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Le Musée des Montres & Horloges de la Cité Interdite à Pékin
(Chine)
Heure locale

Jeudi 27 octobre 2011

 

Histoire de remettre les pendules à l'heure, je décide de partir à la découverte du musée de l'horlogerie de la Cité interdite. J'ignore ce qu'on y trouve réellement et cela sera l'occasion pour moi d'en apprendre un peu, du moins je l'espère, sur la Chine et sa relation avec le temps. L'homme a toujours ressenti le besoin de mesurer le temps, et ce, dès la Haute Antiquité. Il commença par inventer le cadran solaire qui nécessitait le soleil et la lumière du jour. Puis, ce fut l'horloge à eau, ou clepsyde, inventée en Egypte. Ce genre d'horloge donnait l'heure même la nuit. On était donc sur la bonne voie. Mais leur fiabilité ne valait pas celle des sabliers. En l'an 725 de notre ère, un Chinois, I Hing, inventa le premier mécanisme à échappement (partie primordiale de l'horloge): L'horloge mécanique était née. Vers 1090, un autre Chinois, Su Dong, construisit une horloge astronomique en métal haute de six mètres capable d'indiquer la position des constellations. Il s'agissait d'une horloge mécanique à entrainement hydraulique. Mai sous les Yuan, l'horloge n'est plus entretenue et les secrets de sa fabrication se perdent. Retour à la case départ?


C'est à l'intérieur du Palais Feng Xian Dian (Salle du culte ancestral),que se tient le musée des montres et des horloges de la Cité interdite. J'ai vu des horloges, beaucoup d'horloges, que des horloges.....mais point de montres! Le Palais Feng Xian Dian fut construit au début de la dynastie des Ming et fut rénové en 1656 ( sous la dynastie des Qing). En forme de I, le palais possède deux bâtiments: Un bâtiment avant et un bâtiment arrière, reliés par un couloir. A l'époque des Ming et des Qing, le palais servait de lieu d'offrandes pour les sacrifices faits par l'Empereur. Il servit donc de temple impérial ancestral:Chaque année au Nouvel An, lors du solstice d'hiver, lors de l'anniversaire de l'Empereur, le jour où l'empereur accordait un titre à une concubine impériale, et lors des anniversaires des anciens empereurs et impératrices, une cérémonie se tenait à cet endroit afin d'offrir des sacrifices aux ancêtres impériaux.

Le premier jour de chaque mois lunaire, l'Empereur se rendait dans le Palais Feng Xian Dian et offrait fruits et légumes aux ancêtres impériaux. En automne, il leur faisait l'offrande de cerfs et autres animaux.


Muni de mon ticket, je pénètre à l'intérieur de l'exposition. Dès les années 1950, une partie de la collection de ces horloges d'époque trouva sa place dans une salle d'exposition de la Cité interdite. Puis, en 1985, on ouvrit une exposition qui leur fut entièrement consacrée dans le Palais du culte des ancêtres. Cet endroit fut réorganisé en 2004 afin de lui donner une dimension internationale. On y découvre ainsi 200 années d'horlogerie à travers des centaines de pièces exposées, «étrangères et chinoises. Un attroupement de personnes s'est formé devant les grandes horloges, véritables attractions de la première salle : La Grande horloge avec carillon, en bois et en forme de pavillon, date de la période Qianlong (1736-1795) (première photo ci-dessus). Elle fut réalisée à la Cour des Qing et reste l'une des plus grandes horloges du palais impérial. Son décor sculpté de bois offre des motifs floraux. Juste à côté, se trouve une autre grande horloge, à eau celle-ci (deuxième photo ci-dessus). Elle fut construite durant la quatrième année du règne de l'Empereur Jiaqing (en 1799) et possède cinq contenants (clepsydres en cuivre). Clepsydre signifie voleur d'eau en grec. L'eau sortait de la bouche des dragons puis coulait dans les contenants. Le clepsydre à flotteur s'élevait en fonction du niveau d'eau présent dans le contenant inférieur et indiquait l'heure à l'aide d'une colonne graduée. Certaines autres horloges à eau, inventées par des Chinois, indiquaient l'heure par tranche de quinze minutes.

