Mercredi 3 octobre 2012
Encore une riche journée que celle d'aujourd'hui! Après une bonne et longue nuit (j'étais épuisé hier soir à mon arrivée à l'hôtel), je pars à la découverte d'Evora, ville de l'Alentejo. L'Alentejo ( qui signifie «au-delà du Tage») est cette région qui comprend une grande moitié sud du pays, caractérisée par le mélange des cultures romaine, arabe et chrétienne. Classé au patrimoine mondial de l'UNESCO en 1986, le centre historique d'Evora est appelée ville-musée, à cause de la richesse de son patrimoine. Le nom d'évora proviendrait du latin et signifierait l'if commun. La ville était déjà fortifiée à l'époque pré-romaine et porta le nom d'Evora Cerealis à l'époque des Romains. Elle restera fidèle à Jules César durant la guerre qui opposera ce dernier à Pompée, à l'époque de la république romaine. Le temple d'évora (en photo ci-dessous) est le témoignage incontournable de cette époque. Datant du II ème siècle et localisé dans le centre ville, il représente le monument le plus connu de la cité. Surnommé communément le Temple de Diane, cette association avec la déesse romaine est une pure légende qui remonte au XVII ème siècle. On pense que ce temple fut probablement construit pour le culte impérial d'Auguste, sur le forum qui servait de place principale à Evora à l'époque. Le monument subit quelques transformation aux II ème et III ème siècles et fut détruit au moment des grandes invasions, au V ème siècle. Les ruines visibles de nos jours sont tout ce qui reste du forum romain. Au Moyen-âge, on incorpora celles-ci à une tour du château d'évora : Colonnes et architraves étaient alors incrustées dans le mur du château médiéval et ce temple, transformé en tour, servira même de boucherie du XVI ème siècle jusqu'en 1836. Il faudra attendre 1871 pour que l'architecte italien Giuseppe Cinatti procède à une véritable restauration du monument.

Evora fut bien entendu occupée par les Maures. Elle fut reprise en 1165 par Geraldo Sem Pavor , date qui correspond à la restauration du diocèse. La ville demeurera une résidence royale durant un laps de temps , particulièrement durant le règne de Jean II du Portugal, Manuel Ier et Jean III, et jusqu'à l'annexion du pays par l'Espagne, en 1580. Le XVI ème siècle sera pour elle prestigieux car elle sera élevée à ce moment-là au rang de métropole ecclésiastique. Le premier archevêque d'évora, le Cardinal Henri Ier du Portugal sera d'ailleurs à l'origine de la construction de l'université de la cité, développée à partir d'un collège jésuite. Une visite sur place me permet d'admirer la cour intérieure de cette institution (ci-dessous) ainsi que de superbes azulejos (deuxième photo) qui ornent toujours les bâtiments. Fondée en 1559, l'université d'Evora fut un centre universitaire majeur pour les Jésuites au Portugal. Le Marquis de Pombal la ferma d'autorité en 1759 ( tout le monde se rappelle l'aversion du Marquis pour les ordres religieux!) mais elle sera rouverte en 1973, devenant ainsi une université publique. C'est au départ la Compagnie de Jésus qui, pendant deux siècles, en assurera le bon fonctionnement. Elle sera classée monument national lors de sa réouverture en 1973. La fermeture de l'université porta un rude coup à la ville car Evora a toujours été une ville jeune. Cet après-midi, j'ai d'ailleurs croisé ces étudiants vêtus de la cape noire pour certains d'entre eux, en train de défiler dans un joyeux brouhaha dans le cadre d'une fête.

Aux abords de l'université, j'aperçois les restes de la muraille romaine (ci-dessous). Trois enceintes protégeaient autrefois la ville. Il n'en reste plus que des morceaux ici et là, datant du Ier siècle et renforcés par le Wisigoths, au VII ème entre les Palais des Ducs de Cadaval et des Comtes de Basto. La muraille médiévale du XIV ème siècle limite la cité au nord et à l'ouest tandis que les fortifications (deuxième photo) érigées dans le style de Vauban au XVII ème délimitent le jardin public au sud.


