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La Cataract Gorge Reserve
(Launceston, Tasmanie, Australie)
Heure locale


Lundi 28 novembre 2016

 

L'histoire de la Tasmanie nous conduit toujours au commencement, c'est à dire il y a environ 180 millions d'années lorsque le supercontinent Gondwana délimité par l'Afrique, Madagascar, l'Inde, l'Amérique du Sud, l'Antarctique, l'Australie et la Nouvelle-Zélande se mit à se fissurer. Le continent australien sera le dernier morceau de Gondwana à se séparer il y a près de 45 millions d'années. Quant à la Tasmanie, elle est géologiquement plus semblable à l'Antarctique qu'à l’Australie elle-même. Durant l'Âge de glace, elle fut pourtant rattachée à plusieurs reprises au continent australien par une sorte de passage dont on a trouvé des traces au promontoire Wilson (Etat de Victoria).

En 1798, George Bass et Matthew Flinders furent les premiers Européens à découvrir la rivière Tamar alors qu'ils mouillaient avec leur navire Norfolk du côté de Georgetown. L'explorateur français Louis de Freycinet, lui aussi, passera quatre à cinq jours à examiner cette rivière jusqu'à atteindre Whirpool Reach, en 1802. Deux ans plus tard, ce fut le tour de William Collins d'observer les parties nord et sud de la rivière Esk. Il fut alors très impressionné par les gorges qui s'élevaient à cet endroit et écrivit dans son journal qu'il ne trouvait rien de plus beau, avec tous ces cygnes et ces oiseaux sauvages...lieu probable de prédilection des Aborigènes pour la chasse. Et les Européens de fonder la ville de Launceston en 1806, après avoir vainement tenté une implantation à Georgetown ou à Yorktown, grâce à la présence d'eau potable due aux fameuses gorges.


 

Je choisis ce matin de me rendre aux gorges de Launceston, situées à l'intérieur de la Cataract Gorge Reserve, et lieu de prédilection, tant pour les habitants de la ville que pour les touristes. Le GPS me conduira à une entrée secondaire de cette réserve, le parking P2, ce qui me donnera l'occasion d'emprunter le télésiège (ci-dessus) afin de traverser le bassin et de débuter ma promenade en me rendant au bureau d'information. Cette balade aérienne me permettra d'admirer l'ensemble du site pendant les dix minutes que dure la traversée. Le site se réveille mais la faune est déjà à l'oeuvre : je croiserai un pademelon sur mon chemin pour le télésiège, non loin du kiosque à musique appelé ici Band Rotunda (ci-dessous). Cet édifice fut bâti en 1896 grâce à une collecte de dons effectuées par les dames de la belle société de Launceston. C'est là qu'on venait jadis écouter des concerts de musique. Au pied de ce kiosque, plusieurs paons font le beau devant un public conquis (deuxième photo). Je monte sur un télésiège puis entame la descente vers la partie principale de cet immense parc. Etant monté à la station secondaire, je paierai à l'arrivée (voir infos pratiques) et me munirai d'un plan de situation car les activités sont nombreuses.


 

La profondeur maximale du premier bassin (le plus grand) n'est que de 19 mètres et l'endroit fut autrefois utilisé par les lavandières, au tout début des années 1820. Des hommes conduisaient ces dames en bateau pour qu'elles fassent leur lessive puis des feux étaient allumés pour faire sécher le linge. A l'endroit de l'actuelle piscine, un certain Wagstaff avait érigé une hutte d'où il surveillait les opérations. Et de réclamer 5 shillings pour douze pièces de linge lavées sur place. Plus loin, se trouvent les deuxième et troisième bassins avant d'atteindre le barrage de Travallyn, qui fut construit dans les années 1950. C'est lors de la ruée vers l'Or, sept ans plus tard, que des petits veinards découvriront le précieux métal dans le troisième bassin.

