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Des Monastères de Batalha et d'Alcobaça au Sanctuaire de Fatima
(Portugal)
Heure locale

Dimanche 30 septembre 2012

 

Une riche journée m'attend ce dimanche, journée du patrimoine qui me vaudra l'entrée gratuite dans les lieux visités. J'ai décidé de partir à la découverte des monastères de Batalha et d'Alcobça puis de me rendre au sanctuaire de Fatima qui revêt pour le peuple portugais la même importance que Lourdes pour nous.

En 1383, Fernando 1er mourut sans héritier mâle direct. C'est donc Dom Joao, fils illégitime du père de Fernando, qui lui succède. Mais cela déplait à Juan de Castille qui conteste cet accession au trône. Le 14 août 1385, les troupes de Joao 1er, commandées par Nuno Alvares Pereira, défirent les Castillans sur un petit plateau situé près d'Aljubarrota, à trois kilomètres au sud de Batalha. La spectaculaire de Joao 1er assurera deux siècles d'indépendance au pays vis à vis de l'Espagne. Victoire spectaculaire et divine: Dom Joao avait fait le vœu d'élever une superbe église à la Vierge s'il gagnait la bataille. Ainsi naquit l'abbaye dominicaine de Santa Maria da Vitoria (en photo ci-dessous). Sa construction débuta en 1388 par l'architecte Maitre Afonso Domingues, auquel ssucèda David Huguet à partir de 1402 (c'est lui qui introduira le gothique flamboyant au Portugal). Les différents rois y laisseront par la suite leurs empreintes: Le fils de Dom Joao, le roi Duarte, commandera un panthéon derrière l'abside mais, abandonnées par le roi Manuel 1er, les chapelles resteront inachevées (deuxième photo), offrant tout de même leurs décorations de style manuélin. Conçues en forme de rotonde octogonale, l'endroit contient sept chapelles. On trouve dans l'une d'entre elles les restes mortels du roi Duarte et de son épouse. Moment unique de l'art de la Renaissance, le balcon des Chapelles imparfaites fut réalisé par Miguel de Arruda en 1533 et représente la dernière tentative d'achèvement de ces chapelles, de la part du roi Joao III.

 

Ce monastère s'assuma donc très vite comme un symbole de l'indépendance portugaise, qui légitimait la dynastie d'Avis (qui avait débuté avec le roi Joao 1er). La magnificence du projet, la nouveauté des solutions esthétiques et les maitres choisis révèlent l'importance que cet ouvrage revêtait pour son fondateur. Les travaux se prolongeront jusqu'aux deux première décennies du XVI ème siècle, pendant le règne de Manuel 1er (qui préférera le Monastère des Jéronimos, d'où les chapelles inachevées).Entre temps, le roi Joao 1er confiera le monastère aux dominicains, qui y resteront jusqu'à l'extinction des ordres religieux au XIX ème siècle. L'école d'études théologiques y fut fondée par ces mêmes dominicains qui profitèrent ainsi de l'aisance des installations et de leur isolement relatif, et contribuèrent aussi à l'agrandissement des lieux.

Afonso Domingues, le premier architecte, était l'architecte portugais qui jouissait de la plus grande aura pour que le roi Joao 1er lui confie une telle tâche. C'est lui qui conçut tout le projet, puis commença l'église (en photo ci-dessous), la salle capitulaire et les galeries sud et levant du cloitre du roi Joao 1er (deuxième photo). Son style d'architecture respecte les valeurs classiques et archaïques de l'époque. La nef centrale de l'église est l'une des plus grandes de tous les temps, et s'élève à 32,5 mètres de hauteur, hauteur amplifiée par des colonnes très denses qui forment un mur visuel continu en renforçant ainsi le sens ascensionnel de l'espace. La voûte d'arêtes, avec de grandes clefs décorées est due à Huguet, qui introduira les lignes évoluées du gothique tardif. Il achèvera les travaux entamés par son prédécesseur en lançant les voûtes et en dessinant le programme de la façade principale (troisième photo) avec un portail d'une iconographie resplendissante. On trouve sur les montants du portail les apôtres conduisant vers le Christ, son image étant étalée sur le tympan et entourée de quatre Evangélistes tandis que les archivoltes sont ornées de vierges, de martyres, de papes, d'évêques, de rois de Juda et de prophètes.


