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La Fonderie de cloches Cornille Havard
(Villedieu-les-Poëles, Manche, France)
Heure locale

 

Mardi 10 mai 2011


 

Lors de votre passage par Villedieu-les-Pôeles, arrêtez-vous à la Fonderie de cloches Cornille-Havard. Vous découvrirez ainsi un savoir-faire unique et rare associant les techniques les plus modernes à des gestes ancestraux. Perpétué dans un atelier du XIX ème siècle , la Fonderie de cloches Cornille-Havard est l'héritière de ces fondeurs de cloches qui furent itinérants jusqu'au XIX ème siècle et qui s'établirent progressivement à Villedieu. Paul Havard était fondeur depuis 1830 à Villedieu-les-Poêles. Son fils, Adolphe, reprend la fonderie en 1860 et installe de nouveaux bâtiments sur l'île de la Commanderie. Certaines techniques mises au point par cet ingénieur polytechnicien sont toujours employées dans les ateliers de fabrication. Aujourd'hui, la Fonderie Cornille Havard compte douze fondeurs et un accordeur de cloches. Elle fabrique des cloches de 450 kilos jusqu'à 5,5 tonnes.

Il faut savoir que l'origine des cloches est très ancienne. Dès l'Antiquité, on trouve des clochettes, des « sonnailles » composées de deux plaques de fer recourbées et jointes par des rivets. Les premières cloches chrétiennes apparaissent au VI ème siècle. Elles sont d'abord utilisées pour l'annonce des offices religieux, puis se feront l'écho de tous les évènements de la vie de la cité: incendies,attaques ennemies,arrivées royales,victoires...

Depuis le Moyen Age, Villedieu-les-Poêles est renommée pour le travail du cuivre. Mais on y fondit aussi des cloches. Les premiers fondeurs vinrent de Lorraine et s'installèrent dans la cité au XVI ème siècle. D'abord itinérants, ils se rendaient dans les villes et villages dès le printemps pour fabriquer sur place la cloche , au pied du clocher auquel elle était destinée. Un four était à chaque fois construit sur place et ils y fondaient le bronze de la cloche.

La construction de l'atelier de Villedieu date de 1862. Et coïncide avec la mise en service de la ligne de chemin de fer Paris-Granville. En 1789, on comptait encore 200 fondeurs de cloches alors que de nos jours, il n'en reste plus que trois. Et il faut savoir que toutes les cloches d'avant la Révolution française ont depuis été classées monument historique. L'atelier Cornille Havard a subi peu de transformation depuis sa conception par Adolphe Havard. L'airain est fondu dans un four réverbère à double voûte. Les outils caractéristiques sont toujours utilisés par des ouvriers qui reproduisent les mêmes gestes que les anciens, appliquant ainsi un savoir faire transmis par des générations de professionnels.

On construit ainsi toujours des moules à base d'argile, de crottin de cheval et de poils de chèvre (l'argile servant au modelage, le crottin de cheval intervenant comme l'élément poreux qui laissera, le moment venu, échapper l'air et le gaz, et le poil de chèvre jouant le rôle de lien) (photo ci-dessous). Dans ce moule, on coulera le bronze en fusion à près de 1200°C. Autrefois en bois, les « planches à trousser » (pour donner la forme parfaite à la cloche) sont aujourd'hui découpées au laser et modélisées sur outil informatique. Ces planches sont primordiales et conditionnent la qualité sonore de la future cloche. Un analyseur de spectre électronique permettra ensuite à l'accordeur de contrôler les notes partielles de la cloche et d'affiner son accordage.

Mais le travail est long avant de pouvoir accorder la cloche qui sera faite de bronze, c'est à dire 78% de cuivre et 18% d'étain. Après la confection du moule qui recevra le bronze en fusion, on ajoute les moules décor (en cire)qui seront collés sur la deuxième partie du moule d'argile et permettront l'apparition des logos et inscriptions voulues. La terre liquide utilisée pour le moule demande six mois de préparation. C'est un mélange très fin qui sera ensuite projeté au pistolet, à raison de dix couches successives, jusqu'à l'obtention d'une carapace. Le moule sera constitué de deux parties: La partie intérieure (le noyau) et la partie extérieure (la fausse cloche).