 

L'exposition débute avec la présentation d'horloges anglaises précieuses. Lorsque les missionnaires occidentaux arrivèrent en Chine, aux XVIIè et XVIIIè siècles, ils introduisirent avec eux des horloges à sonnerie. Les Chinois s'intéressèrent vivement à ces objets et la Cour de Chine se dota rapidement de ses propres ateliers. Après l'introduction des horloges à la Cour des Ming, l'Empereur fit appel à des missionnaires européens qui étaient familiers avec ce type de mécanisme pour en garantir l'entretien et l'usage quotidien. On s'inspira d'abord de ces superbes horloges faites en Angleterre et qui furent importées en Chine par les officiers des douanes de la province du Guangdong (sud de la Chine), au XVIIIè siècle, au profit de la Cour de Chine. Ces horloges possédaient souvent des oiseaux, ou des personnages qui s'animaient lors du fonctionnement de l'appareil. De nombreuses horloges furent réalisées par James Cox ou Joseph Williamson. James Cox inventa ainsi , vers 1760, une horloge apparemment dotée du mouvement perpétuel ( par l'utilisation de l'énergie produite par les variations de la pression atmosphérique). Une colonne de mercure qui montait et descendait poussait un levier qui permettait de remonter le mécanisme de ladite horloge. Il inventa aussi l'horloge astronomique (ci-dessous) avec un calendrier indiquant la date et la semaine. Entre 1760 et 1785, James Cox mettra au point une horloge pneumatique, puis créera une manufacture horlogère à Guangzhou pour fabriquer des horloges anglaises, entre 1783 et 1792. Vous avez dit délocalisation?


John Williamson fut artisan horloger sous le règne de la Reine Anne d'Angleterre (1702-1714). Il venait d'une riche famille qui créait des horloges depuis déjà plusieurs générations. A la fin du XVIIIè siècle, son fils, Timoth poursuivra son oeuvre. D'autres artisans furent aussi des horlogers talentueux au XVIIIè siècle: Barbot, George Higginson,John Bennett, John Taylor, Robert Philip...

Sous la dynastie des Qing, les empereurs Shunzi, Kangxi,Yongzheng, et Qianlong firent montre d'un intérêt croissant pour l'horlogerie. Avant que ne règne l'Empereur Shunzi, des imitations réussies avaient même déjà été produites si bien qu'à l'arrivée de l'Empereur Kangxi, on trouva de nombreuses horloges à la Cité interdite. Chaque enfant de l'empereur en possédait souvent plusieurs exemplaires et on mettait les Occidentaux toujours plus à contribution afin d'améliorer la qualité des horloges produites en Chine.


La prolifération des horloges à la Cour devint si importante que furent bientôt créés le Bureau des Horloges à sonnerie et le Bureau de l'horlogerie. En 1671 ( onzième année de règne), l'Empereur Kangxi fit inscrire « Vénération céleste » sur le frontispice de la Salle Duanning, là où se trouvait le bureau des horloges à sonnerie, endroit consacré à la préservation, la remise en état et la fabrication d'horloges. Ce Bureau est resté depuis cette époque au même endroit et sert d'entrepôt du Palais pour les horloges et autres articles servant à mesurer le temps. En 1732 (dixième année de règne), l'Empereur Yongzheng plaça le bureau de l'horlogerie sous l'autorité du service en charge de l'ensemble des ateliers impériaux responsables de la fabrication et de l'entretien de toutes les horloges indispensables dans la Cité interdite ainsi que de leur identification et leur disposition dans l'ameublement. L'usine manufacturière du Palais impérial de la dynastie des Qing fut donc fondée en 1732, et le site fut d'abord spécialisé dans la production d'horloges carillons et musicales. Des ateliers étaient spécialisés dans l'émaillage, le travail du bois, de l'or , de l'ivoire, ou du jade. Les ressorts moteurs et les cadrans étaient importés via Guangzhou et garantissaient la qualité mécanique des horloges. A l'époque la fabrication d'une grande horloge pouvait prendre plusieurs années.