 

Huguet termina aussi le cloitre royal en garnissant notamment les arcades gothiques d'Afonso Domingues avec des remplages de style manuélin pour mettre en harmonie formes et décors. Ce cloitre est l'un des mieux réussis de l'architecture portugaise grâce à l'harmonie de ses dimensions et à la grande élégance du travail. Il compléta aussi la couverture de la salle capitulaire, en pariant sur une unique voûte dont les dimensions nous paraissent encore aujourd'hui surprenantes. Ce lieu de référence de la vie monastique, débuté par Afonso Domingues permet d'apprécier un vitrail (troisième photo) datant du XV ème siècle, constituant un grand tryptique dédié à la passion du Christ. Huguet eut ussi l'occasion de donner libre cours à son inspiration quant à la construction de la chapelle du fondateur (ci-dessous). Celle-ci accueille le tombeau du roi défunt et de Philippe de Lencastre, tous deux gisant main dans la main. Ce tombeau sera commencé en 1426 par le même Huguet. Il représente la première expérience portugaise d'un tombeau conjugal. Joao 1er y est représenté en armure complète, encore une autre innovation du modèle des gisants médiévaux portugais. Leur fils, Henri, le Navigateur, tout comme les princes Fernand, Pierre et Jean reposent aussi dans cette chapelle funéraire coiffée d'une magnifique lanterne octogonale. La devise de Jean 1er se trouve sur son tombeau: Pour le Bien.

Les Chapelles inachevées, appelées également les chapelles imparfaites, souhaitées par le roi Duarte, ne furent jamais terminées à cause de la mort prématurée du roi et du désintérêt de Manuel 1er. Cependant, celles-ci s'avérèrent être l'un des moments les plus créatifs de l'art manuélin, en particulier grâce à son portail féérique (deuxième photo) né de l'heureuse inspiration de l'architecte Mateus Fernandes. Ce portail faisait partie d'un plan grandiose du roi Manuel 1er dans une tentative de terminer les chapelles voulues par son prédécesseur.


 

Pendant le deuxième moitié du XV ème siècle, le monastère de Batalha fut agrandi par la construction d'un deuxième cloitre, le cloitre du roi Afonso V (ci-dessous). Construction réalisée par l'architecte Fernao de Evora, entre 1448 et 1477. Sa simplicité contraste avec l'exubérance du cloitre de Joao 1er. Il fut bâti sur deux étages et était destiné à la vie quotidienne des moines dominicains et la simplicité du lieu permet encore de nos jours aux visiteurs les plus attentifs d'appréhender le mysticisme qui émane de l'espace.

On remarquera aussi le dortoir (deuxième photo), désormais converti en centre d'interprétation. Celui-ci, dortoir primitif des moines consistait en une vaste salle recouverte d'une voûte en berceau brisé, rythmée par de puissants arcs toraux renforçant son apparence grave. Cet espace commun se révéla peu consistant pour ces moines dominicains, plus habitués aux cellules indivuduelles.

Le réfectoire primitif, occupé depuis 1924 par le musée des offrandes au Soldat inconnu est un espace vaste mais très austère. L'abbaye joua aussi un rôle militaire. Deux soldats inconnus de la Première Guerre mondiale reposent dans le Chapitre (deuxième photo), et sous bonne garde. Ce Chapitre est dominé par une voûte présentant une étoile de nervures qui est due à Huguet.


