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Exposition "Nouvelles du Paradis, la carte postale de vacances"
(Musée de La Poste, Paris, France)
Heure locale

 

Lundi 6 novembre 2023

 

Qui se souvient encore des cartes postales ? Celles que nous recevions et celles que nous adressions à l’entourage et à la famille lors de nos pérégrinations. Il aura fallu l’avènement d’internet pour que ce qui fut longtemps une tradition soit relégué dans un coin de notre mémoire, et encore, chez les plus anciens d’entre nous. Heureusement, le Musée de la Poste se souvient de cette époque et nous gratifie d’une superbe exposition consacrée à la carte postale.

 

L’exposition « Nouvelles du Paradis – La carte postale de vacances », qui a lieu au Musée de la Poste de Paris jusqu’au 18 mars 2024 revient sur ce qui est davantage que quelques mots griffonnées au dos du support cartonné. La première surprise vécue par le visiteur peut naitre de l’apparente banalité de ce support. Or, la plus belle originalité de la carte postale réside pourtant dans la foisonnante variété des points de vue et la grande diversité des regards croisés offerts. Et c’est à un superbe voyage « recto-verso » que le public est ainsi convié, mêlant à la fois histoire, ethnologie et art contemporain.

Avant d’être noyée dans les selfies et les photos Insta, la carte postale elle aussi connut son âge d’or au siècle dernier en enrichissant de ses images un certain rapport au monde et un imaginaire puissant. Une histoire érudite, populaire, joyeuse et... postale que le Musée de la Poste se devait de vous raconter.

 

A l’origine, si c’est au prussien Von Stephan que revient le mérite d’avoir eu l’idée de la carte postale, dès 1865, l’autrichien Hermann sera celui qui l’imposera quatre ans plus tard.

La carte postale est d’abord rejetée par la France et la Grande-Bretagne à cause de son manque de discrétion dû à l’absence d’enveloppe.Ce n’est alors qu’une question de temps puisque notre pays officialise la carte postale non illustrée en 1872 et que la loi du 20 décembre 1872 autorise la « correspondance à découvert », et donc la production des cartes postales, au tarif de 10 centimes pour une carte locale et de 15 centimes pour celles circulant de bureau à bureau. Tandis que les première cartes sont vendues par la Poste, certaines d’entre elles seront même utilisées en cartes-annonces publicitaires jusqu’au 1er février 1874. Les premiers envois, eux, circuleront le 15 janvier 1873.

Dès lors, ce premier pas prometteur permettra à ce nouveau support de connaitre son âge d’or de 1900 à 1904 pour atteindre les 800 millions d’exemplaires dès 1914.

 

Un arrêté publié le 7 octobre 1875 autorise l’industrie privée française à fabriquer des cartes postales : si l’on attribue habituellement la paternité de la première carte postale photographique au marseillais Dominique Piazza (en août 1891), notre inventeur sera vite dépassé par les imprimeries et leurs baisses de couts de production. Que de chemin parcouru depuis la création de la première carte postale illustrée par la Caisse d’Epargne en 1881 ! Au début, il était interdit d’écrire la correspondance du même côté que l’adresse, d’où l’aménagement de larges plages de correspondance du côté illustré.

 

Prise d’un essor fulgurant, la carte postale est fabriquée par dizaines de millions d’exemplaires. A Nancy, Monsieur Bergeret, l’un des plus célèbres créateurs du début de ce siècle de cartes postales illustrées et photographiques ouvre son premier atelier de fabrication en 1898 : de 25 millions de cartes produites en 1900, il passe à 30 millions l’année suivante, puis à 90 millions de cartes postales en 1905, et 100 millions de cartes en 1909, soit le quart de la production nationale. Au total, ce sont trois milliards de cartes qui sont produites par ces mêmes ateliers entre 1900 et 1930 !

 

La carte postale prendra aussi différentes formes tout au long de son existence : c’est en 1870 qu’elle fait pour la première fois son apparition en France, plus exactement à Strasbourg alors assiégée par l’armée allemande du 13 au 23 septembre. Cette carte porte alors l’estampille de la Croix-Rouge et doit permettre à la population locale de communiquer succinctement avec l’extérieur, avec l’accord du général allemand Weider qui autorisa les cartes postales à sortir de Strasbourg. La carte, à l’époque discrètement illustrée d’une unique Croix Rouge, non affranchie, n’est acheminée que vers la France et la Suisse.

