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Greyton
(Province du Cap-Occidental, Afrique du Sud)
Heure locale

 

Jeudi 28 novembre 2019

 

De Montagu à Greyton, je reste dans ces petits villages sud-africains non dénués de charme. Greyton m'ouvre aujourd'hui les bras, avec ses habitants qui me saluent lorsqu'ils me croisent dans la rue. L'air pur de la montagne voisine y est certainement pour quelque chose dans cette décontraction naturelle, et je découvre ce matin un village dont les acteurs sont affairés et profitent encore de la température presque fraiche qui règne ici, avant de subir dans quelques heures l'habituelle forte chaleur de la mi-journée. On fait ses courses, on attend le minibus, on conduit les enfants à l'école ou l'on s'attable tout simplement à la terrasse d'un café pour savourer le temps qui passe.

 

Vous le savez désormais, en Afrique du Sud, un village est souvent né d'une simple ferme. Greyton vécut la même histoire. En 1793, les terres du fortuné Stoffel Koekson furent attribuées à un néerlandais, Marthinus Theunissen qui construisit sa maison sur son exploitation agricole de Weltevreden. Malheureusement, les conflits fréquents avec son voisinage (concernant le bornage des terres) et le bétail errant le dissuaderont de rester longtemps à cet endroit et notre homme partira faire fortune du côté de Stellenboch. La ferme de Weltevreden portera davantage chance aux propriétaires suivants, deux frères de la riche famille des Cloete, originaires de Constantia, qui y élèveront des chevaux. En 1846, un britannique aisé, Herbert Vigne, rachètera Weltevreden et transformera la ferme en village agricole de pleine propriété dès 1854, ne conservant pour lui que deux morceaux de terre et versant le reste dans un tronc commun. Et de donner au village le nom de Greyton, en souvenir de Sir George Grey, gouverneur du Cap à cette époque.

 

Bien avant l'arrivée des Européens, ces plaines verdoyantes et ces ravins boisés étaient occupés par le peuple de la tribu des Hassequas khoi-khoi, tribu qui avait établi un enclos sur les bords de la rivière Gobos, afin d'y parquer les milliers de têtes de bétail et de moutons qu'elle possédait. Cet élevage intensif avait retenu l'attention du capitaine Stoffel Koekson qui fera fortune dans les années 1600. Ce dernier troquera les bêtes à si bon compte avec le peuple khoi qu'il conviera ces gens à venir le voir à Boschmanskloof, avant de leur bâtir des maisons à l'aide de briques faites de boue.

Le tracé du village sera effectué par J G Rietz, tracé qui n'a guère changé depuis son origine. Les propriétés de tailles variables mises en vente à cette époque étaient accessibles à tous, et à des prix abordables, sans discrimination de race, de nationalité ou de religion. Chacun pouvait alors acquérir son lopin de terre en pleine propriété à Greyton, contrairement aux autres villages de la colonie du Cap qui n'offraient pas les mêmes facilités.

Le fameux Herbert Vigne, concepteur de ce projet, épousera au cours des années 1860 Elizabeth Belshaw. Le couple s'installera dans une ferme, « De Bos », et la petite communauté villageoise de vivre cinquante ans durant en paix et en harmonie, dans le respect de son prochain et la tolérance religieuse. Les maisons sortirent de terre, les activités se démultiplièrent, et une école et deux églises virent aussi le jour.


 

Durant ma balade, je constaterai qu'une majeure partie de ces vieux édifices existent toujours, y compris la réserve d'eau du village et les rigoles servant à faire circuler l'eau dans les rues. Même certains anciens cottages, érigés entre 1854 et 1860 sur Vigne Lane sont encore debout. Le village possède également une bergerie bâtie avant 1840, laquelle est désormais intégrée dans l'édifice « The Old Potter's Inn », sur la rue principale.

Autrefois, on n'entrait pas au village comme aujourd'hui mais par une intersection située entre la rue principale et la rue Botha. Un lieu de passage idéal pour la famille De Villiers qui y construira une épicerie dès 1860, ainsi que plusieurs salles dédiées à la célébration mensuelle des communions organisée par l'église hollandaise réformée. Le même édifice (en photo ci-dessus) accueillera aussi le premier bureau de poste du village. Aujourd'hui, l'ensemble est devenu le lieu convivial du « Post House Pub ».

Après le décès d'Herbert Vigne, en 1895, Greyton connaitra la crise économique, comme bien d'autres villages de l'Overberg. Et nombreux seront alors ceux qui quitteront l'endroit pour partir faire fortune ailleurs. L'envoi des récoltes au Cap pour la vente ne rapportait plus comme par le passé et les emplois avaient fondu comme neige au soleil. Il restait toutefois aux familles de quoi subvenir à leur survie grâce à l'exploitation de leurs lopins de terre et à l'élevage d'animaux. Les héritiers d'Herbert Vigne procéderont à leur tour à une division des terres, permettant ainsi la construction de grandes maisons de style victorien, encore présentes de nos jours.

Comme si la crise économique ne suffisait pas, le pays votera le Group Areas Act durant les années 1950, imposant aux familles de couleur (qui avaient un siècle durant vécu aux côtés de voisins d'autres origines et en pleine harmonie) de vendre leurs biens (maisons et terrains). Certains quittèrent la région pour de bon tandis que d'autres furent relogées dans de nouvelles maisons, plus loin, à Heuwelkroon.

 

Le charme conservé de Greyton est pour une large part du au maintien du patrimoine architectural du Cap. J'apercevrai ainsi de jolis cottages dont certains, noyés sous la verdure. Désormais, Greyton relève le défi de d'autosuffisance, projet instauré en 2011. Les jeunes générations sont bien sûr les premières à être sensibilisées sur ce thème environnemental, avec pour sujet principal la sécurité alimentaire. Et Greyton de produire à présent ses propres fruits et légumes organiques. Conscient qu'il faut bien vivre avec son temps, le village s'est aussi résolu à combattre sans pitié les plantes invasives qui menacent la biodiversité locale, à favoriser la survivance du style architectural local qui a jusqu'ici fait le charme de l'endroit et à maintenir les colonies de babouins hors de la ville, évitant ainsi les désagréments habituels d'une cohabitation entre homme animal davantage subie que choisie. J'ai personnellement beaucoup entendu parler de ces singes plus ou moins agressifs mais n'en n'ai jamais croisé, si ce n'est dans le désert montagneux, très récemment, le long de la piste que je parcourais pour me rendre jusqu'à Matjiesfontein. Leur arrogance et leur façon d'être me les rendent antipathiques.

INFOS PRATIQUES :

  • Office du tourisme, 29 Main Road, à Greyton. Roselyn (en photo ci-dessous) se fera un plaisir de vous accueillir et de vous conseiller sorties et divertissements. Le petit ouvrage « Greyton Guide » est en vente sur place pour 60 rands. http://www.greytontourism.com




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