 

Les yeux remplis de ce lieu éblouissant, je reprends le volant pour me rendre au monastère d'Alcobaça (première photo). Inscrit aussi au patrimoine de l'UNESCO, ce monastère est la plus grande abbaye du Portugal et doit sa renommée à la simplicité de son architecture médiévale. Sa fondation en 1153 est liée à l'arrivée dans le pays de l'ordre de Citeaux en 1138, et à la naissance de la nation portugaise. En mars 1147, le roi Afonso Henriques conquit le bastion maure de Santarém et fit vœu d'ériger une église pour les cistersiens. Achevée en 1223, elle sera agrandie par d'autres souverains: Le roi Dinis fera élever le cloitre principal (deuxième photo ci-dessous). Ce cloitre, surnommé aussi cloitre du silence, se trouve au centre du monastère médiéval , et est un passage obligé situé à l'intersection des dépendances de l'édifice. On y trouve un lavabo octogonale (troisième photo) qui servait aux moines à se laver les mains avant de se rendre au réfectoire juste en face. On trouve enfin dans ce cloitre une statue en pierre polychrome (du XVI ème) représentant N.D du Cloitre. L'église abrite les tombeaux du roi Pedro et de sa maitresse Inès (quatrième photo). En effet, pour des raisons d'état, Dom Pedro (fils de Dom Afonso IV) avait du épouser l'Infantede Castille, Constança, alors qu'il était tombé amoureux de l'une de ses dames d'honneur, Inès de Castro. A la mort de Constança, Dom Pedro partit vivre à Coimbra avec Inès. Mais, jugeant la famille d'Inès trop dangereuse pour le royaume, Dom Afonso IV la fit assassiner le 7 janvier 1355. A la mort de son père, Dom Pedro fera arracher le cœur aux meurtriers de sa belle et, ayant révélé son mariage secret avec Inès, fera exhumer sa dépouille et la fera couronner, tout en contraignant la cour à baiser la main de la reine morte.


 

La façade principale de l'église (ci-dessous) offre un portail gothique flanqué des statues de Saint Bénédicte et de Saint Bernard. On distingue aussi N.D de l'Assomption. L'aspect monumental de la façade résulte de la rénovation dans le style baroque qui eut lieu en 1725. Cette église fut bâtie en trois fois, entre 1178 et 1233-52. La voûte des nefs deuxième photo) s'élève à plus de 20 mètres de hauteur, dégageant un espace à la fois grandiose et austère, si cher à Saint Bernard. La Chapelle principale est entourée par le déambulatoire de chapelles voisines tandis que de larges vitraux inondent la célébration eucharistique de la lumière du jour. A côté de la sacristie médiévale, se tient, non loin de là, la « nouvelle »sacristie. Le portail de celle-ci (troisième photo) est la seul partie originale restante (datant du XVI ème siècle). Construite sous le règne de Manuel 1er, la sacristie dut être reconstruite après l'important séisme de 1755. On procéda donc à sa rénovation dans le style rococo (dont le toit qui représente l'apothéose de Saint Bernard). A l'intérieur de cette sacristie (que je n'ai malheureusement pas pu visiter) se trouver le reliquaire.


 

J'arrive maintenant dans la Salle des Rois (ci-dessous). Endroit érudit et austère, cette ancienne chapelle accueillit à l 'époque baroque, les statues des rois du Portugal (seuls les trois Philippe sont manquants!) tandis que les murs sont ornés d'azulejos contant la légende de la fondation du monastère. L'endroit présente enfin une allégorie du couronnement du roi Afonso Henriques par le Pape Alexandre III et Saint Bernard. On attribue cette sculpture aux moines. Le réfectoire est l'un des espaces médiévaux les mieux conservés. Un portail porte l'inscription:Considère que tu manges les péchés du peuple. L'endroit est formé de trois nefs de dimensions et de hauteurs identiques ce qui permet une harmonie spatiale. Juste à côté se trouve la cuisine (deuxième photo) dont l'escalier de droite offre un accès direct avec le dortoir (en cas de petit creux des moines la nuit?) et qui possède une cheminée de style baroque exceptionnellement grande. L'originalité de ce lieu se trouve dans acheminement de l'eau courante: Un réservoir d'eau était intégré dans le système hydraulique savamment mis au point par les moines. L'eau provenant de la Levadinha, un bras de la rivière Alcoa, artificiellement creusé par les moines pour l'alimentation du monastère.