La piscine actuelle, elle, sera construite en 1937, avant d'être agrandie à la taille olympique en 1951, car on espérait que les nageurs australiens viendraient alors s'y entrainer pour les Jeux Olympiques de 1956. Des berges avaient déjà été érigées depuis 1926, puis renforcées en 1933 à la suite de leur destruction par des crues quatre ans auparavant. L'agent d'accueil du bureau d'information me montrera des photos de la dernière crue qui eut lieu ici-même, en juin dernier. Les flots sont extrêmement impressionnants et ne permettent pas de reconnaître l'endroit. L'eau charrie alors des tas de détritus et des troncs d'arbres et la circulation du télésiège, tout comme l'accès au pont Alexandra est alors interrompue en pareil cas. Non loin de là sont dissimulées des caves formées par des crevasses et dans lesquelles des ermites avaient jadis trouvé refuge. Le plus célèbre d'entre eux reste Cranky Man qui vécut ici avec six chiens sauvages.


 

Depuis la station de télésiège, je prends la direction du pont Alexandra (ci-dessus), un petit pont suspendu, qui fut érigé en 1904 et baptisé du nom de la reine Alexandra, épouse du roi Edward VII d'Angleterre. Ce même pont sera balayé et détruit par les redoutables crues de 1929, avant d'être reconstruit depuis. C'est avant de franchir ce pont que deux solutions s'offriront à moi : prendre sur ma gauche et emprunter le chemin conduisant jusqu'à l'usine hydroélectrique de Duck Reach (45 minutes sont nécessaires pour parcourir les 4 km, et il me faudra autant de temps pour revenir), via le Duck Reach Track, soit franchir le pont, remonter en direction du kiosque à musique puis effectuer une balade plus courte (un kilomètre) le long des gorges pour atteindre le pont Kings Bridge. Je choisirai cette seconde option après avoir échangé quelques mots avec un couple de Français originaire d'Aix en Provence et adepte comme moi des grands espaces. Je rencontrerai bien d'autres touristes, pour la plupart asiatiques, lors de ma promenade. Et échangerai ainsi quelques mots avec des Chinois, des Singapouriens, des Hongkongais, des Malaysiens et même... des Japonais. La promenade en direction de Kings Bridge est très populaire et accessible au plus grand nombre. En 1830, bien avant qu'un pont ne soit jeté entre les deux rives, les propriétaires des terrains bordant la rivière s'étaient organisés pour créer un service de transport par bateau. Plus tard, deux baleinières mises bout à bout, amarrées aux deux rives à l'aide de câbles puis recouvertes d'une passerelle en bois permettront de franchir le cours d'eau. Les prix du passage étant devenus prohibitifs, un homme, A.Beverage, eut l'idée de construire un vrai pont juste à proximité. Et les deux prestataires de se chamailler afin de s'octroyer la clientèle. Le pont actuel (ci-dessous), sera fabriqué à Manchester (Angleterre), puis livré sur place et monté comme un mécano de 500 pièces. Il fut l'oeuvre de William Doyne, un jeune et brillant ingénieur qui avait précédemment bâti ponts et voies de chemin de fer en Grande Bretagne, en France, en Allemagne, à Ceylan et en Nouvelle-Zélande. L'achèvement de l'ouvrage aura lieu le 10 décembre 1863, cinq jours avant des crues auxquelles le Kings Bridge résistera d'ailleurs vaillamment. Compte tenu de l'augmentation du trafic, l'ouvrage sera doublé en 1904, grâce à la collaboration cette fois d'une fonderie de Launceston. La dernière rénovation du pont date de 1988.


