Revoir le globe
Top


Le Mount Field National Park
(Tasmanie, Australie)
Heure locale


Vendredi 11 novembre 2016

 

Que diriez-vous de visiter le Mount Field National Park ? La Tasmanie, qui possède 19 parcs nationaux a fêté leur centenaire en août dernier et le parc que je vous propose de découvrir fut justement le premier de cette longue série, puisqu'il fut créé en 1916, autour des chutes d'eau de Russell (ci-dessous en photo). La zone entourant ces superbes chutes avait déjà été préservée depuis 1885, avec le projet d'en faire la première région sauvegardée de l'île. Et puis, il fut décidé ensuite d'en agrandir le périmètre pour obtenir le parc tel qu'on le connait aujourd'hui, et qui porte le nom de Barron Field, premier juge de la cour suprême de la Nouvelle-Galles-du-Sud. Ce monsieur était également un naturaliste amateur passionné par la sauvegarde des beautés naturelles. Il siègera d'ailleurs en 1819 comme président de la cour suprême de la Terre de Van Diemen (Tasmanie).


 

Il faut dire que l'endroit avait jadis été occupé par les trappeurs, du côté de ce qu'on appelait alors les collines de Monto's Marsch (de nos jours, Ellendale), premiers Européens à avoir osé pénétrer dans cette région montagneuse inhospitalière du Mont Field. Aventuriers du bush et hors-la-loi s'y étaient aussi cachés au cours des années 1840, derrière Bushy Park, et survivaient en pillant des fermes et en vendant des peaux de kangourous et d’opossums. Avant 1910, le seul accès à cette zone se trouvait alors à Ellendale, porte d'entrée utilisée par les premier naturalistes et les explorateurs qui se faisaient alors guider par les trappeurs du coin. Dès 1869, le baron Von Mueller, célèbre botaniste allemand, partira ainsi explorer l'endroit pendant une longue semaine à l'est du Mont Field, et rapportera de nombreux échantillons de plantes de cette expédition. L'herbier qu'il constituera sera impressionnant puisqu'il atteindra entre 750000 et un million de spécimens dans les années 1890. Le botaniste Leonard Rodway avait lui aussi effectué un camp d'été sur place (à Noël) trente ans auparavant.

La beauté naturelle des chutes de Russell attira les premiers touristes dès 1885. Et les classes moyennes de l'époque de se presser pour les admirer dès la fin du XIX ème siècle. Leur accès est aisé car je n'aurai besoin que d'un quart d'heure pour les atteindre, depuis le bureau du parc. La promenade à travers la forêt est rafraichissante et je tomberai nez à nez avec un petit kangourou (ci-dessous) qui ne tardera pas à me fausser compagnie, peu rassuré par mon K-way rouge.

 

S'il est aujourd'hui facile d'atteindre le parc national,ce ne fut pas toujours le cas : certes, le Mont Field ne se trouve qu'à une encablure de Hobart mais il fallait faire le déplacement. L'extension de la ligne de chemin de fer au début des années 1900 contribuera au développement de la fréquentation du parc. Dès 1911, une auberge Marriott s'était déjà installée à l'entrée sud de ce dernier et d'autres hébergements ne tardèrent pas à profiter de l'aubaine touristique. Certains se rendaient sur place pour la journée, mais d'autres partaient carrément en expédition pour plusieurs jours. Ainsi l'association touristique de Tasmanie organisa t-elle en 1907 une première sortie du genre sur le plateau du Mont Field. Et de lâcher 3000 premières truites dans le lac Webster dès 1898 pour le plus grand plaisir des pêcheurs. Les autres lacs devaient subir le même sort quelques années plus tard.

