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Si Tokyo m'était contée
(3) (Japon)
Heure locale

 

Samedi 13 janvier 2018

 

Cette nouvelle escale au pays du soleil levant m'offre de poursuivre ma découverte du Tokyo insolite : comme d'autres pays, le Japon possède son loto national, le Takarakuji Dreamkan, qui rouvrit ses portes en 2004 après une logue période de rénovation. L'endroit se présente comme une grande pièce lumineuse sous le regard bienveillant de Ku-chan, la mascotte locale du loto (ci-dessous) et offre d'admirer une exposition traitant de près ou de loin du monde du jeu. On peut y voir des fléchettes, ou des billets de loto du monde entier, tout comme la fameuse brochure distribuée aux gagnants de lots supérieurs à 10 millions de yens, intitulée « Livre à consulter à partir du jour J ». Sur place, le visiteur peut également tenter de soulever l'équivalent du poids de 100 millions de yens en billets de 10000 yens et de noter que 400 millions de yens restent très envahissants, même en coupures de 10000 yens. Ce centre du loto, ouvert gratuitement au public, sert aussi de lieu du tirage du loto à 18h45, tirage qui se déroule derrière une grande verrière renforcée. Vous pourrez toujours tenter d'y assister même si le lieu ne peut accueillir qu'une trentaine de personnes.

Le loto japonais, communément appelé Takarakuji est né au début des années 1600, mais il faudra attendre la fin de la Seconde guerre mondiale pour que le gouvernement nippon crée la loterie d'Etat, Imeniemuyu Takarakuji (l'équivalent de notre Française des Jeux). Le mot Takarakuji peut d'ailleurs se traduire par Loterie de la chance, ou de la fortune. Pour mémoire, le tout premier billet de loterie fut vendu le 29 octobre 1945, probablement dans l'une de ces petites cabines qu'on peut observer un peu partout dans les grandes villes et qui sont des points de vente officiels de la Loterie nationale. Cette loterie fonctionne toute l'année et donne lieu à deux tirages par semaine mais les plus longues files d'attente (de plusieurs heures!) se forment à l'occasion du tirage de fin d'année, le Jumbo Nenmatsu Takarakuji. Il faut dire que ce prix de la loterie japonaise est considéré comme le deuxième plus gros prix au monde, après celui de sa consoeur espagnole, El Gordo (tirage de Noël). Le Jumbo Nenmatsu Takarakuji, dont les résultats sont annoncés le 31 décembre, constitue ainsi un événement national au point que chaque entreprise, association, club ou famille se doit d'acheter au moins un ticket de loterie (le Japonais moyen en acquiert une bonne dizaine à lui seul!) pour ce grand tirage. Cette pratique est presque devenue une tradition et même les enfants se prêtent au « jeu ». Et la loterie d'être devenue si populaire au Japon que des grandes banques profitent du mouvement pour créer leurs propres tombolas à leur tour.


 

Autre musée et autre mascotte : non loin de là se dresse le musée de la Police (ci-dessous en photo) placé sous bonne garde puisque sous l'oeil vigilant de sa mascotte, Pipo-kun. A l'intérieur de ce musée de la Police métropolitaine, les enfants de 3 à 12 ans peuvent fièrement porter un uniforme de policier, sur simple demande. Il leur faudra simplement dire aux policiers s'ils souhaitent revêtir un uniforme standard ou bien une tenue de motard, et de quelle couleur (rouge ou bleu?). Une fois habillé, l'enfant pourra immortaliser l'instant en se faisant photographier sur place, et sur une vraie moto (le casque est bien sûr fourni!). Quant aux pilotes en herbe, ils pourront s'installer à bord d'un véritable cockpit d'hélicoptère de la police japonaise, un appareil datant des années 1950. Les plus grands visiteront les 4è et 5è étages où se tient une exposition sur la police. Le rez-de-chaussée, lui, abrite de nombreux véhicules (autos, motos et autres) qui sont si appréciés des enfants.

L'exposition présente quant à elle des sabres et des uniformes historiques, ainsi qu'une introduction succincte sur quelques héros de la police nippone morts pendant leur service. On y découvre également le rôle des services de police impériaux durant la rébellion de Satsuma (deuxième photo ci-dessous). Cette dernière restera la dernière grande révolte armée de la révolution Meiji, et servira d'inspiration au film « Le Dernier Samouraï ». Originaire de Satsuma tout comme Saigo Takamori (samouraï japonais), le fondateur de la police moderne, Kawaji Toshiyoshi, montera à Tokyo lors de la restauration, suivant d'ailleurs les conseils de ce même Saigo. Notre homme fondera un service de police en 1874, après avoir voyagé en Europe, et notamment en France (la police française de l'époque lui servira d'exemple). Trois ans plus tard, lorsque survint la rébellion de Satsuma, Kawaji participera à la lutte contre les mutins de ses terres d'origine, avant de décéder en 1879, victime de maladie. Son uniforme et son sabre sont exposés au musée de la Police. On trouve aussi sur place un bouclier ayant servi lors de l'incident du chalet Asama (prise d'otage du 19 au 28 février 1972, par un groupe d'extrême gauche dans un chalet situé à proximité de Karuizawa, et qui fit trois morts) et l'on peut observer les impressionnants impacts de balles d'alors. Le 5è étage du musée est consacré à la présentation d'enseignes et d'équipements standard de la police moderne. Il est même possible de tester sur place un simulateur de conduite, à la seule condition toutefois de disposer d'un permis de conduire japonais valide.


