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Le Temple de la Dent sacrée de Bouddha
(Kandy, Province Centrale, Sri Lanka)
Heure locale

 

Lundi 5 novembre 2018

 

Ce matin, Chaminda me conduit au temple de la dent sacrée de Bouddha, temple bouddhiste de Kandy, ancienne capitale du Sri Lanka. Ce temple est situé à l'intérieur du complexe palatial du Royaume de Kandy et abrite une dent de Bouddha, la relique la plus vénérée dans ce pays. Bâti au 16è siècle, le sanctuaire initial s'élevait au centre du Palais royal, jusqu'à ce que les Hollandais attaquent la cité en 1665 et détruisent l'endroit. Le roi Rajasinghe II fera alors reconstruire le bâtiment principal édifié sous le règne de Vimala Dharma Suriya. Le dernier souverain du royaume de Kandy, à savoir Sri Wickrama Rajasinghe poursuivra l'oeuvre de son prédécesseur au 19è siècle en rénovant les douves et le portail monumental. Une autre restauration aura lieu par la suite, après l'attentat à l'explosif perpétré dans le temple en 1998 par les Tigres tamouls.

Comme toujours, il me faut faire des choix car je ne pourrai pas tout visiter à Kandy en si peu de temps. Côté folklore, il y a bien ces petites macaques qui escaladent allègrement les balcons des hôtels, ce qui interdit d'ouvrir sa fenêtre à moins de vouloir voire disparaître ses effets personnels. Les marché de la ville sont également remarquables, tout comme les divers musées existants et le superbe jardin botanique de 60 hectares. Ville du centre du pays, Kandy doit son nom à la déformation de Kande, ce nom que lui donnèrent les Portugais en 1542. Après Anuradhapura (entre le 4è siècle avant JC et le 8è siècle), puis Polonnaruva (jusqu'au 13è siècle), Kandy jouera le rôle de capitale de cet ancien royaume du même nom, de 1592 au début du 19è siècle. Ce royaume de Kandy était alors un état monarchique fondé à la fin du 15è siècle. A l'époque sous la tutelle du royaume de Kotte, Kandy gagnera son indépendance au fil des ans en s'alliant notamment avec le royaume de Jaffna, la dynastie Nayak de Madurai, le royaume de Sitawaka, puis avec les Portugais et les Hollandais. Kandy, à force de diplomatie, demeurera à partir des années 1950 le seul Etat indigène encore indépendant de l'île avant de succomber devant les Britanniques lors de la convention de Kandy du 10 mars 1815, laquelle déposera le roi Sri Vikrama Rajasinha qui sera ensuite envoyé en exil avec sa famille à Vellore (Inde). La ville a toutefois conservé sa vocation religieuse et reste encore aujourd'hui une cité de pèlerinage pour les adeptes du bouddhisme theravada (dont le Sri Lanka reste le berceau) tout en figurant aussi au patrimoine de l'UNESCO, en partie grâce au temple que je m'apprête à visiter.

 

Comme me le raconte Chaminda, posséder la dent de Bouddha signifiait détenir le pouvoir. Et de nombreux souverains mirent leur vie en jeu afin de sauver la précieuse relique (dont ils étaient responsables) face à l'avancée de l'ennemi. Mais qu'est-ce que réellement la légende de cette dent ? D'après la tradition, après la crémation de Bouddha en 543 avant JC, ses disciples éparpillèrent ses restes en huit parts qui furent données aux huit royaumes qui construisirent des stupas pour les abriter. Au 4è siècle, la princesse Hemamala emporta la relique de la dent au Sri Lanka depuis Kalinga (Inde du centre-Est) en la cachant dans sa chevelure. Le précieux objet sera alors conservé à Anuradhapura, avant d'être transféré à Polonnaruwa, puis Dambadeniya et Yapahuwa pour le mettre à l'abri des convoitises. On cachera même cette dent à l'intérieur d'une meule (à Ratnapura), avant son arrivée à Kandy en 1592.

Chaque jour, des moines des deux chapitres de Malwatte et Asgiriya pratiquent des cérémonies dans la chambre intérieure du temple (ci-dessous), à raison de trois fois par jour, rituels de la puja au cours desquels sont apportés le riz et le curry à Bouddha, pendant que des joueurs de tambour exercent leur talent pour le plus grand plaisir du public. Et les portes du sanctuaire de s'ouvrir lors de cette cérémonie.


 

Une fois de plus, nous devons laisser nos chaussures à l'entrée du temple, juste avant de franchir le grand portail (Maha Vahalkada) qui marque l'entrée. A noter que sa pierre de lune est récente, l'originale ayant été détruite dans l'attentat des Tigres tamouls de 1998. Je comprends très vite l'intérêt d'être accompagné parun guide pour visiter l'endroit : aucune information n'est donnée aux touristes dans ce temple et il est par conséquent difficile de comprendre ce que l'on voit. D'autre part, il y a souvent foule pour ce genre d'évènement (mieux vaut visiter l'endroit en semaine) et il n'est pas facile de se frayer un passage et de savoir où se rendre. Enfin, ce genre de cérémonie très séquencée ne laisse entrevoir le reliquaire de la dent que peu de temps. Quelques minutes après le début de l'offrande au rez-de-chaussée du sanctuaire principal, nous montons donc au premier étage afin de tenter d'apercevoir le fameux reliquaire, un coffre gigogne en or taillé en forme de stupa qui contient six autres coffres emboités les uns dans les autres. Ce reliquaire est en effet abrité à l'intérieur d'une salle (Vadahitina Maligawa) ouverte uniquement lors des trois puja quotidiennes.