Le beau monde allait participer à l'ouverture officielle du parc national du Mont Field en 1917, dont la naissance avait été initiée grâce à l'enthousiasme des associations touristiques, clubs sportifs, et corps scientifiques de l'époque, sans parler de personnages illustres comme William Crooke, Leonard Rodway ou Henry Doson, d'autant plus qu'il s'agissait alors d'un des premiers parcs de ce type créés en Australie. Et chacun de réserver sa place pour l'heureux événement. Le parc fut déclaré ouvert par le gouverneur Sir Francis Newdegate, lequel justifia sa création par la nécessité de préserver une fois pour toutes la forêt de Tasmanie au profit des générations futures, et de faire de l'endroit un sanctuaire pour la flore et la faune, mais également une attraction internationale.

 

Pour ma part, je découvre les chemins forestiers sans pour autant disposer du temps nécessaire à une expédition. Une fois au pied des chutes Russell, des panneaux m'indiquent que je me trouve à 15 minutes des chutes d'eau Horseshoe, à 25 minutes des Grands arbres et à 50 minutes de marche des chutes de Lady Barron. Le chemin grimpe (ci-dessus) mais le temps se dégage et l'endroit est agréable. Je poursuis donc ma balade en guettant toutefois l'hypothétique présence d’ornithorynques le long des cours d'eau. Animal semi-aquatique endémique de l'Est de l'Australie, et de la Tasmanie, celui-ci est le seul mammifère à pondre des œufs au lieu de donner naissance à des petits complètement formés. Sa mâchoire ressemble à un bec de canard, et sa queue évoque celle d'un castor. Chose que j'ignorais, l'ornithorynque mâle est aussi l'un des rares mammifères venimeux, avec son dard situé sur les pattes postérieures qui peut paralyser une jambe humaine, voire même de tuer un chien. La chance ne sera pas avec moi cette fois et je n'apercevrai aucun ornithorynque.

Le chemin balisé me conduira sans encombre jusqu'aux chutes Horseshoe (ci-dessous) qui s'avèrent toutefois bien moins spectaculaires que les précédentes. Une fois sur place, on m'indique que je ne me trouve qu'à quinze minutes des grands arbres (deuxième photo). Et rebelote, je reprends ma marche sur le sentier balisé, en rencontrant de temps à autre d'autres visiteurs aussi curieux que moi.


 

J'ai l'intention de me rendre jusqu'au lac Dobson, situé à seize kilomètres de là. Une piste transalpine fut tracée jadis, et dans un premier temps, jusqu'au lac Fenton. Mieux vaut disposer d'un véhicule 4X4 pour y accéder mais je n 'éprouverai aucune difficulté à conduire ma voiture sur ce parcours parfois chaotique et plus ou moins glissant. Je déconseillerai par contre l'usage de cette route par temps de pluie. L'axe de circulation est relativement étroit mais autorise la circulation dans les deux sens. Mieux vaut donc ne pas rouler trop vite (vitesse limitée à 40 km/h) pour pouvoir croiser un autre véhicule en toute sécurité. La route transalpine est enfin divisée en tronçons ouverts (ou pas) au trafic, en fonction des conditions climatiques du moment. C'est qu'il neige ici l'hiver. Le Mont Field devint très tôt une destination de choix pour de nombreux skieurs dès les années 1920. Certains aventuriers plus audacieux que d'autres avaient pris l'habitude de partir dans la forêt enneigée, souvent avec des skis fabriqués maison et des bâtons improvisés. Le développement de ce passe-temps aboutira naturellement à la naissance du Ski Club de Tasmanie en 1926, dont le premier projet sera de bâtir un refuge à Twilight Tarn (lequel existe encore de nos jours), histoire d'offrir un point de chute aux excursionnistes. Le lac Fenton offrira un refuge similaire qui sera régulièrement pris d'assaut en période hivernale. Je longerai le lac en voiture mais ne trouverai malheureusement aucun endroit où me garer pour m'y arrêter. La prolongation de la piste jusqu'au lac Dobson aura lieu en 1937 et arrangera bien des skieurs. Les repères d'enneigement placés le long du parcours permettent d'imaginer les quantités impressionnantes de neige qui tombent en hiver et recouvrent les paysages (ci-dessous) que j'admire aujourd'hui. Je repense à ces ouvriers dont la mission fut de tailler cette piste à travers une forêt jusque là hostile. Leur tâche n'était pas facile et ils ne bénéficiaient même pas de sanitaires sur place. L'hiver était glacial et l'humidité causait aussi de nombreux problèmes. Et la facilité d'accès aux lacs de permettre l'utilisation des réserves d'eau du lac Fenton dès les années 1930, grâce au creusement d'un tunnel sous la montagne destiné à acheminer le précieux liquide jusqu'aux quartiers nord de Hobart.

