Revoir le globe
Top


Aqueducs, des Chemins pour l'eau
(Pavillon de l'Eau, Paris, France)
Heure locale

 

Lundi 21 octobre 2013

 

Il nous arrive encore parfois d'admirer ces ouvrages monumentaux qui ornent les paysages de France : Conçus autrefois pour conduire l'eau, les aqueducs sont apparus en même temps que les premiers habitats urbanisés situés en retrait des rivières. Ce fut d'abord de simples conduits ou tuyaux permettant d'apporter l'eau, puis les aqueducs prirent la forme d'ouvrages d'art comme des tunnels (pour franchir des hauteurs de collines importantes), des tranchées faites dans les collines lorsque celles-ci n'étaient pas très hautes, des ponts-aqueducs pour franchir les vallons ou des bras de mer tout en conservant une pente constante, et des siphons inversés pour passer des vallons importants avec mise en charge des conduites. La Bible parle déjà d'aménagements à Ezéchias, sur la source de Gihon (fleuve mythique) avec percement d'un tunnel pour alimenter le bassin de Silwan à Jérusalem. Nous sommes alors en 700 avant J.C. C'est dire que cette construction ne date pas d'aujourd'hui...

Les Romains aussi construisirent des aqueducs qui utilisaient la simple force de gravitation pour acheminer le précieux liquide. Il en existe de nombreux vestiges comme au Pont du Gard (France), l'aqueduc de Ségovie (Espagne) ou celui de Carthage (Tunisie). Celui de Mons à Fréjus (Var) est encore partiellement en service et alimente un château d'eau sur les hauteurs de la ville.

 

Le Pavillon de l'eau (Paris 16è) propose actuellement une exposition sur les aqueducs: Le parcours est divisé en cinq îlots permettant aux visiteurs de s'immerger dans l'univers de ces ouvrages d'art. On se pose la question de savoir ce qu'est un aqueduc (à l'aide de maquettes présentées, qui montrent les grands principes physiques de fonctionnement) et on présente une carte rassemblant les ouvrages (avec leurs photos) qui alimentèrent ou qui alimentent toujours Paris en eau. La conception et l'évolution de ces constructions sont aussi abordées, à différentes époques, des Romains à nos jours. Enfin, les grands projets de construction d'aqueducs dans le monde sont présentés ainsi que leurs modes de fonctionnement. Petits et grands sont alors invités à découvrir des pièces issues d'aqueducs, à reconstituer des photos à l'aide de cubes, à faire connaissance avec les différents matériaux utilisés et à bâtir eux-mêmes un aqueduc avec des cubes de mousse. On apprend aussi à devenir « dispatcheur » grâce à un logiciel de simulation. Enfin, des projections cinématographiques illustrent avantageusement cette exposition en proposant de découvrir l'eau dans tous ses états.

L’acheminement en eau a toujours été une problématique majeure pour le bon fonctionnement d'une agglomération comme Paris, d'autant plus que les lieux de captage se situent à 100 ou 150 kilomètres des lieux de consommation. Et il peut être intéressant de parcourir, à pied ou à vélo, ces randonnées pédestres commentées ( elles sont proposées au public jusqu'au 17 décembre 2013, voir détails dans les infos pratiques) pour mieux comprendre le savoir-faire humain en matière d'alimentation en eau de la capitale. On construisit en effet plusieurs aqueduc à Paris et dans sa région, et ce, depuis l'époque romaine. Certains ne sont plus que des vestiges, tandis que d'autres sont toujours en service.

 

