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Les Gorges de la Restonica et la Vallée du Tavignano
(Haute-Corse, France) |
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Mercredi 3 octobre 2018
Infatigables, Thérèse et moi poursuivons allégrement notre visite de la Corse en nous tournant aujourd'hui vers les beautés naturelles des environs de Corte : les gorges de la Restonica, et la vallée du Tavignano, sans oublier les lacs d'altitude qui se méritent puisque seuls les randonneurs peuvent y avoir accès. Les journées se suivent mais ne se ressemblent pad (toujours). Heureusement car c'est avec un beau soleil que nous nous réveillons ce matin.Nous n'aurons pas beaucoup de route à parcourir car les deux curiosités du jour ne se trouvent qu'à une quinzaine de kilomètres de Corte, où nous sommes basés. La rivière Restonica (en photo ci-dessous) qui nait dans le massif du Retondo, à 2622 mètres, s'offre une course mouvementée dans ces gorges escarpées avant de rejoindre le Tavignano une fois arrivée à Corte. C'est un site de 6500 hectares que nous nous apprêtons à traverser en empruntant la scabreuse D623. Mieux vaut être prudent et patient au volant pour effectuer ce parcours car le croisement d'autres véhicules peut vite s'avérer délicat, voire dangereux, sur certaines portions du trajet.
La Restonica est une rivière au cours accidenté qui offre aux plus curieux cascades et piscines naturelles d'eau fraiche et limpide. On nous conseille vivement de partir vers les bergeries de Grotelle tôt le matin pour se trouver dans le flux montant des véhicules et éviter ainsi de devoir croiser d'autres voitures. Je suis surpris de voir autant d'automobilistes sur cette petite route en cette fin de saison, d'autant plus que le parking qui se trouve en fin de parcours est de petite taille et ne pourra pas accueillir tout le monde. Sur place, un petit refuge (ci-dessous) offre restauration et souvenirs aux clients de passage. Le parking, lui, habituellement payant durant la saison, est gratuit ce matin. Nous ne nous attarderons pas pas longtemps au fond des gorges car l'endroit reste avant tout un point de départ pour des randonnées dans les alentours. Le sentier qui s'enfonce dans la montagne s'effectue d'abord en montée assez douce sur la moitié de son parcours avant de devenir franchement plus rude pour les non initiés. Il est fortement conseillé d'être équipé pour la randonnée, avec chaussures de marche et équipement adapté pour pratiquer ce genre d'activité. Depuis ce refuge, comptez entre 1h45 et 2h00 pour atteindre le lac de Capitello, le plus haut des lacs d'altitude situé à 1930 mètres, mais aussi le plus profond des lacs glaciaires corses avec 40 mètres de profondeur.
Site classé depuis 1966, les gorges de la Restonica vont du lac de Melu (ci-dessous) à Corte. Et la route qui dessert l'endroit n'est carrossable que depuis 1870. La Restonica est avant tout un torrent sauvage avec pas moins de quinze affluents, dont le ruisseau Rinosu, celui de Cavacciole ou encore ceux de Riviseccu ou Grotelle. Le cours d'eau prend plus exactement sa source au lac de Melu, à 1711 mètres, au coeur de la haute montagne corse, avant de rejoindre le Tavignano, en ville, et au pied de la citadelle, à Corte. Les versants rocailleux aux multiples éboulis qui sont offerts par cette vallée glaciaire permettent d'admirer de vieux pins Lariccio plusieurs fois centenaires. L'un d'entre eux, abattu par la foudre, laisse d'ailleurs apparaître des stries laissant penser que l'arbre aurait pu être contemporain de Charlemagne (en l'an 800). La faune et la flore de ces gorges sont à la fois riches et diversifiées : on peut y rencontrer l'immortelle des frimas, la digitale pourpre ou la renoncule, tandis que le gypaète barbu et le milan royal, rapaces tous deux protégés, survolent le territoire. Dans l'eau, on trouve enfin la truite fario microstigma et l'Euprocte de Corse, un amphibien endémique. Outre l'intérêt écologique majeur présenté par cette vallée, l'endroit offre aux uns et aux autres des possibilités de baignades, de randonnées et de pêche...Plusieurs bergers exercent une activité pastorale dans la vallée, d'où la présence de bergeries, de chèvres (deuxième photo), de brebis et de bovins.
Après notre escapade dans les gorges de la Restonica, nous redescendons jusqu'à Corte pour nous rendre jusqu'à Altiani, un petit village perché (en photo ci-dessous) dans la vallée du Tavignano, au bas duquel se trouve un superbe pont génois (deuxième photo) à trois arches, dont la conception date de l'élargissement effectué par l'intendant Boucheporn, juriste français qui deviendra intendant de Corse entre 1775 et 1785. Notre homme encouragera par ses ordonnances le développement de la forêt, de l'agriculture et de l'industrie tout en organisant, à partir de 1778, un élargissement des ponts de l'île. L'ouvrage génois d'Altiani, classé sur la liste des monuments historiques, sera quant à lui agrandi et restauré au 19è siècle et est aussi appelé pont Laricio (en référence au pin de Corse du même nom). Il est agrémenté à son extrémité de la petite chapelle Saint Jean-Baptiste, de l'ancienne piévanie de Rogna, datant des 17è et 18è siècle, mais malheureusement dissimulée par un camion en stationnement lors de notre venue.
La route qui mène à Altiani offre des paysages grandioses (ci-dessous). Le Tavignano, lui, reste le plus long cours d'eau de Corse, juste derrière le Golo (88,7 kilomètres), après avoir pris sa source au-dessus du lac de Nino (1743 mètres), en photo ci-dessous, et d'offrir 74 affluents au total. La rivière traverse ainsi une vingtaine de communes et six cantons différents. La vallée du Tavignano offre une faune et une flore très riches : on trouve ainsi des sources encroûtantes, ou pétrifiantes, des sources d'eau calcaire avec, par précipitation, la formation de tufs (dépôts non consistants) ou des travertins (roches calcaires durcies). La flore associée est constituée de mousses et d'algues. La tortue d'Hermann apprécie aussi cette vallée, même si la déprise agricole a quelque peu endommagé son habitat naturel au fil des ans, avec la création de milieux semi-ouverts et ouverts vers du maquis dense qui lui est bien moins favorable. Cette tortue est protégée et la destruction de ses œufs (ou des tortues elles-mêmes) est formellement interdite. La chauve-souris s'est également installée dans les nombreux gites bâtis abandonnés le long du Tavignano, tandis que l'alose feinte, espèce marine migratrice, trouve les conditions maximales de reproduction dans les eaux du cours d'eau. Cette reproduction a lieu en rivière, au printemps et en pleine nuit. Côté fleurs, sachez que la vallée du Tavignano regroupe 25 espèces d'orchidées, dont l'Ophrys d'Eléonore, orchidée corso-sarde extrêmement rare sur l'île, dont certaines populations en mauvais état souffrent avant tout de l'avancée du maquis. Nous nous arrêterons au village d'Altiani, dans un charmant petit bar où nous ferons la connaissance de quelques habitants qui nous parleront de leur village avec beaucoup de gentillesse et de disponibilité. Ah, la tradition d'accueil corse... Notre café avalé, nous partirons à la découverte du lieu en déambulant dans les ruelles du petit village de 56 âmes.
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