Non loin de ces anciennes murailles se trouve le Palais des Ducs de Cadaval, fondé au XIV ème siècle sur les restes d'un château maure. Situé en plein cœur du centre historique, il fut fondé aucours du XIV ème siècle près de la Tour d'Evora, où le chevalier Martim Afonso de Mello, serviteur du Maitre d'Avis et descendant de la couronne portugaise, demanda de le bâtir. Construit en partie sur les remparts romains et wisigoths de la ville, il incorpore deux styles architecturaux, notamment militaire, par les traces de fortifications visibles et la Tour de la façade principale. L'arrière du Palais, on peut admirer la Torre das cinco Quinas. Outre les jardins, et les terrasses de cafés et du restaurant qui dénaturent quelque peu l'endroit (c'est dommage!), le Palais offre de voir les différentes salles qui le composent (première photo) , avec, à l'intérieur, des collections de sculptures, peintures et armures, remontant aux XV ème et XVIII ème siècles. L'église Dos Loios, adjacente (deuxième photo), appelée aussi église de Saint Jean l'évangéliste, est l 'une des plus belles églises privées du pays. Entièrement restaurée par Dom Jaime (dixième Duc de Cadaval), en 1957, elle fut toutefois fondée en 1485. On y pénètre par un porche gothique du XV ème siècle comportant sur un côté une pierre tombale en forme de baldaquin comportant l'inscription de sa fondation et les armes de son fondateur qui n'est autre que Dom Rodrigo de Melo, premier Comte d'Olivenza. A l'intérieur, la nef, soutenue par des nervures gothiques, est recouverte d'azulejos du XVII ème formant une collection exceptionnelle du peintre Antonio de Oliveira, datée de 1711 et signée par l'artiste. Au mur, on aperçoit la tribune de la nef (du XVII ème) construite par le premier Duc de Cadaval. La Chapelle du Saint Sacrement comporte un très bel autel doré datant du XVIII ème siècle.


Dans un mouchoir de poche, se trouve l'ancien couvent Dos Loios, devenue depuis une pousada, par l'intermédiaire du Saint Esprit. Le bâtiment était autrefois le monastère de Saint Jean l'évangéliste de la congrégation de Loios. Fondé en 1485, par Dom Rodrigo Melo, sur la requête de Jean II, ce monastère fut bâti sur les restes de constructions arabes ultérieures. Du château qu'il y avait là autrefois, il ne reste que quelques ruines. Celui-ci fut en effet détruit par l'incendie lors de la révolution de 1383-85. Le XVIII ème siècle vit la reconstruction du monastère depuis sa destruction partielle par le séisme de 1755. Puis, par décret royal, le monastère dut fermer en 1834 avec l'abolition des ordres religieux décrétée par l'état portugais, et resta inhabité. C'est en 1965 qu'il fut transformé en pousada après de longs travaux. Cet hôtel a ceci de particulier que les chambres (ci-dessous) sont les anciennes cellules des religieuses et sont toutes différentes. Une expérience inoubliable!

Le musée d'Evora se trouve sur le Largo (Place) Condé de Vila Flor, en face du temple romain et de la pousada. Son histoire remonte à 1804 lorsque le Frère Manuel do Cenaculo, alors archevêque d'évora, inaugura la bibliothèque publique qui avait recueilli ses collections d'objets d'art et d'archéologie personnelles. En 1834, l'abolition des ordres religieux provoqua, quelques années plus tard, en 1865, le transfert de la bibliothèque à l'état portugais. Le musée, lui, fut officiellement créé par décret le 1er mars 1915 après la proclamation de la république portugaise et reçut comme dotation quelques-unes des salles du Palais épiscopal. Puis, l'espace étant insuffisant, on utilisa le Palais de l'Amaral pour agrandir les lieux. Ce palais ayant été partiellement détruit par un violent tremblement de terre en 1926, on déplaça à nouveau les collections au Palais épiscopal. Le musée se situe dans la partie la plus élevée de la ville. Et sous ses pieds se trouve le plancher du forum romain, quelques maisons datant de l'occupation musulmane ainsi que quelques tombes médiévales datant du XII ème siècle. Les collections de ce musée furent transférées depuis la bibliothèque publique ( située juste en face). On y trouve des objets archéologiques, mais aussi des œuvres venues des ordres religieux après leur extinction, des sculptures, des peintures (comme sur la photo ci-dessous, les deux évêques saints , du Maitre de Sardoal)

