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A la fois Joyeuse et ardéchoise
(Joyeuse, Ardèche, France)
Heure locale

Lundi 9 août 2021

 

En Rhône-Alpes, l'Ardèche offre toutes ses différences du nord au sud du département, et réserve donc une grande variété de milieux naturels et de paysages, sans tenir compte de l'escarpement de plus de mille mètres de dénivelé séparant le haut plateau du Massif central et la vallée du Rhône. Ce territoire forestier (45% de sa superficie est recouverte d'arbres) est vaste et se prête à la randonnée pédestre ou cycliste mais aussi à l'histoire : l'homme y est présent depuis la Préhistoire et nous a laissé la grotte Chauvet et autres dolmens et menhirs. L'Antiquité y verra les Gaulois, à Jastres (au sud), avant que n'apparaisse la Province du Vivarais, largement protestante, avec ses guerres de religion et ses massacres. La révolution française ne sera pas toujours bienvenue dans ce qui deviendra le département des Sources de la Loire en 1790. Alors qu'une partie de la noblesse s'exile, des bandes de chouans se réfugieront dans les montagnes et une contre-révolution royaliste, menée par le comte de Saillans, sera défaite à Joyeuse le 11 juillet 1792.

 

Idéalement située le long de la rivière de la Beaume, à la croisée des routes, entre Cévennes et Gorges de l'Ardèche, Joyeuse nous conte encore aujourd'hui ce qu'elle fut autrefois, une cité ducale et médiévale. Il suffit d'explorer la petite ville à pied pour mesurer la richesse du patrimoine historique et culturel. Autant d'atouts qui font de l'endroit un lieu incontournable en Ardèche. Partons donc à la découverte de ses ruelles et des mystérieux goulajous, de minuscules venelles ressemblant à d'étroits passages voûtés. Poussons la porte d'anciennes échoppes reconverties désormais en une vingtaine d'ateliers d'art, et découvrons le passé de la ville grâce au musée local. Nos papilles se régaleront quant à elle des saveurs du cru en flânant sur le marché hebdomadaire du mercredi matin, l'un des plus grands marchés de l'Ardèche méridionale.

La légende populaire prétend que Charlemagne aurait établi ici son campement, sur les bords de la rivière lors de son retour d'Espagne. Lors d'une partie de chasse, il aurait égaré son épée prénommée « Joyeuse ». Plus de peur que de mal puisqu'un de ses soldats aurait retrouvé l'objet. Et Charlemagne, en signe de gratitude, de lui demander de bâtir ici-même un domaine dont le soldat serait le seigneur à condition que sa descendance porte le nom de la glorieuse épée de l'empereur. Ainsi donc naquit Joyeuse.


 

C'est vers 1200 que fut créée la maison de Joyeuse. Anne de Joyeuse, qui demeure à ce jour le plus connu des descendants, deviendra en 1581 le premier Duc de Joyeuse et...l'un des mignons du roi Henri III. Deux cents ans auparavant, les premiers remparts de la cité médiévale étaient érigés (en 1381) dans la cité médiévale, mais seules certaines parties de l'enceinte restent encore visibles de nos jours, au niveau de la Place de la Brèche. Lors de notre promenade à l'intérieur de cette ville labellisée Ville et Métiers d'Art, un détail interpelle : le nom des rues figure en français et en occitan. Cela s'explique par le fait qu'avant la révolution française, Joyeuse se trouvait en Vivarais, tout en appartenant aux états du Languedoc (où siégeait à l'époque le consul de la cité).

Le château s'impose immédiatement à nous. Bâti au début du 16è siècle (durant la Renaissance) sur les fondations d'un vieux château médiéval, la forteresse abrite actuellement la mairie. Notons que le bâtiment est inscrit à l'inventaire des monuments historiques. Il abrite notamment le Collège des Oratoriens où l'on enseigna aux élèves jusqu'en août 1781, et selon les principes de la Société de l'oratoire de Jésus fondée par le Cardinal de Bérulle, en 1611. Ce collège sera d'ailleurs l'un des premiers établissements de cet ordre.

 

Autre monument historique, l'Hôtel de Montravel, ancien hôtel particulier construit entre les 12è et 14è siècles, et qui fut jadis un témoignage précieux de l'habitat noble urbain. Il n'en reste plus désormais que la façade datant de 1775, même si l'endroit abrite aujourd'hui la Maison de la Caricature et du Dessin d'Humour. On peut encore y admirer un bel escalier de ferronnerie aux armes de Montravel. Ancienne maison Pellier (du nom d'une famille de régisseurs du duché de Joyeuse), la demeure devint propriété des Montravel par le mariage des descendants des deux familles avant la révolution. On prétend qu'un souterrain (muré depuis) relierait les oubliettes du château. Mystère !

Une autre maison joyeusaine mérite la détour : la Castellane (qui abrite désormais l'office de tourisme), anciennement propriété de Marie de Guise, duchesse de Guise et de Joyeuse, est située dans un parc descendant jusqu'à la rivière Beaume.

Non loin du château se dresse le Square François André, mécène de Joyeuse au milieu du 20è siècle. C'est lui qui créa ce jardin, à l'endroit même d'un ancien couvert, jadis centre administratif et commercial de la ville.

 

Notre balade nous conduit maintenant à la salle et Place de la Peyre : cette salle, autrefois appelée salle du pesage des soies, fut construite au début du 19è siècle. Elle symbolise encore de nos jours la place occupée à cette époque par la sériciculture (ou élevage du ver à soie), un artisanat qui donna durant des générations les plus belles soies ardéchoises, vendues sur place les jours de marché.