Il existait également une Maison des horloges, dans le Pavillon de la réalisation des voeux du Palais de Yuanmingyuan, complémentaire au bureau de l'horlogerie de la Cité interdite. Sous le règne de l'Empereur Qianlong, le service de fabrication des horloges du Palais réunissait un groupe de missionnaires doués des compétences nécessaires en la matière, mais aussi des horlogers chinois et des eunuques horlogers, soit au total une centaine d'artisans qui produisaient des horloges pour l'Empereur. Un exemple de réalisation: Cette grande horloge (ci-dessous) en bois de santal rouge et en forme de tour qui fut réalisée sous le règne de l'Empereur Qianlong.


Bientôt, la Chine se mit à produire ses propres horloges. L'usine manufacturière du Palais impérial de la dynastie des Qing, Guangzhou et Jiangsu furent les trois de production d'importance.

La qualité des horloges produites à Guangzhou à la fin du XVIIIè siècle était équivalente à celle des horloges anglaises et coutaient un tiers moins cher. Elles restaient toutefois hors de pris pour le commun des mortels et étaient le plus souvent des cadeaux honorifiques destinés à être offerts à des hauts fonctionnaires ou à des riches marchands , ce qui limita le développement de ces horloges. Le terme « horloge de Guangzhou » fait référence aux horloges carillons fabriquées à Guangzhou sous la dynastie des Qing et jusqu'à l'avènement de la République populaire de Chine. Ces horloges disposent d'attributs nationaux et régionaux d'une grande richesse . Certaines furent conçues pour ressembler à des bâtiments comme des maisons, des théâtres, des kiosques ou encore des pagodes. D'autres prirent la forme d'une gourde, d'un vase précieux ou d'un pot de fleurs. Leurs boites étaient parées de cuivre doré, parfois même ornés d'émaux brillants caractéristiques de Guangzhou dans des tons transparents de jaune, vert, bleu et autres couleurs. Les artisans de cette ville inventèrent un artisanat associant les techniques d'émaillage occidental et les caractéristiques de l'art chinois. Les décorations formelles avaient pour thèmes la tranquillité et les grandes occasions et étaient destinées à offrir une image apaisante. Non seulement l'horloge donnait l'heure mais elle prenait aussi vie grâce à l'animation de silhouettes et de petits animaux. Admirez cette horloge de bureau avec sa tour en cuivre émaillé (ci-dessous) et ornée d'immortels qui offrent les voeux d'anniversaire.


Jiangsu n'était pas en reste et développa aussi les fondements d'une industrie horlogère. Le développement de l'agriculture et de l'artisanat lors de la dynastie des Qing sous les règnes des empereurs Kangxi,Yongzheng et Qianlong, avait non seulement engendré une prospérité commerciale mais avait aussi permis l'installation de l'horlogerie située en aval du fleuve Yangtsé. L'industrie horlogère de Suzhou date du XVIIIè siècle et atteindra sa perfection au XIXè siècle. Xu Chaojun détailla la structure, les fonctions, l'entretien et la réparation d'une horloge dans son traité de 1809, « l'explication illustrée des horloges carillons », à Songjiang ( l'actuelle ville de Shanghai). Ce livre fut le premier document chinois à être consacré entièrement à la fabrication mécanique des horloges. En 1816, la confrérie de l'horlogerie élabora une inscription dans un parc du souvenir, situé à huit kilomètres de Suzhou. Et témoigne ainsi de la longue histoire horlogère de cette ville. Suzhou produira différents types d'objets: Des horloges de nuit, à pendule, des horloges à trois fonctions...Elles donnaient l'heure , mais aussi les termes solaires de chaque saison. Les horloges Su se sont généralement inspirées de la culture orientale traditionnelle pour leur conception. Et offrent ainsi simplicité élégante et valeur ornementale. La province du Jiangsu s'est taillée une solide réputation pour la création de ses horloges à cadran dont les pièces internes sont entièrement fabriquées à la main ( notamment les gravures naturelles des feuilles de cuivre doré). Chaque horloge est faite de trois parties: la base, l'écran et la boite. La plupart sont réalisées en bois rouge gravé alors que d'autres sont ornées de perles de culture pour leur donner encore plus de valeur. D'autres encore s'inspirent du mobilier de la dynastie des Ming.