 

Quelques instants plus tard, Chaminda me conduit à la salle de prière de la famille royale, appelée Pallemaluwa. Cette salle, où il est interdit de prendre des photos, abrite un grand bouddha et plusieurs peintures murales. Sa construction daterait du règne de Kirti Sri Rajasinghe.

Nous nous rendons ensuite dans la tour de l'Octogone (nommée ainsi à cause de sa forme) qui abrite la bibliothèque du temple, et contient de riches manuscrits et ouvrages sur feuilles de palmier. C'est depuis cette bibliothèque que le président de la république sri-lankaise tout juste élu s'adresse généralement à son peuple. Là encore, il est interdit de prendre des clichés. L'extérieur du sanctuaire principal (ci-dessous) est quant à lui remarquable pour son style architectural, les peintures originales de ses boiseries et les ornements du plafond surplombant l'ensemble. Les deux niveaux de ce sanctuaire sont connus sous les noms de Palle malaya (étage inférieur) et Udu malaya (étage supérieur). Ils sont surplombés par une toiture dorée qui fut construite en 1987 et qui est entourée d'une barrière dorée.


 

Nous quittons bientôt le sanctuaire principal pour pénétrer à l'intérieur de l'Alut Maligawa, bâtiment plus récent qui renferme des images de Bouddha offertes par d'autres pays. Chose intéressante, les peintures exposées dans cette immense salle retrace en 21 tableaux la légende de la relique de la dent jusqu'à son arrivée à Kandy (ci-dessous). Les premier et deuxième étages de ce même édifice abritent le musée Sri Dalada, qui rassemble manuscrits et documents historiques de valeur ainsi que des statues en cuivre représentant les émissaires des rois qui participèrent aux cérémonies et à la procession d'Esala Perahera. Ces dix jours de célébrations en l'honneur de la relique de la dent sacrée de Bouddha attirent chaque été au mois d'août des millions de visiteurs et de pèlerins et mieux vaut arriver plusieurs heures en avance (ou carrément louer sa place à la fenêtre ou à un balcon d'une maison situé sur le parcours de la procession) pour espérer voir quelque chose. Millénaire, cette fête n'existe sous sa forme actuelle que depuis le 18è siècle, à l'époque du règne de Kirti Sri Rajasingh. En ce temps-là, des processions en hommage aux esprits protecteurs de la cité (Natha, Pattini, Vishnou et Kataragama) partaient des devale, mais des moines thaïlandais de passage exprimèrent un jour leur désapprobation devant la nature hindoue de ces réjouissances et le roi décida qu'à l'avenir, la relique de la dent de Bouddha précèderait les défilés des fidèles. Les cérémonies débutent donc par Kap Situweema, qui implique la plantation d'un jacquier sanctifié symbolisant le début de Kumbal Perahera, première période de cinq jours. Il faudra attendre la seconde période appelée Randoli Perahera, pour assister aux festivités les plus spectaculaires, avec, chaque soir, à partir de 20h00, des défilés de danseurs, de joueurs de tambour, d'acrobates et d'éléphants somptueusement parés (deuxième photo ci-dessous). Chaminda me conduit au petit musée Raja Tusker qui abrite la dépouille empaillée de l'éléphant Raja (troisième photo) qui porta cinquante ans durant, et jusqu'à son décès en 1988, le coffret de la relique de la dent lors des processions de l'Esala Perahera. Sur place, on peut voir de nombreuses photos retraçant la vie de cet animal devenu célèbre.


 

Juste en face du musée Raja Tusker se trouve le Hall des audiences (ci-dessous), pavillon où les souverains de Kandy accueillirent leurs hôtes, jusqu'en 1815, date de la reddition du royaume face aux Britanniques. La construction de ce hall sera achevée sous le règne de Rajadhi Rajasinha en 1783. A noter que les sculptures des piliers de bois qui supportent la toiture de l'ensemble sont caractéristiques de l'art de la période de Kandy. C'est aussi à cet endroit que sera signée la reddition du dernier souverain en 1815, faisant place nette pour la souveraineté britannique. Cet édifice sera rénové en 1875 pour la venue à Kandy du prince de Galles, le futur Edouard VII. Et sera pour l'occasion rallongé de 9,5 mètres. L'endroit est encore utilisé de temps à autre pour des cérémonies officielles.

Un peu en retrait, le palais royal se dresse quant à lui au nord du temple et à l'opposé du lac. Son aménagement sera décidé par le roi Vimaladharmasuriya I et cette résidence royale, qui possédait jadis trois portails et un mur haut de huit mètres, d'abriter désormais le musée archéologique de la ville.

De retour au bord du lac, où se dresse encore aujourd'hui la piscine des concubines du roi (deuxième photo), j'observe le mur de briques délimitant le lac Bogambara (lac artificiel jadis creusé par les rois sur l'emplacement d'anciennes rizières). Ce mur-là est surnommé le mur des vagues et on le retrouve également le long des douves, avec ses niches destinées à recevoir des lampes à huile de coco.


INFOS PRATIQUES :

  • Temple de la Dent sacrée de Bouddha, Palace Square, 16 Deva Vidiya à Kandy. Ouvert tous les jours de 5h30 à 19h00. Entrée : 1500 roupies (paiement uniquement en argent liquide). Site internet : http://sridaladamaligawa.lk/

 

 










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