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Plaza de Toros de la Maestranza
( Quartier El Arenal, Séville, Andalousie, Espagne)
Heure locale


Mardi 28 octobre 2014

 

Je commence ma visite de Séville par le quartier de El Arenal, bordé par le Guadalquivir et gardé par la Torre del Oro, Cet endroit abritait autrefois des dépôts de munitions et des chantiers navals. De nos jours, ce sont des arènes d'ne blancheur éblouissante, La Plaza de Toros de la Maestranza, qui dominent désormais. Celles-ci accueillent des corridas depuis plus de deux siècles. C'est là où je vais vous emmener aujourd'hui. Arènes de Séville, Plaza de Toros, ou La Maestranza, tous ces noms identifient le même lieu. Bâties entre les XVIII è et XIX è siècles, ces arènes sont la propriété de l'institution militaire laïque qui leur donne leur nom, la Real Meastranza de Caballeria. C'st l'un des monuments les plus visités de la ville à cause de son architecture unique (ci-dessous) , à tel point qu'elles furent classées le 7 décembre 1983 comme bien d'intérêt culturel d'Espagne. Les arènes représentent en effet un des hauts-lieux de la corrida dans le pays et accueillent d'ailleurs l'une des férias les plus importantes, la Feria de Abril.


 

La tradition tauromachique est déjà bien ancrée dans l'Andalousie du XVIII è siècle et les nobles ont pour habitude de pratiquer le sport équestre. En 1730, le roi Philippe V d'Espagne, qui est le protecteur de la corporation de la Real Maestranza, octroie à celle-ci le privilège d'organiser des corridas de taureaux. L'institution décide alors de faire bâtir sa propre arène à Séville, dans ce quartier d'Arenal. La première arène est rectangulaire et en bois, et est installée près de l'amphithéâtre actuel. Mais les arènes rectangulaires ne répondent pas aux exigences du combat car leurs angles offrent au taureau un refuge inapproprié et dangereux pour les combattants. Le Real Maestranza décide donc en 1733 d'ériger, non loin de là, une structure ronde, face au Guadalquivir. Cette arène de bois circulaire est peu à peu entourée à partir de 1749, avec diverses dépendances. On y trouve alors abattoirs et écuries, maisons et magasins, qui s'incrustent dans ce lieu des célébrations taurines. Bientôt, on pense à construire uns structure en maçonnerie. Le projet est lancé en 1761, sous la direction des architectes Francisco Sanchez de Aragon et Vicente de San Martin. Les travaux débutent d'abord sur les chapeaux de roue, puis ralentissent ensuite. Le Balcon du Prince (réservé à la famille royale et actuellement en travaux de réfection) n'est achevé que quatre ans plus tard. Au cours du XVIII è, la corrida équestre pratiquée par la noblesse tombe un peu en désuétude, car l'arrivée des Bourbons sur le trône d'Espagne (en 1700) a modifié les habitudes de la cour, jusqu'à détourner l'aristocratie de ce loisir. Toutefois, la corrida à pied s'imposera lentement mais sûrement au cours du siècle et les combats codifiés ainsi que les premières figures célèbres font aussi leur apparition. Ces corridas seront cependant interdites en 1786, par Charles III d'Espagne. Décision qui sera suivie de peu d'effets, mais les travaux des arènes de Séville, commencés en 1761, sont interrompus alors que seul un tiers de l'édifice est réalisé. Ils reprendront plus tard, mais s'éterniseront car, en 1800, la majeure partie des arènes est encore en bois. Durant le XIX è siècle, la construction se poursuivra tant bien que mal : En 1820, la couverture de la moitié des gradins supérieurs est achevée. Et quarante-huit ans plus tard, le mauvais état du Balcon de la Députation impose sa restauration. On rajoute alors des balcons adjacents. L'ensemble sera totalement achevé en 1881 (soit 120 ans après le début des travaux!). L'architecte Juan Talavera terminera l'édification des tribunes, les arènes restées ouvertes pendant des décennies sont entièrement fermées, et le dernier tiers, en bois, laisse la place à une construction en maçonnerie. C'est cet étalement de la construction dans le temps qui explique la forme imparfaite ovoïdale de la piste, chose unique dans l'histoire de la tauromachie espagnole. Le XX è siècle connait restauration et transformations de l'amphithéâtre : entre 1914 et 1915, Anibal Gonzalez remplace les gradins par des tribunes en briques (ci-dessous). De 1927 à 1951, on construit le siège de le Real Maestranza de Caballeria de Séville et la chapelle de l’institution (deuxième photo ci-dessous). Les arènes visibles aujourd'hui sont le fruit de 200 ans d'efforts.


