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Les Ardennes, Terre de combats et de légendes
(France)
Heure locale

 

Jeudi 2 Juillet 2020

 

Le poète Arthur Rimbaud y naquit, tout comme le vicomte de Turenne, maréchal de France sous Louis XIII et le roi Soleil, Robert de Sorbon (fondateur de la Sorbonne au 13e siècle), Jean-Nicolas Corvisard (médecin de Napoléon), Robert Debré (fondateur de la pédiatrie moderne) ou l'abbé de La Caille (astronome et cartographe du 18e siècle). Elles ont pour chef-lieu Charleville-Mézières, abritent la frontière entre la Belgique et la France et sont depuis très longtemps une terre de légendes. Aviez-vous reconnu les Ardennes ?

 

A un saut de puce de la Belgique, le département des Ardennes nous accueille en vert, entre terres et rivières. Breton de naissance, j'ignore tout de cette France du Grand-Est, et des Ardennes, théâtre de bien des batailles synonymes de défaites comme à Waterloo, en 1815, où Napoléon 1er dut abdiquer face aux coalisés et se résigner à voir les Ardennes filer aux Pays-Bas, puis bientôt occupées par les troupes prussiennes. Un comble ! Rebelote en 1870 avec la capitulation de Napoléon III à la bataille de Sedan une nouvelle fois face aux Prussiens. Trop confiante en elle, notre belle France ne se méfia pas du précepte « Jamais deux sans trois » qui conduira au plus gros charnier que l'Europe ait connu, celui de 1914-1918, lequel placera encore une fois les Ardennes en avant-poste face à l'ennemi. Péchant par excès de confiance, l'armée française considérera à l'époque que le relief de ce département et ses forêts denses suffiraient à décourager l'assaillant. Balivernes ! Et les Ardennes de devenir alors le seul département français à avoir été entièrement occupé pendant toute la durée de la Grande Guerre. Lors du second conflit mondial, l'Allemagne revancharde postera l'essentiel de ses forces armées sur le territoire ardennais, que l'»infranchissable » ligne Maginot traversait (et dont l'ouvrage de Villy constituait l'ultime Fort du secteur fortifié, mais pas la fin de la Ligne Maginot) tout en restant aisément contournable. L'armistice de 1940 jettera le coup de grâce sur ces terres ardennaises que l'armée nazie déclarera zone interdite.

Terre de souffrance, de sacrifice et de souvenir, les Ardennes accueillent celles et ceux qui se souviennent et veulent approfondir leurs connaissances pour mieux comprendre. Terre de mémoire, le département offre pas moins de soixante sites sur trois conflits (guerres de 1870, de 1914 et de 1939) sur une même application « Ardennes Terre de Mémoire » (développée par le Conseil départemental, en collaboration avec les acteurs publics du tourisme ardennais). Une application disponible en français, anglais et allemand (https://cd08.fr/articles/ardennes-terre-de-memoire-lappli-dhistoire-0 ). Le Musée Guerre et Paix en Ardennes de Novion-Porcien attend les férus d'histoire, avec les grands moyens (14000 objets exposés, 150 costumes et 50 engins lourds (https://www.guerreetpaix.fr/), pendant que l'ouvrage fortifié de Villy-la-Ferté, ultime bastion de la ligne Maginot livre ses secrets aux visiteurs (https://www.ouvragelaferte.fr/), que Charlemont nous ouvre les portes de la citadelle de Givet construite par Charles Quint en 1554 pour défendre son empire (http://www.charlemont-citadelle-de-givet.fr), que le fort des Ayvelles nous fait découvrir ce lieu fortifié supposé protéger notre pays des invasions après la défaite de Sedan (1870)(http://www.domaine-ayvelles.fr/). N'oublions pas Bazeilles qui tire sa dernière cartouche (http://maisondeladernierecartouche.com/fr) sur le lieu de l'ultime résistance héroïque d'une cinquantaine d'hommes de la Division d'Infanterie de Marine durant les combats des 31 août et 1er septembre 1870.