 

A l’époque, Nancy, placée sous tutelle allemande, aura également le droit de faire usage de la carte de correspondance. Mise à disposition de la population nancéienne au prix d’un centime, et dans la limite de cinq cartes par personne, cette carte était vendue dans toutes les recettes et par les facteurs et pouvait être acheminée vers les Etats de la Confédération de l'Allemagne du Nord, la Bavière, le Wurtemberg, le Bade, le Luxembourg ainsi que vers n'importe quel point des territoires français occupés par l'armée allemande. La correspondance pouvait être écrite à l'encre ou au crayon et l'expéditeur n'était pas tenu de se nommer. 

 

Dès 1873, était déjà apparue la CPO (carte postale officielle) destinée à circuler à découvert en France et en Algérie, à l’intérieur d’une même ville ou dans la circonscription d’un même bureau de poste (correspondance locale). Suivront la carte réponse payée, la carte pneumatique à usage parisien et la carte postale pneus (PPP) en 1879, puis la carte postale pneus réponse payée l’année suivante.

Toujours en 1873, naquirent les cartes publicitaires, à l’initiative cette année-là des magasins La Belle Jardinière qui firent reproduire au recto des cartes officielles de petites illustrations représentant leurs immeubles de la rue du Pont-neuf, à Paris.


Revenons à présent sur l’évènement qui nous intéresse. L’exposition aborde ici la carte postale sous quatre aspects et à ses différents stades de son existence :

 

  • L’objet visuel

 

On apprend ainsi que la carte postale joue un rôle clef dans la mise en images des territoires, et ce, depuis la fin du 19ème siècle.

D’abord liée aux migrations volontaires ou forcées,elle s’impose peu à peu comme un rite vacancier avec l’essor des congés payés et du tourisme de masse.

Parvenue au rang de « média de masse », elle façonna l’imaginaire moderne de l’ailleurs en participant à la construction de véritables stéréotypes visuels de territoires via la représentation de monuments emblématiques, bords de mer, sommets enneigés, personnages « typiques » ou « scènes pittoresques ».

 

 

  • L’objet économique

 

Depuis sa fabrication jusqu’à sa diffusion, la carte postale mobilise un certain nombre de savoir-faire, de compétences et de moyens.

L’exposition offre de découvrir artistes et professionnels qui oeuvrent à sa conception.

Soumis à une concurrence de plus en plus rude, les éditeurs de cartes, véritables entrepreneurs de l’image, convoitent les sites fréquentés afin d’amender constamment leurs collections pour les faire coïncider au mieux avec les goûts changeants des consommateurs, en ajoutant souvent au point de vue « idéal » l’incontournable ciel bleu azur...

Quant aux stratégies publicitaires, elles se multiplient en incluant entre autres la création de différents supports pour présenter les cartes.

 

 

  • L’objet de correspondance

 

Lorsque la carte postale apparut pour la première fois dans l’Europe des années 1870,la possibilité de dévoilement dans la sphère publique d’une correspondance associée à l’intimité surprend, voire engendre le débat.Mais peu à peu, les rédacteurs évaluent ce nouveau support peu coûteux et illustré, s’adaptent et inventent de nouvelles formes d’écriture, allant de la simple marque d’affection au récit condensé de quelques lignes.

Une fois expédiée, la carte postale agissait comme un puissant vecteur de lien social. Une pratique aujourd’hui en voie de disparition à cause d’internet, du téléphone portable et des réseaux sociaux.

 

 

  • L’objet de collection

 

En plus du lien social, la carte postale se veut support d’information pour les amateurs de traditions et de contrées lointaines. Et de se hisser rapidement au rang d’objet de collection par le biais de circuits d’échange répartis sur toute la planète.

Les collections d’André Laville, Arnold van Gennep, Albert Hagneaux, Jean-Marie Donat et Francis Laffon qui sont présentées dans l’exposition sont autant d’exemples d’approches différentes de la collection, entre science, loisir, souvenirs et démarche artistique.

Et c’est sur le nouveau récit vacancier que s’achève ce parcours, un récit qui se perpétue à l’heure des réseaux sociaux, au moyen d’une pratique associant visuel et texte... à l’instar des cartes postales d’antan !

 

INFOS PRATIQUES :

  • Exposition « Nouvelles du Paradis – La carte postale de vacances » jusqu’au 18 mars 2024, au Musée de la Poste, Quartier Montparnasse, 34 Boulevard de Vaugirard, à Paris (15ème).
  • Www.museedelaposte.fr

  • Catalogue de l’exposition, en vente sur place. 250 pages, près de 250 illustrations, 39€.










 



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