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La Roche-Bernard
(Morbihan, France)
Heure locale

Lundi 12 août 2013

 

Parmi les petites cités de caractère qui émaillent la Bretagne, La Roche-Bernard tient honorablement sa place. Surtout connue pour son port de plaisance situé sur les berges de la Vilaine (ci-dessous), la cité est aussi remarquable pour son vieux quartier. De Vannes, une quarantaine de kilomètres nous sépare de l'endroit. La circulation y est aisée à cause des routes à sens unique qui desservent la ville. Chose d'autant plus importante que La Roche-Bernard est visitée par de nombreux touristes particulièrement en cette période estivale. Lionel et moi y accédons par le pont de la Roche-Bernard (deuxième photo), qui fut inauguré en 1960. L'ouvrage nécessita pour sa construction quelques 4850 m3 de béton armé, 15000 m3 de matériaux de construction et 1 600000 kilos d'aciers pour les travées. Cet ouvrage, pont suspendu à deux voies reposant sur deux pylônes hauts de 85 mètres et plus élevé que l'ancien pont dont on aperçoit encore les culées (troisième photo) permettait d'éviter le centre de l'agglomération. Plus loin sur la Vilaine (quatrième photo), le pont du Morbihan fut ouvert à la circulation en 1996: Equipé de quatre voies, celui-ci permit la déviation de la Roche-Bernard en faisant ainsi sauter le dernier bouchon sur ce grand axe routier de la Bretagne sud. Car le franchissement de la Vilaine représenta longtemps une contrainte. Le premier pont de la cité fut érigé en 1839. Avant cette date, le franchissement du fleuve se faisait par un bac reliant le passage de Guédas à la rive droite de la Vilaine. Au début du XIX ème siècle, la traversée est assurée par plusieurs embarcations d'une longueur d'une dizaine de mètres, mues et guidées par des rames, gaffes et leviers. Il existe alors un « passe-cheval » et un batelet qui venait au secours des bacs en péril. Le courant et le vent , puissants à cet endroit , pouvaient en effet entrainer ces derniers jusqu'à deux kilomètres du passage. Le premier pont mis en service en 1839 fut un pont suspendu avec un tablier en bois mais la légèreté de sa structure pourtant hardie pour l'époque engendrera une succession d'accidents dès 1852 et conduira à sa reconstruction en 1872 (celui-ci fut le deuxième pont). Un troisième pont fut construit en 1911 en réutilisant les viaducs d'accès de ses prédécesseurs. Il était fait d'un arc métallique à tablier intermédiaire, permettant le passage d'un chemin de fer d'intérêt local. Mais ce pont sauta le 15 août 1944 à cause de la foudre. Un bac et une passerelle provisoire furent alors mis en service de 1945 à 1960, à l'aide de surplus américains. Puis, on installa une passerelle flottante en 1948 dont les éléments provenaient des installations alliées d'Arromanches où elles avaient servi au débarquement.


 

La surface de la commune ne dépasse pas 42 hectares et est d'ailleurs l'un des plus petits chef-lieux de canton de France. La ville possède pourtant deux ports: Le vieux port, aussi appelé « port du Rhodoir » et le port-neuf. Une activité portuaire est attestée dès le XII ème siècle, mais la plaisance représente désormais l'activité principale du port: Le port neuf correspond à l'actuel quai de la Douane et le front de Vilaine s'étendant jusqu'en contrebas du pont de La Roche-Bernard. Avant le XX ème siècle, cet endroit était essentiellement un lieu réservé à la construction navale. C'est à cet endroit que fut construit le premier vaisseau de guerre à trois mâts surnommé La Couronne. On peut d'ailleurs encore de nos jours apercevoir un chantier naval en activité près du grand parking de ce port. C'est le plus beau bâtiment de guerre de Louis XIII qui y fut lancé en 1634. Ce vaisseau de ligne à trois ponts mesurait 52 mètres de long pour 15 mètres de large et était armé de 72 canons. L'équipage comprenait quelques 650 hommes dont 500 matelots. Le navire fut bâti à La Roche-Bernard suite à un heureux concours de circonstances: Au début de son règne, Louis XIII souhaitait disposer d'une flotte puissante face à l'Angleterre car il ne souhaitait plus acheter des navires aux Hollandais comme par le passé. Une trentaine de navires sera donc construite dans des ports bretons et La Roche-Bernard sera choisi par le Cardinal de Richelieu pour bâtir sa plus belle unité à cause, entre autre, de son port abrité des regards indiscrets et de la proximité d'importants massifs forestiers offrant des bois de qualité. Après l'abandon de la construction navale, le terrain fut aménagé durant la deuxième moitié du XX ème siècle et offre désormais aux visiteurs plusieurs installations liées aux sports nautiques.