 

Terre de légendes, les Ardennes le sont également, et depuis fort longtemps puisque ces fables ardennaises sont apparues entre les 6e et 9e siècles, dans les vallées de la Meuse et de la Semoy, au cœur de la grande forêt située sur le territoire du Parc naturel régional des Ardennes, forêt qui donna son nom au pays (« Arduen » en celte signifie forêt profonde). On a tous besoin de rêve, de mystère et d'histoires magiques. Le cœur du massif ardennais, qui surplombe les méandres de la Meuse et de la Semoy, vous invite justement à un voyage au pays des légendes, des fées, du cheval-fée Bayart, du cerf de Saint-Hubert, de l'enchanteur Maugis ou des seigneurs diaboliques...On y parle aussi du château du diable qui campe à 400 mètres d'altitude sur les tours de quartzite fracturées du Roc-La Tour à Monthermé. S'y ajoutent les sites des Quatre Fils Aymon (Bogny-sur-Meuse) et des Dames de Meuse (Laifour).

Les marcheurs mettront un point d'honneur à effectuer la randonnée des Dames de Meuse, sur 14 kilomètres, et d'une durée de quatre heures. De difficulté moyenne cette promenade est facilitée par un balisage jaune et rouge et des panneaux directionnels placés aux bons endroits. Départ de la gare de Laifour, puis remonter la rue de la Gare, traverser la D1 et poursuivre tout droit sur 500 mètres, suivre le chemin de la forêt, tandis que l'on grimpe ardemment jusqu'à atteindre le sous-bois parallèle aux falaises, sur 1,5 km puis franchir l'intersection, peu avant une clôture à gibier. Une variante existe, qui offre un itinéraire moins escarpé. Tous les chemins menant à Rome, le randonneur aguerri tournera à droite avant le franchissement de la clôture, et suivra un sentier escarpé qui mène au point de vue des Dames de Meuse. Le site des Dames de Meuse inspirera de nombreux artistes par ses paysages merveilleux. Ainsi George Sand, Théophile Gauthier ou Michelet resteront-ils en admiration devant la sombre forêt qui recouvre l'endroit. D'après la légende, ce site témoignerait de l'adultère puni des Dames de Meuse. On prétend que les trois fils du seigneur de Hierges partent pour la croisade après avoir épousé Berthe, Hodierne et Ige, les trois filles du seigneur de Rethel. Et ces épouses devenues infidèles d'être alors punies par Dieu pour ne pas avoir su garder loyalement le pacte conjugal en l'absence de leurs époux. Elles finiront transformées en trois énormes rochers à l'heure précise où Jérusalem sera prise d'assaut. Ce lieu magique appartient à l'unité la plus ancienne du massif ardennais, là où la Meuse a creusé une vallée profonde, laquelle abrite de remarquables espèces végétales.

 

Les Ardennes est un terme qui s'emploie aussi au singulier. On parle ainsi de l'Ardenne qui s'étend sur trois pays réunis autour d'une identité commune, la nature, l'imaginaire, l'authenticité et le partage. Cette Ardenne transfrontalière riche de son patrimoine et de ses paysages, de la variété de ses couleurs et de ses saveurs, de ses légendes et de la poésie, invite au voyage. A pied, à vélo, à moto ou en voiture, vous arpenterez ce département à votre rythme. On a coutume de dire ici que sous chaque pierre se cache une légende.

Du côté de Monthermé se trouve le magnifique point de vue de Roc-la-Tour, à la fois site d'escalade pour amateurs avertis et lieu de légende. Autre lieu, autre légende: on raconte qu'un seigneur avait une jeune femme belle, fière et ambitieuse mais sans château digne de l'abriter. Ce seigneur vit un jour venir à lui un personnage qui le fit rougir de sa pauvre maison et lui offrit, en échange de son âme, de bâtir un superbe château. Ainsi sa femme aurait-elle enfin la demeure dont elle rêvait. Le seigneur reconnut le diable et conclut le marché. Selon son habitude, Messire Satanas devait construire le château en une nuit, avant le premier chant du coq. Il se mit rapidement au travail avec ses lutins et ses diablotins. Le château terminé, seule la dernière pierre restait à poser lorsque le coq se mit soudainement à chanter dans la vallée. Le diable était refait. Et dans sa colère, de détruire le château dont les débris forment aujourd'hui Roc-la-Tour.

