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Exposition "Faire le mur. Quatre siècles de Papiers peints"
(Musée des Arts décoratifs, Paris, France) |
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Mardi 15 Mars 2016
Et si nous faisons le mur, ou si nous visitions plutôt l'exposition du musée des Arts décoratifs de Paris (1er), « Faire le mur . Quatre siècles de papiers peints ». C'est une façon de parler mais surtout un sujet passionnant qui nous est actuellement offert de découvrir jusqu'au 12 juin prochain. Le titre de l'exposition veut bien dire ce qu'il veut dire et fait référence aux différents usages autorisés par le papier peint qui participe à la construction et à la décoration d'une paroi murale. L'exposition développe plusieurs thématiques, dans six salles différentes dédiées à l'évènement, aux techniques et aux époques qui se mêlent sans ordre chronologique particulier. Des papiers peints anciens côtoient ainsi des pièces contemporaines, histoire d'illustrer les méthodes de production, tandis que les typologies et les formes se répètent, changent ou évoluent au rythme de l'histoire de l'art. Car ce papier-là n'est pas seulement une surface couvrante. Il crée en effet de nouveaux univers, des sensations ou bien des ambiances nécessitant parfois des procédés de fabrication complexes. Ainsi, motifs et rendus chromatiques et lumineux transforment-ils notre perception de l'espace jusqu'à même laisser apparaître des architectures fictives et des effets de trompe-l'oeil. Ces différents types de papiers témoignent d'une richesse créative tout en étant les acteurs iconiques de l'histoire des styles et des tendances reflétant le goût et les mœurs de toute une époque.
Pénétrons dans la première salle, au titre évocateur « Anoblir le mur ». L'anoblissement constitue ici un procédé d'embellissement des tissus, appliqué au papier peint pour insister sur la capacité de ce dernier à enjoliver les parois murales. Ces attributs de l'ornementation sont illustrés par des pièces maitresses, comme par exemple les impressions en arabesque du XVIII ème siècle, réalisées notamment par la célèbre manufacture Réveillon, d'après le nom du propriétaire de cette Manufacture royale de papiers peints, Jean-Baptiste Réveillon. Doit-on rappeler que ladite manufacture épaulera étroitement les Frères Montgolfier dans la réalisation de leurs premier aérostats, en leur fournissant le papier qui enveloppait le ballon, papier assemblé dans les jardins même de l'entreprise ? Plus récemment, on trouve également les créations contemporaines du Studio Job et Timorous Beasties. Dans le respect des normes esthétiques établies, le papier peint devient non seulement un objet décoratif, mais plus généralement le reflet d'une culture et d'un art de vivre.
La seconde salle est intitulée « Imaginer le mur », et met l'accent sur les genres artistiques inventés et réinterprétés au fil des siècles, avec des papiers peints tels que ceux d'André Groult, Emile-Jacques Ruhlmann, André Mare, René Fumeron et Léonor Fini. Décorateur et dessinateur de meubles français, André Groult concevra par exemple une chambre de femme dans une harmonie de rose et de gris, avec des murs tendus de soie brochée, lors de l'Exposition internationale des Arts décoratifs et industriels modernes de 1925. Il travaillera aussi pour un appartement de luxe du paquebot Normandie en 1935. Née de mère italienne et de père argentin, Léonor Fini, elle, réalisera entre autre « Lendemain de fête » (ci-dessous en photo) pour la Société française des papiers peints. Artiste-peintre surréaliste, elle sera également décoratrice de théâtre et écrivain. Les œuvres présentées dans cette salle évoquent aussi bien certains savoir-faire traditionnels que des approches novatrices qui offrent un nouveau souffle à la décoration d'intérieur. Au cours de son histoire et tout en répondant aux goûts et aux critères de beauté d'une époque, le papier peint a aussi la capacité de solliciter l'imagination, voire même d'altérer notre