 

Le dortoir (ci-dessous) est l'un des plus anciens espaces du monastère. On remarque immédiatement la grande longitude (67 mètres) de ses nefs qui insiste sur l'austérité de l'idéal cistercien, impression renforcée par des colonnes basses et brutes d'où sortent les voûtes. La Salle du Chapitre servait quant à elle aux moines pour discuter des sujets de la communauté et pour administrer le monastère. C'est là que se déroulait quotidiennement la lecture du chapitre de la loi. Les postulants y postulaient leurs vœux et on y entendait les moines en confession. Une décision de 1180 imposa l'inhumation de tous les abbés dans cette pièce (deuxième photo).


 

Je termine ma sortie en m'arrêtant à Fatima, une petite ville portugaise devenue célèbre lorsqu'en 1917, en pleine première guerre mondiale, de jeunes bergers (en photo ci-dessous) sont à plusieurs reprises témoins d'une apparition mariale (vision de Marie).le& » octobre 1917, 70 000 personnes assistèrent au miracle du soleil tournoyant sur lui-même comme un disque d'argent. La Vierge délivrera aussi aux enfants le message de Fatima. Ce sont ces apparitions qui donnèrent naissance au sanctuaire de Notre Dame de Fatima (deuxième photo), lieu de pèlerinage catholique aussi cher aux Portugais que Lourdes dans le cœur des Français. Ce qui n'était autrefois qu'un village tient son nom de l'arabe Fatima, à une princesse capturée par les forces chrétiennes pendant l'occupation mauresque du Portugal et qui va être fiancée au Comte d'Ourem. Convertie au catholicisme, elle sera baptisée avant d'épouser le Comte en 1158.

 

Fatima attire aujourd'hui les croyants des quatre coins du monde et ils sont nombreux en ce dimanche. Certains se déplacent à genoux en faisant des prières (ci-dessous). Cette pratique populaire date de la première guerre mondiale durant laquelle on demanda aux habitants de faire des sacrifices. Je renonce à me rendre à la Chapelle des apparitions tellement il y a foule. Je ne me sens pas à l'aise parmi cette affluence parfois trop sollicitée par un mercantilisme exacerbé. L'imposante basilique, dont la construction débuta le 13 mai 1928, s'élève, dans un style néo-classique, avec sa tour de 65 mètres surmontée d'une croix (deuxième photo) et entourée de colonnades (troisième photo). A l'intérieur, une foule se presse pour apercevoir et photographier les tombes des trois jeunes bergers témoins des apparitions de la Vierge.


 

 

INFOS PRATIQUES:

 


  • Monastère de Batalha, à Bataha. Tel:(351) 244 765 497. Ouvert tous les jours de 9h00 à 17h00 (d'octobre à mars) et de 9h00 à 18h00 (d'avril à septembre). Brochure disponible en français, espagnol, portugais, italien,anglais, allemand et japonais. Site internet: http://www.mosteirobatalha.pt/pt/index.php

  • Monastère d'Alcobaça, à Alcobaça. Tel:(351) 262 505 120/128. Ouvert tous les jours de 9h00 à 17h00 (d'octobre à mars) et de 9h00 à 19h00 ( d'avril à septembre). Brochure disponible en français, espagnol, portugais, italien,anglais, allemand et japonais. Site internet: http://www.mosteiroalcobaca.pt/pt/index.php

  • Monastères portugais: http://www.igespar.pt/pt/patrimonio/pesquisa/geral/patrimonioimovel/detail/70469/

  • Sanctuaire de Fatima: http://www.santuario-fatima.pt/portal/index.php?lang=FR

  • Restaurant A TOCA, Rua Dr Correta Mateus 40/44 à Leiria. Tel:(351) 244 832 221. Voici de quoi me réconcilier avec les restaurateurs de la ville. Une bonne table, un patron qui est à son affaire et vous sert rapidement et généreusement, tout en se préoccupant de votre confort. Le vin rouge Mont Velho faisant ses effets, on est vite aux ...anges! 15 € ( mais ici on sait ce que manger veut dire!)

 

 










 



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