Pendant ce temps, un feu puissant est entretenu à l'intérieur du four à réverbère afin de faire monter le bronze en température ( 4h30 à 5 heures sont nécessaires avant d'atteindre les 1200°C, et les briques du four deviennent alors blanches). Il faut compter 15 minutes pour faire fondre une tonne de métal. Et il faut dix tonnes de métal pour couler une cloche de 5,5 tonnes. Une fois le métal à la bonne température,celui-ci est amené par un canal en direction de la cloche. 106 secondes suffisent pour couler l'intégralité du métal dans le moule. Les impuretés remontent à la surface, et le métal reste pur, et retombe très rapidement en-dessous des 1000 degrés. En refroidissant, celui-ci se rétracte et il est alors prévu d'injecter du métal ( 14 kgs de métal par cercle visible sur la photo ci-dessous) afin de combler les trous. On utilise une poudre exothermique comme ralentisseur de refroidissement. La cloche entame alors une (très) longue période de refroidissement: Trois à quatre semaines de refroidissement sont nécessaires pour une cloche de 5,5 tonnes. Et puis, on sort la cloche de son moule et celle-ci apparaît alors comme par magie: Sablage,ciselage,polissage,accordage, puis repolissage complèteront la conception de l'objet. On peut atteindre six mois de travail au total.

Grâce à sa maitrise des techniques à la « cire perdue », la Fonderie Cornille Havard a évolué vers la fonderie d'art et la fonderie de décoration. Lorsque je pénètre dans la cour de l'atelier, je découvre des cloches destinées à la paroisse de Ghajnstelem (Ile de Malte)(photo ci-dessus). La dernière cloche vient d'être fondue et refroidit encore en terre. Elle pèse 5,5 tonnes et rejoindra l'ensemble des huit cloches ( poids total de 14 tonnes, perché à 35 mètres de haut). Le transport des cloches jusqu'à l'ile de Gozo, leur destination finale, prendrra deux jours , par route pour atteindre la mer adriatique puis, bateau. Une souscription privée a permis le financement de l'opération ( il faut compter environ 40 € pour 1 kilo de cloche) et les décorations représentant les huit béatitudes ont été réalisées par deux artistes maltais. Leur bénédiction est prévue le 15 août prochain.

Jusqu'à présent, la cloche la plus lourde était celle du bourdon de la cathédrale maronite Saint Georges à Beyrouth (Liban).Soit 2,7 tonnes.

D'autres cloches plus modestes ont aussi vu le jour. Comme ces trois cloches qui furent coulées à l'occasion du treizième centenaire du Mont Saint Michel (ci-dessous).

Une autre cloche a connu une histoire peu ordinaire. En 1988, des Japonais lancent une souscription pour commander une cloche destinée à célébrer le 1250è anniversaire du Temple shintoiste Impérial de Daishijo (Japon). Peu de temps avant sa livraison, l'Empereur Hirohito décède. La coutume nippone interdit l'importation d'objets religieux au Japon dans de telles circonstances et la cloche reste bloquée à Villedieu. Depuis, la Fonderie a reçu le règlement de la fameuse cloche mais cette dernière n'a jamais été réclamée. Elle trône dans la cour, pour le plus grand plaisir des touristes.

La maison Cornille Havard a su évoluer depuis vers l'ensemble des métiers de clocher: équipements mécaniques des cloches,beffrois en bois ou en métal,abat-sons,électrification des cloches,paratonnerres,cadrans... vous pouvez même passer commande de votre propre cloche auprès de la fonderie! Cette entreprise reste l'une des rares entreprises spécialistes de l'Art campanaire. Luigi Bergamo a été récompensé pour son savoir faire et la transmission de celui-ci en recevant le titre de Maître d'Art en 1998, des mains du Ministre de la Culture de l'époque. L'entreprise est aujourd'hui menée de main de ...maître par Paul Bergamo qui valorise partout dans le monde ce savoir-faire ancestral enrichi par les recherches exceptionnelles de son père.


 


 


 

INFOS PRATIQUES:


  • Fonderie de cloches Cornille-Havard , 10 rue du Pont Chignon à Villedieu-les-Poêles. Tel: 02 33 61 00 56. Site internet: http://www.cornille-havard.com

    Ouvert du mardi au samedi, de 10h à 12h30 et de 14h à 18h (du 15 février au 12 novembre 2011)

    Ouvert le dimanche et le lundi de Pâques et tous les jours en juillet et août 2011

    Droit d'entrée: 5,50 € (adulte) et 4,50 € (enfant). Visites guidées (durée: 25 minutes) des ateliers de fabrication.

    Boutique de souvenirs sur place ( DVD sur la fonderie Cornille Havard, en vente sur place)

    Opération 1000 cloches pour Pâques, avec exposition sur place. Questionnaire à remplir par les enfants, toute l'année, avec des énigmes à la clé.

     

  • Exposition permanente de cartes postales ( sous la tente) relatives aux cloches.












 

 



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