 

L'aménagement de la réserve ne se fit pas en un jour et ce fut la promenade en zig-zag (Zig Zag Track) qui fut le premier chemin de randonnée à être conçu dans le parc, en 1885. Et quatre ans plus tard, la ville de Launceston était déterminée à rendre accessible au grand public le versant nord des gorges. C'est ainsi que le chemin des cataractes (Cataract track) et celui du gardien du cottage (Caretakers Cottage) furent créés en 1890. L'accès au parc fut d'abord basé sur un système de tronc où l'on devait glisser son penny, mais personne ne paya ce droit d'entrée et on installa, l'année suivante, une barrière en bois et un tourniquet gérés par le gardien afin de mieux contrôler les entrées. Et 243£ d'être récoltées dès la première année (soit 58000 tickets vendus!). Le gardien, lui, recevait une rémunération de 50 shillings par semaine, travaillant en été de 6h00 à 21h00 sans discontinuer, avec une seule semaine de congés annuels. Le dernier gardien du parc, Eric Menzies, prit sa retraite en 1974 et le cottage fut alors transformé en bureau d'information sur les gorges. En 1906, on comptera plus de 88000 visiteurs (la population de Launceston était de...28000 âmes). Devant l'énorme succès du site, la communauté chinoise de la ville participera également développement des gorges, en organisant une fête en mars 1890, puis en février 1891, dans le parc de la ville, afin de récolter des fonds. Le succès fut au rendez-vous puisque 12000 personnes se déplacèrent pour l'occasion, permettant de récolter 12OO £ qui furent remises à la ville de Launceston afin d'entretenir la réserve des gorges. Joli geste !

 

Le chemin de randonnée menant à l'usine hydroélectrique (Duck Reach Track) est chargé d'histoire : l'usine de production électrique (ci-dessus) fut bâtie en 1895 et était alors la plus grande unité hydroélectrique existante pour l'époque. Ce projet d'usine était destiné à remplacer l'ancienne usine de production d'énergie fonctionnant au gaz de houille. Un vote des habitants eut lieu à l'issue de vifs débats controversés (par exemple, certains prétendaient que l'éclairage électrique altérerait le beau teint des dames de la ville) et l'usine hydroélectrique l'emporta par 2173 voix pour (et 690 voix contre). C'est ainsi que Launceston fut la première ville australienne à utiliser l'électricité pour éclairer ses rues, dès 1895. L'édifice était relié à un tunnel de 850 mètres de long servant au transport de l'eau depuis Deadman's Hollow, jusqu'à l'usine en contrebas, soit un débit de 5537 litres d'eau par seconde. Le tout entrainant une turbine qui produisait l'électricité. Ce bâtiment, mais aussi le pont suspendu voisin seront détruits par les crues de 1929, puis restaurés. Le pont, lui, sera à nouveau détruit par les crues de 1969, puis reconstruit en 1995 à l'occasion du centenaire du site. Ce passage était à l'origine utilisé par les ouvriers afin de rejoindre le tunnel pour les opérations d'entretien.

 

INFOS PRATIQUES :

  • Cataract Gorge Reserve, à Launceston. Tél : 03 6323 3610. Pour vous y rendre en voiture, empruntez Basin Road puis suivez les panneaux. Vous atteindrez ensuite le principal parking P1. Vous pouvez aussi franchir le Kings Bridge, puis emprunter la Trevallyn Road. Vous atteindrez le parking P2 (Cliff Grounds). Deux autres parkings (P3 et P4) permettent de visiter l'usine hydroélectrique de Duck Reach ( à quelques kilomètres de là). Pour s'y rendre, suivre la Denison Road. Site internet : http://www.launcestoncataractgorge.com.au/
  • Band Rotunda, l'ancien kiosque à musique est désormais un centre d'information décrivant l'histoire de la réserve. Ouvert du lundi au vendredi de 9h00 à 16h00, et les samedi et dimanche de 9h00 à 16h30.

  • Deux options pour le télésiège : un aller simple à 12 AUD$ ou un aller et retour à 15 AUD$. Ce service fonctionne tous les jours de 9h00 à 17h30. Paiement CB (sauf American Express). Durée du voyage : 10 minutes.

  • Le café-restaurant des Gorges (près du kiosque à musique) n'offre pas d'accès WiFi mais vous pouvez tout de même capter un accès WiFi gratuit GovTas. Quant aux paons, ils investissent le toit et la terrasse mais ne quémandent pas. Ils sont trop bien élevés !









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