 

Le terrain sur lequel se dressent les arènes est un endroit de faible élévation, face au Guadalquivir, et est connu sous le nom de monte del Baratillo. Il est situé entre le Paseo Colon, la Calle Adriano et la Calle Antonio Diaz, et forme un triangle avec ses dépendances. Contrairement aux autres arènes espagnoles, la Maestranza s’insère complètement dans le tissu urbain de la cité, symbolisant le profond ancrage de cette institution. L'accès à certains secteurs des gradins supérieurs se fait à travers des portes donnant sur la Calle Adriano. Une simple ruelle, la Calle Circo, en partie couverte sous forme de passage, entoure l'arène et marque la frontière entre l'enceinte taurine et le reste des bâtiments. Les arènes (en photo ci-dessous) se présentent sous la forme d'un polygone à trente côtés inégaux. On note une nette influence du style baroque tardif dans l'architecture, qui tend cependant vers le classicisme. La façade est flanquée, face au fleuve, d'une gracieuse porte principale (deuxième photo), appelée la porte du Prince, qu'on n'ouvre que pour les toréadors totalisant trois trophées (les deux oreilles et la queue du taureau). Le dernier à avoir franchi cette porte s'illustra en...1971. La porte est encadrée par deux tourelles couronnées de toits de tuiles à quatre versants, percées d'oculi et de portes surmontées de frontons à volutes originaux. La porte se compose de deux corps ou niveaux. Le niveau supérieur est un balcon à balustrade relié au Balcon du Prince à travers une porte flanquée de pilastres doriques et d'un fronton. L'ensemble est élégant avec ses murs chaulés soulignés par les pointes d'ocre et de rouge sombre ornant certains éléments décoratifs. Le côté sud est quant à lui agrémenté d'une terrasse en premier niveau donnant accès aux gradins supérieurs. Ce corps de gradins est précédé d'une galerie à arcades fermée vers l'extérieur par une belle balustrade ajourée.


 

La partie intérieure des arènes est formée de trois anneaux concentriques enroulés autour d'une piste irrégulière. Le premier cercle contient les gradins inférieurs non couverts (tendidos). Le deuxième anneau abrite les gradins supérieurs couverts, sous lesquels se trouve la galerie d'accès aux tendidos (photo). Le troisième anneau renferme les différents services des arènes, comme les cours où sont gardés les taureaux, la boucherie ou l'infirmerie. Cet anneau-là est surmonté en partie par une terrasse ornée d'une galerie à arcades (deuxième photo ci-dessous) autorisant l'accès aux gradins supérieurs. Des dépendances de la Real Maestranza et des logements particuliers occupent le reste de l'étage. Les gradins inférieurs, majoritaires regroupent la plupart des places assises et sont non couverts, tandis que la partie supérieure de l'édifice est couverte d'un toit de tuiles et est séparée du niveau inférieur par une élégante galerie à arcades reposant sur des colonnes toscanes de pierre, offrant une apparence de grâce et de légèreté. Les balcons du Prince et celui de la Députation renforcent la qualité architecturale de cette construction intérieure. Le Balcon du Prince, nous l'avons vu, fut bâti en 1765, en l'honneur du Premier Frère majeur de la corporation de la Real Maestranza issu de la famille royale, l'infant Philippe. Erigé comme une véritable façade intérieure, il se décompose en deux corps superposés, le premier formant un portail qui donne accès à la Porte du Prince à l'extérieur (l'équivalent de la grande porte dans les autres arènes). Ce portail est flanqué de deux colonnes ioniennes, et est surmonté d'un blason sculpté. Le second niveau forme le balcon proprement dit, et est exclusivement réservé à la famille royale d'Espagne. Celui-ci est entouré d'une balustrade et flanqué de colonnes corinthiennes. Au centre d'un fronton, sont placées les armes de la famille royale sculptées, et entourées de deux figures allégoriques. Face au balcon du Prince se trouve le balcon de la Députation, surplombant la porte du toril (quatrième photo).