 

Pour partager sa terre de légendes avec les visiteurs, le département des Ardennes a mis sur pied la « Route des Légendes » en treize étapes. Un itinéraire de 450 kilomètres (https://www.visitardenne.com/fr/les-routes-touristiques/route-des-legendes#/), à cheval entre France et Belgique, qui permet de découvrir l'Ardenne mystérieuse décrite plus haut. Imprimable, téléchargeable sur un smartphone, ou géolocalisable, vous passerez d'une étape à l'autre sans difficulté et découvrirez à chaque point-étape les curiosités locales (dont une au moins concerne le monde des légendes). A titre d'exemple, Laifour (première étape) nous en apprend davantage sur les Dames de Meuse et suggère au visiteur un circuit balisé pour se rendre jusqu'aux trois rochers. Juste à côté, à Revin, on nous détaille en quelques lignes ce qu'est la « Cité du Fer », puis nous sommes conviés à nous promener au Mont Malgré-Tout, puis à la Maison espagnole, en complétant la fiche d'information par des bons plans. J'ai, à titre personnel, rarement vu de carnet de route aussi complet et précis dans les informations données. Une opportunité unique de passer des vacances dépaysantes, sportives, enrichissantes et au bon air.

 

Enfant du pays, Hervé Gourdet s'illustrera d'abord comme créateur du festival de féerie Le Printemps des Légendes (Monthermé) de 2009 à 2012, après avoir fondé la troupe inter-celtique du Bagad Arduinn (en 2003) et le Centre des Légendes et d'elficologie en Ardenne. Homme de tous les défis, notre talentueux auteur-illustrateur conçoit bientôt une collection de carnets de voyages, « Escapades fantastiques », sur les plus beaux sites de légendes des régions de France et nous invite à ponctuer notre visite des Ardennes d'histoires étonnantes, de sites magiques et d'incroyables rencontres. L'ouvrage, d'une centaine de pages, consacré à « L'Ardenne mystérieuse », comprend les textes de l'auteur (contes, histoires, lieux-dits...), des illustrations de personnages liés aux endroits visités, des photos et des QRcodes ouvrant sur des vidéos et des récits associés aux lieux de légende, le tout immédiatement accessible sur votre smartphone. Chaque vidéo invite également le lecteur à visionner récits, contes et histoires narrées par les intervenants rencontrés sur place. Tel un colporteur des temps modernes, Hervé Gourdet collecte un grand nombre de témoignages à l'aide d'outils multimédia, puis écrit ses propres textes avant de tracer sur le papier les créatures imaginaires qui peuplent ces lieux magiques.

Ainsi en est t-il de cette Ardenne apparentée à la déesse Arduinna avant de servir de refuge pour les quatre fils Aymon contre l'empereur Charlemagne dont l'immense empire allait d'Aix-la-Chapelle à Constantinople, puis de « terre sorcière » dès le 16e siècle. Au départ, les quatre fils du Duc Aymon, Renaud, Allard, Guichard et Richard sont quatre vaillants chevaliers, jeunes, beaux, forts et droits, à l'oeil fier et au regard loyal. Ils appartiennent à la cour de Charlemagne et leur vie est une succession de tournois, de plaisirs et de festins. Mais au cours d'une partie d'échecs, Renaud blesse mortellement Berthelet, le neveu de Charlemagne. Les quatre frères sont alors contraints de fuir la fureur de l'empereur. Montés sur le cheval-fée Bayard, qu'ils ont reçu de leur cousin Maugis, l'enchanteur de la fée Oriande, les quatre frères devenus hors la loi se réfugient dans la forêt d'Ardenne. Ils y bâtissent le château de Montessor, sur un promontoire escarpé de la vallée de la Meuse. Mais Charlemagne les retrouve et ordonne le siège du château-fort. Le castel est pris par trahison, et les fils Aymon, avec Bayard, mènent alors une vie errante dans la forêt ardennaise trois années durant, avant de rentrer au château de leur père à Dordonne, puis d'atteler pour d'autres aventures qui les conduiront dans le Sud de la France et vers l'Allemagne. Les rochers saillants, sur les hauteurs de Bogny-sur-Meuse, ont l'allure de quatre cavaliers au galop, souvenir éternel de l'épopée ardennaise des chevaliers ayant inspirée une chanson de gestes très populaire au Moyen-Age. Où que vous soyez, ce livre est l'indispensable compagnon de route qui vous donne accès à cette mystérieuse Ardenne.

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