 

Mon arrivée au lac Dobson (ci-dessous) sonne la fin du voyage. Le Pandani Grove, l'un des soixante sentiers de randonnée de Tasmanie m'invite à faire le tour du lac, mais un groupe de touristes chinois que j'avais rencontré plus tôt dans la journée m'apprendra que l'endroit est infesté de moustiques. Je renoncerai à faire cette balade d'1,5 km et qui dure de 30 à 40 minutes. Le lac Dobson est situé à 1040 mètres d'altitude et l'air y est plus froid. Sur la rive du lac j'entends les batraciens croasser mais n'en distinguerai aucun. Encore faudrait-il avoir l'oeil et être initié à la vie sauvage. Ce que Bill Belcher, le premier ranger du parc, devait connaître. Habitant du coin, Bill occupera ce poste à partir de 1917, lui qui connaissait le coin comme sa poche. On disait qu'il connaissait chaque rocher et chaque arbre du parc, et qu'il était le plus délicieux des hommes, d'humeur égale et toujours prêt à aider son prochain. Il sera à l'origine de nombreuses améliorations dans ce vaste ensemble, durant les 17 années que durera sa mission, accompagné de son cheval Runic. L'épouse de Bill assistait du mieux qu'elle pouvait son ranger de mari, en accueillant les visiteurs. La mission de ses successeurs est désormais différente. Le concept de protection de la nature a changé, mais l'idée reste identique : protéger ce sanctuaire naturel pour les futures générations.

 

INFOS PRATIQUES :

  • Mount Field National Park, 66, Lake Dobson Road, National Park. Tél:03 6288 1149. Site internet : http://parks.tas.gov.au/index.aspx?base=3589
  • Pour accéder à ce parc national, il faut s'acquitter d'un droit d'accès. Pour ma part, j'ai choisi d'acheter un pass (valable deux mois) pour mon véhicule en réglant par CB sur internet (http://parks.tas.gov.au/index.aspx?base=914

    ). Il suffit de suivre les instructions, de compléter un formulaire avec l'immatriculation du véhicule et le tour est joué. Les rangers pourront par la suite vérifier que vous êtes bien titulaire du pass en tapant votre n° d'immatriculation, et vous n'aurez rien à payer d'autre (pas de ticket d'entrée). Prix du pass : 60 AUS$ (ce pass est valable dans tous les parcs nationaux de Tasmanie pendant la période de validité)

  • Ne faites pas comme moi, ne confondez pas la route du Lac Dobson (qui est en fait une piste) et celle qui mène à Strathgordon (une route goudronnée). En sortant du centre des visiteurs du parc, vous trouverez immédiatement la piste sur votre droite (des panneaux routiers pas très voyants indiquent la direction).

  • Les randonnées sont classées en trois types : courte (moins de deux heures), moyenne (de 2 à 4 heures) et longue (de 4 à 8 heures). Il existe trois niveaux de difficulté (facile, modéré, difficile). Procurez-vous le dépliant du parc (avec le plan) au bureau d'accueil des visiteurs. Un ensemble de sept brochures (en anglais) racontant l'historie de sept parcs nationaux de Tasmanie est aussi disponible sur place pour la modique somme de 2 AUD$.








Retour aux reportages







Qui Suis Je - Reportages - Médiathèque - Calendrier - Pays - La lettre - Contact
Site réalisé par Kevin LABECOT
Disclaimer - Version mobile