Jusqu'à la construction du barrage d'Arzal, le port de La Roche-Bernard était asséché à basse-mer. L'échouage était certes satisfaisant mais les plus gros navires restaient mouiller dans le chenal. La plupart des équipements du port date du XVIII ème siècle. On assista à cette époque à l'aménagement des quais de la Vilaine, à la création d'une brèche dans le rocher du Ruicart pour transporter les marchandises d'un quai à l'autre, et à l'installation d'une écluse de chasse au fond du Rhodoir afin de lutter contre l'envasement du port. L'ancien port accueillit également des bateaux de pêche qui rapportaient saumons, anguilles, civelles et autres espèces plus recherchées.


 

La Vilaine arrive pratiquement en fin de course lorsqu'elle atteint La Roche-Bernard. L'histoire de la ville est bien entendu liée au fleuve qui constituait une jolie voie de pénétration que ce soit pour le commerce ou pour les invasions. C'est le viking « Bernard » qui aurait fortifié la place et serait à l'origine du bourg au X ème ou XI ème siècle. Un estuaire très encaissé, dominé par deux falaises abruptes de soixante mètres , sur lequel s'ouvre une anse très discrète: Le port ancien propre à dissimuler en embuscade quelques drakkars prêts à surgir. Enfin, l'énorme rocher en forme de promontoire servit d'assise au premier château et donna son nom à la ville, La Roche, celle de Bernard. Située rue du Passage, ce promontoire granitique surplombe la Vilaine et le port et abrite deux canons ayant appartenu au vaisseau de guerre français « Le Juste », bateau qui fut coulé lors de la bataille des Cardinaux en 1759. Une plaque commémorative indique que c'est à La Roche-Bernard que fut conçu le vaisseau de guerre « La Couronne, durant le XVII ème siècle. C'est par de violentes invasions normandes que naquit la ville actuelle aux IX ème et X ème siècles: Nantes subit d'abord deux assauts vers 850. Vingt ans plus tard, des combats se déroulèrent aux abords de la Vilaine, que les Normands remontèrent jusqu'à Redon. On signale d'ailleurs des « Bernard » dans la région dès 916 et un premier château érigé dès 1010. Le seigneur de La Roche, Bernard, puis son fils Simon et Bernard II furent les fondateurs d'une seigneurie délimitée par la grande Brière et la forêt. En 1095, une charte créa le bourg de La Roche-Bernard qui s'étendait alors de la Place du Bouffay à l'église. Les Barons de La Roche-Bernard fréquentèrent à cette époque la cour des comtes de Nantes puis celle des Ducs de Bretagne. Simon, le fils de Bernard, sans doute soucieux du repos des âmes de son père et son frère Rivallon (les deux furent assassinés) dota largement les religieux, fit un don en 1031 à Saint-Sauveur de Redon, et semblerait avoir fondé l'abbaye de Saint-Gildas-des-bois où mourut son successeur Bernard II vers 1100. Durant la guerre de succession de Bretagne qui opposa, de 1341 à 1365, conflit qui opposa Jeanne de Penthièvre à Jean de Monfort, les barons de la ville prirent parti pour le Roi de France. Leur château sera alors détruit par les partisans de Jean de Montfort et les barons se réfugient à Missilac, au château de la Bretesche.


 

En 1547, François de Coligny, marquis d'Andelot et mari de Claude de Rieux, devient baron de la Roche-Bernard. Il introduit le culte protestant en 1558, et fait de la ville l'un des premiers centres de Bretagne. Dans la foulée, nobles et bourgeois se convertissent, mais la Roche-Bernard, cité réformée au cœur d'une province catholique est bientôt occupée en 1590 par des troupes espagnoles commandées par le duc de Mercoeur. Lors de ma promenade dans le vieux quartier, je découvre la Maison du Canon (aujourd'hui hôtel de ville, en photo ci-dessus) qui fut érigée en 1599 par le seigneur de Lourmois. Les quatre fenêtres centrales sont des ajouts postérieurs qui datent du XVIII ème siècle. Il en est de même pour le clocher et le cadran solaire. Une petite statue en haut de l'édifice représente un homme nommé Le Père La Roche dont on retrouve l'équivalent féminin sur la façade du Château des Basses-Fosses (ci-dessous), La Mère La Roche. Cette maison porte ce nom à cause de la pièce d'artillerie qui est située au coin du bâtiment et qui provient du vaisseau français L'Inflexible, qui fut coulé durant la bataille des Cardinaux en 1759. Quant au Château des Basses-Fosses, il abrite actuellement le musée de la Vilaine maritime, mais n'a jamais été un château en tant que tel mais un hôtel particulier qui date des XVI ème et XVII ème siècles. La bâtisse comporte deux niveaux sur la façade avant (côté Ruicart) et cinq niveaux sur la façade arrière (dont des caves creusées dans la roche). Certains personnages illustres ont séjourné dans cet hôtel: Henriette Marie de France, mais aussi Jacques II d'Angleterre, roi d'Angleterre et cousin de Louis XIV. Nous l'avons déjà vu, de 1629 à 1634, La Roche-Bernard abrita, sur l'ordre du Cardinal de Richelieu, l'important chantier de construction navale du bateau royal « La Couronne ». D'autres vaisseaux consacrés notamment à la traite négrière contribueront aussi à la prospérité du port. En 1665, les baronnies de la ville et celles de Pontchâteau sont unies au marquisat de Coislin, érigé en duché-pairie de Coislin en faveur d'Armand du Cambout qui interdira le culte protestant de la Roche. Un an plus tard, la ville est érigée en communauté de ville par Louis XIV. Ce privilège était très recherché à cette époque et La Roche-Bernard pourra, grâce à celui-ci, députer aux Etats de Bretagne. Le quartier historique de la ville abrite la Place du Bouffay, ancien centre névralgique de l'ancien bourg. Des halles s'étendaient autrefois depuis la Maison du Canon jusqu'à la crêperie de La Roche (deuxième photo ci-dessous). Elles furent malheureusement détruites au début du XX ème siècle pour laisser la place à différents marché (dont le marché aux bêtes). Sur cette même place se trouve l'auberge des Deux Magots (troisième photo): Cet ancien hôtel particulier fut probablement bâti par un armateur ou un officier de marine durant le XVII ème siècle, et tire son nom des deux sculptures sur la façade qui représentent des singes-magots, probable souvenir du propriétaire de l'hôtel.


