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Le Train de l'Ardèche
(Ardèche, France)
Heure locale

 

Mercredi 10 juin 2020

 

Il était une fois l'Ardèche, ancienne province du Vivarais, aux milieux naturels et paysages diversifiés, depuis le nord-ouest avec ses hautes collines et moyennes montagnes, le sud et ses gorges spectaculaires, et le centre du département à l'histoire géologique complexe. Et l'homme bâtisseur de défier la nature en y traçant le chemin de fer du Vivarais, depuis Tournon jusqu'à Lamastre, en passant par la vallée du Rhône, la vallée du Doux et ses gorges infranchissables, et le plateau ardéchois. Un voyage inoubliable à bord du Train de l'Ardèche, précieux héritage ferroviaire du début du 20e siècle. En voiture !

 

C'est à la fin du 19e siècle que le réseau ferré du Vivarais vit le jour. A l'époque, la France comptait 3000 km de voies ferrées construites depuis 1823. Dans les années 1850, sept compagnies ferroviaires sont créées : PLM (Paris-Lyon-Méditerranée), Paris-Orléans, Midi Nord, Est, Alsace-Lorraine et Ouest. D'abord contournée par le PLM en 1866, le département devra attendre la loi de 1871 autorisant les lignes interdépartementales pour enfin envisager un plan de développement ambitieux dans le domaine du rail. Au niveau national, 11000 km de lignes secondaires sont d'ores et déjà prévus tandis que l'Ardèche ne va construire le réseau du Vivarais qu'en plusieurs étapes, et ce, pour des raisons financières : très vite, la construction d'une voie normale (à écartement de 1435 mm) s'avère trop couteuse à insérer dans le relief ardéchois. On choisit donc l'écartement d'un mètre, pour ses rayons de courbures plus faibles qui nécessiteront moins d'ouvrages d'art. Le premier réseau sera composé de trois lignes, dont celle de Tournon-Lamastre. Et entre mille et trois mille hommes d'oeuvrer bientôt, et quatre ans durant, à la construction de ponts, viaducs, murs de soutènement, tunnels, gares et pose des voies. L'objectif est alors de relier la vallée du Rhône à celle de la Loire et le service, inauguré en 1891 entre Tournon sur Rhône et Lamastre, de proposer alors trois trains quotidiens de bout en bout de ligne, mais le chemin de fer connaitra un tel succès que cela s'avérera vite insuffisant et l'on commandera alors des matériels supplémentaires tout en prolongeant les lignes. 1903 verra ainsi la mise en service de locomotives à vapeur spécialement adaptées pour appréhender les courbes sinueuses de la ligne montagnarde, en attendant l'arrivée future d'autorails. Jusqu'en 1914, l'ensemble du réseau du Vivarais , inauguré en 1903, fonctionne à plein régime (de 244791 voyageurs en 1897 à 663714 voyageurs en 1913) avec ses 201 km de voies métriques.

 

Le chemin de fer s'insérera rapidement dans l'économie locale en assurant le transport de marchandises agricoles, du bois, du courrier postal et des voyageurs. Les gares, même éloignées des bourgs, formaient de véritables espaces de vie, donnant lieu à la création d'un train spécial du marché permettant aux habitants de Tournon sur Rhône de se rendre au marché hebdomadaire de Lamastre. Le rail facilitera également la circulation sur le territoire en raccourcissant les distances : d'une durée de huit heures en malle poste, on passera à moins de deux heures en train pour relier deux villes ardéchoises.

Les années 1960 marqueront l'avènement de nombreux projets routiers en France, signant l'arrêt progressif des lignes secondaires. Et le réseau de Mastrou (nom d'origine de la voie reliant Tournon sur Rhône à Lamastre) de fermer en 1968 avant de renaitre, moins d'un an plus tard, sous la forme d'une ligne touristique grâce à la détermination et au travail acharné d'une équipe de bénévoles passionnés de train, rassemblés sous l’égide de l'Association Sauvegarde et Gestion de Véhicules Anciens (SGVA).