A la fin du XVI ème siècle, la capitale connait un formidable essor et Paris grandit autour de son centre fortifié. Les 350 000 parisiens, eux, ne bénéficient pas encore d'une eau de qualité. Sous le règne d'Henri IV, des recherches sont menées afin de retrouver et de restaurer l'aqueduc de Lutèce. Probablement bâti dans la deuxième moitié du II ème siècle après J.C, cet ouvrage cessa de fonctionner au moment des invasions barbares (IV ème) à cause du manque d'entretien. Les eaux captées provenaient alors des sources et du drainage des eaux de toute la plaine située entre Wissous, Rungis, Chilly-Mazarin et Morangis. Long de 16 kilomètres, l'aqueduc traversait le Val de Marne pour gagner la Montagne Sainte Geneviève et desservir la ville antique, les thermes, fontaines et palais. Malheureusement, sa réutilisation s'avéra impossible car l'aqueduc de Lutèce était trop dégradé. Après l'assassinat d'Henri IV par Ravaillac, en 1610, sa veuve, Marie de Médicis, fit construire un nouvel aqueduc pour alimenter les fontaines publiques de la rive gauche ainsi que les jardins de son Palais du Luxembourg. Appelé « Aqueduc de Médicis » (ci-dessus), celui-ci célèbre cette année son 400è anniversaire.

 

Au XIX ème siècle, l'hygiène sanitaire prend une plus grande place dans la vie quotidienne des Parisiens et de grands travaux d'infrastructures voient le jour : Canaux, égouts, voies ferrées, routes, bâtiments prestigieux et...aqueducs. Les techniques s'industrialisent et les outils deviennent plus performants. La main d'oeuvre est bon marché et abondante. De nouveaux matériaux (comme la fonte qui permettra de fabriquer des conduites plus grandes et plus résistantes) apparaissent aussi.

Entre 1836 et 1866, Paris passe de un à deux millions d'habitants. On doit alors la construction des nouveaux aqueducs parisiens à Eugène Belgrand, ingénieur novateur : Polytechnicien et ingénieur des Ponts et Chaussées, il participe à la rénovation de Paris dirigée par le Baron Haussmann, de 1852 à 1870. C'est à lui qu'on doit les égouts de Paris, l'aqueduc de la Vanne et le réservoir de Montsouris. Egalement historien, Eugène Belgrand rendra hommage à ses prédécesseurs fontainiers comme Salomon de Caus et les constructeurs de la Samaritaine du Pont-Neuf. Afin d'offrir une eau de qualité à la population, il décide de capter des sources éloignées de Paris puis de les acheminer ensuite jusqu'aux portes de la capitale par deux aqueducs, celui de la Dhuis (qui franchit 130 kilomètres presque à l'horizontale) et celui de la Vanne (lequel mesure plus d'un kilomètre, sur une hauteur de 38 mètres et 77 arcades). Après le décès d'Eugène Belgrand, trois autres aqueducs sont érigés : Aqueduc de l'Avre et celui de Loing. Celui de la Voulzie ne sera achevé qu'en 1925. Il était initialement prévu en 1884 mais fut ajourné à cause de la première guerre mondiale. A eux seuls, ces trois aqueducs acheminent toujours aujourd'hui la moitié de la consommation d'eau potable des Parisiens (soit 483 000 m3 par jour en moyenne, selon les chiffres de l'année 2012). L'aqueduc de l'Avre, érigé entre 1890 et 1893 mesure 102 kilomètres, possède 9 siphons et 1,3 km de pont-aqueduc. Il fut conçu pour acheminer l'eau des sources découvertes à l'ouest de la capitale et alimente désormais le réservoir de Saint-Cloud (nord-ouest de Paris). L'eau provient de Verneuil sur Avre et de Dreux (régions Centre et Basse-Normandie) et se déverse à raison de 160 000 m3/jour. L'aqueduc du Loing (ci-dessous) fut quant à lui construit de 1897 à 1900, sur une longueur de 95 kilomètres, avec 16 siphons et 300 mètres de pont-aqueduc. Il fut conçu pour doubler la capacité de l'aqueduc de la Vanne ( il est d'ailleurs parallèle à celui-ci) et son eau provient de la région de Nemours et de Provins (210 000 m3/jour) pour alimenter le réservoir de Montsouris (centre de Paris).


 

De nos jours, les 470 kilomètres du réseau d'aqueducs bénéficient d'une gestion informatisée et automatisée : C'est le Centre de contrôle et de commande d'Eau de Paris qui gère en temps réel ce réseau. Le débit, la pression dans les canalisations et le niveau de remplissage des réservoirs sont ainsi surveillés. Des agents, présents sur place 24 heures sur 24 participent ainsi activement à l’approvisionnement en eau de la capitale. Bien entretenus, les anciens aqueducs acheminent encore l'eau potable. Ils font l'objet de travaux de réhabilitation afin d'éviter fuites et ruptures de canalisations. Un service d'auscultation des conduites est même utilisé, qui mêle mécanique et électronique. Celui-ci permet de tester la résistance des conduites tous les cinq mètres environ et de repérer d'éventuels problèmes afin d'organiser les travaux à venir.

