'issue des travaux.


 

Je me rends maintenant au 77, Forrest Avenue, où se trouve un ancien cottage, celui des King, immigrants anglais arrivés ici vers 1865. Henry et Susannah King sont le type même des migrants anglais du XIX ème siècle. Partis de l'Essex, ou Henry avait oeuvré comme policier, ce couple britannique va rejoindre Bunbury avec leurs quatre fils. Henry se lancera dans la production de briques et fournira d'ailleurs plusieurs chantiers de la ville et de Busselton. D'abord installé avec son épouse près de la jetée, à Wollaston Street, Henry King fera l'acquisition de 5 acres de terres sur lesquels il bâtira sa propre maison, aidé de son fils. Nous sommes alors en 1880. L'argile, tirée de la zone marécageuse trouvera un usage immédiat avec Henry tandis que Susannah fera son beurre et sa crème grâce au lait des quelques vaches dont le couple dispose alors. Dix ans plus tard, Henry laissera tomber la brique pour s'adonner au jardinage, puis décèdera en 1899, après avoir été témoin de bien des changements à Bunbury. Son épouse le suivra dans la tombe en 1912.

 

Une visite de la demeure en compagnie du guide de la Société historique de Bunbury permet d'imaginer ce qu'était la vie quotidienne d'une famille de classe moyenne de l'époque. Les pièces de la maison (à l'exception de la cuisine, qui était située en dehors de la maison, et fut démantelée il y a quelques années) contiennent désormais un nombre important d'objets hérités de cette époque : une bouillotte (ci-dessus) était remplie d'eau chaude et servait alors à chauffer le lit. Plus loin, je découvre un gramophone portable Colibri qu'on emportait lors des pique-nique pour se divertir. Décidément, notre époque n'a rien inventé.

Autrefois, on faisait davantage d'enfants qu'aujourd'hui : les King en eurent sept, entre 1856 et 1876. James, Henry (ou Harry), William (aussi surnommé Bill or Nobby), George, Elizabeth, John et Suzan (qui mourra précocement au bout de 18 mois) formèrent ainsi une famille soudée. James épousera une certaine Mary Petit, en 1881, puis s'installera à Perth. Il conduira un laps de temps la malle-poste entre Perth et Vasse (trois jours de voyage étaient nécessaires), jusqu'à ce que l'arrivée du rail, en 1893, ne mette en péril son emploi. Cela ne l'empêchera pas d'avoir sept enfants. Harry, lui, marchera dans les pas de son père et fabriquera des briques, prospectant aussi l'or avant d'obtenir un emploi au Conseil de Bunbury. Il épousera Elizabeth Hogan en 1886 et lui fera plusieurs enfants. William, ou Bill alias Nobby si vous préférez, possédait un sacré caractère : l'homme partira en expédition à plusieurs reprises en Australie, puis fera fortune dans l'immobilier à Bunbury au point de prendre sa retraite à l'âge de...38 ans. Il possédait alors des boutiques dans Victoria Street et plusieurs cottages dans Wollaston Street, là où il avait vécu enfant, avec ses parents. En 1896, il épousera Lucinda Winbridge mais ne lui fera pas d'enfant. Bill héritera du King Cottage au décès de Susannah, sa mère.

 

George tentera lui aussi sa chance dans la prospection aurifère, avec d'ailleurs un certain succès puisqu'il s'enrichira et investira dans l'immobilier à Bunbury. Il épousera Mary Ann Shanahan et aura six filles plus un fils avec elle. John se lancera quant à lui dans la production de briques puis partira à la recherche de l'or. Malchanceux, il rentrera et se reconvertira comme marchand de quatre saisons avec son cheval et sa carriole. Il épousera Eliza Hay qui lui donnera trois enfants. Enfin, Elizabeth épousera William Connor en 1888 et aura quatre enfants. La famille déménagera dans le Queensland avant de revenir du côté de Cottesloe (Ouest australien). A la mort de William Jing, le King Cottage sera racheté par des immigrants suédois, Henry et Alice Carlson, tout juste arrivés en Australie en 1881. Le boom économique d'alors qui survint dans l'ouest australien avec la découverte de gisements aurifères les incitera à revenir dans la région. C'est en 1904 qu'Henry (en photo ci-dessous) épousera Alice Warner. Puis le couple s'établira à Balingup, où il tiendra boutique. Trois enfants, Roy, Mary et Ivan naitront de cette union.

 

C'est en 1923 que les Carlson feront l'acquisition du King Cottage avec cinq acres de terres autour. La propriété sera alors rebaptisée « Lamorna », qui correspondait alors au lieu de naissance de la mère d'Alice, en Cornouailles. La retraite d'Henry sera active puisqu'il s'occupera de Prince, le cheval de la maison, de la vache, et du potager. Dans les années 1930, les cinq acres de terres seront divisés. Quant aux enfants, ils n'iront pas très loin : Roy achètera une maison au 81, Forrest Avenue, avec écuries, potager et court de tennis, et Ivan posera ses valises au 75 de la même avenue, dans une demeure entourée d'un grand jardin. Henry tirera sa révérence en 1950 à l'âge de 84 ans. Son épouse, Alice, partira neuf ans plus tard. C'est à cette date que le King Cottage sera cédé à plusieurs propriétaires. Et Ivan de suggérer de le revendre à la municipalité de Bunbury pour en faire un musée. Le sort du cottage sera scellé en 1966.

 

 

INFOS PRATIQUES :


  • Dolphin Discovery Center, 830 Koombana Drive, à Bunbury. Tél:08 9791 3088. Ouvert tous les jours de 8h00 à 16h00 (d'octobre à mai) et de 9h00 à 14h00 (de juin à septembre). Entrée : 10 AUD. Boutique et café sur place (dégustez le gâteau à la carotte, il est irrésistible!). Accès internet gratuit sur place : bunburywifi. Le centre propose également des croisières pour observer les dauphins (49AUD), et il est possible de nager avec les cétacés en mer lors d'une croisière de 3 heures (165 AUD). Repas des animaux à 10h00, 11h00 et 23h00. Site internet : http://www.dolphindiscovery.com.au

  • Pour être bénévole au centre de découverte des dauphins, la première chose est de pratiquer l'anglais (niveau conversation), accepter de travailler à mi-temps et être souriant. Les bénévoles à long terme sont généralement originaires de la région de Bunbury. Ils doivent faire acte de présence au centre pendant quatre heures au moins par semaine, et durant six mois. Ils peuvent cependant rester plus longtemps. Certains volontaires sont au centre depuis...plus de 20 ans ! Les bénévoles à court terme, eux, doivent fournir 20 heures minimum de travail par semaine, pendant six semaines. Contact : volunteers@dolphindiscovery.com.au

  • King Cottage, 77 Forrest Avenue à Bunbury. Tél : 08 9721 7546. Ouvert tous les jours de 14h00 à 16h00. Prise de photos interdite. Entrée : 10 AUD. Site internet : http://www.bunburyhistoricalsociety.com

  • Evitez le terrain de camping Discovery Park Koombana Bay, l'accès internet est inutilisable !






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