Je me rends maintenant à la cathédrale (ci-dessous)dont l'édifice primitif aurait été fondé en 1186 par l'évêque Dom Paio. On pense qu'elle aurait été bâtie sur l'emplacement d'une ancienne mosquée. Après la Reconquista et la guerre civile de 1245-48, c'est à l'initiative de l'évêque Dom Durando Pais que fut érigé le bâtiment actuel. Sa construction se termina vers 1350. En forme de croix latine, l'ensemble est constitué de trois nefs de sept travées, d'un transept saillant et d'un chevet. On remarque deux tours différentes sur cette cathédrale. La tour-lanterne (deuxième photo) est couronnée d'une voûte en croisée d'ogives. Extérieurement, le pinacle conique couvert en écailles de pierre révèle un lointain modèle byzantin. Le cloitre, rectangulaire, aux arcades sans remplages ouvertes sur le jardin central est couvert d'une voûte à croisée d'ogives et chaine longitudinale (troisième photo). La décoration traduit une franche influence musulmane. C'est l'évêque Dom Pedro qui le fit construire. Il y a sa chapelle et sa sépulture. Si la construction de la cathédrale date du Moyen âge, la reconstruction de son chœur , elle, date du XVIII ème. Le roi Joao V y investit un budget d'un million de cruzados et confia le projet à l'architecte en chef du royaume, Joao Frederico Ludovice. On démolit lechoeur architectural gothique dès 1718 pour reconstruire un nouveau chœur qui fut achevé en 1746 (quatrième photo).




Ma balade se poursuivra dans le dédale des rues et ruelles qui caractérise la cité d'évora (ci-dessous). Je note au passage l'existence d'une superbe fenêtre manuéline(deuxième photo) qui orne la maison du poète et diplomate Garcia de Resende. Poète, chroniqueur, musicien mais aussi architecte, Garcia de Resende était un homme complet. Comme beaucoup d'hommes de la Renaissances, il présentera de multiples facettes: chansons, tango et expertises en architecture militaire... Il est même considéré par certains historiens comme l'initiateur du cycle des Castros, car ses chansons sur la mort d'Inès de Castro constitue le plus ancien document poétique connu sur ce thème.


INFOS PRATIQUES:
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Hotel VITORIA, Rua Diana de Liz, 8 à Evora. Accueil sympathique ( un réceptionniste parle très bien notre langue), bon accès wifi, mais chambre un peu bruyante. Etablissement situé à côté d'un parking et disposant de quelques places pour l'hôtel aussi. Nuitée à 43 € (avec petit déjeuner inclus!). A 15 minutes à pied du centre historique.
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Office du tourisme, Praça do Giraldo,73 à Evora. Tel:(351) 266 777 071. Ouvert de 9h00 à 18h00 ( du 1er novembre au 31 mars) et de 9h00 à 19h00 ( du 1er avril au 31 octobre). Site internet: http://www2.cm-evora.pt/guiaturistico/Frances/itineraire.htm
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Site internet de la mairie d'Evora: http://www.cm-evora.pt/pt
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Site internet de découverte de l'Alentejo: http://www.alentejotours.pt/Content/Home.aspx
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Université d'Evora: http://www.uevora.pt/
Ouverte en semaine de 9h00 à 19h00, et de 9h00 à 13h00 le samedi. Fermée le dimanche et jours fériés. Entrée gratuite.
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Palais des Ducs de Cadaval: http://www.palaciocadaval.com/fr.html
Entrée: 5 € ( église + palais). Ouvert de 10h00 à 12h30 et de 14h00 à 18h00 (sauf le lundi)
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Restaurant Quinta do Bispo ( à deux minutes de l'hôtel sus-nommé), Rua Diana de Liz à Evora. Tel:(351) 266 741 398. Bon accueil, cuisine correcte.
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Pousada Dos Loios, Largo Conde de Vila-Flor à Evora. Tel: (351) 266 730 070. Site internet: http://www.pousadas.pt/historic-hotels-portugal/fr/pages/home.aspx
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Musée d'Evora, Largo Conde de Vila-Flor à Evora. Tel:(351) 266 702 604. Entrée: 4 €. Ouvert du mardi au dimanche de 10h00 à 18h00. Entrée gratuite les dimanche et jours fériés jusqu'à 14h00. Site internet: http://museudevora.imc-ip.pt/
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Cathédrale d'Evora. Tel (351) 266 759 330 Ouverte tous les jours de 9h00 à 12h20 et de 14h00 à 16h50. Entrée: 1,50€. Cathédrale + cloitre: 2,50€.