 

Il faut bien du courage pour entretenir cette ligne de trente-trois kilomètres traversant un relief aussi accidenté. Certes, la voie ferrée emprunte la vallée du Doux. Affluent du Rhône, cette rivière prend sa source à plus de mille mètres d'altitude sur la commune de Saint-Bonnet-le-Froid (Loire) puis chemine sur soixante-dix kilomètres avant de se jeter dans le Rhône. Cette ligne du Vivarais remonte ainsi le cours du Doux, démontrant que le train est l'unique moyen d'accès à ces gorges spectaculaires. Le paysage y est pittoresque, tout en changeant au fil des saisons. La zone, connue sous la dénomination de « ZNIEFF des Etroits » est bien sûr protégée pour sa faune et sa flore et est le gage de la biodiversité er de la richesse du territoire traversé. On peut ainsi admirer lichens, chênes verts,genévriers cade...flore à tendance méditerranéenne au milieu de laquelle s'épanouissent écrevisses à pattes blanches, castors, reptiles et autres rapaces...C'est seulement quelques minutes après avoir quitté la gare de Colombier-le-Vieux que s'ouvre la vallée. On quitte alors les gorges encaissées pour traverser un espace jalonné de vergers et de châtaigneraies. Et de croiser, tour à tour, le village de caractère de Boucieu-le-Roi, le Château de Chazotte et autres maisons de maitre et ouvrages d'art, jusqu'à, sans même s'en rendre compte, atteindre Lamastre, une des « portes de l’Ardèche ».

 

Désormais, un nombre croissant de touristes découvrent chaque année le Train de l'Ardèche qui parcourt gaillardement la ligne historique du réseau du Vivarais. Le temps passe, les noms changent mais les hommes restent armés de leur attachement au patrimoine et de leur volonté de perpétuer le passé. Et de se retrousser les manches dans les différents ateliers de la ligne pour assurer l'entretien technique et la réparation du matériel roulant, souvent classé au titre des Monuments Historiques. Locomotives Mallet, autorails, locotracteurs et voitures (dont la plus ancienne date de 1891 et intervenait sur le réseau breton) font l'objet d'une attention régulière. Parallèlement, des agents passent au crible la voie ferrée pour en vérifier le bon état et remettre à neuf au moins deux kilomètres de rail chaque hiver. En gare et à bord des trains, les chefs de train assurent la sécurité des voyageurs tout en les assistant. Pendant ce temps, mécaniciens et chauffeurs formés par compagnonnage sur le réseau, enfournent le charbon à la pelle, remplissant la citerne d'eau de la locomotive et réglant les derniers détails avant que le convoi ne s'ébranle. Un chef de ligne coordonne départs et arrivées en gare, avec la régularité d'un horloger, tandis que d'autres agents administratifs gèrent dans l'ombre le bon fonctionnement de l'ensemble.

 

Je l'ai souligné plus haut, le Train de l'Ardèche utilise du matériel roulant d'origine, certaines machines ayant été conçues spécialement pour cette voie ferrée spécifique, d'autres étant classées au titre des Monuments historiques. La fameuse locomotive Mallet (du nom de son concepteur, l'ingénieur franco-suisse Anatole Mallet) s'insère aisément dans les courbes serrées depuis 1903. Puis des autorails sont venus compléter l'ensemble (dont un autorail du réseau corse datant de 1981).

Les voyageurs sont, quant à eux, acheminés dans des voitures d'origine, qui proviennent notamment des réseaux suisses et breton et datant (parfois) de la fin du 19e siècle. Ces équipements n'étant plus utilisés depuis belle lurette sur leurs réseaux historiques, ils ont un jour rejoint la ligne du Vivarais dans les années 1970. Restaurées et entretenues dans les meilleures conditions, ces voitures, isolées le temps de se refaire une beauté, sont de nouveau réinsérées sur la ligne. C'est ainsi que quelques wagons de première classe datés respectivement de 1905 et 1913 ont réintégré le réseau courant 2018, une fois leur intérieur garni de velours et de bois, témoins du luxueux décor ferroviaire du siècle dernier. En fonction de la clientèle, chaque train peut être renforcé d'un fourgon à bagages daté de 1904, qui recevra les glacières, vélos et poussettes des nombreux randonneurs de passage.