 

Le Passage de la Quenelle (ci-dessous) donne sur la Place du Bouffay. Celle-ci tiendrait son origine du nom donné à un impôt sur les barriques de vin. Cet accès était autrefois l'une des seules entrées de la ville pour les marchands qui venaient de Pénestin et de Guérande car La Roche-Bernard était une ville-étape pour ces derniers avant de se rendre des dans villes plus grandes comme Vannes, Nantes ou Redon. Toutes sortes de marchandises étaient acheminées à dos de mule (à cause du fort dénivelé de la rue) jusqu'à ce passage. Jadis entièrement pavée, celui-ci offrait une rigole centrale pour l 'évacuation des eaux. La rue de la Saulnerie (deuxième photo), elle, tire son nom de l'activité des sauniers (qui récoltaient le sel). Leur costume de paludier permettait de les identifier facilement du reste de la population. Son ancienne fonction marchande l'amena à contenir des maisons utilisées pour leurs greniers, ou bien qui servaient d'échoppes, d'ateliers ou d'entrepôts notamment au XVI ème siècle. C'est là que le baron de La Roche-Bernard entreposait le sel qu'il percevait grâce aux impôts sur cette marchandise qui transitait abondamment sur sa baronnie.


 

Derrière l'hôtel de ville, se tient une petite chapelle, la Chapelle Notre-Dame (ci-dessous): La fondation de celle-ci est attestée par le cartulaire de Redon en 1063. Les fondations romanes ont aujourd'hui disparu et les parties encore visibles datent essentiellement des XVI ème et XIX ème siècles. Ce lieu de culte ne présente pas un grand intérêt architectural mais est intéressant d'un point de vue historique. C'est ici, qu'en 1558, le seigneur d'Ancelot de Coligny introduisit le culte protestant. Le premier mariage protestant de Bretagne y aurait été célébré sept ans avant. Le bâtiment possédait alors deux entrées, car les catholiques ne voulaient pas passer sous la même porte que les protestants. Ces derniers avaient fait ouvrir une nouvelle porte qui sera rebouchée en 1570, lors de la paix de Saint-Germain, paix qui rendit au culte catholique la fameuse chapelle. Lors de la Révolution française, l'endroit perd sa fonction religieuse car le tribunal révolutionnaire y installe ses quartiers généraux. Quelques temps plus tard, la chapelle sera vendu comme bien national. Puis la construction, laissée à l'abandon pendant des décennies, sera sauvée, entre 1974 et 1984, par une association de sauvegarde du patrimoine alors qu'elle menaçait de s'écrouler.


 

 

INFOS PRATIQUES:

 


  • Office de tourisme de La Roche-Bernard:http://www.arc-sud-bretagne.fr

  • Musée de la Vilaine maritime, Château des Basses-Fosses, 8, rue Ruicart à La Roche-Bernard. Tel:02 99 90 67 98 et 02 99 90 83 47. Ouvert tous les jours de 10h30 à 12h30 et de 14h30 à 18h30 du 10 juin au 15 septembre. Entrée: 3€. Site internet: http://www.assolesamisdumusee.jimdo.com

  • Visites & circuits du patrimoine local sont disponibles dans la région: La Roche-Bernard offre aux amateurs de se promener à pied gratuit, une heure durant, dans la cité en compagnie de Jacques Hazo, animateur de Patrimoine des Tourisme Arc Sud Bretagne. Des balades à vélo sont également possibles (3€ par adulte pour 3 heures), ou bien en voiture (même tarif, même durée). Renseignements à Tourisme Arc Sud Bretagne au 02 99 90 67 98.

     

    http://www.tourisme-arc-sud-bretagne.com

  • Restaurant Le Vieux Quartier, 8, Place du Bouffay à La Roche-Bernard. Tel:02 99 90 61 19. Accueil très sympathique. Site internet:http://www.le-vieux-quartier.fr

  • D'autres photos sont disponibles sur le site--> Médiathèque--> Album photos Europe.

 

 










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