impression spatiale d'un lieu. C'est que le papier peint revient de loin : cette expression serait d'ailleurs apparue à la fin du XVIII ème siècle et aurait été rapportée de la Chine, à l'occasion de l'arrivée des papiers peints chinois peints à la main dans les valises de voyageurs occidentaux. Plus tard, des manufactures feront appel à des artistes pour concevoir de nouveaux motifs, et, malgré son appellation, le papier peint ne sera jamais peint mais imprimé. C'est Marco Polo qui en évoquera le premier l'existence, dans son Livre des Merveilles, la splendeur des intérieurs chinois. Bien plus tard, Goethe fera allusion au même papier en parlant des superbes chambres, décorées avec beaucoup de goût, d'une petite auberge française. C'est par la route de la soie que notre papier peint gagnera le monde arabe, enfermé dans des caravanes, d'abord à Bagdad en 793, au Caire en 900, à San Felipe en 1056, à Fabiano en 1276 et à Fès en 1184. Au milieu du XVIII ème siècle, en pleine époque des Lumières, le papier peint scellera son destin avec celui de l'imprimerie. Et toute une classe moyenne émergente, qui ne se satisfera pas davantage de murs à la chaux, suivront notre reine Marie-Antoinette qui lancera la mode du papier peint. Réveillon en sera d'ailleurs le premier grand maitre et lui donnera toutes ses lettres de noblesse. Rien qu'à Paris, on dénombrera une quarantaine de fabriques en 1790, la France étant entre temps devenue le lieu de rayonnement de ce support. Sous le règne de Napoléon III, l'industrie du papier peint connaître un essor inégalé, avec l'adoption de machines anglaises et la maitrise de la vapeur en 1860 qui permettront des avancées techniques inespérées. Le XX ème siècle verra l'apogée du papier peint qui s'adaptera alors parfaitement au développement accéléré de l'urbanisation européenne. Et de devenir jusqu'aux années 1980 la décoration murale la plus utilisée au monde. Puis, une crise gagnera cette industrie deux décennies durant, avant le grand retour du papier peint au milieu des années 2000.
La troisième salle, « Déguiser le mur » est quant à elle une salle qui rend hommage au trompe-l'oeil à travers les créations des XVIII ème et XIXème siècles, comme celles des Manufactures Desfossés & Karth, mais aussi Dufour & Leroy. Dentelles et draperies peintes donnent ainsi l'illusion d'un jeu de textures et de volumes qui transforment la planéité du mur. Genre pictural destiné à jouer sur la confusion de la perception du spectateur qui, sachant qu'il est devant un tableau ou une surface plane peinte est malgré tout trompé sur les moyens d'obtenir cette illusion. Il ne se limite pas seulement au tableau mais également la peinture murale, et aussi au papier peint.
Dans cette même veine, « Raconter le mur » réunit les papiers peints qui renvoient à différents courants stylistiques de l'histoire de l'art. L'étrusque, le néo-classique, le néo-gothique ou encore l'orientalisme restent des références essentielles pour des manufactures de renom comme Délicourt, Desfossés & Karth, Lapeyre, Sanderson ou bien Zuber. Appliqués sur la paroi, ces ornementations et structures architecturales peintes créent des effets d'optique en ouvrant le mur vers des horizons pourtant factices. Ces recherches autour du dessin et du motif vont de pair avec des expérimentations dédiées aux matières et textures.
Les deux dernières salles, « Inspirer le mur » et « Jouer le mur » permettent d'admirer des productions où la papier laisse place à d'autres matériaux. Le carton, le cuir, ou bien des substances métallisées libèrent le mur des formes et des méthodes classiques. Plusieurs créateurs participent au renouvellement des motifs comme c'est le cas des éditeurs de Piero Fornasetti, Jean-Charles de Castelbajac et Christian Lacroix. Le papier peint n'est alors plus juste un ornement mais une installation murale, jusqu'à devenir même une œuvre d'art à part entière. DE quoi vous en coller plein la vue !
INFOS PRATIQUES :
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