Chaque train résume une page d'histoire:amoureux des machines à vapeur, vous embarquerez alors à bord du train des Gorges ou de celui du Mastrou. Le train des Gorges effectue un voyage d'une demi-journée au départ de la gare de Tournon Saint-Jean, en passant par la partie basse de la ligne, celle des gorges du Doux. Une fois le convoi arrivé en gare de Colombier-le-Vieux/ Saint Barthélémy-le-Plain, la locomotive est retournée sur un grand pont tournant pour repartir dans l'autre sens. « Le Mastrou », lui, offre un voyage d'une journée, toujours au départ de Tournon Saint-Jean, et emprunte la totalité de la ligne soit 28 km, traversant tour à tour les gorges inaccessibles du Doux et le plateau ardéchois avec ses fermes, vergers et châtaigneraies, avant d'atteindre la gare de Lamastre. Les voyageurs disposent alors de trois heures pour découvrir la petite ville surnommée « porte de l'Ardèche » et sa gastronomie locale largement représentée.

Vous préférez l'autorail ? Deux trains vous attendent : le Train du Marché, premier convoi historique de la ligne, qui permet aux habitants de la vallée du Rhône de se rendre chaque mardi d'été au grand marché hebdomadaire de Lamastre, où vous rencontrerez des producteurs locaux. Le second convoi, « le « Lamastre-Boucieu Express » quitte Lamastre en début d'après-midi pour partir à la découverte du village de caractère de Boucieu-le-Roi, et ce, durant la période estivale. Une fois sur place, les voyageurs sont conviés à une visite guidée du village avant de repartir pour Lamastre en fin d'après-midi.

 

Le Chemin de Fer du Vivarais organise aussi des trains à thèmes, pour faire découvrir la ligne, le patrimoine local ou encore le terroir. Ainsi le Train de l'Ardèche se décline t-il chaque année en Grande chasse aux œufs, le temps d'une demi-journée pour perpétrer la tradition médiévale de cette chasse. Le convoi est affrété deux jours durant la période de Pâques pour conduire petits et grands dans un lieu tenu secret qui aurait été visité par les cloches et les lapins.

Le Train de l'Ardèche convie de la même manière les plus assoiffés à embarquer pendant une demi-journée à bord du train du sommelier, pour partir à la conquête des grands crus locaux, le temps d'un fascinant week-end « Vignobles et Découvertes » et d'une dégustation proposée par un sommelier à bord du convoi, et en partenariat avec les cavistes et les viticulteurs locaux.

Au moment d'Halloween, les 30 et 31 octobre, le Train fantôme refait surface pour accueillir petits et grands déguisés et maquillés en gare pour découvrir une histoire des plus terrifiantes qui leur est contée lors du voyage. Le trajet retour invitent les enfants autour de contes et de jeux, avec, bien entendu une surprise à la clef !

Après avoir roulé toute l'année, le Train de l'Ardèche prend un repos bien mérité de quelques semaines, au coeur de l'hiver, une pause toutefois interrompue entre le 26 et le 30 décembre, pour laisser la place au Train des Crèches : les locomotives à vapeur Mallet reprennent alors du service pour transporter les passagers jusqu'au village de Boucieu-le-Roi où chacun arpentera trois heures durant les rues médiévales décorées pour l'occasion, jusqu'à atteindre la Maison Pierre Vigne, lieu d'une exposition des Crèches du Monde organisée par les religieuses du couvent du Saint Sacrement. En fin d'après-midi, chocolat ou vin chaud sont servis aux visiteurs avant de monter à bord du convoi pour le trajet du retour. Attention au départ !

 

INFOS PRATIQUES :

 










 



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