Les horloges des ateliers impériaux sont aussi représentées dans cette exposition. Comme cette horloge en bois rouge (ci-dessus) ornée d'un personnage portant un éventail. Elle fut réalisée par les ateliers impériaux sous le règne de l'Empereur Qianlong.

Les horlogers suisses et français étaient très prospères au XVIIIè siècle et la plupart des missionnaires experts en horlogerie présents en Chine venaient de ces deux pays. Ayant apporté avec eux les techniques occidentales les plus avancées, ils produisirent avec les artisans chinois et les eunuques horlogers les plus fameuses horloges chinoises de l'époque. Le Bureau de l'horlogerie connut son apogée durant la seconde moitié du XVIIIè siècle. Les horloges destinées à l'Empereur recevaient alors le nom de Yuzhi ( signifiant Faite sur ordre de l'Empereur) et étaient surnommées horloges impériales. Il y en avait de toutes sortes: Horloges à sonnerie, horloges artistiques, horloges musicales, horloges à veilles, montres goussets, ….toutes produites en étroite collaboration avec des ateliers de laque, d'orfèvrerie, de menuiserie, de travail du jade ou de l'ivoire, de métallurgie, d'armurerie. Ces horloges exprimaient les conceptions esthétiques chinoises.

Les horloges à sonnerie pouvaient marquer les heures et les quarts. Les Qing savaient créer des horloges à sonnerie, avec pendule en plomb pour la plupart mû par un système de chaines et d'engrenages. Les horloges artistiques étaient des objets raffinés, d'usage courant et destinées à la famille impériale et à des officiels de haut rang. Les horloges musicales jouaient une mélodie, pour marquer les heures ou même à la demande. Le tout agrémenté de personnages qui entraient alors en mouvement offrant un spectacle des plus magiques. L'horloge à veilles, elle, fut inventée par Valentin Chalier, à la demande de l'Empereur. Il s'agissait d'un instrument de mesure du temps né des traditions chinoises et occidentales qui pouvait décomposer la journée en 12 et 24 heures et la nuit en cinq veilles ( la durée de chaque veille était modifiable en fonction de la longueur des nuits correspondant aux 24 périodes solaires du calendrier traditionnel chinois.


 

Le sujet de ce musée était si passionnant que je n'ai pas vu le temps passer et ma montre a déjà fait le tour du cadran. Il me faut rentrer, moi aussi, avec ma montre à quatre cadrans au poignet, bien pratique pour les voyages. N'oubliez pas de vous rendre dans la section Médiathèque, album Asie afin de découvrir toutes les photos de cette visite!

 

 

INFOS PRATIQUES:


  • Musée des montres & horloges de la Cité interdite à Pékin (Chine). Ouvert de 8h30 à 16h00 ( en été), de 8h30 à 15h30 (en hiver).

     

    Droit entrée: 10 yuans ( indépendamment du droit d'entrée pour l'accès à la Cité interdite).

     

    Aucune brochure ne vous est remise. Informations en anglais à l'intérieur.

     

    Dans la deuxième salle du Palais, des démonstrations de fonctionnement d'horloges ont lieu quotidiennement à 11h00 et à 14h00.

    Au même endroit, des vidéos sur l'horlogerie sont projetées de 9h00 à 15h00.











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