L'entretien des aqueducs se veut avant tout écologique car ils participent à la préservation de la biodiversité. 80% des 470 kilomètres d'aqueducs sont ainsi composés d'une large bande enherbée qui offre à de nombreuses espèces végétales et animales de vivre et de se déplacer. L'usage de pesticides est bien entendu proscrit et les lieux sont entretenus comme des prairies naturelles , en fauchant deux fois par an par exemple. On a aussi aménagé des espaces de circulation pour les espèces (appelés trames vertes et bleues) et on a depuis identifié des espèces classées très rares en Ile de France sur l'aqueduc de la Vanne (forêt de Fontainebleau).


 

Les aqueducs en région parisienne représentent trois principaux ouvrages d'art : les aqueducs de la Vanne (ci-dessus), du Loing et de l'Avre, totalisant 470 kilomètres de canalisations pour alimenter Paris . Quatre régions sont ainsi concernées par ces aqueducs (qui fournissent 50% de la consommation d'eau des Parisiens). A noter aussi : L'aqueduc de Médicis a une longueur de treize kilomètres, ce qui en fait le plus long monument historique de notre pays ( l'aqueduc de Lutèce, dont il ne reste que des vestiges, totalisait seize kilomètres!). Trois réservoirs accueillent l'eau apportée par ces aqueducs : Montsouris, L'Hay les Roses et Saint-Cloud. Nous l'avons vu, de telles installations exigent des soins constants et le schéma d'investissement d'Eau de Paris (pour la période 2012-2016) prévoit près de 70 millions d'euros de travaux sur l'ensemble du patrimoine ( les aqueducs constituent l'un des axes forts de ce programme). Par exemple, le chantier des arcades du Grand Maître est particulièrement impressionnant avec ses 192 arcades supportant sur plus de deux kilomètres l'aqueduc de la Vanne en forêt de Fontainebleau. Cet aqueduc, construit entre 1866 et 1874 a une longueur de 156 kilomètres, 36 siphons et 17,3 km de pont-aqueduc. Il capte les eaux de la vallée de la Vanne, affluent de l'Yonne pour les apporter au réservoir de L'Hay les Roses (sud-ouest de Paris) à raison de 145 000 m3/jour.


  

INFOS PRATIQUES :

 

 


  • Randonnées pédestres commentées (jusqu'au 17 décembre 2013) : A l'aqueduc de l'Avre (5 km) le samedi 23 novembre 2013 à 14h30 (rendez-vous Place Victor Hugo, à l'angle avec la rue Copernic devant la pharmacie. Métro : Victor Hugo), à l'aqueduc Médicis de Rungis (2 km) le samedi 16 novembre 2013 à 15h00, uniquement sur inscription au 01 42 24 54 02, à l'aqueduc et pont-aqueduc d'Arcueil-Cachan (1 km) les jeudi 28 novembre et lundi 2 décembre 2013 à 14h30 rendez-vous à la sortie de la gare RER B Arcueil-Cachan, côté rue du Docteur Gosselin , en queue de train depuis Paris). Les visites sont gratuites et durent deux heures environ. Inscription préalable souvent obligatoire.

  • Exposition « Aqueducs, des chemins pour l'eau », jusqu'au 22 février 2014 au Pavillon de l'eau, 77 avenue de Versailles à Paris (16è). Tel : 01 42 24 54 02. Ouvert du lundi au vendredi de 10h00 à 18h00 et le samedi de 11h00 à 19h00. Entrée gratuite.

  • Pavillon de l'eau : http://www.eaudeparis.fr/pavillon/

 


 



Retour aux reportages







Qui Suis Je - Reportages - Médiathèque - Calendrier - Pays - La lettre - Contact
Site réalisé par Kevin LABECOT
Disclaimer - Version mobile