 

Au temps d'Edo (1603-1867), les fonctions de police étaient conduites par un corps de magistrats citoyens choisis parmi les samouraïs. Ces magistrats étaient assistés par une force de police professionnelle constituée d'officiers samouraïs et de citoyens ordinaires appelés jittemochi. Kawaji Toshiyoshi sera l'homme qui restaurera la police japonaise à la suite de sa visite en Europe. Deux polices lui serviront alors de modèle, la police française de la IIIè République et la police prussienne. Ses recommandations seront mises en œuvre dès 1873 et les services de la police civile seront centralisés au niveau national bien que la mise en œuvre locale eut été déléguée aux préfectures. Lors de la rébellion de Satsuma (révolte des samouraïs contre la disparition du système féodal face à la restauration Meiji), l'absence d'un système policier digne de ce nom avait contraint le gouvernement à faire appel à des unités de police comme milices afin de réprimer la révolte.

 

A la recherche d'un brin de nostalgie ? Il faut alors vous rendre à l'immeuble Okuno de Ginza (en photo ci-dessous), qui ressemble étrangement à un vieil immeuble parisien. Achevé en 1932 dans les arrière-rues de Ginza, cette construction reste un rare exemple de résidence collective de luxe des débuts de l'ère Showa. Et offre son ancienne splendeur du Ginza des années 1930 qui correspond à la grande époque Mobo-Moga (abréviation de Modern Boy, Modern Girl), correspondant à la culture et à la mode de la jeunesse nippone qui s'occidentalisera durant les années 1920-1930. Ainsi la moga (appelée aussi Modan Garu, pour traduire modern girl, ci-dessous en photo) symbolisera t-elle un sexe-symbole des années 1920. Cette nouvelle femme émancipée, du moins en apparence, et soucieuse d'adopter les derniers codes de la mode internationale s'opposera au modèle féminin traditionnel. Cette ère moga débuta en 1923, juste après le grand tremblement de terre qui ravagea le Kanto. Le monde nippon est alors captivé par le modernisme tout en essayant de survivre aux effets de la Première guerre mondiale. Durant ce premier conflit mondial, la femme japonaise avait remplacé l'homme nippon parti au front. A l'issue de la guerre, celle-ci se battra pour l'égalité des salaires et des droits entre homme et femme. Alors que l'Occident connaissait les défilés des mouvements féministes, le Japon de la période Taisho (1912-1926) était davantage préoccupé par la promotion de la nation sur les marchés internationaux et son positionnement en politique internationale. La présence américaine s'imposa au pays du soleil levant , à travers le jazz et le consumérisme. Et la femme populaire, présentée alors comme garçonne, d'y jouer le rôle principal en étant d'ailleurs accompagnée par le Modan Boy (Modern Boy) ou Mobo. Le développement de cette nouvelle mentalité s'étendra d'abord dans les grandes villes, avec la complicité des filles de bonne famille. Cette moga sera une femme exubérante qui aimera la vie. Elle contera fleurette et appréciera les mêmes activités que la gente masculine, fumant, buvant des vins spiritueux tout comme les hommes. Elle s'intéressera au tennis puis se mettra à conduire des automobiles. Elles n'étaient pas pour autant féministes et ne s’entendaient pas avec leurs congénères occidentales qui les jugeaient trop libertines, indépendantes, voire vulgaires. Cette moga suscita beaucoup de controverses au sein de l'opinion japonaise, à cause de sa garde-robe occidentale et provocatrice et de son caractère rebelle, et sera considérée comme une femme riche et capricieuse par les traditionalistes.


 

Revenons à l'immeuble Okuno : ses plafonds bas, ses escaliers étroits et les subtiles décorations derrière une façade recouverte de verdure offrent une atmosphère particulière et reflète un certain raffinement de l'avant-guerre. C'est Kawamoto Ryoichi qui conçut le bâtiment. On doit aussi à cet architecte le Kondan Kaikan et les regrettés appartements Aoyama Dojunkai d'Omotesando, détruits depuis pour bâtir à la place le complexe Omotesando Hills. Lors de son inauguration, l'immeuble Okuno comportait six étages, le dernier étage ayant été rajouté. De nos jours, cette résidence accueille plusieurs boutiques d'art bien adaptées au milieu ambiant. On peut accéder librement à l édifice et y déambuler sans contrainte. Je ne manquerai pour ma part, de monter dans le très original ascenseur à fermeture manuelle (ci-dessous) avec sa grille jaune en accordéon. Merci de lire auparavant le mode d'emploi (en japonais) de cet ascenseur avant d'y monter (le panneau se trouve dans l'entrée) et jetez un œil au passage sur son indicateur à aiguilles qui surmonte la machine.

 

INFOS PRATIQUES :

  • Loterie japonaise Takarakuji Dreamkan, 2-5-7 Kyobashi Chuo-ku, à Tokyo. A 2 minutes de la station de métro Kyobashi (ligne Tokyo metro Ginza) ou à 2 minutes de la station Tarakacho (ligne Toei Asakusa). Entrée libre. Le centre est ouvert de 10h00 à 19h30 les lundi, mardi, jeudi et vendredi, de 10h00 à 19h00 le mercredi, et de 10h00 à 18h00 le samedi.Tirages du loto ouverts au public, à 18h45 (maximum 30 personnes)
  • Musée de la Police, 3-5-1 Kyobashi, à Tokyo. La prise de photos est interdite aux 4è et 5è étages. Entrée libre.

  • Immeuble Okuno, 1-9-8 Ginza Chuo-ku, à Tokyo. Accès par métro, à 5 minutes de la station Ginza-Itchome (ligne Tokyo Metro Yurakucho)



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