L'église Saint-Pierre pointe quant à elle son clocher vers le ciel. Tout commença au 11è siècle, lorsqu'une première chapelle fut élevée à cet endroit. L'antique église étant devenue trop petite, sera reconstruite à partir de 1669 (pour ne s'achever qu'en 1676, suite à la lenteur exceptionnelle des travaux). Et l'édifice d'être lui aussi inscrit à l'inventaire des monuments historiques. Le lieu de culte actuel, dédié à Saint-Pierre et Saint-Paul date pour partie du 15è siècle et se trouve près du château. Il abrite plusieurs chapelles : chapelle de Saint-François-Régis (et son autel en marbre rose du Languedoc), chapelle Saint-Louis, chapelle ducale de la Sainte Vierge, chapelle des Oratoriens et chapelle Notre-Dame des sept Douleurs. D'autres œuvres valent aussi le coup d'oeil comme ce maitre-autel en marbre blanc à l'origine conçu pour la cathédrale de Pointe-à-Pitre (Guadeloupe) qui sera finalement jugé trop haut et trop fragile pour affronter les éventuels séismes, puis racheté par le curé de la paroisse. Réjouissons-nous de pouvoir retrouver le clocher de l'église, qui sera abattu en 1793 par les abominables révolutionnaires,lesquels doteront l'édifice d'un toit plat. C'est en 1912 que fut érigé l'actuel clocher.

 

C'est dans l'ancien collège du 17è siècle, situé en plein cœur de la cité, que se dresse l'Espace Castanea, un lieu destiné à faire (re) découvrir le châtaignier, cet arbre emblématique des Cévennes, et son fruit délicieux.

Dirigeons-nous rue de la Récluse pour atteindre quelques instants plus tard la Place de la Récluse dominée par sa célèbre tour. Cette place était à l'époque en dehors de l'enceinte fortifiée de Joyeuse et l'on dit qu'une recluse aurait jadis vécu de la charité publique, enfermée dans cette tour, à l'intérieur d'une prison volontaire et perpétuellement close. Sous cette même place se cache un immense réservoir d'eau potable construit au milieu du 19è siècle qui alimentait toutes les fontaines publiques du village. Parmi celles-ci se trouve l'ancienne fontaine de la Grant-Font, érigée d'après Louis de Montravel, même si son style semble antérieur à sa date de construction (1870).

L'incontournable monument aux morts, lui, fut érigé en 1925. Il représente un couple de paysans ardéchois pleurant la perte d'un fils lors de la Grande guerre. C'est l'un des rares monuments aux morts pacifistes, symbole de la douleur et du souvenir dû aux disparus.

Terminons cette promenade en revenant sur les goulajous, étroits passages voûtés dont je vous parlais au début de cet article. Ceux-ci relient la Grand'rue à la ville basse. Ainsi le Goulajou des Endettés doit-il son nom aux Joyeusains qui empruntaient ce passage pour éviter de passer devant les commerçants chez lesquels ils avaient des dettes. Les chemins de traverse ont du bon !

 

Ne nous quittons pas sans avoir abordé les gourmandises joyeusaines :

  • le macaron de Joyeuse remonte au mariage d'Anne de Joyeuse et de Marguerite de Lorraine. Fabriquée à partir d'amandes, de noisettes, de sucre, de blanc d'oeuf et de farine, cette douceur est travaillée à la main, avant d'être cuite selon une méthode gardée secrète qui lui donne son croquant et sa saveur. Le biscuit se conserve plusieurs mois sans difficulté.

  • La pouytrolle (ou pouïtrolle) est une autre spécialité confectionnée à base de blettes, d'épinards, de gros oignons et de porc entrelardé.

  • Le picodon est un fromage au lait cru de chèvre, à pâte molle et à croûte naturelle tout droit venu des Cévennes ardéchoises, d'une partie de la vallée du Rhône et des Préalpes drômoises.

  • La maôche (ou maouche) est un estomac de porc farci à l'aide de chou, de pommes de terre, de chair à saucisse, de carottes, de pruneaux, c'est selon.

  • La Bombine, spécialité typiquement ardéchoise et fort appréciée l'hiver compte tenu de sa consistance : ce plat contient pommes de terre, carottes, oignons, olives noires, morceaux de lard (ou d'agneau, ou de pied de veau...) et est à l'origine le plat du pauvre. Bon appétit !

 

INFOS PRATIQUES :

  • Maison de la Caricature et du Dessin d'Humour. Ouverte en juillet et en août, du lundi au vendredi de 16h00 à 19h00. Tél : 06 70 72 18 07
  • Musée de la châtaigneraie, à l'Espace Castanea. Ouvert en avril, mai, juin, septembre et octobre, du mardi au dimanche de 14h00 à 18h00. Ouvert en juillet et août tous les jours de 14h à 18h les lundi, samedi et dimanche et de 10h à 18h les autres jours.Tél : 04 75 39 90 66. www.castanea-ardeche.com

  • Le marché, l'un des plus réputés de l'Ardèche, se tient toute l'année et chaque mercredi matin, Place de la Grant-Font

  • Le marché des Créateurs se tient au cœur de la vieille ville (un marché nocturne a également lieu Place de la Gare) tous les dimanches soirs, en juillet et en août.

  • En Octobre, se tient le Salon Gourmand et Artisanal, le temps d'un weekend festif et culturel dans le cadre des Castagnades d'automne et des fêtes de la châtaigne.

  • Office du Tourisme, 63, Avenue François Boissel à Joyeuse. Tél : 04 75 37 24 48. https://www.cevennes-ardeche.com/










 



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