 

Des corridas ont lieu dans ces arènes de la Maestranza (qui appartiennent à la première catégorie regroupant les arènes des capitales de provinces qui organisent au minimum quinze spectacles annuels, dont au moins dix corridas). La Real Maestranza de Caballeria de Séville, propriétaire des lieux, délègue depuis 1934 l'organisation des spectacles à un prestataire privé, l'entreprise Pagés, qui fut tenue par Diodoro Canorea jusqu'en 1959, puis depuis 2009, par son fils Eduardo. Les maestrantes (membres de la corporation nobiliaire) conservent toutefois un droit de regard sur la programmation et disposent de loges spéciales pour les courses de taureaux. L'arène dispose seulement de 12538 places (ce qui est loin d'en faire l'une des plus vastes arènes du pays). La première corrida lors de laquelle fut coupée une oreille eut lieu en 1915, durant la Feria de San Miguel, en septembre, qui vit triompher Joselito El Gallo (dont on peut admirer son costume ci-dessous). Cette époque fut marquée par la dualité entre Joselito et Juan Belmonte et donna d'ailleurs lieu à la construction d'une Plaza de Toros monumental, en 1916, et pouvant accueillir 23000 spectateurs. Son histoire fut brève puisque sa dernière corrida s'y déroula en 1920, et qu'on détruisit l'endroit dix ans plus tard.


 

La Temporada sévillane suit quant à elle un cycle immuable, dans une ville très attachée aux traditions. La saison débute officiellement le dimanche de Pâques, le dernier jour de la Semaine sainte. C'est le jour où se déroule la plus prestigieuse corrida de l'année, appelée Corrida del Domingo de Resurreccion. Quinze jours plus tard, commence la Feria de Abril, un vendredi, pour s'achever un dimanche deux semaines plus tard. La fête dure exactement 17 jours et compte 18 spectacles taurins, dont deux corridas de rejoneo (comme représentée sur cette peinture ci-dessous, visible au Musée taurin). A partir du deuxième lundi, la féria taurine coïncide avec la Feria de Abril qui n'est autre que la grande fête populaire annuelle sévillane. Un événement à ne pas manquer ! Une grande tradition de cette fête est la miurada (la corrida de l'élevage de Miura), qui clôture tous les ans le cycle du dernier dimanche. On peut y voir les grandes figures du combat de taureaux, mais aussi des toréadors plus modestes. Y sont présentés essentiellement des élevages andalous réputés : Conde de la Corte, Cuadri, et Domecq. Durant les mois de mai et de juin, sont organisées des novilladas tous les dimanches. Une autre corrida a lieu à l'occasion du Corpus Christi, et pour le 15 août, Fête de la Vierge des Rois et copatronne de Séville. La Feria de San Miguel, elle, se tient en septembre. Elle était autrefois plus importante que la Feria de Abril mais se résume aujourd'hui à deux corridas qu ont lieu le dernier weekend du mois. La saison se termine le 12 octobre, avec une corrida en l'honneur de la Fête de la Vierge du Pilar.


 

La visite des arènes se termine par celle du Musée taurin (ci-dessous). Situé sous les gradins, ce musée permet de découvrir une vaste collection d'oeuvres qui retrace l'histoire de la tauromachie espagnole et son évolution au fil des siècles. Il est composé de quatre salles principales : la première est dédiée à la corporation et à sa relation avec la fête taurine. La deuxième salle reprend des scènes de l'étape de la Tauromachie « a pie » (à pied) avec des éléments datant du XIX è siècle. La troisième salle s'intéresse aux vingt première années du XX è siècle et cible l'âge d'or de la tauromachie. On y retrouve deux personnages incontournables, Juan Belmonte et Joselito « El Gallo ». La dernière salle présente, elle, un ensemble d'éléments de l'imagerie taurine, dont des habits de lumière, des ustensiles, des capes, sculptures (comme cette sculpture de Mariano Benlliure ci-dessous) et affiches diverses. Une salle de peintures offre également de voir peintures, dessins de Goya (deuxième photo ci-dessous) et autres œuvres exclusivement dédiées au monde de la Tauromachie.


 

 

INFOS PRATIQUES :


  • Plaza de Toros de la Maestranza, Paseo de Colon, 12, à Séville. Tel : (+34) 954 210 315. Ouvert tous les jours (même les jours fériés) de 9h30 à 19h00 (de novembre à avril) et de 9h30 à 20h00 (de mai à octobre). Juin à septembre : de 9h30 à 23h00. Entrée : 7 €. Des visites guidées sont organisées toutes les vingt minutes (de 9h50 à 15h10). Chaque visite dure une quarantaine de minutes et comprend les arènes et le musée taurin. Site internet : http://www.realmaestranza.com/

  • Restaurant El Rincon del Tito, C/Escuelas Pias, 10, à Séville. Tel (+34) 954 22 51 53. Cuisine simple mais produits frais, bons et pas chers. Portions généreuses. Vin au verre à conseiller (2,50€). Accueil fort sympathique du propriétaire et de son équipe.

 

 

 










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